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espece s'appelloit gros, parce que c'étoit la plus groffe monnoie que l'on fabriquât à Tours dans ce temps-là.

Le parifis ou fou parifis valoit un fou tournois & un quart; par conféquent le parisis du temps de S. Louis vaudroit de notre monnoie actuelle 22 fous 6 deniers.

La livre tournois, appellée auffi franc, depuis que le Roi Jean fit faire, en 1360, des francs d'or qui valoient une livre ou 20 fous, valoit comme à préfent 20 fous tournois. Charlemagne, comme nous l'avons déja dit ailleurs, fut le premier qui introduisit l'ufage de compter la monnoie par livres, fous & deniers. Pour fe former une idée juste de la maniere dont le numéraire s'est établi, il faut fe rappeller que fous la premiere & la feconde race de nos Rois, on ne fe fervoit point pour pefer l'or & l'argent, du poids de marc, mais de la livre pondérale des anciens Romains. Pepin, au commencement de fon regne, ordonna qu'on tailleroit 22 fous d'argent dans le poids de cette livre. Les métaux précieux étant devenus plus abondans en France par les conquêtes de Charlemagne, ce Prince fit faire des fous d'argent plus pefans; ils étoient à la taille de 20 pour une livre d'argent, & cette livre, également établie par Charlemagne, fut alors plus grande que la livre Romaine, puifqu'elle valoit 12 onces de notre poids de marc actuel. Vingt des fous de Charlemagne contenoient le poids d'une livre d'argent, ou de 12 onces poids de marc; & depuis ce tempslà on s'est toujours fervi en France du mot livre, quand on a voulu exprimer une fomme de 20 fous. Voilà comment la livre de compte a été introduite, & l'on voit par-là qu'elle doit fon origine à la livre de poids, & qu'elles étoient toutes deux de même valeur dans leur commencement, puifque les 20 fous d'argent, dont est compofée la livre de compte, pefoient alors une livre ou 12 onces. Suivant un Réglement de Charlemagne, fait à Francfort l'an 794, fes monnoies étoient d'argent fin; mais en ne calculant que fur l'argent à 11 deniers 12 grains, qui eft l'argent-le-Roi, nous trouvons que la livre d'argent du poids de 12 de nos onces vaut 78 livres 17 fous de notre monnoie actuelle; que le fou de ce temps-là valoit 3 liv. 18 fous 10 den., & le denier 6 fous 6 !! deniers.

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Depuis Charlemagne jusqu'à Philippe I, les fous furent d'argent, & les 20 peferent prefque toujours une livre poids ou approchant; mais dans la furte les fous ayant beaucoup diminué de

leur poids, on n'en continua pas moins de fe fervir toujours du terme de livre, pour exprimer une fomme de 20 fous, quoiqu'ils ne pefaffent plus une livre d'argent. Enfin l'affoibliffement de la livre numéraire a été porté au point, que fi un homme avoit emprunté, fous le regne de Charlemagne, une fomme de 100 liv., fa famille, fi elle exiftoit, ne s'acquitteroit aujourd'hui qu'en donnant 7885 livres; & encore qu'un particulier qui, l'an 800, avoit 1000 livres de revenu, étoit auffi riche, en ne confidérant que la valeur du numéraire, que celui qui parmi nous jouit de 78850 livres de rente.

Sous S. Louis, la livre numéraire valoit 20 fous appellés gros tournois, ou 240 deniers appellés petits tournois, & 18 livres de notre monnoie préfente.

La livre parifis valoit une livre tournois & un quart; elle reviendroit à 22 livres 10 fous de notre monnoie, fur le pied de celle de S. Louis. La livre parisis fe divifoit en 20 fous, ou 240 deniers parisis, mais elle contenoit 25 fous, ou 300 deniers tournois.

On prouve par un titre de l'an 1068, du Jeudi après la Converfion de S. Paul, lequel eft une donation faite à la Confrairie des Clercs de Pontoife; par un autre titre de S. Denis, de l'an 1060, qui étoit la premiere année du regne de Philippe I; par un autre titre de S. Cyprien de Poitiers daté de l'an 1105, fur la fin du même regne, que c'eft fous ce Prince, ou même fous les regnes précédens, que la diftinction de la monnoie tournois & de la monnoie parifis, qui étoit celle des Comtes de Paris, a commencé à avoir lieu. On verra mieux que par le difcours, les rapports de toutes ces monnoies de compte entr'elles, à l'infpection de l'abaque fuivant.

Pite, picte, poitevine, pougeoife, Pogefia Turonenfis.

1 Pite parifis, pite bourgeois.

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21 Maille ou obole parifis, maille ou obole bourgeois.
3 1/2 2 1 Denier tournois, petit tournois.

4 2 | 2 | 1 | Denier parisis, petit parifis, bourgeois.

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10

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Double, double tournois, Royal double tournois.

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Doub. par., Royal doub. par., doub. & fort bourgeois.
Hardi, liard, blanc.

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960 768480 384 240 192 120 96 80 60 40 20 16 Livre tournois, franc;

1200/960600480|300|240|150|1201007550:25

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Livre parifis. Toutes ces monnoies ont été des efpeces réelles, chacune dans leur temps, & dans d'autres temps n'ont été que numéraires & de compte. Par l'Ordonnance de Philippe le Bel, du mois de Juillet 1313, il eft fait défenfes à tous de ne faire achats & payemens de marchandises ou aucuns contrats, finon à fous & livres tournois, & au parifis. Cette Ordonnance fut depuis confirmée par celles des années 1343 & 1347.

Mais Henri III ordonna, par Edit du mois de Septembre 1577, que tous les comptes feroient faits par écus d'or fol, qu'il évalua à 60 fous piece, & que tous actes & contrats feroient faits dreffés & conçus en écus d'or, lefquels néanmoins pourroient être payés en toute forte d'efpeces d'argent & de billon ayant cours. Cet Edit ne fut exécuté que jufqu'au mois de Septembre 1602, à caufe des grands inconvéniens qui en étoient arrivés, & qui obligerent Henri IV d'abroger cette maniere de compte par écus d'or fol, & de rétablir l'ancienne maniere de compter par fous & par livres parifis & tournois,

Enfin le numéraire par parifis & tournois a été abrogé par l'Or donnance du mois d'Avril 1667, par laquelle Louis XIV ordonna qu'à l'avenir les fommes feroient exprimées dans les Jugemens, conventions & autres actes, par deniers, fous & livres, & non par parifis ou tournois.

On fe fert néanmoins encore aujourd'hui du terme de parifis dans les Ordonnances des Aides, pour exprimer un quart en fus du droit porté par ces Ordonnances; fouvent il y eft fait mention du parifis, fol & fix deniers pour livre. Pour évaluer le droit ainsi énoncé, on en prend le quart pour le parifis, puis on l'y ajoute; enfuite on prend le vingtieme de cette fomme pour le fol, & on l'y ajoute de même; enfin on prend le quarantieme de cette nouvelle fomme pour les fix deniers, & on l'y ajoute encore. Par exemple, foit un droit de 4 liv. =a, à percevoir fur une marchandise quelconque, le parisis sera exprimé par 7, le sou pour

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droit principal avec le parisis, fol & fix deniers, reviendra en

total à

13797a
10256

5 liv. 7 f. 7 den.

289 641

On fe fert encore auffi quelquefois du terme d'or fol pour évaluer & calculer les monnoies de France dans les remifes qu'on en fait pour les pays étrangers, ce qui triple la fomme que l'on remet; ainfi quand on dit qu'on a 450 liv. 15 f. 6 d. d'or fol à remettre à Amsterdam à 86 deniers de gros par écu, on fous-entend qu'on a 1352 liv. 6 f. 6 d. monnoie courante, la livre d'or valant 3 liv. tournois, le fou d'or 3 f., & le denier d'or 3 deniers. Ecu fe doit toujours entendre de l'écu d'or avant l'an 1641.

Il eft encore néceffaire pour se reconnoître dans les antiquités de la Monarchie Françoise, relativement aux époques de la fabrication & du cours des monnoies, de favoir que le commencement de l'année civile n'a pas toujours été fixé au même jour de l'année astronomique, & que même on n'a pas toujours compté le nombre des années de la même ére, confacrée dans l'hiftoire par quelque événement remarquable.

L'on a fait ufage en France de quatre éres ou époques, d'où l'on eft parti pour compter les années de J. C.; celle de fa naiffance fuivant le ftyle de Denis le Petit, qui eft la nôtre actuelle;

celle

celle de fa naissance fuivant la vérité évangélique, & celles de fa paffion, de fa mort, ou de la Rédemption, felon ces deux ftyles. Gervais, Moine de Cantorbéri, qui vivoit au commencement du treizieme fiecle, met dans fa Chronique une distinction entre les années de l'Incarnation, felon Denis le Petit, & les mêmes années felon l'Evangile. Il dit que, felon la vérité de l'Evangile, il faut ajouter 22 ans au calcul de cet Auteur, pour trouver la véritable année de l'Incarnation. Marianus Scotus, Florent Bravonius Moine de Vorcefter, & quelques autres Chroniqueurs, ont été du même sentiment. On trouve cette même diftinction dans un refcrit du Pape Urbain II; mais, fuivant la date de ce refcrit, il faut ajouter 23 au calcul de Denis le Petit, pour avoir l'année felon la vérité de l'Evangile. Hélinand Moine de Fontfroide, Ecrivain de la fin du douzieme fiecle, n'anticipe que de vingt-un ans l'Ere de Denis le Petit.

A l'égard de l'époque de la Paffion, elle dépend de l'âge que l'on croit qu'avoit J. C. lorfqu'il fut mis à mort; les uns ont fuppofé qu'il avoit 32 ans, d'autres 33, & quelques-uns jusqu'à 34 ans, lorfqu'il fut crucifié, & ont calculé en conféquence.

Suivant le style de Denis le Petit, nous fommes cette année à l'an 1778 de la naiffance de J. C., & felon la vérité évangélique nous fommes à l'an 1799 fuivant quelques-uns, à l'an 1800 felon d'autres, & fuivant d'autres encore à l'an 1801 de la naiffance de J. C. Cette même année que nous comptons pour la 1778° depuis la naiffance de J. C., fera la 1744°, la 1745 ou la 1746 depuis sa passion ou fa mort, fuivant qu'on admettra que J. C. a vécu 32, 33 ou 34 ans, le tout fuivant le ftyle de Denis le Petit; mais en calculant felon le ftyle appellé de la vérité évangélique, on trouvera que nous fommes à l'an 1765, 1766, 1767, 1768 ou 1769 depuis fa mort, suivant la diverfité des opinions qui font abfolument partagées_tant fur le nombre des années qu'il faut ajouter au calcul de Denis le Petit pour avoir les années de la naiffance du Sauveur felon la vérité évangélique, que fur l'âge qu'il avoit quand il fut mis à mort.

Tant de ftyles divers fuivis à-la-fois & felon le caprice ou l'opinion des Ecrivains dans un même pays, étoient bien propres à répandre de la confufion fur la Chronique de la France; auffi n'eft-elle devenue lumineufe que depuis la fixation générale du commencement de l'année comptée de la naiffance de Jefus-Chrift, Tttt

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