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n'épargna pas les fermens dans toute féance: il nioit tout, & à chaque article il juroit fur l'hoftie qu'il avoit confacrée à la Meffe; il difoit: Que Dieu me châtie devant vous fi j'ai dit & fait tout cela. Il fe plaignis beaucoup du tour malicieux qu'on avoit donné à une de les paroles, lorfque cité par les Reli gieufes au jugement du Seigneur, il avoit ré pondu: Oh, nous verrons quand nous y ferons, qui a raifon de vous ou de moi; qu'on avoit voulu, en rapportant ce trait, le faire paffer pour un impie qui ne croit pas l'immortalité. Il reprochoit les jugemens téméraires qu'on faifoit des Soeurs qui avoient obéi, & s'étoient rendues à la fignature; les louanges que les Religieufes fe donnoient à elles-mêmes, imitant le Pharifien de l'Evangile, qui difoit: Je jeûne deux fois la femaine, &c. enfin la hardiefle qu'on avoit de le prêcher, de le menacer des jugemens de Dieu › & du compte qu'il auroit à lui

rendre.

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On répondit très-franchement à tous ces griefs, & on déclara qu'on ne pouvoit pas défavouer ni retracter quoique ce fût dans les deux Actes parce que tout Y étoit vrai. Le Prélat éleve la voix, dit que tout y eft faux, trés-faux, fauciffime; donne des démentis fans nombre, tonne, fait des menaces, s'échauffe jufqu'à faigner beaucoup du nez: puis il attaque avec grand feu une fœur qu'il accufe d'avoir fabriqué ces piéces pour le noircir, & de les avoir fait figner aux autres fans peut-être qu'elles les euffent lues. On lui foutint le contraire. L'altercation finalement retomba, ainfi que de coutume fur le Formulaire & fur l'obligation de figner.Il fit un raifonnement aux Religieufes qui vérita blement avoit quelque chofe de fpécieux.>> Vous

» mes,

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faites fcrupule, dit-il, nonobftant le Comman → dement du Pape & des Evêques, de figner un Fait que vous ne fçavez point par vous-mêde crainte de condamner un particulier : Et vous fignez bien dans un procès-verbal des » chofes que plufieurs de vous ne fçavent que fur le rapport d'autrui, fans craindre de men»tir & d'affurer des calomnies contre votre Archevêque. C'eft-là peut-être la feule chofe un peu fenfée que cet Archevêque ait dite dans deux ou trois cens entretiens qu'il a eus avec ces Religieufes dans tout le cours de cette affaire. Il est vrai en effet qu'il le trouve beaucoup de traits dans le procès-verbal, dont on ne pouvoit pas dire que toutes les Religieufes les avoient fçus & vus par elles-mêmes n'ayant pas toutes été préfentes à tout & par tout. La SourChriftine voyant qu'il fe complaifoit extrêmement dans fa réflexion, & qu'il fommoit la Communauté d'y répondre, le fit en ces termes » Il y a bien de la différence, Monsei»gneur, entre figner un Formulaire qu'on ap

pel de foi, pour témoigner fa créance à la fa»ee de l'Eglife, & figner un procès-verbal. Car » dans le premier on témoigne qu'on a dans le

cœur la créance de ce qu'on figne : mais dans » un procès-verbal chacune figne pour ce qu'elle a dit ou ce qu'elle a vu ; & il fuffit pour ne pas faire de mal qu'on foit affuré de ce qu'on a dit, & qu'on n'ait pas de connoissance qu'il y ait rien de faux dans ce que les autres difent.» M. Chamillard voulut le mêler dans la controverfe. Il dit à la Sœur Eustoquie, que c'étoit très-mal de faire des actes pareils contre le refpect du à fon Supérieur. Elle lui répondit que fi elle étoit fimple particuliére, elle n'au roit garde de faire de telles démarches ; mais

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qu'étant membre d'une Communauté, elle devoit cela à fon Corps. C'eft, répondit-il, par tes intérêts de Communauté que les Monasteres fe ruinent & que les particuliers fe perdent. La Soeur lui repliqua qu'il falloit faire diftinction: qu'il eft vrai qu'un intérêt temporel qui fait recevoir des filles pour acquerir du bien, eft pernicieux au Monaftére, que la Maifon en avoit toujours été exempte, graces à Dieu; mais que c'étoit une obligation indifpenfable, & non un intérêt, de s'oppofer à la deftruction d'une Maison où Dieu eft fervi, &c.

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L'Archevêque crut qu'il gagneroit mieux fon monde dans des entretiens particuliers. Il employa l'après-midi à voir toutes lesSœurs l'une après l'autre. Sa tentative fut fans fruit. Aucune ne voulut défavouer le procès verbal ni rétracter la lettre, excepté les Sœurs qui avoient figné le Formulaire, & deux ou trois autres qui par délicateffe de confcience déclarérent qu'elles n'avoient aucune part aux Actes, fans cependant les condamner, Une d'entre elles a rétracté dans la fuite le défaveu qu'elle avoit donné de la fignature du procès verbal, en a fait réparation publique en préfence de la Communauté & l'a configné dans un Ecrit foufcrit d'elle. C'est la Soepr Sufanne de fainte Cecile Robert. Ce que M. l'Archevêque dit à une Sœur dans cette entrevue eft remarquable. I l'affura qu'il avoit grande peine & une extrême répugnance à faire ce qu'il faifoit; que la Cour en pouvoit rendre témoignage ; que le Roi fçavoit qu'il en avoit pleuré, & que c'étoit ce qui lui avoit fait refufer d'abord l'Archevêché, Puis parlant du Procès verbal; » Voyez, ditil, combien on me fait dire de chofes > combien on me traite mal; hé bien, je fouf

XL.

M. de Péréfi

xe. Nouvel

fre tout cela pour l'amour de Dieu & pour fa gloire, & fuis réfolu de paffer par deffus, » & d'aller jufqu'au bout. » Puifqu'il avoit un fi bon cœur, que ne difoit-il plutôt qu'il parleroit au Roi, & qu'il feroit enforte de le radoucir? Il rentra dans la Communauté à la fin de la journée, & dépofa les Officiéres, en la place defquelles il mit celles qui avoient figné ; "ce fut la Sœur Flavie qu'il nomma Sous-prieure, la Sœur Dorothée Célériere, &c. Il écouta en filence bien des chofes qui furent dites à ce fujet, & entre autres beaucoup de réflexions que firent les Religieufes fur les nouvelles Officiéres, & fur leur peu de capacité. Il étoit notoire que deux d'entre elles étoient des filles imbécilles, privées pour cette raifon de voix active & paffive depuis plufieurs années, outre que quatre de ces figneufes étoient des étrangé res aggrégées à la Maifon. Enfuite le Prélatfe retira, laiffa à une des Sœurs un projet d'ac commodement figné de fa main, fur lequel il lui dit de faire fes réflexions & de voir ce que les autres en penferoient, Il en fera parlé plus

bas.

Le lendemain ces nouvelles Officiéres fe miNouvelles rent en poffeffion de leurs offices. Les clefs du Officiéres coffre-fort où étoient tous les titres de la mainommées par fon furent données à la M. Eugénie & aux fœurs Flavie & Dorothée par M. de la Bruinterdit des netiere qui étoit venu le vifiter depuis l'enléSacremens M. vement de M. Akakia l'homme d'affaire de la maison, dont nous allons parler. Le Grandme d'affaire de P. R. mis à Vicaire rendit témoignage au bel ordre qu'il la Bastille. trouva dans les papiers. Il ordonna qu'on pré parât une chambre bien fermée, pour y met tre le coffre-fort: & en attendant que les ferrures fuffent faites & posées à cette chambre,

Akakia hom

deux filles Ste Marie fe relevérent pour garder à vue ce coffre qui cependant étoit bien fermé, Une Religieufe repréfenta à M. de la Brunetiere qu'il paroiffoit convenable qu'une des trois clefs au moins fût entre les mains de quelqu'une de la Communauté qui étoit de 45. pendant que les deux autres feroient entre les mains de 8. ou 9. foumifes, dont cinq n'étoient pas profeffes de la maison. Le GrandVicaire répondit avec rudeffe que le grand nombre ne devoit pas être compté; que puifqu'il étoit défobéiflant, il étoit jufte que le petit nombre eût l'adminiftration de la maifon, & que fi Monfeigneur faifoit bien, il les privefoit de voix active & paffive. Il fallut donc laiffer faire. On avoit eu la précaution, avant que l'ancienne Célériere rendît les clefs à la nouvelle, d'emporter quelques piéces de toile & quelques hardes pour donner aux pauvres fœurs poftulantes converfes, parce qu'on appréhendoit qu'elles ne fuffent renvoyées fans aucune récompenfe de leurs fervices. Auffitôt que les changemens furent exécutés, les Religieufes fe trouvérent dans une vraie captivité. Les Tours, les parloirs, la Sacriftie, les Offices, les chambres, les jardins, les tribunes du Choeur & de l'avant-choeur, les paffages pour approcher de certaines fenêtres, tout fut fermé. On n'avoit la liberté d'aller qu'à l'Eglife & au réfetoire; & dès qu'on étoit rencontré dans quelqu'autre chemin, c'étoit un crime capital. Le foir de ce premier jour la foeur Flavie fe préfenta après complies pour donner de l'eau-bénite à la Communauté en qualité de fousPrieure. La plus grande partie de la Communauté s'y trouva, & reçut l'eau-bénite de fa main. On continua à le faire de même tous les

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