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lice; Madame de Schomberg engagea la con verfation, & parla favorablement des Religieuses. La Reine Mere dit; » Pour moi je crois qu'elles croient bien faire, & que ce » n'eft que par délicateffe de confcience qu'elles » refufent de figner. Affurément, dit Madame » de Schomberg. V. M. leur fait juftice: car

il n'y a point d'apparence que des filles qui » ont paru fi faintes jufqu'ici dans tout le re» fte, agiffent en ceci contre leur confcience. » La Reine parla enfuite de leur vertu, qu'elle avoit oui dire qu'elles en avoient beaucoup, qu'elles étoient fort défintéreffées, fort mortifiées pour leur corps, & qu'enfin c'étoit de bonnes filles. Madame de Schomberg ajouta qu'elles avoient beaucoup d'efprit: » Oui, dit

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la Reine, fur-tout celle qui eft aux Filles» bleues, & c'eft pour cela que nous l'avons » mife avec Madame de Rantzau qui est sa» vante.» (C'est la Soeur Angélique de S. Jean.) Une Dame de la Cour dit auffi fon mot à propos. On parla en particulier de la M. Agnès, dans l'intention d'intéreffer le bon cœur de la Reine pour elle. La Reine dit qu'on lui avoit donné pour compagnie une de fes niéces ; & comme on vouloit en faire un mérite à fa Majefté, elle dit que cela étoit du à M. de Paris ; mais que s'il ne l'avoit pas fait, elle l'auroit fait fans doute: On parla auffi de Madame de faint Ange & de M. d'Andilli. La Reine plaignit fort celui-ci, concevant qu'il avoit du avoir une grande affliction.

Parmi ces propos il y eut bien des paroles dites de travers par certaines gens qui vouloient faire leur Cour. On en entendoit quelques-unes qui difoient : Pour moi je ne fuis pas de ce fentiment-là. D'autres dirent que les Arnauds

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avoient été huguenots, & qu'ils s'en fentoient encore : que c'étoit ici un démêlé entre la famille des Arnauds & le corps des Jéfuites, & qu'il n'y avoit pas d'apparence que les Jéfuites y duffent fuccomber.

XXVI.

lard confeffe

Dès les premiers jours de l'enlévement, M. M. de Pé l'Archevêque fit dire aux Religieufes par M. réfixe leve Chamillard qu'il les rétabliffoit dans l'ufage l'interdit des des Sacremens. C'eft pourquoi elles ne firent Sacremens. pas difficulté de s'adreffer à lui pour la confef- M. Chamilfion, fans le reconnoître cependant pour Supé-coutes les rieur. Il ne laiffa pas d'eflayer de faire des Sœurs, Actes de fupériorité; car dès le lendemain il fit une conférence à la grille, où il ordonna de la part de M. l'Archevêque qu'on donnât aux filles de fainte Marie toutes les clefs de la Maifon : ce qui fut refufé. Nonobftant ce refus il écouta à confeffe toutes celles qui fe préfentoient, fans les molefter, ni fans exiger rien d'elles. Il étoit le premier à impofer ulence a celles qui vouloient s'expliquer & déclarer qu'elles étoient toujours dans les mêmes difpofitions au fujet de la fignature: Taifez-vous, leur difoit-il, laiffez-vous donner l'abfolution. D'autres fois lorfqu'on lui difoit qu'on ne figneroit jamais, il répondoit: » Il ne faut pas parler ainfi: c'eft prévenir Dieu & s'oppofer » à la lumiére & à l'infpiration de fa grace: priez Dieu feulement qu'il vous faffe connoître fa fainte volonté. » Pour les Converses comme elles n'étoient point en cause dans l'affaire de la fignature, il les arrêtoit sur ce qu'elles difoient que les Meres avoient agi fuivant leur confcience, & leur refufoit pour cela l'absolution: il leur permettoit de dire qu'elles ne pouvoient pas croire que les Meres; euffent mal fait en refufant de figner. Il les in

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XXVII.

peat d'actes

de Supériori

té.

quiéta beaucoup dans la fuite, parce qu'elles ne vouloient pas donner leur confiance à une Soeur Dorothée qui avoit été nommée Célériere pour récompenfe de fa fignature; il les menaçoit de leur interdire la Communion.

Si M. Chamillard en agiffoit ainfi au Confeflional avec une forte de modération,

il

en étoit pas de même dans les conférences. Il déclamoit avec un fiel & une amertume fans égale contre les Meffieurs qui avoient conduit les Religieufes jufqu'alors, & qu'elles eftimoient avec tant de raifon. Ce n'étoit qu'invectives, que calomnies, que qualifications atroces. Ce qui caufa bientôt un grand embar ras de confcience pour ces filles, qui ne favoient fi elles devoient écouter en filence toutes ces déclamations odieufes, ou bien s'absenter des conférences du Docteur. Ce ne fut paslà le feul point qui les ambarraffa. Nous verrons combien de peines d'efprit différentes elles eurent à éprouver dans toute la fuite de cette ́affaire. Elle fe tirérent affez bien de la premiére qui regardoit la conduite qu'elles devoient tenir avec la Mere Eugénie & les filles fainte Marie.

Cette Religieufe prétendoit faire toutes les La Mere Eu- fonctions de Supérieure, fuivant l'intention génie fait au- de ceux qui l'avoient introduite dans la Maitant quelle fon. M. Chamillard recommandoit fortement à la Communauté de fe foumettre à fon gouvernement. Les filles de P. R. crurent devoir prendre un parti mitoyen, qui eft celui qu'el les avoient déja déclaré la veille à l'Archevê-que, fçavoir qu'elles rendroient obéissance à la Mere Eugénie dans les chofes indifférentes & extérieures qui ne feroient pas contraires à leur Régle & à leurs Appels ; & que dans tout le

Fefte elles la traitteroient comme une étrangere, avec tous les égards que preferit faint Benoît envers les hôtes. La Mere Eugénie étant allé au Choeur, & ayant demandé quelle place elle prendroit, on lui dit que la place de l'Abbeffe devoit refter toujours vacante dans fon abfence; qu'elle pouvoit prendre telle autre place qu'elle voudroit: elle prit celle de la Prieure. Il en fut de même pour le réfectoire. Quant aux exercices, les filles de fainte Marie n'en faifoient aucun de la maison : elles fe levoient, fe couchoient comme elles vouloient. Elles affiftoient feulement aux offices du Chœur, pendant lefquels elles difoient leurs priéres particuliéres a l'Inftitut, & enfuite elles récitoient leur Chapelet, ou lifoient tour à tour dans le Livre de l'Amour de Dieu de faint François de Sales que la Mere Eugénie lailloit toujours devant fa Stale.

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On continua de s'affembler en Communauté pour régler toutes chofes fans la participation de la Mere Eugénie, afin de ne pas trop multiplier les occafions d'obéir à l'intrufe, & de ne lui pas donner prife pour affervir de plus en plus à fa domination. Elle avoit dès le premier jour convoqué la Communauté fous prétexte de vouloir faluer toutes les Religieufes quand on la vit placée pour préfider, plufieurs s'enfuirent, & elle embraffa celles qui demeurérent. Elle ordonna dans ce premier Chapitre qu'on donnât les clefs du Tour, de la Sacriftie, & des portes de Clôture à des filles de fainte Marie qu'elle défigna. On résista beaucoup à la propolition, auffi bien qu'à la déclaration qu'elle fit que déformals les filles de fainte Marie feroient feules au Tour, que celles de P. R. re#teroight dans le veftibule du Tour, & que leg

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filles fainte Marie accompagneroient toujours celles de P. R. au parloir,& affifteroient aux vifites des gens du dehors. Après beaucoup de conteftations il fallut fe rendre en partie pour ne point aigrir les chofes. Les clefs de la Sacriftie furent données à une fille fainte Marie : les autres furent refufées, & on les garda jufqu'au 24. Septembre que l'Archevêque dépofa les Officieres de P. R. On ne put point empêcher les filles fainte Marie d'être dans le Tour: mais on y étoit conjointement avec elles. Il fallut de même fouffrir qu'elles fe trouvaflent dans les parloirs avec les Religieufes de la maifon, & qu'elles y fiffent le personnade Sœur Ecoute.

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Les Sœurs furent partagées fur le parti qu'il falloit prendre dans un coup d'autorité que voulut faire la Mere Eugénie pour l'ouverture d'une porte. Les Meres par le paffé n'avoient jamais voulu accorder à Madame la Marquife de Sablé une porte de communication de fon appartement dans la maifon. La Mere Eugénie à l'inftigation de la four Flavie qui commençoit déja à trahir fes fœurs, offrit à la Marquife de faire l'ouverture ; & elle mit les Ouvriers en œuvre, fans en communiquer avec les fœurs de P. R. La four Euftoquie ayant apperçu ce qu'on faifoit, s'éleva fortement contre l'entreprife, & eut avec la fœur Fla-vie une prife affez vive: quelques autres fœurs criérent auffi là contre; de forte que l'ouvrage ne fut pas continué. La Communauté affemblée penchoit beaucoup pour tolérer tout ce que la Mere Eugénie entreprendroit, afin de ne pas donner lieu à une plus grande perfécution. Les jeunes fœurs Euftoquie, Chriftine & quelques autres repréfentérent, que ce

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