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à combattre; parce qu'on n'est pas long-temps courageux, ni ferme contre soi-même.

Si votre oil, si votre main droite vous scandalise (1), c'est-à-dire, si ces personnes qui vous sont si chères, vous sont une occasion de tomber, séparez-vous-en. Ajoutez, si elles vous font scandaliser votre frère; car tout ce qui le fait tomber, est aussi pour vous une chute semblable à celle d'un homme qu'on jetteroit dans la mer une meule au col (2).

Le troisième enseignement sur cette matière, regarde le mariage, et son indissolubilité. Mais on peut encore porter plus loin ses pensées. Car comme cet indissoluble lien du mariage signifie l'inséparable union de Jésus-Christ avec son Eglise; les ames qui sont entrées dans ce bienheureux contrat, doivent garder la foi à Jésus-Christ, et ne faire jamais divorce avec lui.

Pour cela, il faut éviter jusqu'aux moindres choses qui déplaisent à l'Epoux céleste. Ce ne sont pas seulement les ruptures qui sont à craindre dans les mariages, mais encore les moindres froideurs. Tout va au divorce, si on n'y prend garde : et il faut promptement réparer les moindres négligences: la délicatesse de l'Epoux en est blessée : l'amour refroidi s'éteint bientôt.

Veille donc, ame chrétienne; veille sur les moindres choses rien ne plaît plus à celui qui aime, que l'attention à le contenter en tout au contraire, il n'y a rien de plus terrible que cette parole célèbre du Fils de Dieu (3): Je voudrois que

(1) Matth. v. 29, 30. —(2) Matth. xvi. 6. — (3) Apoc. 11. 15, 16.

vous fussiez froid ou chaud. On vous pourroit tourner au bien, et vous seriez capable de quelque action; mais parce que vous êtes tiède et sans efficace, on ne peut rien faire de vous, et je vous vomirai de ma bouche.

XVI. JOUR.

Ne jurer point: Simplicité chrétienne. Matth. v. 33, 37.

Je trouve cet endroit un des plus touchans de la doctrine chrétienne; parce que le Fils de Dieu y établit la plus aimable de toutes les vertus, qui est la sincérité. Le chrétien ne ment jamais il dit : Cela est, cela n'est pas (1): et cette parole tient lieu de tout serment. Car au lieu de jurer ou par le ciel, ou par la terre, ou par la sainte cité, ou par sa tête, ou en quelque manière que ce soit : on lui ordonne pour toute réponse: Cela est, cela n'est pas: oui et non. Le mensonge ne trouve point de place dans une expression si simple: elle ne souffre point non plus de déguisement: car sans détour ni embarras, on répond: Cela est, cela n'est pas: et la sincérité d'un chrétien doit être si parfaite et si connue, qu'on s'en tienne à sa simple parole, comme s'il avoit fait mille sermens de toutes les sortes.

Cette parole est bien forte: Tout ce qui est audelà vient du malin (2) ou du mal. Tout ce qu'on

(1) Matth. v. 37. — (2) Ibid.

dit de plus, que cela est, cela n'est pas; c'est la dureté des cœurs, c'est la malice et la fourberie, c'est le démon en un mot qui l'a introduit. Revenons donc à l'origine rendons-nous si croyables par notre sincérité, qu'on se fie à nous à cette simple parole: Cela est, cela n'est pas : oui et non.

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Ne soyez pas si décisif, si affirmatif, n'exagérez pas: Ne jurez pas (1): c'est une partie de cette douceur dont il est dit: Bienheureux ceux qui sont doux (2). Ce que vous direz de plus fort que la simple affirmation ou négation, ne seroit pas nécessaire, si les cœurs étoient bien disposés. Soyez de votre côté dans cette disposition et s'il faut aller au-delà, que ce soit uniquement pour les autres qui ont besoin d'être poussés plus fortement.

Renouvelez-vous, quittez le vieux levain (3). Le méchant est menteur, parce qu'il a intérêt de cacher et de déguiser ce qu'il fait, Revélez-vous de l'homme nouveau, qui est Jésus-Christ, qui est créé selon Dieu, en justice, et dans la sainteté de la vérité (4). Ainsi, quittant le mensonge, qui ne convient qu'au mauvais qui veut se cacher: Dites-vous la vérité les uns aux autres, parce que vous êtes membres d'un méme corps (5). La main ne veut pas tromper la tête, lorsqu'elle la prend pour guide parmi les ténèbres; l'œil ne veut pas tromper les pieds, ni les pieds cacher leur marche aux yeux et à la tête. Si ces membres se pouvoient parler et interroger l'un l'autre, ils se diroient simplement la vérité en toutes choses; oui et non: cela est, cela n'est

(1) Matth. v. 37. (2) Matth. v. 4.(3) I. Cor. v. 7.-(4) Eph. av. 24. — (5) Ibid. 25.

pas. Vivez ainsi, chrétien: ne faites point le mystérieux ni l'important. Taisez-vous par modération et par prudence, et non pas en faisant l'homme sage et l'homme grave. N'ayez point de dissimulation; surtout ne faites rien de mal, de douteux, ni de suspect, afin que vous n'ayez rien à déguiser. Si vous péchez, car qui ne péche point? et qu'il vous faille découvrir votre péché à un confesseur, comme la plaie à son médecin dites, cela est, cela n'est pas, sans chercher de vaines excuses à votre faute, ni de longues circonlocutions pour l'envelopper. L'humilité vous fera sincère : vous guérirez infailliblement, pourvu que vous gardiez la sincérité.

On jure par le nom de Dieu, et on le prend à témoin, afin que notre parole, foible par ellemême, devienne ferme et inviolable par l'interposition du nom de Dieu. Mais si nous sommes remplis de Dieu, et revêtus de Jésus Christ, la vérité est en nous; et nos discours étant fermes par le mérite de la source d'où ils sont partis, ne demandent pas d'être appuyés par la religion du ser

ment.

Il y en avoit qui croyoient qu'on ne juroit pas, à moins d'interposer le nom de Dieu. Ils ne prenoient pas pour serment de dire par le ciel, ou par la terre, ou par la sainte cité; et ainsi du reste. Mais Jésus-Christ décide, qu'il y a dans tout cela quelque chose, qui ayant rapport à Dieu, doit être regardé avec une espèce de religion, sans qu'il soit permis à l'homme de le profaner par ses ser

mens.

Cette parole est remarquable: Ne jurez point par

votre tête; car vous ne pouvez faire blanc ou noir un de vos cheveux (1). De tout ce que vous appelez vôtre, il n'y a rien dont vous puissiez disposer; pas même de la couleur de vos cheveux. Ne dites donc pas, je jure par ma tête, c'est-à-dire : je me dévoue, ou comme on parle, je dévoue ma tête à telle et à telle peine car loin d'avoir pouvoir sur votre tête, vous n'en avez pas même sur vos cheveux pour les faire venir ou croître, ni pour en changer la couleur. Soyez donc soumis à Dieu, et ne parlez jamais, comme pouvant disposer de la moindre chose.

XVII. JOUR.

Charité fraternelle : étendue de la perfection chrétienne. Matth. v. 38, 43.

JÉSUS-CHRIST revient encore à l'obligation de la charité fraternelle, dont il avoit déjà dit, que loin qu'il fût permis de tuer ou de frapper, il ne falloit pas même se fâcher contre son frère, ni lui marquer de l'aigreur par aucune injure que si on avoit quelque démêlé, il falloit être facile à se raccommoder; n'employer point de juge, s'il se peut, pour terminer nos différends; ni même de médiateur pour concilier les esprits aliénés. Nous avons un médiateur naturel de notre réconciliation mutuelle, qui est Jésus-Christ, et l'esprit de charité et de grâce qui nous anime. Il faut donc se rendre trai

() Matth. v. 36.

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