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des règles de la perspective linéaire au charme d'une perspective aérienne artistement ménagée?

M. Bossuet a rendu de grands services à nos jeunes peintres, en remettant en honneur l'étude de la perspective; il en a publié un cours fort recommandable. Luimême il met ses principes en pratique avec beaucoup de succès. Il y a à peine quatre ans que cet artiste peint les intérieurs de ville, et il a acquis, pour certaines parties, une habileté qui lui donne une belle place parmi nos premiers talens dans ce genre. Tout ce qui s'acquiert par un travail persévérant, par une observation consciencieuse, M. Bossuet est sûr d'avance de l'obtenir. Les qualités qui tiennent plus particulièrement à l'imagination lui viennent aussi successivement, à mesure que sa main se fait. Les premières productions que nous avons vues de ce pinceau étaient plutôt de beaux dessins d'architecture coloriés, que de la peinture comme l'entendent les Canaletti et les Bonington. Aujourd'hui la vigueur de ton se montre, chez M. Bossuet, à côté des autres mérites qu'elle sert à rehausser : il a encore quelques progrès à faire pour arriver à la supériorité, dans cette partie comme dans l'autre ; mais le passé de l'artiste nous répond de son avenir.

Il y a peu de monumens anciens dans le pays que M. Bossuet n'ait copiés sous toutes leurs faces. Après

avoir bien exploré la Belgique, il a commencé ses excursions chez nos voisins. La vieille capitale de la Normandie a d'abord attiré son attention : les beaux restes de l'âge gothique sont nombreux dans la ville de Rouen. Notre peintre a rapporté de son voyage un portefeuille d'études qui pourra longtemps suffire à la confection de ses tableaux.

La vue du n° 16, l'Abbaye de Saint-Amand, à Rouen1, en est le premier résultat que nous soyons appelés à juger.

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Ce tableau est sobre d'effet, c'est par les détails qu'il attache il est peint avec adresse et d'une touche fine; le dessin surtout en est remarquable : l'artiste n'a cherché à tourner aucun obstacle; il les a surmontés avec patience. Les moindres ornemens de ces façades, toutes les fleurs de cette architecture élégante et parée sont minutieusement copiés; ils ne sont point esquivés par quelque effet d'ombre ou de lumière, trop obscurs ou trop éblouissans pour laisser pénétrer jusqu'à eux le rayon visuel. Les figures même qui animent la rue sont bien disposées, ont un bon mouvement. Cependant nous devons dire que le groupe bourgeois, sur le devant, fait un mauvais effet: la dame en mantille et en joli chapeau à fleurs n'est pas là à sa place; là à sa place; elle ne cadre

1 Hauteur, mètre, 1,30; largeur, mètre, 1,04.

pas avec le reste du tableau. En revanche, les paysannes, les gens du peuple sont bien pittoresquement groupés: la femme assise sur son cheval, entre deux paniers, l'homme sur le parapet du quai, son chien devant lui, le pêcheur à la ligne, dont les jambes pendent au-dessus du pont, le petit garçon en blouse, toutes ces figures sont spirituellement touchées.

Nous voudrions plus de nerf dans les avant-plans, et une teinte moins uniforme dans le fond, beaucoup trop lilas.

L'autre tableau de M. Bossuet est une Vue du rivage à Malines. C'est plutôt un choix de maisons curieuses, éparses dans la ville, et réunies là pour faire un ensemble, que la reproduction fidèle d'une Vue. Nous ne lui faisons pas de cette licence un reproche bien sérieux, mais nous pensons toujours que c'est abuser de la crédulité publique que d'agir ainsi. Le public, prévenu par cette observation, qu'il peut facilement constater, élèvera aussi des doutes sur l'exactitude de la Vue de Rouen.

Du reste, on retrouve dans ce numéro les mêmes qualités que dans l'autre ; les premiers plans y ont plus de vigueur.

Il y a beaucoup d'avenir dans le talent de M. Bossuet: la route qu'il a parcourue depuis quelques années nous montre qu'il est capable de fournir une belle carrière.

B. C. KOEKKOEK.

Voici Un été, no 285 ', qui ressemble fort à un printemps. Est-ce là le ton de la verdure en Hollande pendant cette saison? Pour notre pays, ce serait un mois de mai. Ne disputons pas sur un titre, le tableau du peintre de La Haye annonce un pinceau fort habile et tout à fait de son pays, pour le soin qu'il apporte à l'exécution si délicate. Il a choisi un sujet où tout autre aurait complétement échoué. Tout est vert sur cette toile : les eaux reflètent un bosquet vert, les nuages du ciel en prennent fortement la teinte. Mais, sous cette couleur dominante, des nuances infinies se découvrent, et le

1 Hauteur, mètre, 0,65; largeur, mètre, 0,82.

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