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nifi ut furetur, & maltet, & perdat, il ne vient que pour perdre & pour tuer , que le procédé de cet Archevêque. Il entre dans un Diocèle plein de défordres, & il n'en voit aucun... La plupart des Monaftères de fon Diocèse fonc pleins de fimonie & de divifion, fans parler des autres défordres: il ne fonge feulement pas à y remédier. Il y en a un exempt de tous ces maux, parfaitement uni, plein de vérité, de charité & de défintéreffement; & il forme le deffein de le perdre. N'en trouvant point de fujet dans les loix établies, il en fait une nouvelle, qu'il fçait être contraire à leur confcience; & parce qu'elles n'y peuvent obéir, il ne trouve point d'autre moyen de les punir de cette prétendue défobéillance, que de renverfer de fond en comble le Monaftére. »

Pour faire le contrafte, écoutons comment un autre s'exprimoit fur le compte des Religieufes perfécutées ; c'eft M. de Rebourt Confeffeur de la maifon. » C'eft, dit-il, ce qui me fait regarder avec admiration la grace que Dieu a faite à de fimples filles, qui demeurent dans une fermeté étonnante au milieu de la plus hor rible tempête qui fut jamais ; ce font elles qui portent tout le poids de la perfécution... Nous pourrons nous autres (Eccléfiaftiques) contribuer de quelques feuilles, c'eft-à-dire des écrits & des paroles pour défendre la vérité : mais elles la défendent d'une manière infiniment plus noble par leurs fouffrances toutes chrétiennes, & qui font confidérées par l'Eglife tellement au deffus de toutes les autres maniéres de défendre la vérité, qu'il n'y a que ceux qui la foutiennent de cette forte, qui aient mérité d'en être martyrs, c'est-à-dire témoins, La coutume, l'imagination, la mémoire font

très-capables de fournir les penfées de la piété ; & l'on apprend la langue de la dévotion, com me on apprend les autres langues. Enfin l'on défend les vérités de la Religion par la même lumiére du fens commun avec laquelle on défend les vérités philofophiques. Il n'y a que la défense réelle, effective & longue comme celle de nos Sœurs, en quoi l'amour propre trouve peu de nourriture: & je me perfuade que P. R. portera tellement feul cette tempête qu'il en garantira tous les autres. C'eft une conjecture de la feue Mere Angélique, à laquelle les circonftances préfentes me portent de déférer beaucoup. Elle s'exprime fort agréablement & d'une maniére qui mérite d'être fçue. Car en parlant d'Eleazar qui tua l'Eléphant, & fut écrafé par fa chute, elle ajouta en parlant à fes Sœurs nous tuerons la bête; mais la bête pous tuera.

Belle Lettre

Après les portraits fi juftes & fi naturels des XXIII. principaux Acteurs de la fcéne, faifons quel de M. Nicole ques réflexions fur la chofe même. Nous les fur la perféemprunterons d'une Lettre de M. Nicole, ou cution prénous les trouverons toutes faites. Elles fem- fente de P. R blent dictées par la piété même. Cette Lettre eft du commencement de Septembre de cette année. Elle eft adreffée à un Prieur de S. Ayri, D. Jofeph Homaffel, comme le porte une copie authentique écrite de la maind'une des Religieufes de P. R. Comme il n'y a d'imprimé de cette Lettre qu'une partie qui concerne une autre matiére, je rapporterai tout au long cette partie-ci, qui ne l'eft point. » Vous prendrez, M. R. P. par la Lettre que je me fuis donné l'honneur d'écrire au R. P. Abbé, M.Nicole imles étranges nouvelles que je trouvai ici à mon primée chez retour de Verdun. C'eft de ces accidens dont Defprez.

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C'eft la 82e: des Lettres de

on peut dire avec l'Ecriture, Factum eft ver bum in Ifraël, quod quicunque audierit, tinnient amba aures ejus: Il e arrivé une chofe dans Ifraël qui eft telle, que quiconque en entendra le récit, fera obligé de mettre la main fur fes deux oreilles. Car il eft vrai qu'ils produisent dans l'efprit une efpéce d'étourdiffement dont il n'eft pas facile de revenir. Ce fera fans doute un fujet d'affoibliffement pour plufieurs, qui appréhendent pour eux-mêmes le traitement dont ils voient l'image dans ces faintes filles, C'eft de ces coups extraordinaires que s'entend particuliérement cette parole de J. C. Beatus qui non fuerit fcandalifatus in me: Heureux celui qui ne fera pas fcandalife à mon fujet. Sa paffion fcandalifa tous fes Apôtres, & elle a fcandalifé depuis les Juifs qui ne fe font pas convertis. Il en eft de même des fouffrances de tous fes ferviteurs, dans lefquels la paffion de J. C. fe renouvelle durant le cours de l'Eglife. Car elle jette l'épouvante dans toutes les ames charnelles, & les emporte hors de l'aire: Facta autem tribulatione & perfecutione propter verbum, continuò fcandalifantur: Le moment de la tribulation & de la perfecution à caufe de la parole étant venu, auffi-tôt ils font fcandalifes, Mais elles font auffi un grand fujet de confolation & de confiance à ceux qui favent que les fouffrances font en cette vie la récompense & l'épreuve de la folide vertu ; qu'elles font une partie du centuple que Dieu a promis à ceux qui quitteroient le monde pour lui ; qu'elles diftinguent les enfans bâtards des enfanslégitimes, & les timbales retentiffantes, c'està-dire, les Chrétiens qui n'ont que des paroles & de l'apparence fans aucun fond, de ceux qui font férieufement à Dieu, & qui lui rendent

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ce culte véritable de la loi nouvelle, in fpiritu & veritate, en efprit & en vérité, qui confifte dans un vrai défintéreflement, & dans un détachement effectif de toutes les chofes du monde, qui leur fait préférer l'intérêt de Dieu à tout ce qu'ils ont de plus cher. Car il eft cer tain, M. R. P. que, pour fuivre Dieu dans ces rencontres fi fâcheufes, il ne faut pas feulement avoit renoncé aux intérêts groffiers, mais auffi aux plus fpirituels. Et c'est pourquoi J. C. dit à celui qui lui promettoit de le fuivre partout où il iroit, que les renards avoient leurs taniéres & les oifeaux du ciel leurs nids; mais que le fils de l'homme n'avoit pas où repofer fa tête : pour lui faire entendre qu'afin de le fuivre partout, & auffi bien dans les démarches dures & pénibles, que dans celles qui font faciles, il ne faut avoir ni taniére, ni nid; & qu'il faut s'être dépouillé non-feulement des paffions baffes & charnelles, qui font comme les taniéres des ames terreftres, mais auffi des intérêts plus déliés, qui font comme les nids ou les oifeaux du ciel, c'eft-à-dire les fpirituels & les ames qui s'élèvent de la terre fe repofent quelquefois. Le repos des Monaftéres, la douce confolation de la compagnie de fes fréres, l'amitié de fes Supérieurs font de ces fortes de nids pour les perfonnes fpirituelles. Mais J. C. oblige quelquefois ceux qui le veulent fuivre, de fouffrir la perte de ces nids, comme on le voit maintenant dans ces faintes Religieufes qui en font privées, & qui peuvent bien dire avec vérité ces paroles du Pf. 16. Propter verba labiorum tuorum ego cuftodivi vias duras: J'ai marché par des voies dures, pour obéir aux paroles de votre bouche: l'intérêt de leur confcience les obligeant de fuivre en certe Tome I.

XXIV.

rencontre une voie très-dure & très-pénible à la nature, mais que la grace leur rendra dou. ce & facile. Les auteurs du choix que l'on a fait, n'ont pas été mal avertis : car il est vrai qu'excepté deux ou trois dont je n'ai pas oùi parler, ils ont choifi les plus fortes: mais ils ont auffi choifi celles qui étoient les plus capables de fouffrir leur inhumanité. De forte qu'on peut dire que les raifons de Dieu, & les raifons des hommes fe font fort bien accordées. J'oferois prefque vous promettre leur perfévérance car quoiqu'elle ne dépende pas de leurs propres forces, il y a pourtant un certain cours ordinaire dans la grace même, quoique toute gratuite, qui fait que l'on peut concevoir fans témérité ces fortes de confiances, qui ne font point contraires à la défiance qu'on doit avoir de foi & de fa foibleffe. Celles qui reftent font beaucoup plus à plaindre, parce qu'apparemment on les attaquera d'une maniére toute différente, & plus dangereufe; & qu'au lieu qu'on ufera de rigueur contre celles que l'on a chaffées, on n'emploiera que des careffes trompeufes pour celles qui reftent. Mais Dieu eft capable de faire triompher la foibleffe de ces filles & des terreurs & des careffes du monde : & la fuite de tant de graces qu'il leur a faites, nous le doit faire efpérer. Je ne m'étendrai pas davantage fur une chofe qu'il vaut mieux confidérer dans un filence de l'ef prit; & je ne veux pas troubler par mes réflexions celles que votre lumiére & votre piété vous fera faire fur un accident fi extraordinaire. >> Reprenons le fil de notre Hiftoire.

11 eft aifé de s'imaginer quelle fut la défoNoms de lation & le faififfement de toutes ces faintes toutes les Re-Religieufes, lorfqu'après cette expédition tyligieufes de

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