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de s'occuper à un travail qu'un pieux Ecclé fiaftique lui avoit propofé, de traduire en vers les Hymnes de l'Eglife. La décifion de la Mere étoit laconique : » C'est un talent dont Dieu ne vous demandera point compte : il faut l'ensevelir.» Elle étoit d'ailleurs toujours prête à quit ter fa folitude pour les œuvres de charité. Dès que quelqu'un étoit malade dans la maison, elle ne bougeoit d'auprès de fon lit. Elle vifitoit auffi beaucoup les pauvres malades.

En 1651. M. fon pere tomba malade à Paris, où il étoit revenu avec elle. Elle l'assista assidument dans cette maladie dont il mourut. Ce fut alors que fe voyant pleinement libre, elle fe hâta de fuivre la vocation : & dès que fes partages furent faits avec fes fretes & fœurs, elle entra à P. R. âgée de 26. ans. Les grands talens qu'elle avoit, & qui étoient relevés par une vertu qui croiffoit de jour en jour, lui ont mérité d'être employée toute jeune dans les plus importantes charges. Elle étoit Soûprieure de la maifon des Champs, lorfqu'elle eft morte à l'âge de 36. ans. Sa mort fera rapportée plus bas.

Bulle d'InnocentX.con

LIVRE V.

Ce qui s'eft paffé à P. R. depuis 1653. jufqu'en 1664. Commencement de la grande perfécution au fujet du Formulaire. Mort de la Mere Angélique en 1661.

A Bulle d'Innocent X. contre les cinq fameufes Propofitions de Janfénius, parut tre les cinq en 1653. La Mere Angélique prévit bien dès

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Bulle.

lors toutes les fuites fâcheufes qu'entraîneroit propofitions. après elle cette Bulle. Elle envifagea cet évé-Sentimens de nement comme un coup de la Providence, quila Mere An.. vouloit humilier les amis de la vérité, parcegélique fur que peut-être ils auroient attribué la victoire à la force de leurs écrits, fi la bonne caufe avoit triomphé. » Nos ennemis, difoit-elle, n'étoient pas encore affez orgueilleux; & > nous n'étions pas encore aflez humbles. » Prions, pleurons, gémiffons: les larmes feront plus que les écrits; car les écrits ne font point entendus des hommes, & les larmes le feront de Dieu. Elle exhortoit tous les amis avec qui elle s'entretenoit à s'attendre à tout & à fe préparer de bonne heure à une grande perfécution; elle fe félicitoit elle-même par avance de la bonne part qu'elle efpéroit y avoir.

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Comme c'étoit à M. Arnaud & à fes amis que les Promoteurs de cette Bulle en vouloient, & que les Solitaires de P. R. étoient liés de fentimens avec ce Docteur, on fe fervit de cette Bulle pour frapper en même tems ces derniers. On avoit répandu par tout de faux bruits fur leur doctrine. On les avoit repréfentés à la Reine mere comme des hypocrites & des impies, qui fous prétexte de retraite & de pénitence vouloient renverfer la difcipline de f'Eglife, & abolir l'ufage des Sacremens; com me des hérétiques plus dangereux que Luther & Calvin, qui corrompoient la foi par de nouvelles erreurs; comme des traîtres & des rebelles, qui entretenoient commerce avec les ennemis du Royaume.

II.

Les Religieufes de P. R. étoient enveloppées Ecrits diffa dans ces diffamations qu'on femoit parmi lę mans contre monde. Dès l'année 1652. le P. Brifacier Jé-les Religieufuite, dans fes fermons & dans fes écrits, les fes de P. R.

condamnés traitoit de filles impénitentes, défefpérées, afa par l'Arche- cramentaires, vierges folles, &c. Mais l'Archevêque de Pa- vêque de Paris, J. Fr. de Gondi, avoit con

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damné les fermons & le livre, déclarant les Religieufes pures & innocentes des crimes dont l'auteur avoit voulu noircir la candeur de leurs bonnes mœurs, offenfer leur intégrité & religion, de laquelle il dit être affure par une entiére certitude.

tance,

tre,

L'Ordonnance de l'Archevêque ayant été attaquée par un libelle intitulé, Lettre d'impor&c. on y répondit par un écrit intitulé, Défenfe de la Cenfure de M. de Paris pour la juftification des Religieufes de P. R. M. Arnaud fit aufli un écrit qu'il rendit public fous ce tiL'innocence & la vérité défendues, &c. Enfin en 1654. parut un autre écrit justificatif & des Religieufes & des Solitaires de P. R. intitulé, Mémoire pour fervir d'éclairciffement fur les faux bruits que l'on fait courir contre P. R. des Champs. On y fait un récit très-fimple de la maniére dont quelques perfonnes de piété fe font trouvées réunies en petit nombre dans l'efpace de 18. ans, pour vivre en folitude à la maifon de P. R. des Champs, qui étoit alors déferte: & on dément les bruits ridicules qu'on répandoit fur cette prétendue Communauté compofée de 40. Ecclefiaftiques & de 40. Théologiens, pendant que ces 49. Eccléfiaftiques fe réduifoient à un feul Chapelain, & que ces 40. Théologiens étoient entiérement chimériques, n'y en ayant pas un feul, du moins jufqu'au retour des Religieufes dans cette maifon, dix ans après l'établiffement de cette demi-douzaine de Solitaires. Le Mémoire eft très-beau, & fans réplique.

M. d'Andilli de fon côté fe donna l'honneur

d'écrire à la Reine Mere, pour détruire dans Fefprit de Sa Majefté ces miférables bruits, auffi dépourvus de vrai-femblance, que pleins de malice & de noirceur. Mais les ennemis redoublérent leurs impoftures & leurs artifices, Ils répandirent un infâme libelle, intitulé, Port-Royal d'intelligence avec Genève, contre le S. Sacrement de l'Autel. Accufer des filles qui font jour & nuit dans l'adoration perpétuelle du S. Sacrement, d'être ennemies de la préfence réelle de J. C. dans ce Sacrement, c'eft en vérité vouloir faire le fecond tome des Pharifiens, qui, pendant que J, C. chaffoit les démons, l'accufoient d'être d'intelligence avec le Prince des démons. Ces Ecrivains furieux étoient piqués d'un côté de la publication qui commençoit à fe faire des Lettres Provinciales, & du crédit étonnant qu'eurent dans le public ces Lettres, où M. Pafcal dévoiloit avec autant d'efprit que de force les horreurs de la morale des Jéfuites & des autres Cafuiftes relâchés & de l'autre ils s'autorifoient dans la perfécution qu'ils faifoient aux amis de P. R. de la Cenfure que la Sorbonne avoit faite de la fameufe propofition de M. Arnaud dans fa feconde Lettre à un Seigneur de la Cour, que les Docteurs avoient déclarée hérétique. Voici l'histoire abrégée de cette Cenfure.

III.

Hiftoire a

M. le Duc de Liancourt, qui, auffi bien que la Ducheffe fon époufe, a édifié toute la brégée de l'afFrance par fa piété, s'étant préfenté pour la faire de M. confeffion à un Prêtre de S. Sulpice fa pa, Arnaud en roiffe, cet Eccléfiaftique prévenu contre P. R. Sorbonne, & lui déclara qu'il ne pouvoit lui donner l'ab- de la Cenfure de fa propofifolution, qu'il ne rompît tout commerce avec tion. ces Meffieurs, qu'il ne retirât fa petite fille de P. R. où elle étoit penfionnaire, & qu'il ne

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congédiât de chez lui l'Abbé de Bourzeis lie avec P. R. & auteur de quelques ouvrages pour la défenfe de la grace. M. Arnaud dont la foi étoit attaquée par-là, fe crut obligé de fe juftifier par une lettre imprimée, & de répondre par une feconde lettre à plufieurs écrits publiés contre la premiére.

Ce fut dans cette lettre que les partifans des Jéfuites, & entr'autres le célébre Docteur Cornet, cherchérent des objets de leur cenfure, & des prétextes pour l'exclufion de M. Arnaud, qu'ils méditoient depuis long-tems. Ils expo férent à la cenfure deux propofitions, l'une de fait, & l'autre de droit. Celle de fait étoit ce que foutenoit M. Arnaud, que les perfonnes qui ont examiné avec foin Janfénius, n'y avoient pas trouvé les cinq propofitions ; que quand ils fe tromperoient, on ne pouvoit les accufer d'héréfie, & qu'on ne pouvoit tout au plus exiger d'eux que le filence, que M. Arnaud étoit prêt de garder. La propofition de droit étoit conçue en ces termes : Les Peres nous montrent un Jufte dans la perfonne de S. Pierre, à qui la grace, fans laquelle on ne peut rien, a manqué dans une occafion, dans la quelle on ne peut pas dire qu'il n'ait point péché. M. Arnaud, en parlant ainfi, ne faifoit que copier S. Auguftin & S. Chryfoftôme, qui difent la même chofe, & il produifit un grand nombre d'autorités des Peres qui y étoient entiérement conformes pour le fens & pour les expreffions, lefquelles d'ailleurs tiroient leur vérité du langage de J. C. même, lorfqu'il dit: Sans moi vous ne pouvez rien faire, & lorfque dans l'occafion même dont il s'agiffoit, il avoit dit à S. Fierre: Vous ne pouvez pas me fuivre maintenant. Mais fi ce langage de M. Arnaud

étoit

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