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dame la Mar.

Madame la Marquife d'Aumont, Huraut de quifè d'Au. Chiverni, veuve du Marquis d'Aumont, Lieumont, de M. tenant Général des armées du Roi. Nous avons le Maître,&c. vu comment la Mere des Anges lui avoit en

quelque forte prophétifé fa mort prochaine. Cette vertueufe veuve avoit choifi P. R. pour le lieu de fa retraite le refte de fes jours ; après avoir quitté la maison de Sainte Marie du Fauxbourg faint Antoine, indignée des calomnies que la Supérieure avoit débitées contre le célébre Pere Defmares de l'Oratoire. Elle y pratiquoit tout ce qu'elle pouvoit des exercices de la Religion, difoit fon Bréviaire, faifoit l'affiftance devant le faint Sacrement,difoit fa coulpe, &c. Elle n'avoit de communication particuliére avec les Sœurs, qu'autant que les Meres le jugeoient à propos. Elle avoit commencé par remplir ce que la juftice exigeoit d'elle, s'étant chargée de toutes les dettes de la fucceffion de M. fon pere, qu'elle a entiérement acquittées. La charité trouva enfuite fa place. Elle faifoit d'abondantes aumônes, affiftoit des perfonnes de condition dans leur befoin, dotoir des filles dans des Couvens, faifoit apprendre à d'autres des métiers. Avant que d'entrer à P. R. elle avoit donné 40000. liv. à un suvent pour avoir la liberté d'y entrer pour aire des retraites; & depuis elle avoit encore confacré dir ou douze mille livres pour un établissement religieux. Ce fut elle qui tira P. R. de l'accablement de dettes où il étoit, avant même qu'elle entrât. Le Choeur de la maifon de Paris avec les logemens qui font au-deffus, fur bâti à fes dépens, auffi-bien que le corps de logis qu'elle habitoit. Elle a auffi beaucoup contribué au rétablissement de P.R.des Champs,& fait quantité de préfens à l'Eglife. Toutes fes aumônes

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avoient, autant qu'il lui étoit poffible, te mérite de n'être connues que de Dieu & d'un trèspetit nombre de perfonnes; accompagnées d'ailleurs d'an air de générofité qui les relevoit infiniment aux yeux des perfonnes qu'elle affiftoit. Elle fut un peu furprife, lorqu'elle fut attaquée de la derniére maladie qui parut tout d'un coup mortelle : car elle avoit beaucoup appréhendé la mort pendant fa vie. Cependant elle fe réfigna de très-bon cœur. Elle écrivit fur un papier les fentimens de reconnoiffance qu'elle avoit de la grace que la maison lui avoit faite de la fouffrir, s'en reconnoiffant très-indigne & comme elle ne pouvoit parler, elle pria for Confeffeur de lire le papier à toute la Communauté, avant que de lui adminiftrer les Sacremens. Elle demanda auffi par grace d'être enterrée comme une Religieufe avec la qualité de Sœur après fon nom dans l'Oraifon des morts, fororis noftra. Mais elle ne demanda pour elle aucun fervice ni aucunes priéres d'obligation. Un mois auparavant étoit moft un autre faint & grand perfonnage, qui avoit fait dans les dehors de P. R. à peu près ce que la Mere Angélique avoit fait dans les dedans. La Mere étoit Réformatrice, & comme feconde Fondatrice du Couvent: celui-ci a été le Chef & le Fondateur, pour ainfi dire, de cette compagnie de Solitaires qui habitoient au dehors. C'est le célébre M. le Maître, cet illuftre Avocat, l'ornement du barreau par fa fublime éloquence fon beau génie & fon profond favoir ; cet orateur de vingt-huit ans, qui attiroit la Cour & la Ville à fes plaidoyers; cet homme enfin fi eftimé que le Roi l'avoit gratifié d'un brevet de Confeiller d'Etat dans une auffi grande jeuneffe. Nous avons lu plus haut le récit édifiant

XV.

de fon éclatante retraite

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& nous verrons le détail de fa belle vie dans l'Hiftoire des Solitaires. Rien n'eft plus grand & plus fublime que la maniére dont la Mere Angélique envisage cette mort dans deux Lettres écrites à ce fujet : je me contenterai de ce feul trait : Je l'ai vu enterrer fans larmes, quoique les autres en répandiffent beaucoup, parce que Dieu m'occupoit l'efprit, & l'accabloit des vérités de la foi qui anéantiffent la créature devant fa divine Majesté & qui font eftimer pour rien tous les intérêts qu'on fe peut imaginer.

En 1659. trois autres folitaires moururent. 1. Le Pere Maignart de l'Oratoire, qui après avoir été Curé à Rouen, fe retira à faint Ci& vint enfuite mourir à P. R. âgé de

ran

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65. ans.

2. M. Richer Avocat qui renonça au barreau, & vint s'établir à P. R. où Dieu l'éprou va par une maladie d'hydropifie très-longue & très-douloureufe. Il eft mort âgé de 47. ans.

3. M. Belair, jeune homme de mérite retiré au Château de Vaumurier auprès de M. le Duc de Luines, qui a conduit les bâtimens de P. R. des Champs, quand on l'a rétabli.

En 1660. il arriva une mort bien précieuse devant Dieu & devant les hommes, d'un faint d'une condition bien différente. C'est un Charretier de P. R. nommé Innocent Fai, qui mourut à l'âge de vingt-huit ans. Nous verrons fa rélation dans l'Hiftoire des folitaires. Elle eft de la main de la Mere Angélique elle-même.

Joignons encore une autre mort à toutes celMort de la les-ci, pour faire voir qu'entre les mains de Sour Delphi- Dieu tous les âges & toutes les conditions font nes. Abrégé également propres à faire éclater fes merveilde fa vie. les. Nous venons de les admirer dans une Mar

ne d'Angen

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quife, dans un grand génie, & dans un pauvre Charretier : Nous allons les voir dans une jeune fille de condition, dont la feconde Angélique, la Mere de faint Jean, a fait l'histoire. Je parle de la Sœur de Sainte Delphine d'Angennes, qui mourut cette même année 1660. à l'âge de feize ans après dix-huit mois de féjour dans P. R. M. fon pere qui étoit cadet de fa maison, n'ayant pas une fortune opulente, la laissa entre les mains de la Dame de Fontaineriant fa tante, qui l'éleva toute petite. Les fentimens de piété que le Livre de la fréquente Communion infpirérent à la tante, vinrent fort à propos, pour feconder les bonnes difpofitions de l'enfant. M. fon pere lui fit entendre de bonne heure qu'il fouhaitoit qu'elle fe fit religieufe ; & la Demoiselle de son côté voyant qu'elle n'avoit pas d'autre parti à prendre, conçut un défir fincére de l'être. Mademoiselle de Fontaineriant fa coufine étoit alors à P. R. Ce fut ce qui lui procura la connoiffance de cette maifon qu'elle choifit dès-lors pour s'y faire Religieufe. Mais M. fon pere ne penfoit pas de

même. Le décri où étoit alors le Monaftére dans bien des efprits, fit regarder au pere cette maifon, comme un lieu où fa fille ne pourroit pas faire fon falut. Ainfi il lui déclara nettement qu'il ne vouloit point de ce Couvent. Après plufieurs tentatives inutiles auprès de lui, la Demoiselle confentit à fe faire Religieufe dans l'Abbaye du Pont-aux-Dames, dont l'Abbeffe étoit belle-foeur de la Comteffe d'Olonne, coufine germaine de la jeune Demoiselle. Dans l'entre-tems elle alla à P. R. voir fa coufine Mademoiselle de Fontaineriant pour lui dire adieu. Elle fonda les Meres pour voir fi on ne voudroit pas bien la recevoir malgré l'oppofi

tion de fes parens. Quand elle vit qu'elle ne pouvoit rien gagner, elle fondit en larines & fut réduite à un tel état qu'elle fit compaffion aux Meres, qui voulurent bien la garder, fuppofé que Madame la Comteffe d'Olonne, qui étoit chargée de la conduire au Pont-aux-Dames, confentît à la laiffer, & que dans la fuite on eût le confentement du pere. La Maréchalle de la Ferté promit de s'employer auprès du pere ; c'étoit en 1659. en Janvier.

Dans les premiers jours on la connut pour une fille fort inftruite, aimant le bien & là régularité, mais eftimant peu les petites humiliations & le travail des mains. Son goût étoit pour lire, pour entendre, pour écrite de belles vérités. Comme elle étoit reftée boiteufe d'une chûte qu'elle avoit faite étant en nourrice, & qu'elle n'avoit pas une forte complexion; peu adroite d'ailleurs pour les différentes chofes qui font à faire dans les Couvens, fes difpofitions tant pour le corps que pour l'efprit, firent appréhender qu'au lieu d'une bonne Religieufe dans le goût de P. R. on n'eut reçu une petite Demoiselle peu propre pour la maison: Cependant on eut patience, parce qu'on remar quoit en elle de la docilité pour faire tout ce qu'on lui difoit, & tout ce qu'elle voyoit faire aux autres. Elle commença à l'entrée du Carême un renouvellement entre les mains de M. Singlin. On apperçut bientôt un grand changement en elle. Elle fe mit à tout, elle travailloit de tout fon cœur aux offices les plus rudes, fe mettant toute en fueur: fe contentant d'ailleurs pour fes lectures des Livres de piété les plus fimples. Il lui reftoit à réformer une amitié trop humaine pour fa petite coufine : elle ne pouvoit s'empêcher de rompre le filence de temas

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