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vous êtes déjà avec les justes : venez avec moi : venez à mon trône, dans lequel vous serez assis avec moi (1); car je l'ai promis.

O paroles qu'on ne peut assez méditer! Venez: 'Allez. Taisons-nous tais-toi, ma langue tes expressions sont trop foibles. Mon ame, pèse ces mots qui comprennent tout le bonheur et le malheur; et toute l'idée de l'un et de l'autre : Venez: Allez : Venez à moi, où est tout le bien. Allez loin de moi, où est tout le mal.

Venez, les bénis, les bien-aimés de mon Père: autrefois maudits et haïs des hommes; mais dès-lors bénis de mon père, dont la bénédiction se déclare en ce jour venez posséder le royaume qui vous étoit préparé (2). Venez, petit troupeau : ne craignez plus rien, puisqu'il a plu à votre Père de vous donner son royaume (3). Venez, venez, venez entrez dans la joie de votre Seigneur (4) : jouissez de son royaume éternel. O venez, venez! Quelle parole! quelle joie! quelle douceur ! quel transport!

Un royaume quelle grandeur ! Un royaume préparé de Dieu et de Dieu comme Père : et préparé pour un Fils unique, éternellement bien-aimé; car c'est le même qui est aussi préparé pour les élus: Enfans de dilection et d'élection éternelle; vous avez assez souffert, assez attendu; venez maintenant le posséder. On ne possède que ce qu'on a pour l'éternité : le reste échappe et se perd.

(1) Apoc. 111. 21. — (4) Matth. xxv. 21, 23.

(2) Matth. xxv. 34. (3) Luc. XII. 32.

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XCIV. JOUR.

J'ai eu faim: j'ai eu soif. Nécessité de l'aumône : son mérite et sa récompense. Ibid.

J'AI eu faim: j'ai eu soif: j'ai été nud : j'ai été malade et en prison (1). C'est par la même raison qui lui fait dire; Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu? et; Je suis Jésus que tu persécutes (2): c'est par la société, ou plutôt par l'unité qui est entre le chef et les membres; c'est parce qu'il est le sep, et que nous sommes les branches (3). Mais il faut ici remarquer, que les pauvres sont de tous ses membres, ceux dans lesquels il est le plus.

Tous les pères relèvent ici l'avantage et le mérite de l'aumône, que Jésus-Christ vante tant, et qu'il vante seule dans le siége de sa majesté, dans son dernier jugement; à qui seule il attribue la vie éternelle. Ils démontrent aussi par le même endroit la nécessité de l'aumône; puisque manquer de la faire est un crime, et le seul crime que le juste juge allègue pour la cause de la damnation. Et la raison en est évidente, en ce que

Premièrement; si le précepte de la charité est l'abrégé de la loi et des prophètes, comme il dit lui-même; il étoit juste de renfermer dans la charité toutes les bonnes œuvres, et dans la privation de la charité toutes les mauvaises.

Secondement, comme dit saint Jean Celui qui

(1) Matth. xxv. 35, 36. — (2) Act. IX.

4, 5.. (3) Joan. xv. 1, 5.

n'aime pas son frère qu'il voit, comment aimera-t-il Dieu qu'il ne voit pas (1)? Ainsi la même justice qui l'oblige à punir le monde pour le défaut de la charité, l'oblige aussi à marquer le défaut de la charité dans son effet le plus sensible, qui est la charité envers les frères.

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Troisièmement les deux préceptes de la charité, dans lesquels, comme on vient de dire, consistent la loi et les prophètes, sont renfermés manifestement dans ces paroles : J'ai eu faim: j'ai eu soif: et, Toutes les fois que vous l'avez fait à un de mes frères, vous me l'avez fait à moi-même (2): puisqu'il nous montre par-là que le motif d'exercer la charité envers le prochain, est la charité envers Dieu.

Quatrièmement : tous les péchés sont en quelque sorte renfermés dans le défaut de l'aumône; parce que dans l'aumône étoit renfermé le remède de tous les péchés, conformément à cette parole: Rachetez vos péchés par l'aumône (3). Et encore: La charité couvre la multitude des péchés (4). Et encore: Faites l'aumône, et tout sera pur pour vous (5). Ainsi tous les hommes étant pécheurs, et par-là exclus en rigueur du royaume des cieux, ce qui les en exclut en dernier lieu, c'est de négliger le remède,

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Cinquièmement la vie éternelle nous étant donnée à titre de miséricorde et de grâce, la justice demandoit que cette miséricorde nous fût accordée au prix de la miséricorde; conformément à cette

(1) I. Joan. IV. (4) I. Pet. iv. 8,

20.

.-(2) Matth. xxv. 35, 40.— (3) Dan. 1v. 24. — (5) Luc. xi. 41.

parole Bienheureux les miséricordieux, parce qu'ils obtiendront la miséricorde (1). Et encore: Jugement sans miséricorde à celui qui ne fera pas miséricorde (2).

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Sixièmement. Comme les miséricordes de Dieu éclatent au-dessus de toutes ses œuvres (3), selon ce que dit David ainsi en est-il des miséricordes de l'homme; et les œuvres de miséricorde devoient principalement être célébrées au jugement dernier, comme les plus éclatantes de toutes les autres, et comme celles qui nous rendent le plus semblables à Dieu, conformément à cette parole: Soyez miséricordieux, comme votre Père céleste est miséricordieux (4). Ce qui répond à cette parole: Soyez parfaits, comme votre Père céleste est parfait (5) : ainsi que la conférence des deux passages le fera paroître. Ainsi la perfection où nous devons tendre principalement, et par-là nous rendre semblables, comme le doivent de vrais enfans, à notre Père céleste, est celle d'exercer la miséricorde.

Pour ces raisons, tout est renfermé dans les œuvres de miséricorde et on en pourroit rapporter une infinité d'autres que chacun pourra suppléer.

Il reste donc à s'examiner sur l'obligation de l'aumône; et sans écouter les vaines excuses dont se flatte notre dureté, considérer sérieusement si nous pouvons appaiser véritablement notre conscience sur un point si décisif de notre éternité.

(1) Matth. v. 7.- (2) Jac. 11. 13. - (3) Ps. CXLIV. 9. — (4) Luc. VI. 36. - (5) Matth. v. 48.

XCV. JOUR.

J'ai eu faim, j'ai eu soif, transportés en la personne de Jésus-Christ. Ibid.

SEIGNEUR Jésus, ma vie et mon espérance, je me mets en votre sainte présence, pour voir et considérer dans votre lumière, en foi, et en perpétuelle reconnoissance de vos bontés, comment vous avez transporté en vous nos misères et nos infirmités, jusqu'à pouvoir dire : J'ai eu faim : j'ai eu soif: j'ai été nud, prisonnier, malade, en la personne de tous ceux qui ont eu à souffrir des maux semblables.

Le fondement de ce transport! ô Jésus, c'est l'amour qui vous a porté à prendre notre nature, et à la prendre non point immortelle et saine, comme vous l'aviez faite dans son origine; car vous êtes le Verbe par qui tout a été fait (1); vous êtes celui à qui le Père a dit : faisons l'homme (2): et vous l'avez fait avec lui et avec votre St.-Esprit, qui est avec le Père et avec vous un seul Dieu souverainement parfait. C'est donc vous qui avez fait la nature humaine; et quand vous l'avez prise, vous n'avez pris que votre propre ouvrage. Mais vous ne l'avez pas prise, encore un coup, saine, parfaite, immortelle, et selon l'ame et selon le corps, telle qu'elle étoit d'abord sortie de vos mains. Vous l'avez prise telle que le péché, et votre justice vengeresse l'avoient faite

(1) Joan. 1. 2. (2) Gen. 1. 26.

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