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XXVII. Grandes do

" fielle en voyoit un, elle feroit convertie, Le » Seigneur lui accorda ce qu'elle défiroit, en opérant cette merveille: elle fut elle-même » témoin inconteftable du changement de la fa»rine qu'elle manioit, & fe convertit bien fin>> cérement. »

Une autre forte de merveille, & une preuve nations faites nouvelle de l'attention de la Providence fur cetà la maison. te maifon défintéreffée, ce font les grandes

donations qui y ont été faites en différens tems. M. Arnaud, pere de la Mere Angélique, employa de groffes fommes à rétablir les anciens bâtimens, & à fermer de murs le terrain du Monaftére. Madame Arnaud fa veuve, fit l'acquifition d'une grande maifon au Fauxbourg S. Ja ques, pour y établir la maifon de P. R. de Pa ris. Le prix de l'achat tout feul, fut de 24000. liv. Madame la Marquife d'Aumont acquitta enfuite les groffes dettes qui avoient été contractées pour bâtir l'Eglife, & pour accommoder la maifon. La Marquife de Sablé & la Princeffe de Guimené firent conftruire, l'une le Chapitre, l'autre la Sacriftie & une partie du Cloître. Plufieurs corps de logis tant au dehors qu'au dedans, furent bâtis par une Dame Aquaviva, M. de Sévigné, Madame Le Maître, Madame de Guenegaud, & les deux Dames nommées plus haut. Plufieurs Dames qui s'y font faites Religieufes, ont fait de grandes largeffes à la maifon, Madame Bochart Champigny Chaze, Madame Boulogne S. Ange, Madame Rubentel Le Camus, &c. Dans le tems de l'Inftitur du S. Sacrement une Dame Bardeau légua pour cela 30000. liv. Meffieurs Le Maître, Sericourt & Saci lui ont donné leurs biens. M. Benoise Confeiller au Parlement, & M. Briquet Avocat Général ont donné chacun 1000/écus; M,

l'Abbé de la Potherie une rente de so. écus fur
le fel: la Reine de Pologne Marie de Gonza-
gue, un Ciboire d'agate eftimé 4000. écus, &
autres préfens très-riches. Quant à la maison
des Champs qui avoit été abandonnée, elle
fut rétablie ou plutôt rebâtie quatre fois plus
grande, par les foins & en partie aux dépens
de M. le Duc de Luine, de M. d'Andilli, M.
de Sevigné, M. Dugué de Bagnols. Celui-ci y
dépenfa 40000. liv. outre une rente de 6000.
liv. qu'il céda au Monaftére. Le Duc de Lian-
court, la Ducheffe fa femme, M. de Luzanci
lui firent une donation, chacun de 10000. liv.
M. Champagne de 6000. liv. M. d'Epinoi S.
Ange de tout le bien dont il pouvoit difpofer..
Le Duc de Luine fit bâtir le Château de Vaumu-
rier, M. de Liancourt un grand logis pour y
faire des retraites, la Ducheffe de Longueville
un grand Hôtel pour y venir demeurer de tems
en tems; fans parler du rétablissement & de
l'amélioration des fermes de la maison, des
étangs, des bois, qui fe font faites par les So-
litaires qui y étoient retirés, & d'une multitu-
de d'aumônes particuliéres, faites à la maifon
par nombre de
gens connus & même inconnus.
C'eft ainfi qu'à mesure que cette fainte maison
fe plaifoit à répandre des aumônes au dehors,
la Providence les faifoit rentrer.

La Mere An

C'eft la grande charité de la Mere Angéli- XXVIII. que pour les pauvres, qui a donné lieu à tous ces récits. Pour achever le tableau de cette cha- gélique fait quitter à fa rité qui étoit universelle, je vais rapporter ce four Agnès qu'elle lui fit faire pour les proches, je veux dire, fonAbbaye de pour trois de fes foeurs, Catherine-Agnès, Ma- S. Cir, & la rie-Claire & Anne-Eugenie, & nous repren- fe à P. R. auffait Religieu. drons ainfi l'hiftorique, qui a été interrompue fi bien que par le long détail des vertus de la Mere. J'ai re- Marie-Claire, autre fœur.

D;

marqué plus haut que la jeune CatherineAgnès deftinée pour l'Abbaye de S. Cir, où elle étoit entre les mains d'une perfonne de confiance pour fon éducation, venoit de tems en tems paffer quelques femaines à P. R. pour fe divertir avec fa fœur Angélique. Quand celle-ci fut touchée de Dieu, Agnès en fut furprise, & même choquée de la maniére pauvre & vile dont elle vit qu'elle s'habilloit. Angélique avoit grande envie de l'avoir avec elle, & de l'amener à la Réforme de P. R. Elle profita d'un état de mélancolie & de langueur où, tomba fa fœur par l'éloignement de la perfonne qui avoit foin d'elle, & qu'elle aimoit beaucoup, laquelle lui fut ôtée, parce qu'étant une femme féculiére, les Supérieurs de S. Cir eurent scrupule de la voir toujours réfidente dans leur maison. Dans un dernier féjour qu'elle fit à P. R. Angé lique tâcha de la gagner, & de la dégoûter de fa prétendue Abbaye de S. Cir. Mais la jeune Sœur y tenoit beaucoup, quoique d'ailleurs déja bonne chrétienne, aimant exceffivement la priére, l'office divin, le travail dans les chofes les plus rudes & les plus baffes, & même le jeûne. Angélique s'avifa d'un expédient: elle écrivit à M. fon pere que la langueur où étoit fa fœur,' ne venoit que de chagrin, & qu'il vaudroit bien mieux lui donner la fatisfaction d'être pour toujours avec elle à P. R. & renoncer à I'Abbaye en confidence dont on fe repaiffoit pour l'avenir. Car en effet il y avoit ici le cas de confidence. C'étoit une Religieufe de S. Cir qui avoit le titre d'Abbeffe, avec promeffe de le remettre à la fille de M. Arnaud, quand elle auroit 20. ans. M. Arnaud qui chériffoit tendrement fes enfans, & ne vouloit que ce qui pouvoit leur faire plaifir, confentit à la propo

fition ; & la petite Sœur qui en fut un peu étonnée, n'ofa pas cependant en dédire Angélique. En 1609. elle avoit eu une grande maladie, & étoit devenue hydropique : elle fut en langueur pendant 2. ans. On attribua la maladie à une indifcrétion de pénitence dans fon féjour de S Cir. N'ayant que 13. ans elle avoit fait le grand jeûne pendant tout un Carême, ne mangeant qu'une fois le jour. Elle entra à P. R. encore fort infirme: & comme elle ne pouvoit pas faire toutes les obfervances extérieures, elle fe dédommageoit par l'intérieur. Elle affectionnoit tellement l'Oraifon qu'elle y étoit prefque toujours, lorfqu'elle n'étoit pas au lit: ce qui l'excédoit à un tel point, qu'on la trouvoit quelquefois évanouie & fans connoiffance. Sa maladie augmenta confidérablement. La Mere Angélique ne la quittoit point : elle demeuroit des journées entiéres auprès d'elle dans une chambre étouffée pendant les plus grandes chaleurs de l'été, & où tout étoit fermé, à caufe que le moindre air faifoit éyanouir la malade. Elle eut la confolation de la voir bien rétablie, & en état de prendre l'hâbit en 1611. Car peu-à-peu le défir lui vint de fe faire Religieufe à P. R. auffi-bien que le dégoût de fon Abbaye de S. Cir. Angélique qui vouloit éprouver la réfolution, la laila plus d'un an fans lui donner l'habit. Le tendre amour qu'elle avoit pour elle, n'étoit pas aveugle. Elle la traita dans fon Noviciat comme elle auroit traité la moindre des Novices. Elle la mortifioit en toutes choses, & ne lui paffoit rien: elle lui procuroit de fréquentes humiliations, voulant détruire en elle un certain fond de fuffifance & d'amour propre, qui reftoit mêlé avec fes grandes qualités. Agnès fit pendant ce tems-là de grands progrès,

pratiquant la foumiffion, l'humilité, l'amour de la pauvreté. Lorfqu'elle étoit encore Noyice, fa Sœur la fit elle-même Maîtreffe des autres Novices, n'ayant perfonne pour remplir cette place importante. Elle s'en acquitta trèsbien, & le P. Capucin qui fervoit alors la maifon, & qui avoit confeillé de charger du Noviciat la jeune Novice, dit un jour à la Mere Angélique que ce feroit une des plus grandes Religieufes de France. Il y avoit dans les filles de P. R. une telle docilité, que pas une n'y trouva à redire, & toutes la révéroient. En 1612. Agnès fit profeffion entre les mains de fa Sœur Angélique. Ce fut fa premiére conquête dans fa famille. La jeune Marie-Claire une d'entre fes Sœurs, qui étoit la cinquième des filles de M. Arnaud, étoit élevée à P. R. depuis l'âge de fept ans. Elle fit un voyage à Andilli, & au retour elle rapporta avec elle un efprit volontaire, & un affez grand amour du monde ; ce qui fut pour la Mere Angélique un exercice à fa patience, & une occafion de manifefter fa grande difcrétion. Elle fupportoit les défauts de la petite Sœur avec une douceur admirable, pour ne point aigrir fon efprit un peu hautain ; mais elle le faifoit, non en autorisant ses fautes, mais en les diffimulant avec tant d'adresse, qu'il ne paroiffoit pas qu'elle s'en fût feulement apperşue. ce moyen elle réuffit à ramener peuà-peu fa petite Sœur à l'amour de la Religion, dont elle lui donna l'habit dès l'âge de 14. ans. La quatrième des fix filles de M. Arnaud, fut Converfion la troifiéme conquête de la Mere Angélique. d'une troifié Cette excellente fille obtint par fes prières que me Sœur de Dieu retira fa fœur Anne-Eugénie des dangers la Mere An- du fiécle, où elle étoit déja engagée par le cœur, gélique, Anne Eugénie de & la conduifit à la Religion. Anne Arnaud,

XXIX.

l'Incarnation.

Par

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