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FERD. DE BRAEKELEER.

M. Ferdinand de Braekeleer s'est fait une réputation méritée dans les tableaux de genre, cette peinture qu'ont illustrée les Téniers et les Ostade. Sans avoir la vigueur des anciens, il rappelle souvent leur touche légère et leur coloris harmonieux. Il compose avec esprit, groupe bien ses figures, distribue habilement sa lumière et ses ombres, rend les détails avec exactitude, dessine purement, Aussi d'éclatans succès ont-ils signalé son apparition dans le monde des artistes, aussi le suffrage des connaisseurs a-t-il continué, depuis lors, à confirmer chaque année le jugement du public.

Non encore satisfait de ces succès, et désirant mériter,

par des œuvres qu'il jugeait plus importantes, l'approbation de ses compatriotes, l'excellent peintre de genre a voulu aborder l'histoire. Timide encore en 1833, il représenta, dans un tableau de moyenne dimension, La courageuse défense de Tournai, lors du siége par le duc de Parme, en 1581. On applaudit à cet essai, parce que le peintre y avait mis toutes les qualités qui caractérisent son talent, et parce que, assez heureusement inspiré, il s'était même surpassé.

Plusieurs l'encouragèrent à persister dans cette nouvelle voie ; d'autres, plus clairvoyans, lui conseillèrent de ne pas abandonner les sujets familiers. Ces critiques avaient remarqué, au milieu des beautés de cette production, un manque total de grandeur et de noblesse, caractères si indispensables dans la peinture historique.

Les pensées leur avaient parues pauvres, les physionomies communes, les expressions peu passionnées.

L'artiste a mieux aimé accorder sa confiance aux conseils des premiers que de suivre les avis des autres. La toile immense que nous avons sous les yeux est le résultat de cette confiance. Nous allons l'examiner avec une attention scrupuleuse ; nous nous ferons un plaisir d'y signaler les beautés de premier ordre qui y abondent, nous dirons également ce qui nous paraît lui manquer pour faire un tableau d'histoire.

Dévouement des magistrats et des citoyens d'Anvers.

(N° 67.)

« Les Espagnols, après la victoire du Mankerheyde, se mutinèrent, parce qu'on ne leur payait pas la solde que Sanche d'Avila leur avait promise s'ils étaient vainqueurs, déchirèrent leurs drapeaux et résolurent de marcher sur Anvers. Instruit de ce mouvement, le capitaine Frédéric Perenot, seigneur de Champigny, pour mettre la ville à l'abri d'un coup de main, mit toutes ses troupes et les métiers sous les armes et demanda, en outre, du secours au commandant de Bruxelles. Les ennemis, craignant que la garnison de la citadelle ne fit une irruption dans la ville et ne la mît au pillage, se barricadèrent du côté de la citadelle : en vingt-quatre heures de temps ils élevèrent de ce côté un rempart de vingt-quatre pieds de haut. De son côté, Sanche d'Avila appelle les Espagnols et les Bourguignons, de Lierre, de Breda et des villes environnantes, sous les ordres de Julien Romero, d'Antoine Oliviera et de Francisco Baldez. Alphonse de Vargas accourut aussi de Maestricht avec sa cavalerie. Enfin les soldats 1 Hauteur, m. 4, 80; largeur 6, 90.

mutinés d'Alost arrivèrent à la citadelle, dont les portes leur furent ouvertes. Toutes ces forces se trouvant ainsi réunies dans le château, Sanche d'Avila donna l'ordre de sortir et de tomber sur la ville. Cinq mille hommes d'infanterie, outre les cavaliers qui étaient nombreux, commencèrent l'attaque. Les Espagnols, malgré la vive et courageuse résistance des habitans, pénétrèrent dans la ville qui fut livrée au pillage et à l'incendie. »

Cet événement eut lieu le 4 novembre 1576, et c'est là ce que les Anversois appelèrent la fureur espagnole (de spaensche furie). M. de Braekeleer a représenté le moment où le bourgmestre, Jean Vander Meere, frappé à mort, est soutenu par l'échevin Jean Vander Werve, tandis que le markgrave Goswyn de Vareick continue glorieusement le combat.

La scène se passe dans une rue d'Anvers, coupée d'une barricade. La droite du tableau est occupée par le groupe des combattans anversois; à gauche sont les Espagnols; dans le fond, la tour de Notre-Dame et l'incendie qu'ont allumé les étrangers.

Le markgrave est debout, l'épée à la main; il se retourne vers ceux qui le suivent, et leur montre l'ennemi qu'ils doivent repousser. Le bourgmestre est tombé le genou en terre, mais il se relève vers l'échevin, qui, derrière lui, s'empresse de le soutenir. Voilà le groupe

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