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même, il est très capable du discernement nécessaire. Profitez vous-même de ces lettres, puisque c'est pour vous qu'elles sont écrites, et qu'elles laissent peu de doutes indécis par rapport à vos états.

et où il faut attendre avec patience les ouvertures que Dieu donnera pour en sortir. Continuez à demeurer soumise à Dieu dans ses voies, c'est le meilleur et le plus sûr.

L'Époux céleste est à la porte : entrez avec la lampe, avec le saint et pur amour, et vivez à lui seul. Ce n'est pas contenter le cher Époux que de parler sans cesse de croix, et de vouloir chan

Je vous mets entre les mains de celui à qui l'épouse a dit : Tirez-moi1, et qui a dit luimème: Nul ne peut venir à moi, si mon Père ne le tire 2. Cachez-vous dans les plaies de Jésus-ger celles qu'il envoie, et qu'il destine lui-même Christ; qu'il vous soit un époux de sang: il a été blessé pour nos péchés, et nous sommes guéris par ses plaies. Je le prie, ma Fille, qu'il soit avec vous, et je vous bénis en son nom. A Paris, ce 26 février 1703.

EXTRAITS

de différentes lettres,

Sur les moyens d'attirer l'Époux céleste: l'attention à contenter Dieu, l'obligation de conserver la paix dans tous

les événements, la conduite à tenir dans les peines que nous cause le prochain, la vie cachée, etc.

Il ne faut point tant faire de choses pour attirer l'Époux céleste; il ne faut qu'aimer, et toujours croître en reconnoissance et en amour. Dieu vous fera trouver la part de Marie dans celle de Marthe, quand vous entrerez dans cette dernière par obéissance et par charité.

Allez votre train, sans vous détourner : songez plutôt à contenter Dieu qu'à être contente, et ne cherchez point tant à savoir si vous lui plaisez; mais faites fidèlement tout ce que vous croirez qui doit lui plaire, et soyez soumise à ses volontés. Demeurez en tout à la disposition du cher Époux, qui vous fera accomplir cette volonté divine.

Quelles que soient les intentions des hommes à votre égard, demeurez tranquille. Ce sont ici les occasions où il faut conserver la paix par rapport à l'ordre de Dieu, moteur des cœurs, et qui fait tout ce qui lui plaît dans le ciel et sur la

terre3.

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Les dispositions où il faut être sur les peines dont vous me parlez sont d'adorer Dieu qui les permet, et de suivre, par rapport aux autres, les règles de la charité. C'est se rendre trop dépendant de la créature, que de se laisser troubler par les sentiments d'autrui : il faut du moins garder les dehors, si on ne peut se rendre maitre du dedans.

Il y a des conjonctures où on n'a rien à dire,

nut pour les siennes, et déclara être celles qu'il avoit écrites à cette sœur.

Cant. 1. 3.- 2 Joan. vi. 44. - Ps. CXXXIV. 6.

à notre sanctification par sa sagesse miséricordieuse. Consolez-vous cependant, et abandonnez-vous à sa volonté sans réserve.

Anéantissez-vous, et demeurez ensevelie et cachée avec Jésus-Christ, si vous voulez lui plaire trop heureuse de participer à la sainte obscurité de sa vie, et au silence de sa sépulture. Comptez-vous pour rien; et que la seule obéissance vous remue dans votre sépulture, et vous en fasse sortir.

Il n'y a rien de plus inconnu aux hommes, que les conduites particulières de Dieu sur les ames: c'est un secret qu'il s'est réservé ; il n'appartient pas à de foibles mortels de les vouloir pénétrer; il suffit qu'on les adore et qu'on s'y soumette.

Exposez souvent à Dieu vos besoins, vos foiblesses et vos impuissances. Dites-lui, en un mot, qu'il soutienne lui-même votre espérance, et qu'il vous défende de tout ce qui pourroit ou la détruire ou l'affoiblir.

Je n'oublie point de prier pour obtenir la délivrance de votre peine : mais je ne veux pas que votre repos dépende de là; puisque Dieu seul et l'abandon à sa volonté en doit être l'immuable fondement. C'est l'ordre de Dieu, et je ne puis ni ne veux le changer; parcequ'il n'y a rien de plus aimable ni de meilleur que cet ordre, dans lequel consiste la subordination de la créature envers Dieu.

La nature se trouve partout, et peut se trouver dans les actes les plus purs, qui peuvent servir à la repaître. Le moyen le plus efficace pour l'empêcher de s'y trouver, c'est de la laisser comme oubliée, et de songer plutôt à l'outrepasser qu'à la combattre.

Tout n'est rien en effet : tout ce qu'on pense de Dieu est un songe, en comparaison de ce qu'on voudroit et faire et penser pour célébrer sa grandeur. Offrez-lui le néant de vos pensées, qui se perdent et s'évanouissent devant la plénitude de sa perfection et de son être infiniment infini. Apprenez à ne point aimer, afin de savoir aimer : videz votre cœur de l'amour du monde, afin de le remplir de l'amour de Dieu.

Étant toujours incertains de la venue de notre juge, vivons tous les jours comme si nous de

vions être jugés le lendemain, ou même aujourd'hui.

Vous souhaitez à l'heure de la mort la confiance que vous ressentez souvent: ignorez-vous que celle qu'on a pendant le cours de la vie a son effet au temps de la mort ? Que sommes-nous, sinon des mourants? Celui qui donne cette confiance ne peut-il pas la continuer? Que fera l'ame à la dernière heure, sinon ce qu'elle a toujours fait? Dieu n'a-t-il pas en son pouvoir tous les moments? et y en a-t-il un seul qui ne puisse être celui de la mort? Que faut-il donc faire à chaque moment, sinon étendre sa confiance à tous les moments suivants, et à l'éternité tout entière, si notre vie pouvoit durer autant?

Nous sommes affligés; mais nous ne sommes pas dans l'angoisse, nous ne sommes point troublés nous sommes agités; mais nous ne sommes pas délaissés : nous sommes abattus; mais nous ne périssons pas 1. Je vous le dis, dilatez-vous, mettez-vous au large2; réjouissezvous en notre Seigneur; je vous le dis encore une fois, réjouissez-vous 3 en Jésus-Christ votre espérance. Mon esprit s'est réjoui en Dieu mon Sauveur 4.

3

L'amour est fort contre la mort : sa jalousie est dure et violente comme l'enfer : elle a des touches brûlantes; les torrents d'eau ne l'éteindront pas 5.

Ce que Dieu a déja fait pour nous est assez grand pour nous faire attendre le reste avec foi et confiance. Amen, amen.

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Pour le bref, loin qu'il doive venir à Pâques, on m'a averti de bonne part qu'on n'avoit même encore osé le demander, ni envoyer la supplique. Ceux qui mandent qu'il viendra si tôt savent bien que non; et mon plus grand déplaisir, c'est que Dieu soit offensé par tant de mensonges. Celles qui appelleront à M. de Paris feront parlà un acte authentique pour me reconnoître; puisque s'il est le métropolitain, je suis l'évêque ; et le premier pas qu'il faut faire pour pouvoir être secouru par mon supérieur, c'est de me rendre obéissance. Au surplus, M. de Paris est trop entendu pour outre-passer son pouvoir; et il sait que j'en sais les bornes, qui en cette occasion sont bien resserrées; car il ne peut exempter personne de me rendre une entière et perpétuelle obéissance. Pour ce qui regarde madame votre abbesse, je ferai tout pas à pas et avec circonspection; mais, s'il plaît à Dieu, avec efficace. J'ai peine à croire qu'elle se détermine à me désobéir, ni aussi qu'elle se résolve si tard à m'obéir franchement. Quoi qu'il en soit, assurez-vous que je penserai à tout, s'il plaît à Dieu, et que Dieu

sera avec moi.

Je vous prie de dire à toutes les Sœurs que vous me nommez, que je reçois avec joie les témoignages de leurs bons sentiments par votre entremise, et en particulier à madame de SaintMichel; que si elle m'a été une fidèle et courageuse conductrice, j'espère la guider à mon tour où je sais qu'elle veut aller de tout son cœur. Pour madame de Sainte-Placide, je ne la veux pas délivrer de la crainte où elle est entrée pour moi, parcequ'elle m'attirera ses prières. J'ai toutes mes Filles présentes, et je les salue nommément.

Meaux, ce 10 mars 1690.

LETTRE PREMIERE.

Sur la manière dont Dieu avoit préparé les liaisons qu'elle avoit avec lui; et sur les démarches de l'abbesse de Jouarre, pour se soustraire à son obéissance.

Je me souviendrai toujours, ma Fille, que vous êtes la première qui avez reçu de moi la parole de vie, qui est le germe immortel de la renaissance des chrétiens. Cette liaison ne finit jamais, et ce caractère paternel ne s'efface point. Dieu prévoyoit ce qui devoit arriver, quand je vous consacrai* par ma parole qui étoit la sienne, et il en jetoit dès-lors les fondements.

* II. Cor. iv, 8. — Ibid. vi. 43. Phil. IV. 4. 2 47. Cant. v. 6, 7.

Bossuet avoit prêché à sa profession,

Luc. 1.

LETTRE II.

Sur les affaires du prélat avec l'abbesse de Jouarre,

J'ai reçu, ma Fille, votre lettre du 11 mars, qui m'instruit de beaucoup de choses. Il n'y a plira. Songez bien, et faites songer toutes nos qu'à avoir la foi, et l'œuvre de Dieu s'accomchères Sœurs à cette parole de saint Jean: Ipse enim sciebat quid esset facturus': « Pour lui, » il savoit ce qu'il devoit faire. »

Tout se fera; je n'omettrai rien, s'il plaît à Dieu; et je suivrai encore, s'il le faut, le procès du conseil, qui n'ira pas moins vite que celui du parlement, et où j'aurai l'avantage qu'il faudra;

Il s'agit d'un bref que l'on disoit être sollicité par l'abbesse de Jouarre, pour maintenir l'exemption qu'elle s'attribuoit. Joan. v1.6.

11.

en attendant, m'obéir. J'ai trouvé nécessaire de | sa requête en cassation : j'en suis bien aise; ċar rappeler madame votre abbesse, à moins qu'elle plus tôt elle paroîtra, plus tôt je mettrai fin à cette ne se mit en devoir d'obtenir un congé de moi, requête. selon le concile de Trente. Vous pouvez assurer ces dames qu'elles ne seront jamais commises ni nommées. Pour vous, ne craignez pas, je vous prie, ce qu'on peut me dire de cette part-là: outre que je n'y ai nulle foi, et que je crois plutôt tout le contraire, je suis d'ailleurs si prévenu en votre faveur, que vous pouvez sans hésiter marcher avec moi avec une pleine confiance.

J'approuve fort les raisons que vous avez euės d'écrire en divers endroits, et je vois bien qu'il ne vous restoit aucun moyen de le faire que par M. Phelipeaux. Vous ne devez point douter que je n'autorise hautement ce qui aura été fait par cette voie. Au reste, la paix est un bien que Dieu veut qu'on desire. Il y a celle du dedans que lui seul peut donner, et que nulle créature ne nous peut ravir: celle du dehors est un moyen pour conserver celle-là; mais Dieu ne la donne pas toujours. Il a sa méthode pour guérir les plaies de notre ame: il ne se sert pas toujours des remèdes qu'il a en main; il veut exercer la foi, et éprouver notre confiance. Il faut attendre ses moments, et se souvenir de ce mot de saint Paul: Ayant la paix avec tous, autant qu'il est en vous 1; et de celui de David: « J'étois en paix » avec ceux qui haïssoient la paix : » Cum his qui oderunt pacem eram pacificus 2. Voilà, ma Il la prémunit contre les discours qu'on tenoit sur lui; et Fille, votre pratique et celle de nos chères Sœurs:

Je salue de tout mon cœur madame votre sœur, et toute la troupe élue, dont les noms et les vertus me sont très présents. Laissez discourir les autres: leur temps viendra; et pourvu qu'on ne manque pas de foi à la Providence, on verra la gloire de Dieu.

A Versailles, ce 15 mars 1690.

LETTRE III.

lui donne des règles pour vivre en paix au milieu des troubles excités par la désobéissance de l'abbesse.

Je vois, par une apostille de madame votre sœur à votre lettre du 28, que vous n'avez pu la fermer à cause d'un mal à la main. J'en suis en peine, et je vous prie de me mander ce que c'est.

le reste se dira en présence, et avant la Pentecôte, s'il plait à Dieu.

A Paris, ce 2 mai 1690,

LETTRE IV.

où l'on peut révéler un secret.

Je vous dirai, ma Fille, en attendant, quella relève des défenses de l'abbesse ; et lui marque le cas vous faites bien de m'avertir de tout, jusqu'aux moindres choses qui peuvent me faire connoître l'état de la maison. Au surplus, pour ne point J'ai reçu votre lettre du 6; je n'ai pas encore et en perdre le temps de mon côté dans des redites, bien résolu ce qu'on pourra faire signer, tenez pour bien assuré que tout ce qu'on dit de moi quelle forme; je voudrois bien pouvoir y être est faux et sans fondement, sans qu'il soit né-moi-même : rien ne presse pour cela, et tout se cessaire que je vous en écrive rien en particulier. fera dans le temps. Le procès-verbal est bien : ce Ce qui sera véritable je vous le dirai, afin que qui est bon pour un reni n'est pas toujours bon vous en instruisiez celles que vous trouverez à dans un acte juridique; la fin nous justifiera enpropos. J'ai fait tirer Henriette du lieu où elle vers les plus opposés. étoit.

Les mouvements que se donne madame de Jouarre sont inouïs. Je pousserai cette affaire jusqu'où elle doit aller, et n'oublierai rien pour défaire la maison d'un prêtre infame, qui en a causé tout le malheur. Si le père André a vu madame l'abbesse, il doit dire de bonne foi que je n'ai point fait dépendre de là sa mission: mais j'ai consenti seulement que, pour le bien de la paix, il s'assurât, s'il pouvoit et s'il le jugeoit à propos, d'un consentement de ce côté-là. Quoique ce Père m'ait invité à voir madame de Jouarre comme de la part de cette abbesse, je n'ai rien voulu répondre, et suis très résolu de ne la pas voir jusqu'à ce qu'elle ait éloigné son mauvais conseil. J'ai quelque soupçon qu'on verra bientôt

Je vous relève, ma Fille, de toutes les défenses de madame de Jouarre, qui vont à vous empêcher de parler des sujets que vous me marquez; puisque dans l'état où sont les choses, il n'est pas possible de s'en taire.

Il faut garder inviolablement le secret où la personne qui le confie est intéressée en sa personne; si ce n'est qu'un bien sans comparaison plus grand oblige à le révéler aux supérieurs, en prenant les précautions nécessaires pour la personne qui y a intérêt; à plus forte raison peut

on découvrir les autres secrets.

J'ai vu, en passant à Chelles, madame de Richelieu : elle a de l'esprit; mais j'ai peine à croire

Rom. XII, 18. Ps. cxIx. 7.

que l'on confie l'abbaye de Jouarre à une si jeune religieuse.

Il est certain que madame de Jouarre a fait proposer à madame de Chelles une permutation. Je veillerai à tout autant qu'il sera possible, et n'oublierai rien, s'il plaît à Dieu.

Je suis fâché de votre mal aux yeux. Vivez en paix avec Dieu, et, autant que vous le pourrez, avec les hommes. A vous, ma Fille, comme vous

savez.

A Paris, ce 8 juin 1690,

LETTRE V.

Il lui témoigne sa peine des désagréments qu'éprouvoient de la part de l'abbesse les religieuses qui lui étoient fidèles.

J'ai reçu, ma Fille, votre lettre du 3. Je ne m'étonne ni ne me fàche de ce qu'on fait de malhonnête à mon égard; et toute ma peine vient de celle qui en retombe sur vous et mes fidèles Filles. Je serai demain, s'il plaît à Dieu, à La Ferté-sous-Jouarre, pour y recevoir Monseigneur* samedi; et dimanche aller coucher à Jouarre, où je commencerai par demander madame votre soeur et vous. Je verrai après madame la prieure, et je donnerai le lendemain tout entier à nos autres chères Filles. Là nous parlerons de tout plus amplement. J'enverrai dire à madame la prieure de La Ferté-sous-Jouarre le jour et l'heure que j'arriverai, et mes gens iront préparer mon logement, que je prendrai dans l'abbaye.

Je prends une part extrême à vos déplaisirs sur le sujet de M. le duc de Luynes, et je vous prie de témoigner à madame votre sœur combien je suis sensible à votre commune douleur.

Je vous entretiendrai en particulier avec tout le loisir que vous souhaiterez, et je n'oublierai rien pour vous marquer mon estime et ma confiance.

A Germigny, ce 3 octobre 1690.1

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sentir avec lui; mais en même temps il faut emprunter, pour ainsi parler, sa volonté sainte; afin de dire à Dieu que la sienne soit accomplie. Je prie notre Seigneur qu'il soit avec vous. A Germigny, ce 13 octobre 1690.

LETTRE VII.

Sur les affaires de Jouarre.

Il n'y a rien de changé dans ma marche, et c'est toujours samedi au soir que je serai à Jouarre sans y manquer, s'il plaît à Dieu. J'envoie cet exprès pour en avertir madame la prieure, et pour vous le confirmer. Je vous entretiendrai à loisir, et toutes celles qui voudront me parler ou des affaires de la maison, ou même de leurs peines particulières : c'est ce que je vous prie de dire à madame Gobelin.

J'ai reçu les quatre sentences, qui sont toutes placées en bon lieu, aussi bien que celles qui les ont écrites. Vous me ferez grand plaisir de le leur dire, et en particulier à madame votre sœur. Samedi vous saurez des choses nouvelles : en attendant, je vous dirai seulement que tout ce qui vient de Paris, ce ne sont que des réponses ambiguës, et des moyens d'éluder. Je prie notre Seigneur qu'il soit avec vous.

A Meaux, ce 2 novembre 1690.

LETTRE VIII.

Résolution où il est de faire exécuter son ordonnance contre l'abbesse de Jouarre; il exhorte cette religieuse à montrer beaucoup de douceur et de modestie.

J'ai reçu votre lettre et votre billet qui y étoit joint, avec les deux lettres pour M. de Chevreuse et pour le père Moret, que j'aurai soin de rendre en main propre, du moins la première, et l'autre si je puis.

Mon ordonnance, de la manière dont elle est. motivée et prononcée, est hors d'atteinte; mais il faudra voir ce que dira le parti quand les nou velles de Paris seront venues: on y aura fait de grands cris. Je m'en vais pour les entendre de près, et procéder à la vive et réelle exécution. Il n'y a qu'à ne se pas étonner du bruit, et attendre l'événement de cette affaire, qui sera, s'il plaît à Dieu, comme celui de toutes les autres.

Plus on a de raison, et plus on avance; plus il faut être douce et modeste, et moins il faut prendre d'avantage : c'est ce que je vous prie de dire et d'inspirer à toutes nos chères Filles. Il faut, s'il se peut, fermer la bouche aux contredisantes, et en tout cas ne leur donner aucun prétexte. Il faut aussi rendre de grands respects

.

à madame la prieure, qui assurément les mérite par ses bonnes intentions, et par la manière dont elle a agi dans cette dernière visite; on ne doit rien oublier pour profiter de ses bonnes dispositions, qui seront très utiles au bien de la mai

son.

M. le grand-vicaire aura soin d'envoyer souvent à Jouarre, pour en recevoir et y porter les nouvelles.

Celles de ma santé sont fort bonnes. Je garde pourtant la chambre, pour empêcher le progrès d'un petit mal de gorge qui est venu de beaucoup parler, et d'un peu de rhume.

Je salue toutes nos chères Sœurs, et plus que toutes les autres madame votre sœur, dont l'amitié et les saintes dispositions me sont très connues. Ainsi je n'ai pas besoin qu'on me dise rien de sa part: elle m'a tout dit, et j'y crois.

Voilà les deux livres que vous souhaitez : recevez-les comme une preuve de mon estime; assurée que je ne souhaite rien tant que de pouvoir vous en donner de plus grandes. Je vous garderai fidèlement le secret. Faites, s'il vous plait, mes amitiés à madame de Sainte-Anne;

n'oubliez pas nos autres chères Sœurs. C'est avec regret que je vous quittai sans vous avoir pu tenir ma parole. Je suis à vous de tout mon cœur.

A Meaux, ce 9 novembre 1690.

LETTRE IX.

tout pur. J'espère vous revoir bientôt, et avec assez de loisir pour vous écouter en particulier, et toutes celles qui desireront communiquer avec moi. Je prie notre Seigneur qu'il soit avec vous.

A Paris, ce 24 novembre 1690.

LETTRE X.

Il lui apprend la soumission de l'abbesse de Jouarre à son ordonnance; et la rassure sur ses craintes.

J'ai reçu votre lettre, et vous ne devez pas en être en peine. Madame de Jouarre me rendit hier une visite elle me demande congé. J'ai promis de l'accorder, à condition de satisfaire à tous les articles de mon ordonnance dans les termes y portés. Elle s'y est soumise ; il y aura cependant un arrêt du parlement pour la confirmer: ainsi le gouvernement de la maison et mon autorité seront établis. Madame de Jouarre m'a

dit que le boucher étoit content, et qu'elle me feroit voir son compte arrêté et sa quittance. Voilà, ma Fille, toutes les nouvelles de deçà.

Dans peu M. de La Vallée sera justifié, et l'ira dire à Limoges. Pour moi je retournerai, s'il plait à Dieu, à Meaux, d'où je ferai savoir de mes nouvelles à Jouarre; et je ne tarderai pas d'y aller faire un tour. Je vous prie de faire part de ceci à nos chères Filles que vous jugerez à propos, et en particulier à madame de Lusancy. Madame de Jouarre ne m'a rien dit du tout sur son sujet mais pour vous et madame votre

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Sur les affaires de Jouarre ; et sur les priviléges des vierges sœur, il ne faut pas que vous songiez à l'apai

à l'égard des reliques.

J'ai rendu votre lettre en main propre à M. de Chevreuse, qui fera entendre à madame la duchesse de Luynes vos raisons, dont il est fort persuadé. Pour le surplus, vous verrez bientôt l'exécution entière de mes ordonnances, et madame de Lusancy va être riche. Je lui écris le détail des affaires encore assez en gros; mais cela se va débrouiller, et vous saurez d'elle, ma Fille, ce que j'en puis dire.

Vous ne devez pas être en scrupule pour avoir touché les reliques : c'est une nécessité pour les religieuses; et les épouses de Jésus-Christ ont des priviléges sur cela au-dessus du commun des fi

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ser; et quoi que je lui aie pu dire, elle veut vous attribuer tout ce que j'ai fait. La vérité et la patience sont votre refuge, avec l'assurance infaillible de mes consolations, de mes conseils et de mon autorité. Je ne vois pas, Dieu merci, que vous ayez beaucoup à craindre, et en tout cas je partagerai vos peines avec vous. Je n'écris pas à nos chères Filles qui m'ont écrit, à cause de l'empressement où je suis. Je dis un mot à madame de Rodon, pour lui donner occasion de fortifier son noviciat, dont elle me parle.

J'ai parlé à madame de M. Gérard; mais je n'ai pas cru le devoir recommander pour la prébende vacante, ne croyant pas mon crédit assez affermi pour cela, quoique notre conversation ait été remplie d'honnêtetés réciproques, et qu'on ait paru content de moi. On n'a pas même voulu faire semblant de savoir la mort du pauvre M. Galot. M. Gérard doit s'assurer que je ne lui manquerai pas, en continuant à bien faire.

Je prie notre Seigneur qu'il soit avec vous,

A Paris, ce 30 novembre 1690.

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