Images de page
PDF
ePub

perdu sans un édit de Constantin qui vient heureusement rétablir le calme, et rendre les dieux chrétiens paisibles et uniques possesseurs du paradis.

?

Quoi ! diront les Chrétiens tout étonnés, voilà nos anges, nos saints, notre Dieu, enfin tout notre culte Eh! oui: selon le chantre de la Guerre des dieux. Qu'a de commun cet amas de dégoûtantes platitudes avec ces dogmes sublimes si éloquemment développés par Bossuet dans ses élévations sur les mystères, et dans la seconde partie de son discours sur l'histoire universelle! Je l'ignore mais c'est bien là le christianisme. L'auteur l'a démontré rigoureuse-. ment pour deux classes d'êtres bien précieuses à. la philosophie, les libertins et les filles perdues: d'ailleurs il a tout écrit sous la dictée du SaintEsprit..... Vous riez; c'est ici un nouvel exemple de l'extrême habileté avec laquelle nos philosophes. savent faire usage de leurs armes. Plusieurs d'entr'eux avoient déjà imaginé de mettre dans la bouche des Chrétiens quelques-uns de ces aveux qui les écrasent, mais notre poëte déploie ici un art bien plus profond. Ce ne sont plus les Chrétiens qu'il introduit sur la scène, c'est leur Dieu même. L'enthousiasme de la philosophie porté à son comble dans ces dernières années pouvoit seul produire cet élan du génie. Jugez combien il est plaisant d'entendre le Saint-Esprit rapporter

force extravagances qui se passent dans le paradis, s'égayer en histoires faites pour charmer certains lieux, et présenter des tableaux..... Non; jamais on n'imagina rien de plus inepte et de plus absurde que les personnages mis en jeu par le poëte, et qu'il appelle les dieux chrétiens. — Il y pa

roît; mais ce ne sont là que des portraits de fantaisie. Que vous êtes stupides! prenez le cœur, les affections, les yeux de ceux pour qui ils ont été tracés, et vous les trouverez ressemblans : l'invention, l'exécution, tout vous paroîtra étincelant de vérité et même d'esprit.

CHAPITRE XXI.

Son

Ce que l'auteur de la Religion universelle pense des raisonnemens des philosophes. système particulier de philosophie.

Ce sont sans doute de vigoureux raisonnemens que ceux que j'ai exposés jusqu'ici : l'esprit humain a droit de s'en glorifier. Voyez quels coups terribles ils portent aux preuves du christianisme, à sa morale, et à ses dogmes. Ils ont eu les succès les plus éclatans; en peu de temps ils ont fait des conquêtes sans nombre à la philosophie. Cependant, qui le croiroit! ils ont paru foibles et misé

ges,

rables à un des plus illustres disciples de nos sale savant auteur de la Religion universelle, << Les philosophes, dit-il, ont pris le parti de rejeter la doctrine du christianisme

c'étoit » aller au plus court et au plus aisé: mais ils ont » fait voir par là que s'ils étoient moins crédules » que le peuple, ils n'étoient pas plus instruits, >> et qu'ils n'avoient pas cessé d'être plongés dans » les ténèbres de la commune ignorance.» (T.5, p. 18, et Av. p. 5.)

Il ne m'appartient point de discuter la solidité de ces reproches ce qu'il y a de certain pour quiconque en jugera avec impartialité, c'est que le disciple plane bien au-dessus de ses maîtres. Ah! le grand-homme! c'est avec raison que plusieurs savans de Paris, le regardent aujourd'hui comme un des principaux arcs-boutans de la philosophie. Quelles admirables découyertes que celles qu'il a exposées d'abord en douze volumes in-octavo, et qu'il a eu depuis la complaisance de resserrer dans un moindre espace, pour l'avantage du commun des lecteurs ! Elles forment un système que « l'on doit bien se » garder de confondre avec une foule d'autres, » (bien moins vastes et bien moins imposans) » qui ont été faits sur la mythologie, et qui après > nous avoir éblouis par de brillantes promesses, > nous ont laissés aussi incertains qu'auparavant » sur le véritable sens de la mythologie énigma

»tique des anciens. » (Rel. univ., t. 2, p. 188.) Celui-ci leur est bien supérieur. « Son auteur a » jeté l'ancre de la vérité au milieu de l'océan des » temps; et, après seize années de pénibles re>> cherches dont sa femme a su adoucir pour lui >> la fatigue et l'ennui par la société la plus douce, > il a retrouvé enfin le fil de nos connoissances » religieuses qui étoit perdu depuis bien des siè » cles. » ( Tom. 1, p. 31 et 32, et Ép. déd.) Quelle confiance ne devons-nous pas avoir dans son travail et dans les résultats qu'il obtient ! « Il > analyse l'opinion des autres, et il se garde bien » d'en créer une. Persuadé que le génie de l'hom» me qui peut expliquer les religions est bien au» dessus de celui qui en fait, c'est à la première » gloire qu'il aspire par amour de la vérité dont » il a soif ainsi que de la justice. » ( Ibid. pag. 11.)

[ocr errors]

Voilà pour le fond de son systême. Quant au développement, il nous déclare que sa marche est libre.« Si les érudits à cerveau étroit trouvent » qu'elle l'est trop, parce qu'elle n'est point pe» sante, il ne cherche point à se justifier auprès » d'eux, puisque la nature en leur refusant le » génie ( qu'elle lui a accordé libéralement, ) les » a par là même rendus incapables de le recon>>noître partout où il se montre dans l'antiquité, » à la hauteur de laquelle ils ne peuvent pas » lever (comme lui.) » (Toni. 2, pag. 190.)

s'é

Mais écoutons-le, il va « dévoiler à nos yeux la » source de nos opinions religieuses, en fixer » l'origine, en suivre les progrès et les formes » variées.» ( Tom. 1, Préf., p. XIII.) Pour parvenir à ce but, «il fait l'analyse des cultes par >> le moyen de l'astronomie et de la physique. » (Ibid.) Chaque religion ainsi anatomisée ne présente plus à l'œil de l'observateur que le soleil, les étoiles, les planètes et les quatre saisons. << Celle des Chrétiens sembloit devoir échapper » à cette analyse, et ne pouvoir être confondue >> avec les autres dont elle a dans tous les temps » affecté de se séparer. Attaquée et défendue pres» que dès son berceau, on auroit pu imaginer » qu'elle demeureroit encore victorieuse des nou>> veaux combats que la philosophie livre à ses >> fictions sacrées et à ses dogmes obscurs; que » son Dieu seul resteroit en possession de cette » réalité historique que, pendant bien des siècles, » il avoit usurpée; et que près de ses sanctuaires, » échoueroit enfin la méthode nouvelle qui a ou>> vert ceux des autres religions. » ( Tom. 5 art. 1, pag. vIII.) Mais elle étoit trop foible pour résister. La science a soufflé sur elle, et elle a été démasquée : on s'est vu forcé de rez » connoître, que les premiers chapitres de la Ge» nèse et l'histoire de Jésus-Christ, ne renferment que des absurditéset de folles idées qui ne permettent pas de les admettre comme des faits

« PrécédentContinuer »