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membres de

Quoique, par suite du fractionnement de trois d'entre eux en deux, le chiffre total des cantons eût été porté à vingt-cinq, la féNombre des dération continua de compter, à vrai dire, vingt-deux membres la fédération. seulement; car, au point de vue politique ou fédéral, les cantons ainsi partagés ne sont considérés et n'agissent au surplus que comme des fractions de canton, des demi-cantons.

Distinction

entre les droits des cantons

et ceux de la fédération.

Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n'est pas limitée la constitution fédérale, et comme tels ils exercent par tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral (art. 3).

Toute alliance particulière et tout traité d'une nature politique sont interdits entre les cantons, qui ont toutefois le droit de conclure réciproquement des conventions sur des objets de législation, d'administration ou de justice, sous réserve de l'approbation de l'autorité fédérale (art. 7), et de faire avec les États étrangers des traités sur des objets concernant l'économie publique, les rapports de voisinage et la police, pourvu que ces traités ne contiennent rien de contraire à la fédération ou aux droits d'autres cantons (art. 9); mais ils n'ont plus la faculté de conclure de capitulations militaires (art. 11).

Les rapports officiels entre les cantons et les gouvernements étrangers ou leurs représentants ont lieu par l'intermédiaire du conseil fédéral; néanmoins les cantons peuvent correspondre directement avec les autorités inférieures et les employés d'un État étranger lorsqu'il s'agit des objets mentionnés à l'art. 10 (art. 11).

La fédération a seule le droit de déclarer la guerre, de conclure la paix, et de faire avec les États étrangers des alliances et des traités, notamment des traités de péage (douanes) et de commerce (art. 8). Le produit des péages fédéraux sur l'importation et le transit est réparti entre les cantons dans une certaine proportion calculée d'après le chiffre de leur population respective, et l'excédant est versé dans la caisse fédérale (art. 26).

La fédération n'a pas le droit d'entretenir des troupes permanentes. Nul canton ou demi-canton ne peut en avoir au delà de trois cents hommes sans l'autorisation du pouvoir fédéral (art. 13). L'organisation générale de l'armée est déterminée par une loi fédérale (art. 20).

En cas de danger au dehors, le canton menacé doit requérir le secours des États fédérés (art. 15).

La fédération est chargée de l'administration des postes (art. 33), de la surveillance des routes et des ponts dont le maintien l'intéresse (art. 35); elle a scule le droit de battre monnaie

(art. 36), de fabriquer et de vendre de la poudre à canon (art. 38).

L'autorité suprême de la fédération est exercée par l'assemblée fédérale, qui se compose de deux sections ou conseils. (art. 60):

1o Le conseil national est formé de députés élus directement (art. 62) à raison d'un par vingt mille âmes (art. 61), pour trois ans (art. 65), pour tout Suisse âgé de vingt ans non exclu du droit de citoyen actif (art. 63). Est éligible tout citoyen suisse laïque et ayant droit de voter (art. 64).

2o Le conseil des États est composé de quarante-quatre députés des cantons (deux par canton; chaque demi-canton en élit un). Les deux conseils délibèrent sur tous les objets que la constitution place dans le ressort de la fédération (art. 73), notamment les mesures pour la sûreté extérieure et intérieure de la Suisse, les différends entre cantons, l'établissement et la levée des contingents d'hommes et d'argent, les emprunts, le budget et les comptes, la police des étrangers, la haute surveillance de l'administration et de la justice fédérales (art. 94).

Les lois, les décrets, les arrêtés fédéraux ne peuvent être rendus qu'avec le consentement des deux conseils (art. 78), qui s'assemblent une fois tous les ans (art. 75); l'initiative appartient à chaque conseil et à chacun de leurs membres (art. 81), lesquels votent sans instructions (art. 79).

Les deux conseils réunis choisissent parmi tous les citoyens suisses éligibles au conseil national sept personnes, mais une seule dans le même canton, destinées à former pour un terme de trois années (art. 84) le conseil fédéral, lequel exerce l'autorité dictatoriale et exécutive supérieure de la fédération (art. 83) et est principalement chargé de ses relations extérieures, du maintien de son indépendance et de sa neutralité (art. 90), reconnues et garanties depuis 1815 par les puissances signataires de l'acte final du congrès de Vienne.

Le président du conseil fédéral, choisi, ainsi que son vice-président, par l'assemblée fédérale parmi les membres du conseil, pour une année et non rééligible pour l'année qui suit, est président de la fédération (art. 86).

Le siège des autorités et de la fédération est l'objet de la législation fédérale (art. 108). Le tribunal fédéral siège à Lausanne.

La nouvelle constitution a aboli les privilèges de lieux, de naissance, de personnes ou de familles que les pactes précédents

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avaient laissé subsister. Désormais tous les Suisses sont égaux devant la loi (art. 4); partant tous sont tenus au service militaire (art. 18); tout citoyen d'un canton est citoyen suisse; mais nul ne peut exercer des droits politiques dans plus d'un canton (art. 42).

La fédération garantit à tous les Suisses le droit de s'établir librement dans toute l'étendue du territoire fédéral (art. 41). Tous les cantons sont obligés de traiter les citoyens (1) des autres États fédérés comme ceux de leur État en matière de législation et pour tout ce qui concerne les voies juridiques (art. 48), d'où il suit que les jugements civils définitifs rendus dans un canton sont exécutoires dans toute la Suisse.

Les étrangers ne peuvent être naturalisés dans un canton qu'autant qu'ils sont affranchis de tout lien envers l'État auquel ils appartenaient (art. 43).

La fédération a le droit de renvoyer de son territoire les étrangers qui compromettent sa sûreté intérieure ou extérieure (art. 57). C'est sans doute comme corollaire de cette disposition que l'ordre des Jésuites et les sociétés qui lui sont affiliées ne peuvent être reçus dans aucune partie de la Suisse (art. 58), bien que le libre exercice du culte des confessions chrétiennes reconnues soit garanti dans toute la fédération (art. 44).

Le droit d'association (art. 46), celui de pétition (art. 47) et la liberté de la presse (art. 45) sont garantis. La peine de mort pour délit politique est abolie (art. 54).

La constitution fédérale peut être revisée en tout temps (art. 111) dans les formes statuées par la législation fédérale (art. 112).

Usant de cette faculté, l'Assemblée générale a, dans le courant de l'année 1873, élaboré et discuté un projet de révision de la Constitution du 12 septembre 1848, qui a été soumis à la votation populaire le 19 avril 1874, et adopté par 340,199 citoyens contre 198,013, et par 14 États et demi contre 7 et demi. Un arrêté du conseil national en a déclaré la mise en vigueur à partir du 29 mai 1874.

Cette nouvelle constitution ne modifie la précédente dans aucun de ses fondements ni de ses principes essentiels, mais seulement sur quelques points d'administration intérieure et d'organisation générale, étendant l'intervention des autorités fédérales de manière,

(1) Cette rédaction des art. 41 et 48 a été votée postérieurement à la date de la constitution, le 14 janvier 1866. Le texte primitif ne s'appliquait qu'aux « citoyens de l'une des confessions chrétiennes. >>

comme l'indique son préambule, a « affermir l'alliance des confédérés, maintenir et accroître l'unité, la force et l'honneur de la nation suisse. »

Analogie avec les cons

titutions des

Etats-Unis et

blique Argen

§ 58. D'après ces traits principaux on peut voir que la constitution helvétique a plus d'un point d'analogie avec celle de la Confédération germanique, mais qu'elle se rapproche encore davantage de la répu de celles des États-Unis de l'Amérique du nord et de la république tine. Argentine; en effet, chacune de ces fédérations forme, en ce qui regarde les affaires internationales, un seul et mème État indépendant, n'ayant de relations avec les autres nations que par l'entremise du gouvernement fédéral suprême, qui représente au dehors la nationalité du corps fédéral tout entier.

Différence avec les

an térieures.

Sous ce rapport la fédération suisse, telle qu'elle est constituée aujourd'hui, diffère essentiellement de ce qu'elle était avant la ré- constitutions volution française de 1789, car alors elle n'était en réalité qu'une alliance en vue de la défense commune contre les attaques du dehors, laissant à chaque canton le droit de conclure des traités avec les autres cantons ou avec les États étrangers, tandis que par la constintion de 1815, et encore plus par celles de 1848 et de 1874, chaque canton a perdu entièrement le caractère et la position d'État séparé indépendant.

Quoi qu'il en soit, et bien que le nouveau pacte centralise davantage le pouvoir de la fédération et donne plus d'unité à ses relations extérieures, la fédération helvétique est empreinte d'un tel esprit d'égalité entre ses membres, elle est l'interprète si fidèle de la tradition historique des populations qui la composent, elle repose sur des fondements si solides, qu'on peut à juste titre la citer comme l'unique exemple d'une véritable fédération existant en Europe *.

Etats-Unis d'Amérique.

Origine.

§ 59. Un autre exemple remarquable de fédération est celui de la grande république de l'Amérique du nord. Une fédération formée Historique. en 1643 par quatre colonies sous le titre de « Colonies unies de la Nouvelle Angleterre » fut le premier germe d'union parmi les établissements anglais de l'Amérique du nord, germe qui ne demcura point stérile, car en 1754, lorsque la guerre éclata entre la France

Wheaton, Elem., pte. 1, ch. 2. § 25; Wheaton, Hist., t. II, pp. 178 et seq.; Phillimore, Com., vol. I, §§ 113 et seq.; Twiss, Peace, §§ 50 et seq.; Fiore, t. I, pp. 196 et seq.; Lawrence, Elem., by Wheaton, note 44; Dana, Elém., by Wheaton, note 33; Halleck, ch. 3, § 15; Prader-Fodéré, Valtel, t. I, pp. 133, 134; Klüber, Droit, § 30, note g; Heffter, § 21; Cussy, Précis, p. 421; Batbie, Traitė, t. III, p. 542; Hall, International law., p. 20.

et la Grande-Bretagne, la fédération embrassait toutes les colonies que l'Angleterre possédait alors depuis le New Hampshire jusqu'à la Georgie; toutefois le lien fédéral ne constituait jusque là qu'une alliance pour la défense commune contre les attaques du dehors (les Indiens et les Français du Canada et de la Louisiane). Mais à partir de cette époque commence la mésintelligence entre le gouvernement anglais et ses sujets d'Amérique. La résistance à des impôts onéreux amena une association plus étroite entre treize colonies, qui l'Indé- s'insurgèrent contre la métropole, et, après avoir soutenu avec succès une lutte armée durant plusieurs années, signèrent leur célèbre << déclaration d'indépendance » le 4 juillet 1776, c'est de ce jour que les États-Unis datent l'ère de leur liberté, et l'année suide fédération, Vante, le 15 novembre 1777, les « articles de fédération et d'union

Guerre de

pendance.

Déclaration d'indépendance.

Articles

etc.

1777.

Constitution

de 1787. Principes généraux.

perpétuelle. >>

Cette fédération était dirigée quant à ses relations extérieures par un congrès composé de délégués de chaque État; le neuvième article du pacte (adopté l'année suivante, 9 juillet 1778) attribuait aux États-Unis assemblés en congrès le droit et le pouvoir exclusifs de décider de la paix et de la guerre, sauf en cas de danger imminent ne permettant pas d'attendre la réunion du congrès; d'envoyer et de recevoir des ambassadeurs; de conclure des traités et des alliances; de se prononcer sur la légalité des prises faites sur terre ou sur eau; d'instituer des tribunaux pour juger les actes de piraterie et de félonie commis en pleine mer, etc.; en un mot, le congrès était revêtu des fonctions exécutives au nom de tous les États-Unis par rapport aux affaires internationales. C'est ce congrès qui, lors de la reconnaissance de l'indépendance de la confédération des États-Unis par les puissances étrangères (paix de Paris du 3 septembre 1783), a pris rang parmi les autorités nationales et a été depuis reconnu comme le représentant des États-Unis de l'Amérique du nord dans leurs relations avec les autres nations.

Mais l'union était loin d'être complète entre les divers États; car, en vertu du troisième des articles de fédération et d'union perpétuelle, chacun d'eux gardait sa souveraineté, sa liberté et son indépendance, ainsi que tout pouvoir, tout droit et toute juridiction qui n'étaient point délégués expressément aux Etats-Unis assemblés en congrès.

§ 60. La constitution de 1787, grâce au sacrifice fait par les Etats d'une portion de cette souveraineté qu'ils retenaient encore, a resserré les liens qui les unissaient déjà, au point d'en former un faisceau compacte et fort. En établissant un gouvernement suprême, en

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