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une fource de très-bonne eau. Devant l'hermitage eft un petit potager qui fournit des herbages & des fleurs. L'Hermite dont il eft ici question eft mort en 1708.

ARTICLE II.

Examen de la grandeur de plufieurs hommes auxquels l'antiquité donne une taille gigantefque.

M. Fréret a recueilli la plupart de ces ftatures extraordinaires, nous les rapportons ici en y faifant l'application de nos mefures. Manéthon, cité par Syncelle, nous apprend que le fameux Séfoftris avoit quatre coudées, trois palmes & deux doigts. Manéthon, Prêtre Egyptien, décrivant la taille d'un Roi d'Egypte, en a donné la mefure en grandes coudées Egyptiennes. Ainsi Séfoftris avoit 91.148 pouces du pied de Roi de hauteur. Toute prodigieufe qu'étoit cette taille, elle eft au-deffous de celle du Hollandois dont parle Ryckius; il avoit huit pieds & demi du Rhin, qui reviennent à 98.6 pouces du pied de Paris.

Nous lifons dans Hérodote (lib. VII, c. CXVII.) que lorsque Xercès étoit campé près de la Ville d'Acanthe, un Prince Achéménide, nommé Artachée, pour qui il avoit une considération particuliere, mourut de maladie. Il étoit d'une taille extraordinaire parmi les Perfes, dit l'Hiftorien, car il ne s'en falloit que quatre doigts qu'il n'eut cinq coudées Royales de hauteur. Il avoit environ 74 pouces & demi. Ce Prince étoit bien moins grand que le payfan Suédois, vu par Rudbeck (Atlantis, vol. III, p. 245.), qui ayant huit pieds de Suéde de hauteur, avoit 87.8 pouces du pied de Paris.

Selon Pline (lib. VII, cap. XVI.), on vit fous le regne d'Augufte un géant & une géante appellés Pufio & Secundilla, qui avoient dix pieds un quart; je penfe que ce font des pieds géométriques : dans ce cas, ces géans dont les fquellettes fe voyoient dans les jardins de Sallufte, avoient cent huit pouces ou neuf pieds

de Roi.

Artaban, Roi des Parthes, avoit envoyé un géant à l'Empereur Tibere. Josephe (Ant. Jud. L. XVIII.) qui le nomme Eléazar, nous apprend qu'il avoit cinq coudées. Si c'étoient des coudées Babyloniennes, ce géant n'avoit que 77 pouces de France.

Le

Le géant Gabbara, envoyé d'Arabie à l'Empereur Claude avoit, felon Pline ( à l'endroit cité), neuf pieds & autant d'onces, ce qui fignifie, je pense, neuf pieds géométriques & une fpithame; il avoit donc cent pouces ou huit pieds 4 pouces.

L'Empereur Maximin avoit, felon Capitolin (in Maximino c. 7.), huit pieds quatre onces de hauteur, qui reviennent à 95 pouces, ou 7 pieds 11 pouces de France.

Nous avons parlé de la taille de Goliath en traitant du pygon, & de celle d'Hercule en traitant du ftade Grec. Nous finirons cet article par quelques endroits des Anciens au fujet de la taille militaire parmi les Romains.

Une loi de Valentinien (Cod. Théodof.) la fixe à cinq pieds fept onces: in quinque pedibus & feptem unciis ufualibus delectus.

habeatur.

M. le Beau, dans fon Hiftoire du Bas-Empire (lib. VII, art. XLVII.), dit que fous Conftance, vers l'an 353, l'âge militaire étoit de 19 ans. Il ajoute que la taille varioit à la volonté des Princes & felon les différens pays; la plus baffe étoit de cinq pieds Romains, la plus haute de fix. On exigeoit pour l'ordinaire au-deffus de cinq pieds, tantôt fix, tantôt sept & tantôt dix рон

ces ou onces.

Végéce dit qu'au temps de Marius on choififfoit des hommes de fix pieds, ou au moins de cinq pieds dix pouces, pour remplir les premieres cohortes des Légions: In primis legionum cohortibus.

ARTICLE III

Digreffion tendant à prouver que l'Amérique a été connue des Anciens.

Les parties occidentales & méridionales de l'Afrique ont été peu connues dans les anciens temps, ou plutôt les connoiffan ces qu'on avoit pu en avoir dans les fiecles les plus reculés, n'ayant pas été écrites, fe font effacées de la mémoire des hommes durant un affez long temps. Il y a eu une époque où la navigation fut tellement négligée, qu'au rapport de Strabon il falloit huit ans pour faire tout le tour de l'Afrique ; ce qui paroît néanmoins peu vraisemblable: car en fuppofant tout le contour de cette partie du monde de 6300 lieues de 25 au degré, il s'enfuivroit que les Navigateurs n'auroient fait qu'un

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peu plus de deux lieues par jour, ce qui ne paroît admissible dans aucune hypothese. Mais fi les Anciens avoient ceffé de fréquenter les côtes éloignées de l'Afrique, on ne doit pas s'étonner que durant un affez long espace de temps ils euffent entiérement perdu de vue le continent Américain. Cependant cette partie du monde a été connue dans la plus haute antiquité, on n'en fauroit douter. Dans le Timée de Platon, on lit un entretien entre les Prêtres Egyptiens & Solon d'Athenes, qui vivoit environ fix cents ans avant l'Ere vulgaire, dans lequel ces Prêtres racontent que vis-àvis du Détroit d'Hercule, il y avoit eu autrefois une Inle appellée Atlantide, plus grande que l'Afrique & l'Afie enfemble; mais qu'enfuite d'un grand tremblement de terre, il furvint une inondation qui, dans l'efpace d'un jour & d'une nuit, fubmergea cette Isle, & la fit entiérement difparoître; que la mer qui étoit entre Gadés ou Cadix & cette Ifle, demeura pendant long-temps inacceffible, à caufe de la grande quantité de limon qui s'y étoit formé des débris de cette Ifle.

Je remarquerai fur ce paffage, que fi l'Ifle Atlantide étoit aussi grande que l'Afrique & l'Afie ensemble, elle n'a pu être fubmergée en entier; car l'efpace de mer compris entre l'Afrique & l'Amérique n'eft pas capable de contenir une Isle d'une auffi grande étendue ce ne pourroit donc être qu'une portion des terres de l'Amérique, qui se seroit détachée de ce continent, & auroit été engloutie. Ces terres perdues étoient apparemment une grande pointe qui rapprochoit le continent Américain du nôtre, laquelle ayant difparu, fit croire que toute l'Ifle Atlantide avoit été abymée dans les eaux de la mer. N'y auroit-il pas lieu de croire d'ailleurs que les Ifles du golfe du Mexique, les Açores, Madere, & les Inles du Cap-Verd font encore des débris de cette ancienne terre? au moins eft-il certain qu'il eft arrivé de grandes révolutions dans cette mer. Diodore de Sicile (lib. III.) parle d'une très- grande Ifle Hespéride, ainsi appellée, parce qu'elle étoit située au couchant du lac Tritonide. Ce lac étoit fitué dans le voifinage de l'Ethiopie, au pied de la plus haute montagne de ce pays-là, que les Grecs appellent Atlas, & qui domine fur l'Océan. Mais il ajoute quelques pages après, que le lac Tritonide a entiérement difparu par la rupture de tout le terrein qui le féparoit de l'Océan.

L'Auteur d'un petit Livre intitulé Du Monde dont les uns attribuent le texte à Ariftote, & d'autres à Théophrafte, & la ver

fion latine à Apulée, affure qu'il y a d'autres grandes terres audelà du continent qui renferme l'Europe, l'Afie & l'Afrique.

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Diodore (lib. V, c. XV.) dit qu'à l'occident de l'Afrique, on trouve une Isle diftante de cette partie du monde de plufieurs journées de navigation; fon territoire fertile eft entrecoupé de montagnes & de vallées. Cette Ifle eft traversée par plufieurs fleuves navigables fes jardins font remplis de toutes fortes d'arbres, & arrofés par des fources d'eau douce. On y voit quantité de maisons de plaifance, toutes meublées magnifiquement, & dont les parterres font ornés de berceaux couverts de fleurs : c'eft-là que les habitans du pays fe retirent pendant l'été, pour y jouir des biens que la campagne leur procure en abondance. Les montagnes de cette Ifle font couvertes d'épaiffes forêts d'arbres fruitiers, & fes vallons font entrecoupés par des fources d'eaux vives, qui contribuent non-seulement au plaifir des Infulaires, mais encore à leur fanté & à leur force. La chaffe leur fournit un nombre infini d'animaux différens qui ne leur laiffe rien à défirer dans leurs feftins ni pour l'abondance, ni pour la délicateffe. Outre cela, la mer qui environne cette Ifle eft féconde en poiffons de toute efpece, ce qui eft une propriété générale de l'Océan. D'ailleurs on refpire là un air fi tempéré, que les arbres portent des fruits & des feuilles pendant la plus grande partie de l'année: en un mot, cette Ifle eft fi délicieufe, qu'elle paroît plutôt le féjour des Dieux que des hommes. Autrefois elle étoit inconnue à cause de fon grand éloignement, & les Phéniciens furent les premiers qui la découvrirent. Ils étoient de tout temps en poffeffion de trafiquer dans toutes les mers, ce qui leur donna lieu d'établir plufieurs Colonies dans l'Afrique & dans les pays occidentaux. Tout leur fuccédant à fouhait, & étant devenus extrêmement puiffans, ils tenterent de paffer les Colonnes d'Hercule, & d'entrer dans l'Océan..... Les Phéniciens ayant paffé le Détroit, & voguant le long de l'Afrique, furent portés par les vents fort loin dans l'Océan : la tempête ayant duré plufieurs jours, ils furent enfin jettés dans l'Ifle dont nous parlons. Ayant connu les premiers fa beauté & fa fertilité, ils la firent connoître aux autres Nations. Les Toscans devenus les maîtres de la mer, voulurent auffi y envoyer une Colonie; mais ils en furent empêchés par les Carthaginois. Ces derniers craignoient déja qu'un trop grand nombre de leurs compatriotes attirés par les charmes de ce nouveau pays, ne défertaffent

leur patrie d'un autre côté, ils le regardoient comme un afyle pour eux, fi jamais il arrivoit quelque défaftre à la Ville de Carthage; car ils efpéroient qu'étant maîtres de la mer, comme ils F'étoient alors, ils pourroient aifément fe retirer dans cette Ifle, fans que leurs vainqueurs, qui ignoroient fa fituation, puffent aller Les inquiéter là.

Je ne fais fi je me trompe, mais à quelques circonftances près de la defcription fleurie que Diodore fait de cette Ifle, je ne puis rapporter cette terre éloignée qu'à la côte du Bréfil, où les Phéniciens après avoir navigé le long des côtes d'Afrique en s'avançant vers le midi, furent jettés par la tempête qui dura plusieurs jours de fuite. Ce trajet n'eft pas de plus de fix cents lieues, qui ne font que douze jours de navigation ordinaire, enforte que par un gros temps ils purent y arriver en cinq ou fix jours.

Plutarque, dans la Vie de Sertorius, rapporte qu'à dix mille ftades de distance de l'Afrique, il y a deux Ifles Atlantides féparées l'une de l'autre par un détroit peu confidérable; ces Ifles, que l'Hiftorien appelle auffi fortunées ou heureuses, ne peuvent être, eu égard à leur diftance de l'Afrique, que les Açores, Tercere & Saint-Michel.

On raconte, dit Pline (lib. VI, cap. XXX.), que vis-à-vis du mont Atlas, il y a une Ifle qu'on appelle Atlantide; elle eft diftante de cinq journées de navigation des côtes de l'Ethiopie occidentale & du promontoire appellé Hefpérioncéras. Je pense que cette Ifle, à caufe de fa diftance de la côte, ne peut être que Madere. A l'oppofite de ce promontoire font les Ifles Gorgones, diftantes du continent de deux jours de navigation, au rapport de Xénophon de Lampfaque : c'étoit-là qu'habitoient les Gorgones. Eu égard à leur diftance, ces Ifles font Fortaventure & Lan cerote, & le promontoire Hefpérioncéras eft, dans ce cas, le Cap Bojador, au lieu que dans le premier cas il répondroit au Cap voifin de la Ville de Mazagan. Au-delà de ces dernieres Ifles font encore deux Ifles Hefpérides; ce font aujourd'hui Canarie & Ténérif: d'où je conclus que les Gorgones ou Gorgades & les Purpuraries font les mêmes Ifles, & que les Hefpérides & les For tunées font également les mêmes Ifles.

Statius Sébofus, allégué par Pline, dit que les Gorgones ne font éloignées du promontoire Hefpérioncéras que d'une journée de navigation; mais que de ces Ifles aux Hefpérides, il y a qua

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