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de Grégoire XIII, et sous celui de Sixte-Quint ensuite, quelques-uns des Evêques auxquels Pie IV avait délégué cette faculté, étant venus à mourir, on mit en question si elle avait été accordée au Siège épiscopal ou aux personnes; dans le premier cas, elle devait passer à leurs successeurs; dans le second, elle s'éteignait avec la vie des personnes. Ce dernier sentiment fut adopté; de sorte que personne ne pouvait plus user de cette faculté, si ce n'est les Prêtres à qui les Evêques l'avaient communiquée avant de mourir. Tel fut le résultat de cette longue et fameuse question, par où l'on voit combien furent trompeuses les espérances du grand bien qu'on attendait, en sollicitant à Rome certaines dispenses insolites » (1). S'il n'y avait pas eu des malheurs à l'occasion de cette question, on aurait pû dire, que c'était une querelle d'Allemand suscitée à l'Eglise. Car déjà le Concile de Trente avait condamné l'erreur de ceux qui avaient nié, que Jésus-Christ fut tout entier sous l'une ou l'autre Espèce. « Si quelqu'un nie, avait-il dit, que dans le vénérable Sacrement de l'Eucharistie, Jésus-Christ tout entier soit contenu sous chaque Espèce, ou sous chacune des parties de chaque Espèce, après la séparation qu'il soit anathème » (2).

Cependant cette controverse avait tellement agité les esprits, que des Conciles provinciaux crurent devoir permettre l'ancien usage dont nous avons parlé, et faire présenter du vin non consacré aux fidèles, aussitôt après leur Communion, pour se purifier la bouche, comme nous le trouvons dans les Conciles d'Aix de l'an 1585 (3), de Toulouse de l'an 1590, et de Narbonne de l'an 1609. D'autres Conciles, au contraire, défendirent cet usage: c'est ce que l'on voit dans le Ier Concile de Milan, sous S. Charles (4) prohibition a été adoptée ensuite dans tous les diocèses.

cette

(1) Hist. du Conc. de Trente par Pallav. tom. 3, liv. 24, ch. 12, n. 8, pag. 700, Ed. Paris 1844.

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distribution et la réception de l'Eucharistie.

Mais en éloignant les accidents de l'Espèce du vin, il est aussi né- Discipline pour la cessaire d'éviter ceux qui pourraient survenir dans la distribution de la Communion sous l'Espèce du pain. Le Prêtre doit prendre garde de ne pas laisser tomber la sainte Hostie, ni aucune parcelle, quelque petite qu'elle soit, et les fidèles de leur côté doivent faire ensorte de ne pas occasionner cet accident ils l'éviteront en tenant la tête droite, ouvrant la bouche, et avançant la langue, de manière à recevoir convenablement la sainte Eucharistie. Si par cas l'Hostie venait à tomber, le Prètre s'empresserait aussitôt de la prendre avec la patène, comme le Prêtre Beatus, et Etherius son disciple, Evêque d'Osma, le faisaient observer dans le vire siècle, en réfutant Elipand: leurs paroles nous font bien connaître la foi de l'Eglise. «Si une petite particule, Micula, disaient-ils, vient à tomber de la main du Prêtre à terre, tous éprouveront un sentiment d'effroi, omnes contremiscent, et se retireront du lieu où elle est tombée; on la cherche avec soin, pour la placer sur la patène, parce que l'Eucharistie est le Corps de Jésus-Christ » (1). Il faut exiger que les communiants tiennent entre les mains le pan de la nappe, adoptée pour cet usage, et que le Servant ou clerc accompagne le Prètre pendant cette action, avec un flambeau allumé, comme il est indiqué dans les Conciles d'Aix de 1585, de Narbonne de 1609, etc. (2).

C'est dans le Lieu Saint que l'Eucharistie doit être conservée et distribuée ensuite pendant la Messe: il est permis cependant de faire autrement dans un cas de nécessité. Dans les premiers siècles, la discipline était de ne célébrer qu'une seule Messe dans chaque Eglise. Tous les fidèles ne pouvaient pas y assister; et comme leur dévotion pour la Communion était grande, les Evèques consentaient à la leur faire apporter chez eux par des Diacres; c'est ce que nous lisons dans l'Apologie de S. Justin (3). Il semble que Tertullien indique la même discipline dans le II Livre à sa femme voulant la détourner de se marier après sa mort à un païen, il lui expose les inconvé

(1) Patrol. tom. xcvi, Ether et Beat. ad Elip. lib. 1 n. 97, pag. 954, Ed. Paris 1851.

(2) Conc. Labb. tom. xv, pag. 1130, 1591,

(3) Apol. I, n. 65, pag. 83, Ed. Paris 1742.

nients qui résultent d'une semblable alliance pour une femme chrétienne relativement à l'Eucharistie: «Déroberez-vous à ses regards, dit-il, ce que vous prenez en secrét avant toute nourriture? S'il vient à découvrir que c'est du pain, ne supposera-t-il pas que c'est ce pain dont on a fait tant de bruit? Et comme il n'en sait rien, pourrat-il rester dans l'indifférence, et ne sera-t-il pas dans des alarmes et dans des soupçons, si c'est du pain ou du poison » (1) ? S. Cyprien, dans son Livre des Tombés, de Lapsis, fait aussi mention de cette coutume. Cette discipline était évidemment avantageuse dans les temps de persécution; mais elle fut supprimée dans la suite, et continua seulement pour les malades. Les Diacres furent d'abord chargés d'ap-. porter l'Eucharistie dans les maisons des fidèles, pour leur administrer la Communion; dans quelques Eglises cependant cette fonction était réservée aux Prêtres; à Nimes, dans le XIIIe siècle, ils pouvaient encore le faire avec la permission de l'Evêque, et même sans cette permission, lorsque le Prêtre de la paroisse était absent ou empêché, et que l'état du malade réclamait ce secours de la Religion. Présentement les Diacres ne peuvent plus remplir cette fonction.

Mais est-il permis de donner la Communion hors le temps de la Messe? L'esprit de l'Eglise est que les fidèles la reçoivent après celle du Prêtre, selon la fin du sacrifice; cependant on peut la donner avant ou après, lorsqu'il y a une raison légitime, telle que l'incommodité qui en résulterait pour une personne infirme ou indisposée; c'est ce que nous trouvons dans le ve Concile de Milan sous S. Charles. Si le Prêtre, y est-il dit, donne la Communion aussitôt après la Messe, il doit le faire, après avoir déposé la chasuble et le manipule, mais en conservant l'Aube et l'Etole du jour; s'il la donnait dans un autre temps, dit le même Concile, il devrait le faire en surplis avec l'Etole blanche, ou l'Etole rouge, s'il suit le Rite ambrosien (2). Le Concile d'Aix, tenu en 1585, prescrit la même chose; seulement il n'exige pas qu'il dépose la chasuble et le manipule (3).

(1) Patrol. tom. 1, Tertul. lib. 2 ad Uxor. cap. 2, pag. 1296. (2) Concil. Labb. tom. xv, Conc. Med. v, pag, 587 et seq.

(3) Ibid. Conc. Aquen. pag. 1130.

Le renouvellement des Saintes Espèces doit avoir lieu à des temps déterminés; car c'est un soin que Jésus-Christ a voulu laisser à l'amour et à la foi de ses Ministres. La substance du pain et du vin est changée au Corps et au Sang de Jésus-Christ par une véritable transubstantiation, comme nous l'avons dit: il n'y reste que les apparences ou les accidents, qui produisent cependant les mêmes effets que la substance même ; le fils unique de Dieu a donc voulu demeurer dans le Sacrement de l'Eucharistie, caché sous les voiles des Espèces, et y rester tant qu'elles seraient dans leur état ordinaire. Mais il faut dire aussi, qu'il fait cesser sa présence, dès qu'elles viennent à s'altérer; c'est cette altération que les Prêtres doivent éloigner avec le plus grand soin par le renouvellement des Espèces sacrées: aussi l'Eglise dans sa sollicitude s'est empressée de le prescrire. Il doit être fait dans un temps plus ou moins rapproché, selon la position des lieux et leur température. Réginon demandait qu'il se fit tous les trois jours (1). Le Concile de Bourges de l'an 1031 ordonne de le faire tous les dimanches (2). Dans les anciennes coutumes de Cluny, écrites vers le même temps par Udalric, il y est dit qu'il fallait tous les dimanches consacrer de nouvelles hosties et consommer les anciennes (3). Le Concile de Rouen de l'an 1072 (4); celui de Londres de 1200 (5); et le Synode de Nimes de 1284 (6), indiquent la même chose. Il est cependant des diocèses, où ce renouvellement n'est prescrit que tous les quinze jours; dans d'autres, tous les mois (7). Lorsque les Eglises sont humides, il est à propos de renouveler plus souvent.

(1) Patrol. tom. cxxxi, pag. 206.

(2) Ut Corpus Domini non plus servetur,quam a dominicâ in alteram. Conc. Labb. tom. Ix. can. 2, pag. 865.

(3) Patrol. tom. CXLIX, Antiq. Consuet. lib. 2, cap. 30, pag. 722.

(4) Conc. Labb. tom. ix, Conc. Rotom. can. 6, pag. 1226, Edit. Paris 1671.

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(7) Dans le diocèse de Nimes, le Synode de 1835 donne quinze jours et tout au plus un mois.

QUATRIÈME QUESTION.

Y a-t-il obligation pour les chrétiens de recevoir la Sainte Eucharistie; dans quel temps et dans quel lieu doivent-ils y satisfaire; et que faut-il penser de la fréquente communion?

Nature de cette obligation.

La question ne saurait être plus pratique; nous allons répondre aux diverses parties qu'elle renferme, par autant d'articles.

ARTICLE PREMIER.

DE L'OBLIGATION DE COMMUNIER.

Pour apprécier la nature du devoir de communier, une distinction est nécessaire. L'obligation de faire une chose est absolue, ou simplement relative. Dans le premier sens elle est prescrite comme moyen de salut, et l'impossibilité d'y satisfaire n'en fait pas cesser les conséquences. Dans le second sens, elle n'est autre chose qu'un précepte positif, et lorsqu'il n'y a pas possibilité de le remplir, il n'en `résulte aucune faute. L'obligation absolue existe pour le Baptême, comme nous l'avons déjà vu; mais non pas pour l'Eucharistie, selon l'enseignement de l'Eglise. Dans les premiers siècles, des chrétiens regardèrent la réception de l'Eucharistie comme un devoir rigoureux pour le salut; c'est pourquoi lorsque quelqu'un venait à décéder sans avoir pu le remplir, on ne laissait pas de lui donner l'Eucharistie, même après sa mort. Le e Concile de Carthage, de l'an 397, s'empressa de défendre une chose semblable, donnant pour motif que Jésus-Christ a dit : « Prenez et mangez » ce que les morts ne peuvent faire (1). Dans le vir siècle, le Concile de Constantinople in Trullo renouvela cette défense pour les Eglises orientales (2).

(1) Concil. Labb. tom. 11, Conc. Carth. 3, can. 6, pag. 1168.

(2) Ibid. tom. vi, can. 83, pag. 1177.

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