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cœur, il fait plus que s'il domptoit l'univers, il se dompte lui-même. Plus grand que le monde entier, il méprise tout ce que le monde estime, il en jouit sans attache, il le perd sans regret, parce qu'il ne le considère point comme sa fin. Grand jusques dans le sein de l'humilité la plus profonde, il aime à n'avoir pour témoins de ses vertus que les regards du souverain Juge, il souffre sans vouloir qu'on le plaigne, il fait les plus grandes choses sans s'en apercevoir. Indulgent pour les autres, il n'envisage d'un œil sévère que ses propres foiblesses. Il se voit tel qu'il est, homme et pécheur ; et comme tel, il descend dans l'abîme de son néant; mais il y trouve son Dieu qui, ami des humbles, l'élève jusqu'à lui.

Mondains entêtés jusqu'ici d'une vaine et fausse grandeur, avouez donc enfin que la grandeur réelle est celle qui se trouve dans les vertus chrétiennes, dans la conformité avec J. C.; avouez que le sentier du véritable honneur est celui qu'un homme Dieu nous a tracé, et que la vraie gloire est de suivre le Seigneur.

Ne nous vantez plus vos héros. Ils n'offrent à nos yeux que des qualités mensongères; souvent plus propres à faire le malheur du genre humain qu'à le rendre heureux, plus ressemblantes à l'enflure, à l'orgueil, qu'à l'amour dé

réglé de soi-même et à la bienveillance envers les hommes, plus faites pour en imposer à une multitude séduite par le préjugé que pour s'attirer l'estime de ceux qui savent discerner le vrai mérite et la solide grandeur.

Cessez de nous vanter encore vos digni➡ tés, vos noms et vos titres; pour apprécier ces avantages frivoles, suivez moi jusqu'au tombeau de ceux qui les ont possédé avant vous. Levez ce marbre qu'on a orné d'inscriptions magnifiques, et près duquel on a érigé des trophées en leur honneur. Que couvre-t-il? des cendres !... voilà tout ce qui reste de ces Grands de la terre; et leur ame infidèle, où est-elle et qu'est-elle devant Dieu ? Que votre esprit s'élève maintenant jusqu'aux Cieux ouvrez vous, portes éternelles, laissez briller à nos yeux un rayon de la gloire des justes, et qu'à cet aspect se dissipent pour toujours les illusions d'un monde qui ne nous a que trop séduit par ses prestiges.

Mais, Seigneur, pour nous détromper et nous instruire, n'est-ce pas assez du Mystère que nous célébrons ? N'est-ce pas auprès de Jésus naissant, qu'après avoir appris à nous abaisser, à nous humilier comme créature et comme pécheur, nous apprenons à nous élever à une grandeur réelle, en nous glorifiant de l'union

32 Sermon pour le jour de Noël. de notre nature avec la nature divine en J. C., de ses mérites et de ses exemples? Il nous falloit un Maître, ô mon Dieu! vous nous l'avez donné ; donnez-nous donc aussi un cœur docile pour l'entendre. Qu'à son exemple nous soyons véritablement humbles ; qu'en lui et par lui nous devenions véritablement grands, afin qu'après lui avoir été unis sur la terre nous partagions sa gloire dans le Ciel. Ainsi soit-il.

POUR

LE JOUR DE L'ÉPIPHANIE

OU DES ROIS.

Vidimus stellam ejus in Oriente, et venimus adorare

eum.

Nous avons vu son étoile en Orient, et nous sommes venus l'adorer.

Mat. c. 2. v. 2.

Quor de plus digne de notre attention, M. F., quoi de plus propre à nous servir d'exemple, que la fidélité avec laquelle les Mages ont suivi les clartés précieuses que Dieu faisoit briller pour eux ? Il s'étoit déjà manifesté lui-même à leur entendement par cette lumière naturelle qui apprend à un esprit attentif à remonter de la créature au Créateur, et qui, en nous faisant considérer ce qu'il y a de visible dans ses ouvrages, nous donne quelque idée des perfections invisibles et non moins réelles d'un premier Etre. C'en étoit assez pour les engager à lui offrir l'encens de nos vœux et de leurs prières, et à se conformer aux lois de sa sagesse dès leur foible raison pou voit les découvrir; mais aussi sages et plus sages sans doute que ceux que l'anti

que

quité païenne a décorés de ce beau nom, ils sentoient le peu d'étendue de cette raison abandonnée à elle-même, et quelques vérités parvenues jusqu'à eux par une tradition que les Israélites captifs avoient autrefois portée en Orient, leur confirmoient le besoin qu'ils avoient d'une révélation plus expresse ajoutée à la loi naturelle, et qui la mit à la portée de tous les esprits, leur apprenoient la né cessité d'un médiateur entre Dieu et les hommes, et leur faisoient attendre avec impatience le moment où paroîtroit l'étuile de Jacob que Daniel et tant d'autres Prophètes avoient annoncée. A peine l'astre qui devoit les conduire à J. C. l'astre prédit par Balaam s'est-il montré, à peine le flambeau de cette révélation après laquelle ils soupiroient commence-til à luire à leurs yeux, qué déjà ils le suivent avec empressement partout où il doit les conduire, sans s'étonner ni de la critique des fanx sages, ni des fatigues d'une route longue et pénible, ni des dangers qui accompagnent leur entreprise.

Mais ce que je vous prie de remarquer, M. F., c'est que l'étoile semble disparoître quelque temps comme pour les forcer de recourir à l'autorité visible de l'Eglise judaïque, afin d'apprendre d'elle l'endroit où le Messie devoit naître. Cette Eglise

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