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mefure de bled qu'un homme peut raisonnablement confommer en un jour; d'où vient que Suidas l'appelle hèmerèfios trophè, & d'autres hèmétotrophis, ration de bled d'un jour; d'où vient encore ce précepte de Pythagore: Super chanicem ne fedeas, qui fignifie que quoiqu'on ait amaffé de quoi pour un jour, il ne faut pas pour cela demeurer en repos, il faut pourvoir au lendemain.

Il feroit à fouhaiter que cette mefure fût encore en ufage aujourd'hui parmi tous les peuples de la terre, & que les autres mefures en fuffent parties aliquotes ou aliquantes, on auroit de cette maniere un terme commun, auquel on rapporteroit les mefures de tous les pays; ce rapport rendroit les opérations du commerce moins pénibles, & contribueroit merveilleusement au progrès des Sciences & des Arts.

L'Auteur d'un petit Traité fur les mesures, attribué à Galien, & que l'on trouve réuni à fes Œuvres, dit que la chénice en Italie eft de trois fetiers; il faut lire trois hémines, comme l'écrit Pollux (lib. III. ) : κοτύλη τὸ τρίτον τῆς χοίνικος. Dans un manuforit grec de la Bibliothéque du Roi, numéroté 3284, on lit que la chénice eft de quatre cotyles Attiques; puis quelques lignes plus bas, le même Auteur évalue la chénice à trois cotyles feulement. Plufieurs Ecrivains, Marcellus Empiricus, Paul Eginete, Galien ou l'Auteur anonyme du Tarif que nous venons de citer, attribuent quatre cotyles à la chénice; Cléopatre, Pollux & Suidas ne lui en donnent que trois. Hérodote (lib. VII, c. CLXXXVI.), après avoir fait le dénombrement des troupes que Xercès mena aux Thermopyles, qu'il fait monter à 5283220 hommes, dit qu'en ne comptant qu'une chénice de bled par tête, la confommation journaliere de fon armée devoit fe monter à 110340 médimnes de bled: d'où l'on déduit la chénice d'environ quarante-huit pour un médimne. Pour avoir les quarante-huit chénices complettes par médimne, il faudroit qu'il y eût eu 5296320 hommes : il a pu Le gliffer quelque légere erreur dans ce compte. Or tous les Anciens conviennent que le médimne Attique étoit de quarante-huit chénices ou de quatre-vingt-feize xeftès; donc la chénice étoit de deux xeftès ou de quatre cotyles Attiques, ce qui fe rapporte au calcul d'Hérodote. Quelle eft donc la chénice que les Anciens ont évaluée à trois cotyles? On conviendra avec moi que c'est la chénice réduite à trois hémines Romaines, lorfqu'on faura que l'hémine des Romains valoit une cotyle & un tiers Attique; en

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forte que trois hémines & quatre cotyles étoient également la valeur de la chénice ou de la ration de bled pour une perfonne en un jour. Les Romains appelloient encore la chénice Bilibris tritici, comme on le voit par le fixieme Chapitre de l'Apocalypse dans la Vulgate, où on lit, verset 6 : Bilibris tritici denario uno, & tres bilibres hordei denario uno; ce que le grec exprime ainfi : Χοίνιξ σίτου δηναρίου, καὶ τρεῖς χοίνικες κριθοῦς δηναρίον. La chénice en effet étant compofée de trois hémines, ne devoit contenir qu'un peu plus de deux livres, poids Romain, de bled.

Il faut prouver à présent que à préfent que la cotyle Attique étoit les trois

quarts de mine Romaine; c'eft ce que nous allons faire, après

avoir présenté au Lecteur les rapports des mesures Grecques entr'elles.

Selon le manufcrit grec déja cité de la Bibliothèque du Roi, le médimne contient douze hémiectes (demi - fixiemes ou demimodios), l'hémiecte quatre chénices, & la chénice quatre cotyles Attiques. La cotyle, appellée auffi Tryblion, est la moitié du xeftès, & contient quatre oxobathes ou fix cyathes.

Pollux (lib. IV.) dit que le cotyle (l'hémine) eft le tiers de la chénice; que le médimne contient quarante-huit chénices, & le hectos huit chénices.

L'Auteur du Livre fur les poids & mesures, attribué à Galien, dit la même chofe : Le médimne Attique contient douze hémiectes, l'hémiecte quatre chénices; enforte que le médimne contient fix modios ou hectos, quarante-huit chénices ou quatre-vingt-seize xeftès.

Selon Suidas, le médimne étoit une mefure qui fervoit à mefurer les chofes féches, comme le bled, l'orge: il contenoit fix modios, c'est-à-dire, fix hectos.

Cicéron, dans fes Harangues contre Verrès, réduit le médimne de Sicile à fix modios, c'est-à-dire, à fix hectos, & non pas à fix modius Romains, comme l'ont cru Eifenfchmid & d'autres Savans.

Cornélius-Nepos, dans la Vie de Pomponius-Atticus, expose la même définition du médimne Attique; définition claire, & qui cependant n'a fervi qu'à jetter dans l'erreur les Savans qui y ont eu recours: Nam univerfos (Athenienfes) frumenta donavit (Pomponius), ita ut fingulis fex modii tritici darentur, qui modus menfura medimnus Athenis appellatur. Il n'y a nulle apparence que

Nepos ait voulu dire ici que le médimne valoit fix modius Romains. Les Athéniens avoient leur modios, qu'ils appelloient aussi hectos à caufe qu'il étoit la fixieme partie du médimne; de même qu'ils appelloient hémiectos ou hémihectos la douzieme partie de la même mesure.

Harpocration, dans fon Dictionnaire grec, au mot nμientov, affure que le médimne contenoit quarante-huit chénices, & que le modios, qu'on appelloit euros, contenoit huit chénices.

Le métrétès étoit de foixante - douze xeftès, selon Cléopatre de Munditiis); le Scoliaste de Nicandre affure de même qu'il contenoit foixante-douze xeftès : ὁ μετρητὴς ἔχει ξέσας ἑβδομήκοντα δύο. L'amphoreus étoit la moitié du métrétès & de trente-fix xesiès, fuivant le témoignage du même Cléopatre.

Selon le même Auteur, le chous contenoit fix xeftès ou douze cotyles : ὁ χοῦς ἔχει μέτρῳ μεν κοτύλας Αττικὰς δώδεκα, ξέςας Je 15.

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L'oxybaphe ou oxobathe étoit le quart de la cotyle; c'est ce que nous apprenons de Pline (lib. XXI, cap. XXXIV.): Cùm acetabuli menfura dicitur fignificat hemina quartam partem; & qu'on ne s'imagine pas que Pline parle ici des mefures Romaines il avertit expreffément qu'il s'agit ici des mesures Grecques: Et quoniam in menfuris quoque ac ponderibus, crebrò Græcis nominibus utendum eft, interpretationem eorum femel in hoc loco ponemus.

Le xeftès, qu'on appelloit auffi antléter, aryfter, aryftichos, aritana & anochoè, fe divifoit encore en quatre tétartes ou quarts',' & en douze cyathes, comme le fetier chez les Romains.

Refte encore quatre petites mefures d'ufage dans la médecine, mais fur la valeur defquelles les Auteurs ne s'accordent pas; ce qui vient de ce que ces mesures n'étant particulieres à aucun pays, les Médecins ont eu la liberté de s'en prefcrire la capacité, chacun felon fa commodité & l'ufage qu'il fe propofoit d'en faire en pharmacie. C'est ainsi que les Médecins ont eu leurs poids particuliers dans l'antiquité, & qu'ils en ont encore aujourd'hui. Selon Fannius, la cotyle fe divifoit en quatre oxybaphes, en fix cyathes, en vingt-quatre myftrons, foixante-douze chèmes, & cent quarante-quatre cochléarions. C'eft ce que l'on voit par les vers

fuivans:

At cotyle cyathos bis ternos una receptat.
Sed de abaco id pondus fæpè notatur.

Bis quina hunc faciunt drachmæ, fi appendere tentes.
Oxybaphum fiet, fi quinque addantur ad iftas.
At myftrum cyathi quarta eft: ac tertia myftri,
Quam vocitant chemen; capit hac cochlearia bina.

Il convient de remarquer que le métrétès, le chous ou conge, & le tetarte ne fervoient que pour les liqueurs; que le médimne & la chénice n'étoient d'ufage que pour les grains & les chofes féches; au lieu que le xeftès, la cotyle, l'oxybaphe & le cyathe fervoient également à mefurer les grains & les liqueurs. Examinons à préfent quel rapport avoient ces mefures avec celles de Rome & de Paris.

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Nous avons vu plus haut que Galien, pour s'affurer de la continence de l'hémine, qu'on appelloit à Rome libra ou pondo, parce que ce vafe cylindrique étoit divifé fur fa longueur en douze parties qu'on appelloit unciæ, de la même maniere qu'on divifoit le pied, le jugere, le fetier, &c. également en douze onces, avoit pefé ce qu'elle contenoit d'huile, & avoit trouvé que les douze onces mefure ne faifoient que dix onces poids; d'où s'enfuivoit que l'amphore d'huile pefoit quatre-vingts livres, ce que nous avons démontré être exact. Galien voulant de même connoître le port de la cotyle Attique à l'hémine Romaine, remplit d'huile la cotyle, puis verfa ce qu'elle contenoit de cette liqueur dans l'hémine, & remarqua que ce dernier vase n'en étoit rempli que juf qu'à la neuvieme once mefure, ce qui lui donnoit déja le rapport de la cotyle à l'hémine, comme 9 à 12, ou comme 3 à 4; il pefa enfuite l'huile de la cotyle, & lui trouva le poids de fept onces & demie, ce qui donnoit le rapport de la cotyle à l'hémine, comme 7 à 10, ou comme 3 à 4. Siquidem heras (dit - il) (de Med. comp. per gen. lib. V, c. Vİ.) centum octoginta denarios fuit, in pondus non menfuram oleum reducens, tanquam hemina denarios fexaginta pendente. Nam Attica novem Italicas uncias (menfurales) conficit. Pendent enim novem Italicæ unciæ quas in cornibus infectis metiuntur, feptem uncias ponderales & femiffem, quæ fexaginta denarios fiunt, fingulis unciis octo denarios recipientibus.

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Nous prouverons dans la fuite que la livre Romaine étoit compofée du poids de quatre-vingt-fuize deniers, de ceux qui furent frappés fous les Empereurs, de quatre-vingt-quatre de ceux qui furent frappés fous les Confuls, & de foixante- quinze drachmes Attiques: fur ce pied l'hémine d'huile, étant de dix onces poids,

pefoit foixante-deux drachmes Attiques & demie, foixante-dix deniers Confulaires, & quatre-vingts deniers de ceux que firent frapper les Empereurs ; & la cotyle Attique étant du poids de fept onces & demie en huile, pefoit quarante-fix drachmes Attiques & fept huitiemes, cinquante-deux deniers Confulaires & demi, & foixante Impériaux. Or je trouve dans le manuscrit Grec déja allégué, & numeroté 3284 à la Bibliothéque du Roi, que le chous qui eft une mesure des Athéniens, eft compofé de douze cotyles Attiques & du poids de 720 drachmes, c'est-à-dire, de 720 deniers Impériaux : ὁ δὲ χοῦς ἐςὶ μέτρον Αττικὸν, κοτύλαι Αττικάι 16 ́. sadμoû dè dyes óñna's fx. Divifant 720 par 12, nous trouverons 60 deniers pour le poids de la cotyle, comme l'avoit obfervé Galien. Le xeftès, ajoute le même Auteur, eft de cent vingt drachmes, & de la continence de deux cotyles: de Eins METPOÚμEVOS isi xɔruλa' B'. Tadμsî dè óλnaj px'. Divifant 120 par 2, vient 60 deniers pour la cotyle. Ailleurs l'Auteur, après avoir dit que la cotyle Attique s'appelle auffi Tryblion, qu'elle contient quatre oxobathes ou fix cyathes, ajoute que le cyathe pefe huit drachmes : ὁ δὲ κυάθος ἔχει κοτύλης ἕκτον, ὁλκας ή ; ces huit drachmes font des drachmes Attiques, lefquelles multipliées par 6, donnent 48 pour le poids de la cotyle. Dans ce calcul du poids du cyathe, on a compté huit drachmes préférablement à 72, pour éviter la fraction. Cléopatre (de Munditiis) dit que le cyathe eft du poids de dix drachmes ou d'une once & un quart; que la cotyle eft de la continence de fix cyathes, & du poids de foixante drachmes ou de fept onces & demie; que le xeftès contient deux cotyles, & eft du poids de cent vingt drachmes. Selon Diofcoride (de Pond. & Menf.), le cyathe eft de dix drachmes, & le xeftès de cent vingt. Fannius dit la même chose dans les vers suivans:

At cotyle cyathos bis ternos una receptat,

Bis quina hunc faciunt drachme, fi appendere tentes.

Pline, à l'endroit que nous avons déja cité, dit que le cyathe pefe dix drachmes, & que l'oxybaphe, que les Romains appelloient acétabule, étoit le quart de la cotyle & du poids de quinze drachmes: Cyathus pendet per fe drachmas X. cum acetabuli menfura dicitur, fignificat heminæ quartam partem, id eft, drachmas XV. Jobferve feulement fur ce paffage que Pline a traduit du grec, qu'il

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