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Gif, de zoo. pour le Boucher, de so. autres pour autre chofe, elle fe mit de même en priére, & à la fin de fa prière, une Dame lui apporta 2300. liv. dont elle faifoit préfent au Couvent. La dépenfe de P. R. pour chaque année, dans le tems que la maison étoit plus remplie de fujets, étoit de 45. ou 50. mille liv. & quoique la maifon n'en eût que fix ou fept de revenu, Mere Angélique faifoit face à tout, au moyen de quantité de charités extraordinaires, qui venoient comme d'elles-mêmes au Monaftére; car elle n'avoit garde de les mandier. Un de fes plus grands foins dans les néceffités urgentes de la maison, c'étoit d'en dérober la connoiffance à certaines perfonnes, qui ne demandoient pas mieux que d'affifter le Monaftére. » Mes filles, » difoit-elle à fes Religieufes, nous avons fait vœu de pauvreté ; eft-ce être pauvre, que d'avoir toujours des amis prêts à nous faire part » de leurs richeffes? Elle craignoit d'ailleurs de » fe rendre coupable, en allant au devant de » la Providence.» Je rapporterai ici deux belles paroles de la Mere à ce fujet : » Les gens du » monde, difoit-elle, fouhaitent-ils que leurs >> amis leur donnent de l'argent? Ils fe croiroient deshonorés en le recevant; pourquoi les » Couvens fe conduiroient-ils autrement? Au»tre parole: Cela n'est-il pas étrange, qu'il femble que les Couvens ne foient faits que » pour recevoir, & point pour donner? » Elle vouloit donc tout attendre de Dieu : elle fe repofoit fur lui, foit quand il s'agiffoit de donner, & de ne pas s'inquiéter d'être au dépour vu, foit quand il falloit faire quelqu'entreprife pour la maifon, qui étoit d'une groffe dépenfe. Elle difoit avec une affurance parfaite. >> Je n'ai jamais rien entrepris, lorfqu'il étoit né

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XXVI. Miracle des

ceffaire, que Dieu ne m'ait envoyé de quoi le payer. Les traits précédens, & ceux qui vont fuivre, vérifient cette parole d'une sainte hardieffe.

En effet pour recompenfer la foi héroïque de piéces de 5. cette grande ame, le Seigneur alla jufqu'à la fols converties gratifier de vrais miracles. Car c'eft le nom en demi-louis, qu'on eft comme forcé par l'évidence de donner & celui appel à ce que je vais raconter par extrait d'une Relalé de la farine. tion écrite dans le tems par la Mere Angélique

de S. Jean, témoin oculaire. » En 1649. pen

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»dant la premiére guerre de Paris, la Mere Angélique étant à P. R. D. C. la Tourriére vint lui dire un jour qu'il y avoit au Tour » un pauvre homme chargé de famille, qui de» mandoit qu'on l'affiftât. Hé bien, dit la Me» re, que pouvons-nous faire pour lui? Qu'a>> vons-nous? Nous n'avons rien, dit la Tour» riére. Rien, reprit la Mere. Nous avons, répondit l'autre, une feule pièce de 29. fols. » Donnez-la, dit-elle; ce fera quelque chofe » pour ce pauvre homme, ce ne feroit rien pour > nous; car nous ne vivrions pas de cela. La chofe fut faite. Quelques heures après, la Tourriére ayant reparu, la Mere lui dit : >> mais que ferez-vous donc, fi vous n'avez plus >> rien Celle-ci reprit: Vous dites toujours, » ma Mere, que la Providence y pourvoira. Oui, » dit la Mere; & à ce moment je me ressouviens » qu'on m'a donné il y a quelque tems deux rouleaux de piéces de cinq fols, j'en ai dépenfé un; il faut que j'aie mis l'autre quelque part. Elle cherche fur le champ, & le trouve. Quand elle l'eut ouvert (en préfence de la » fœur Angélique de S. Jean, qui a écrit ceci, » & de la Tourriére) elle demeura toute interdite, parce qu'au lieu de piéces de cinq fols,

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» c'étoit des demi-louis. Elle fut quelques in»ftans fans parler, & les autres aufsi. Enfin la » four Angélique de S. Jean lui dit: Eh quoi, »ma Mere, Dieu vous a donc rendu le centu"ple? Elle répondit qu'elle n'y comprenoit >> rien, & fe tut, ne fçachant comment s'y pren >>dre pour ôter de l'efprit des perfonnes préfen»tes, toute idée de miracle : qui eft ce que fon humilité lui faifoit très-fort redouter. On "compte cet or, & on trouve 29. demi-louis, » qui répondoient justement à la piéce de 29. » fols: autant en or qu'en fols. Alors la Mere "prenant un ton d'assurance, dit : Il faut bien "que je les euffe, puifque les voilà. Mais, lui » dit-on, vous vous êtes bien fouvenue de vos s piéces de cinq fols ; fi vous aviez eu des louis, 5 vous vous en feriez fouvenue également.Oui, » dit-elle, je fçais bien qu'on m'a donné deux » rouleaux de piéces de cinq fols: il faudra » chercher celui qui me reftoit. Mais jamais on ne put le retrouver, quelque recherche qu'on » ait faite. Dans la derniére maladie,les Méde»cins ayant ordonné qu'on la réveillât le plus "qu'on pourroit de l'affoupiffement où elle » étoit tombée, fa niéce Angélique de S. Jean s'avifa de lui parler du miracle de la farine, » & de celui des piéces de cinq fols. Elle parut » mécontente de ce qu'on lui difoit. La Sœur » lui dit qu'elle le faifoit exprès, fçachant que » cela la fâcheroit un peu, & la réveilleroit » mieux que des chofes agréables qui l'endor » moient, La Mere répondit en fouriant: Allez, » vous êtes un vrai Satan : laissez-moi en repos. Ce qui prouve qu'elle-même croyoit le miracle véritable car fi elle avoit eu de quoi détromper fa niéce à ce fujet, elle n'auroit pas manqué de le faire avant que de mourir. Tome I

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Le miracle de la farine eft un autre événement qui tient encore plus du prodige, & qui fut attribué aux priéres de la Mere Angélique, & à cette foi ferme qu'elle avoit en la Providence. Le récit que j'en vais faire, eft encore extrait de la Relation qui fut écrite par la perfonne même qui en avoit été témoin oculaire, & même le principal agent; la Relation eft fignée par plufieurs Religieufes dans l'original que j'ai fous les yeux actuellement. » En 1640. le bled avoit germé fur pied, à caufe des pluies >> exceffives & continuelles. Il étoit entiérement » gâté. Le pain qu'on en faifoit, étoit pitoyable, point lié, d'une couleur grisâtre, avec >> des taches violettes : la pâte ne pouvoit ni fe » manier, ni fe pétrir, ni lever : la croûte quit>> toit la mie dans le pain, qui n'étoit épais que >> de deux doigts. La Mere étoit bien affligée furtout pour les infirmes & les enfans, voyant qu'un fi mauvais pain ne pouvoit pas man» quer d'incommoder. Toute la Communauté » pleine de confiance dans les priéres & les mé>> rites de la Mere Angélique, fe perfuada que >> Dieu ne permettroit pas qu'il arrivât aucun >> mal de cette nourriture. La Princeffe de Guimené effaya à plufieurs reprises de faire agréer à la Mere, qu'elle nourrit fa Commu»nauté pendant toute la difette. La Mere la

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remercia conftamment, proteftant qu'elle > avoit mis toute fa confiance en Dieu, qui ne » l'abandonneroit pas. La fœur Boulangère, qui » eft celle qui a fait cette Relation, allant un » jour de grand matin à son four pour cuire, & paffant par-devant la porte d'une Chapelle, marcha fur quelque chofe de moû, qu'elle crut être les habits d'une perfonne. Elle ne fe » trompoit pas la Mere étoit là en priére.Com

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» me la fœur eut grande peur, la Mere lui dit : » C'eft moi, ma fille : vous allez cuire eh, mon » Dieu, que ferons-nous à ce mauvais pain ? » Prions ensemble. La fœur fe mit à prier au» près de la Mere un peu de tems, & s'en alla » enfuite faire fon ouvrage. Lorfqu'elle décou• >> vrit fon levain, elle vit qu'il ne fuyoit pas, » comme de coutume, pardeffous la farine. Elle commença à pétrir, & elle fut, fort furprife de voir que la farine fe manioit bien, ne » s'attachoit plus aux doigts ; qu'en un motelle » étoit toute autre. Le jour étant venu, elle vit "toute la pâte belle, bien blanche, levée à mer"veille. Elle demanda à la Célériére fi c'étoit "qu'elle eût changé pendant la nuit la farine & "le levain. Celle-ci lui dit que non. Auffitôt el» le prend deux fébilles pleines de cette pâte ; elle court les montrer à la Mere qui tenoit » alors l'Assemblée, & crie Miracle. La Mere » veut lui imposer filence: elle crie plus fort. Elle s'en retourne pour enfourner & lorfque »le pain fut cuit,il le trouva parfaitement beau, » & bien léger; & toute la farine qui étoit dans » la maison, où il y en avoit encore pour fix fe

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maines, fe trouva changée. La Mere fe dé» fendit du miracle, & le rejetta fur la foi de la » Célériére, & fur la patience de la Boulangé»re, que Dieu avoit voulu récompenfer. Ön » écrivit à P. R. D. C. la merveille, & il fe trou» va que dans le même tems, le même miracle s'y étoit fait. Une circonftance fingulière ac"compagna ce miracle. La fœur Boulangére "avoit avec elle une jeune Demoiselle An"gloife pour l'aider. Cette Demoiselle avoit » fait abjuration à P. R. mais elle n'en étoit pas » meilleure Catholique: elle difoit de tems en » tems qu'elle voudroit voir un miracle, & que›

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