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remede permis. Si, au contraire, les efpeces étoient taillées au-deffus du poids de 4608 grains, enforte que le poids de 30 louis, ou des 8 écus fût de 4609 grains ou plus; dans ce cas il y auroit forçage de poids, & les pieces feroient au-deffus du poids prescrit l'Ordonnance. Lorfque cela arrive, par la faute, fans doute, des ajufteurs ou taillereffes, c'eft toujours au détriment & à la perte du Directeur. On exige, comme on voit, une grande exactitude dans la taille des groffes efpeces, & beaucoup d'égalité entre leurs poids. Les louis qui peferoient plus de 1533 ou moins de 153 grains; & les écus qui peferoient plus de 555 ou moins de 550 grains, feroient rebutés par les Juges-Gardes, qui le font remettre en fonte, aux dépens des Directeurs, lorfqu'ils font trop forts ou trop foibles, relativement à la portion du marc que chacune de ces pieces peut repréfenter au plus ou au moins. Ĉes pieces font donc pefées non conjointement & par piles de 30 pour les louis, & de 8 pour les écus, ce qui feroit le poids du marc, mais chacune féparément, contre le poids dénéral ou de fierton; & voilà ce qu'expriment les Edits, qui portent que les pieces feront de recours du marc à la piece, & de la piece au marc. On doit con→ clure de ce raifonnement, que pour faire des calculs fur les monnoies, d'après un principe certain, il faudroit fuppofer les louis & les écus taillés entre le plus fort & le moindre poids qu'ils peuvent avoir fuivant l'Edit; savoir, fur le pied de 4600 grains, pour le poids de trente louis, & fur le pied de 4590 grains pour 8 écus.

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Les autres monnoies de moindre importance ne font point fujettes à tant de précision; on les taille le plus également qu'il eft poffible; mais elles font reçues dans les Jugemens, pourvu que la moindre ou la plus grande quantité qui s'en peut fabriquer dans un marc fuivant l'Edit, pefe le marc. Ainfi les pieces de deux fous font admifes, lorfque 112, 113, 114, 115 & 116 pesent un marc. Si les 111 on 117 faifoient le marc, on en rejetteroit quelques-unes. Les 112 ou 116 pieces peuvent donc varier confidérablement entr'elles, en obfervant toutefois que le nombre de pieces plus légeres doit être compenfé par un nombre de pieces plus pefantes; c'eft ce que fignifient les mots Sans recours du marc à la piece, & de la piece au marc.

Voyons les remedes de loi. L'or pour la monnoie doit être au titre de 22 karats, mais l'Ordonnance accorde 12 trente-deuxiemes

de remede, par conféquent le Monnoyeur fera encore en regle, lorfque les louis ne feront qu'au titre de 21 karats 20 trente-deuxiemes; de même l'argent, pour les groffes pieces, doit être travaillé à la monnoie, fur le pied de 11 deniers de fin, mais le Roi permet 3 grains de remede fur le titre, d'où il fuit que les écus feront fuffifamment du titre légitime, quoiqu'ils ne foient qu'au titre de 10 deniers 21 grains. Quand les efpeces fabriquées fe trouvent dans le remede permis par l'Ordonnance, cela s'appelle Echarfeté de loi dans le remede, & dans ce cas le Directeur eft obligé de tenir compte au Roi de cette écharfeté. Mais fi l'écharseté se trouve au-deffous du remede permis, c'est-à-dire, audessous de 21 karats 20 trente-deuxiemes pour l'or, & de 10 deniers 21 grains pour l'argent, cela s'appelle Echarfeté hors du remede; & dans ce cas le Directeur eft condamné à payer au Roi les fommes ordonnées pour la reftitution de cette écharfeté, fi elle est légere, & il eft auffi condamné à l'amende : que fi l'écharfeté eft trop audeffous du remede, il eft des punitions plus rigoureuses, ainsi qu'il eft porté par l'Ordonnance de 1586. Echarfeter, c'est tromper le Roi & l'Etat. Echars fignifie foible. On dit qu'une monnoie eft échars hors du remede, lorfqu'elles eft au-deffous du degré de fin qu'elle devroit avoir; mais elle eft échars dans le remede, lorfqu'elle eft au- deffus. On dit qu'un écu eft échars dans le remede ou hors du remede. Le terme d'écharseté étoit inconnu aux Anciens, parce qu'ils travailloient fur le fin, & employoient les matieres dans tout l'état de pureté qu'il eft poffible de leur procurer. L'invention de l'écharfeté eft née de l'affoibliffement des monnoies, dans le temps où l'on a commencé à en régler le titre à un certain degré. Quand le Monnoyeur approche extrêmement du remede tout entier, fans néanmoins l'excéder, cela s'appelle : Chatouiller le remede. Si le Maître de la Monnoie fe trouve avoir excédé le titre prefcrit par l'Ordonnance, favoir ici 22 karats pour l'or, & deniers pour l'argent, ce que l'effayeur trouve de plus au-deffus du titre eft nommé Largeffe, par l'Ordonnance de 1554, & par celle de 1686, qui oblige les Juges-Gardes d'avertir le Maître qu'il ne lui fera tenu aucun compte pour cette largesse, ni pour la refonte qui fera faite de ces pieces avant qu'elles foient expofées dans le commerce. Largeffe eft, comme on voit, par rapport au titre, ce qu'eft forçage par rapport au poids. Au furplus, nous pourrions inférer de cette inftruction, que

pour établir une base solide de nos calculs, il faudroit fuppofer le titre moyen de l'or ouvré en monnoies, de 21 karats 26 trentedeuxiemes, & celui de l'argent monnoyé de 10 deniers 22 grains, & il ne nous refteroit plus dans ce cas qu'à expofer, d'après ces principes, les valeurs du marc d'or & d'argent fin monnoyés, fuivant qu'on auroit égard aux remedes, ou qu'on n'y auroit point égard; les voici : Pour l'Argent.

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2895120 log. 785. 5- liv. Marc d'or fin fans égard pour les re

2895827 log. 786.7+ liv.

medes.

le même en déduifant la moitié du remede de poids.

même en déduifant la moitié du remede de loi.

2898838 log. 792. 2 = liv.

le

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le

même en déduisant la moitié des remedes de poids & de loi.

2904003 log. 801.7

liv. le même en rabattant la totalité des

remedes de poids & de loi.

Si des produits précédens on retranche le prix du marc de fin non ouvré, qui eft pour l'argent de 51 livres 3 fous 3 deniers, & pour l'or de 740 liv. 9 fous 1 denier, on trouvera la traite de l'argent de 2 livres 3 fous 4 deniers, & celle de l'or de 45 liv. o fous 11 deniers pour marc, dans le cas où l'on négligera de faire entrer en compte les remedes de poids & de loi; & fi on les comprend en entier, la traite du marc d'argent fin fera de 4 liv.

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4 fous deniers, & celle du marc d'or fin de 61 livres 5 fous. Mais il paroît d'une juftesse plus rigoureusement exacte de prendre une traite moyenne, en déduisant le marc de fin non ouvré, du marc de fin monnoyé, dans lequel on n'a compris que la moitié des remedes de poids & de loi, & fur ce pied, la traite du marc d'argent fin n'eft que de 3 livres 13 fous 8 deniers, ce qui fait un peu plus de la quinzieme partie de la valeur intrinfeque du marc, favoir 14. 83; & la traite du marc d'or fin n'eft de que

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liv.

o fous 11 den. environ; ce qui revient auffi à un peu plus de la quinzieme partie de la valeur intrinfeque du marc, favoir 14. 96. Suivant M. D. J. dans le Dictionnaire Encyclopédique (au mot Rendage), le rendage d'un marc d'or feroit aujourd'hui de 10 livres 10 fous, favoir, 7 livres 10 fous pour le feigneuriage, & 3 livres pour le braffage; & le rendage d'un marc d'argent de 28 fous, favoir, 10 fous, pour le feigneuriage, & 18 fous pour le brassage; d'où il fuivroit que les remedes de poids & de loi produiroient au Roi par marc d'argent fin 2 livres fous 3 deniers, & par marc d'or fin 42 livres to fous 11 deniers. Mais cela ne peut être, car l'épargne de la moitié des remedes de poids & de loi, ne produit fur un marc d'argent fin que 10 fous 10 deniers environ d'augmentation & fur un marc d'or fin que 8 livres, d'où il fuit que le rendage pour un marc d'argent fin eft néceffairement de 3 livres 2 fous 1 deniers, & pour un marc d'or fin de 45 livres o fous 11 deniers : ou bien les Auteurs que j'ai fuivi m'ont trompé dans les définitions des mots rendage & traite.

argent

Il nous reste à donner une idée de la maniere de faire la traite dans le fyftême des monnoies 1o, 2o, 12°, 24e, &c. C'est ce que nous allons faire par deux exemples. La monnoie dix-huitieme, mentionnée au deuxieme article de l'Avis préfenté à Philippe le Bel, par les Généraux de Monnoies, eft à 6 deniers de loi, '-le-Roi, à la taille de 14 fous 8 deniers de poids, ayant cours pour 3 deniers tournois piece. Or la monnoie 18e produit 1080 deniers tournois par marc, à 12 deniers de loi, argent-leRoi, d'où il fuit, qu'à 6 deniers de loi, elle n'en produira que la moitié, favoir 540 deniers tournois; trois de ces deniers doivent faire la valeur de la piece; par conféquent il y aura 180 pieces de taille au marc; mais les 14 fous 8 deniers de poids, qui expriment la taille, ne font que 176 deniers ou pieces par marc; c'est que les 4 pieces reftantes étoient retenues à la monnoie pour la traite,

Rrrr

laquelle dans ce cas ne fe montoit qu'à la quarante - cinquieme partie de la valeur du marc monnoyé. La monnoie cinq-centieme du temps du Roi Jean, valoit le marc 125 1. tournois du numéraire courant; cependant ce Prince ne faifoit donner que 120 1. pour marc aux marchands qui portoient les métaux en matiere aux Hôtels des Monnoies, c'eft qu'il retenoit 23 1. pour la traite, ce qui fait entre le cinquieme & le fixieme du prix du marc monnoyé.

Pour connoitre la traite ou l'impofition que le Roi prenoit fur fa monnoie, il faut obferver, que par le mandement qu'il envoyoit aux Généraux Maîtres des Monnoies, il fpécifioit également & le quantjeme de la monnoie, qui exprimoit tacitement la valeur du marc monnoyé, & la taille fictive du même mare, qui exprimoit la fomme qu'il vouloit qu'on donnât du marc hors d'œuvre. Par exemple, la monnoie étant dix-huitieme, le marc d'argent en œuvre ou monnoyé valoit 4 livres to fous; le Roi pouvoit mander qu'on n'en donnât que 4 livres, fon intention étant de retenir 10 fous pour la traite.

Lorfque nos Rois affoibliffoient leurs monnoies par la traite ou le hauffement factice du numéraire de compte, ils cachoient ces affoibliffemens au peuple. On peut en produire pour preuve l'Ordonnance de Philippe de Valois de l'année 1350, par laquelle ayant ordonné qu'on fit des doubles tournois à 2 den. 5 grains de loi, il s'exprime en ces termes, dans fon mandement aux Officiersdes Monnoies: Sur le ferment que vous avez au Roi, tenez cette chofe fecrete le mieux que vous pourrez.. Le Maitre, celuy ou ceux qui font établis par luy à allayer, les fondeurs, tailleurs & effayeurs de ladite Monnoie, que par vous, ne aucun d'eux, les changeurs ne autres en puiffent fçavoir ou fentir aucune chofe; car fi par vous eft fceu, en ferez punis par telle maniere que tous autres y auront exemple.

Quelque temps après le même Roi ayant ordonné qu'on fabriquât des blancs à 4 deniers 12 grains de loi, parle ainfi dans fon mandement : Tenez la chofe fecrete, & fe aucun demande à combien les blancs font de loy, feignez qu'ils font à fix deniers.

Le mandement du mois de Septembre 1351 n'eft pas moins fingulier. Les écus d'or, qu'on faifoit auparavant à 20 karats, furent abaiffés, & on les fit feulement à 18 karats; & pour cacher cet affoibliffement, le Roi fit le mandement suivant: Si vous avez des royaux pour un jour, fi les faites ouvrer & monnoyer ez coins des fers précédans, afin que les marchands ne puiffent appercevoir l'abaisse

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