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La réunion en congrès ayant particulièrement pour but d'éviter les longueurs des négociations traitées par écrit entre les cabinets, les plénipotentiaires y discutent de vive voix la majeure partie des affaires. Lorsque après avoir soutenu sur tous les points les intérêts respectifs de leurs constituants la défense contradictoire en est épuisée, l'accord convenu se formule en une décision, dont les termes, adoptés en commun, résument les votes individuels ('). Si à la fin de la séance aucune décision ne résulte des délibérations, le protocole reproduit la physionomie des débats, il en esquisse les phases, et indique les opinions émises. Ce procès-verbal porte sa date en tête, et les signatures ne s'apposent, dans l'ordre préalablement convenu (2) entre les plénipotentiaires, qu'après qu'il a été lu à haute voix et reconnu strictement exact.

Bien qu'aucun fait principal, aucune observation importante ne doivent y être omis, le protocole dépasserait les bornes en lesquelles il doit être maintenu s'il y était donné place aux digressions, aux développements prolixes, aux redites de la discussion orale : la rédaction pour être sobre n'en deviendra que plus nette et plus précise, et la forme n'en sera que meilleure si une simplicité correcte y tient lieu de tout.

ornement.

Le congrès se termine ordinairement par la signature d'un acte final, résultat définitif des résolutions partielles arrêtées, qui se résolvent soit en un traité (3),

(1) Voy. T. II, p. 535, Votes et opinions.

(2) Voy. T. II, p. 443, De la signature des traités. (3) Voy. T. II, p. 108, Traités et conventions.

soit en une déclaration, soit encore en un recès général ou acte d'ensemble comprenant plusieurs traités séparés (1).

Quand la réunion de ministres ne se compose que des plénipotentiaires de deux gouvernements négociant sous la médiation d'une tierce puissance, elle porte le nom de conférences (2) et non celui de congrès. Ces négociations se terminent quelquefois par une décision arbitrale (3).

Nous ajouterons ici, avant de quitter ce sujet, que si après l'ouverture d'un congrès les représentants de l'une des puissances admises à y prendre part apprenaient qu'il se tint des séances réputées générales où ils n'auraient pas été convoqués, et que les plénipotentiaires de quelques cours plus influentes y prissent, de concert prémédité, des résolutions dont ils leur dissimuleraient l'existence, leur devoir serait de protester formellement contre ces procédés arbi

(1) Voy. Congrès, T. II, chap. v. Les diverses négociations séparées traitées dans le congrès, afin d'ajuster l'accord des parties intéressées, amènent nécessairement la conclusion d'autant de conventions particulières qu'il y avait de points en discussion. C'est pour unir ces divers traités dans une transaction générale que les plénipotentiaires les comprennent dans un acte sommaire, auquel on donne le nom de recès général.

On insère au recès un article particulier, par lequel on déclare que les traités séparés dont se compose la teneur de l'instrument général, et qui lui sont annexés, auront la même valeur que s'ils avaient été textuellement insérés.

(2) C'est ainsi que la paix de Teschen a été négociée, en 1779.

(3) Les décisions arbitrales ont en droit public la même force et valeur qu'elles ont en droit civil. (Voy. ci-dessus, p. 493 et T. II, p. 541.)

traires, et de désavouer d'avance toutes les conséquences possibles de mesures ainsi prises où les intérêts de leurs commettants pourraient se trouver engagés. A défaut de protestations publiques, leur silence pourrait être plus tard interprété comme un consentement tacite donné à des actes qui, rapportés en séances prétendues générales, et signés par les membres présents, seraient considérés comme obligatoires pour tous les États représentés au congrès.

Nous faisons cette observation en vue d'un abus moins rare qu'il ne semblerait devoir l'être, et qui consiste dans l'usage introduit de ne se réunir en séances générales que pour enregistrer en quelque sorte ce que les plénipotentiaires des grandes puissances jugent à propos de communiquer au congrès; les conclusions qui s'y prennent étant censées unanimes dès qu'elles ne sont l'objet d'aucunes réserves. Cet esprit d'envahissement, nous ne l'ignorons pas, se couvre du nom spécieux de garantie, car c'est sous le prétexte de se porter garantes des stipulations générales que les puissances prépondérantes s'arrogent le droit d'empiéter sur la liberté d'action des États faibles; mais les conséquences de cet abus sont assez évidentes pour qu'il suffise de l'avoir signalé.

CHAPITRE IX.

DE LA FIN DES MISSIONS DIPLOMATIQUES ET DU CHANGEMENT DE RANG DES MINISTRES ACCRÉDITÉS.

§ 59.

Des causes qui mettent fin aux missions.

La mission d'un ministre accrédité à une cour étrangère ou à un congrès peut se terminer, pendant sa vie, de l'une des manières suivantes :

1° Par l'expiration de la période fixée pour la durée de la mission (comme, par exemple, par la fin du congrès dont il a fait partie), ou, quand le ministre est constitué seulement ad interim, par le retour du ministre ordinaire. Dans l'un et l'autre cas un rappel formel n'est pas nécessaire;

2o Quand l'objet de la mission est rempli, comme dans le cas d'ambassade de simple cérémonie; ou quand la mission est spéciale et que le but de la négociation est atteint ou manqué ;

3o Par le rappel du ministre ;

4o Par la mort ou l'abdication (') de son souverain

(1) Rien n'est plus rare que les abdications volontaires, par lassitude du pouvoir suprême; les abdications violentes, au contraire, ne sont, de nos jours, que trop fréquentes. Les dernières années du siècle précédent, la première moitié du nôtre, ont vu des révolu

ou du souverain auprès duquel il est accrédité, comme aussi, pour les Envoyés des grandes républiques, par l'avénement au pouvoir d'un nouveau chef de l'État. Dans le premier cas, il est nécessaire que le titre de créance du ministre soit renouvelé; mais il arrive quelquefois que la lettre de notification écrite par le successeur du souverain décédé au prince à la cour duquel le ministre réside exprime ce renouvellement, et rend la présentation d'un nouveau titre superflue. Dans le second cas, le ministre est pourvu d'une nouvelle lettre de créance (1). Toutefois, pendant l'intervalle, s'il y a lieu de prévoir que l'Envoyé sera maintenu à son poste, ses relations ordinaires avec le gouvernement auprès duquel il était accrédité peuvent continuer, et si une négociation est entamée elle peut être poursuivie confidentiellement, sub spe rati;

5o Quand le ministre, à raison de quelque violation du droit des gens à son égard, ou de quelque inci

tions politiques si nombreuses qu'on se lasse en quelque sorte de les compter. Démembrements d'empires, chutes de trônes, érections de souverainetés éphémères, agglomérations et dislocations de provinces, usurpations audacieuses ou hypocrites, passages sanglants de la monarchie à la république et retours éperdus de la république à la monarchie, jamais plus de péripéties émouvantes ne se sont plus rapidement succédé, jamais l'échiquier de l'Europe n'a été remanié avec moins de prévoyance, le gouvernement des peuples plus fréquemment modifié aux dépens de leur repos. Ces vicissitudes sont les leçons de l'histoire. Nous n'avons pas à en dérouler le tableau, mais nous pouvons l'évoquer pour rappeler à la diplomatie militante le premier de ses devoirs, celui de concourir par son esprit de sagesse à l'apaisement des rivalités nationales, au maintien de l'équilibre politique, au retour et à l'affermissement de la concorde, dont ces temps agités semblent oublier jusqu'au nom.

() Voy. ci-dessus, p. 66, et T. II, p. 496.

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