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LETTRE XCVI.

Il l'exhorte à marcher dans la voie où elle étoit entrée. Ce qu'il pense sur l'article de la Clémentine, qui concerne la confession.

Pour réponse à votre lettre du 8, qui est venue avec celle du 6, il n'y a point à hésiter à demeurer dans la voie où vous êtes: elle n'a rien de suspect; mais j'avoue qu'il y faut être conduit de la main de Dieu, et affermi par un conseil ordonné de Dieu; avec cela tout est sûr.

N'étourdissez jamais cette touche intime, sous quelque prétexte que ce soit. Recevez les ardeurs; les lumières en sortiront quand Dieu voudra elles ne sont nécessaires qu'aux docteurs, qui doivent conduire et enseigner.

Puisque vous souhaitez qu'on vous désigne un chapitre à lire, divisez le cinquième en autant de jours que Dieu vous inspirera, et marquezmoi les endroits qui auront rapport à vos états. Ne vous confessez point du tout de ces impatiences, ni de ces peines contre Dieu, non plus que des autres.

Je ne crois point que la Clémentine* oblige sous peine de péché mortel; le concile de Trente l'ayant ou interprétée', ou réduite à une admonition. A vous de tout mon cœur, ma Fille.

A Germigny, ce 7 novembre 1692.

. P. S. Les ardeurs ne sont jamais sans quelques lumières sombres et confuses, mais néanmoins pénétrantes, qui soutiennent, excitent et nourrissent les ardeurs. Il s'y faut donc abandonner; je dis aux ardeurs, sans rien desirer davantage, mais en recevant ce que Dieu donne.

LETTRE XCVII.

traîner, comme vous avez fait cette fois, à Vous confesser de cette peine et des autres, vous serez le jouet de la peine, et vous perdrez des communions qui vous soutiendroient beaucoup. Vous ne recevrez plus de lettres que de Paris. A Germigny, ce 14 novembre 1692.

LETTRE XCVIII.

Sur la nécessité de s'abandonner à la divine Providence dans les affaires.

J'arrivai samedi en cette ville. Je vais aujourd'hui à Versailles, où je porte toutes les lettres et tous les papiers concernant Jouarre, pour y prendre les résolutions que je viendrai ici exécuter. Il me semble qu'on a trop d'inquiétude. Il faudroit une fois être content de faire ce qu'on peut, et au reste s'abandonner à la divine Providence. C'est ce que je fais; et, bien résolu de ne manquer pas de ma part à ses moments, j'attends, et je suis toutes les ouvertures qu'il me donne. On retarde autant l'œuvre de Dieu, qu'on tarde à se mettre dans cette disposition. J'en dirai davantage quand j'aurai eu le loisir de réfléchir sur tout: je n'ai pas encore eu le temps de me tourner.

Pour vous, ma Fille, laissez-vous conduire; ne succombez point à la peine jusqu'ici je la. vois toujours la même, quelque différente que vous en paroisse la forme. Je prie Dieu, ma Fille, qu'il soit avec vous.

A Paris, ce 47 novembre 1692.

LETTRE XCIX.

Sur la dépravation de la nature humaine.

Que la nature humaine est dépravée ! L'Église

Il la blâme de n'avoir point suivi, à l'égard de ses peines, n'ose décider que la sainte Vierge, mère de Dieu,

les règles qu'il lui avoit prescrites.

Le Père gardien de Coulommiers me rendit hier vos lettres à Farmoutiers. J'en suis revenu plus précipitamment que je ne pensois, pressé par beaucoup d'affaires de différente nature, qui m'obligent d'être demain à Paris. Je dirai bien à M. le duc de Chevreuse mais rien n'empêchera madame de Luynes de solliciter; elle s'en fait un point d'honneur.

Quant au surplus de votre lettre et à celle d'hier, je n'ai de loisir que pour vous dire que si vous ne vous tenez rigoureusement à la règle que je vous ai donnée, et que vous vous laissiez en

* Il s'agit de l'article qui prescrit aux religieuses de se con

fesser tous les mois.

Sess. xxv, de Regular, cap. x.

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ait été exemptée de cette tache. Que la nature humaine est dépravée! que le mal est profond! qu'il est général! que nous avons besoin d'être purgés, pour être capables de voir Dieu! Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, parcequ'ils verront Dieu. Soumettez-vous à l'ordre caché par lequel Dieu purifie les cœurs, pour les rendre dignes de le voir. O pureté!ô vision! ô lumière! ô vérité! ô vie! quand vous verrai-je ? O Dieu! quand vous verrai-je?

J'ai reçu hier une visite de madame la duchesse de Luynes, dont je fus fort satisfait: mademoiselle de Luynes y étoit. Mais madame de Jouarre est toujours en même état, et ne songe point du tout à sa conscience; ce qui inquiète beaucoup madame de Luynes, dont les intentions sont très pures. On parle toujours de départ : madame

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Croyez-moi, vous donnez trop dans ces peines: je vous assure qu'elles ne doivent point vous empêcher de communier sans que vous les confessiez. Je n'ai pas besoin de décider s'il y a du péché ou non à parler franchement, je crois pouvoir assurer qu'il n'y en a point; mais 'en tout cas, je vous assure qu'il n'y a point d'obligation de s'en confesser, et que vous feriez mieux de ne le pas faire. Vous ne savez pas combien Dieu est bon, et ce que peut l'abandonnement qu'on lui fait de tout.

J'approuve fort le sentiment de M. de SainteBeuve, et vous pouvez vous reposer dessus; mais je crois la voie que je vous montre plus conforme à votre état présent. Son sentiment et le mien ne sont qu'un dans le fond, et nous allons à la même fin.

Je vois à peu près ce qu'a voulu dire le prédicateur, et je voudrois bien qu'on ne fût pas si affirmatif* en choses où l'Église n'a pas parlé. Celui qui a enseigné à saint Paul que la force se perfectionne dans la foiblesse, et que la tentation donne occasion à notre avancement, peut

seul vous faire entendre que les peines que vous déplorez peuvent aider à purifier le cœur.

Tout ce qu'on dit de vous à Paris, au sujet de l'obéissance que vous me rendez, augmente la couronne que vous devez attendre pour cette action de justice. Le monde parle et juge sans savoir; mais Jésus-Christ l'a jugé, et a cassé par

avance tous ses jugements.

Encouragez madame la prieure à ne point quitter, quoi qu'il arrive. Le soldat de JésusChrist ne doit jamais poser les armes : le temps viendra de se délasser. Je suis à vous de tout

mon cœur.

A Meaux, ce 20 décembre 1692.

*Sur l'opinion de l'immaculée conception de la sainte Vierge.

LETTRE CI.

Il lui marque les raisons qu'il a de ne pas donner des pouvoirs à des personnes qui passent, et lui envoie un exercice pour la fête de Noël.

Ma sœur Cornuau s'est volontiers chargée de ce paquet: elle porte aussi une lettre à madame la prieure, où est une permission pour les capucins; aussi bien j'aurois de la peine à en donner pour des gens qui passent, à moins que je ne les connusse. Souvent ils laissent des impressions auxquelles ils ne peuvent plus remédier; parcequ'ils s'en vont, et qu'on n'entend plus parler d'eux. Au contraire, ceux qui sont stables songent aux reproches qu'ils pourroient s'attirer s'ils faisoient mal, et sont en état de réparer ce qu'ils pourroient avoir fait par mégarde.

Madame de Baradat a parfaitement bien répondu, et il n'y a qu'à parler toujours sur le même ton.

On me mande, ma Fille, que madame de Luynes dit qu'il n'y a pas un mot pour elle dans toutes mes lettres. Souvenez-vous que j'ai répondu à celle que vous m'écriviez sur ce qu'on disoit de vous deux : ainsi elle étoit comprise dans cette réponse, et vous m'étiez toutes deux également présentes.

Voici un très petit exercice pour Noël : vous en pouvez faire part à ma sœur Cornuau, à qui je n'en parle point.

Pour vous, ma Fille, assurez-vous que Dieu regarde dans vos peines. Je suis à vous de tout

mon cœur.

A Meaux, ce 24 décembre 1692.

Abraham a vu monjour, et il s'en est réjoui1. Il a vu mon jour, le jour auquel j'ai paru au monde. Isaïe a aussi vu ce jour, et voici ce qu'il en a vu 2: Un petit enfant nous est né, un fils nous est donné, et sa principauté est sur ses seiller, le Dieu fort, le Père du siècle futur, le épaules; et son nom sera l'Admirable, le ConPrince de paix.

De toutes ces qualités, je choisis pour vous celle d'Admirable, que je vous donne à méditer. Songez bien à cette belle qualité, et donnez-vous quoi principalement ce divin Enfant est admiraà Dieu, afin qu'il daigne vous faire sentir en

ble. Donnez la même chose à méditer à madame

de Luynes et à ma sœur Cornuau.

Donnez à madame de Lusancy à méditer la qualité de conseiller, et qu'elle songe bien aux conseils de ce divin Enfant : qu'elle lui demande conseil sur tout ce qu'elle a à faire, et qu'elle songe en même temps que, tout foible qu'il paroit

Joan. VIII. 56. — 2 Is. IX. 6.

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Je commence à croire plus que jamais que tout le bien se fera à Jouarre, et que madame votre sœur et vous y aurez la plus grande part : heureuses d'y coopérer sans y paroître. Je vous dirai une parole qu'un religieux * très saint, très humble et très pénitent, de l'ordre de saint Dominique, me dit une fois avant que je fusse évêque : Que Dieu m'avoit destiné à avoir part à beaucoup de bien sans que je le susse. Sans exa

Toutes ensemble méditez ces mots : Un petit enfant nous est donné, un fils nous est né : prenez-le toutes, puisqu'il vous est donné à la sainte table; prenez-le comme un petit enfant, puis-miner par quel esprit il parloit, je vous avoue que c'est pour vous qu'il est né en cette qualité. Associez à cette pratique celles que vous croirez qui y entreront.

Je ne parle point exprès de la principauté sur les épaules, qui regarde, selon les Pères, un autre mystère, qui est celui de la croix.

Ce sera le sujet de mon sermon de Noël que je vous donne à méditer. Priez Dieu qu'il m'ouvre l'intelligence de cette admirable prophétie, la plus capable que je sache de faire connoître et aimer ce divin Enfant. Puisse-t-il être aimé de toute la terre!

LETTRE CII.

Sur les trois messes du jour de Noël; et la manière de s'occuper les jours de dimanche et de fèles.

Vous pouvez vous dispenser de l'abstinence

que j'ai toujours été fort touché de cette manière de coopérer aux desseins de Dieu, et que je souhaite une pareille grace à ceux que j'aime.

J'ai vu le père Moret et le père Toquet : le premier m'a dit que les infirmités de madame de Lavardin ne permettroient pas qu'elle suivit madame de Rohan. Je la demanderai; nous verrons. On a envoyé à Rome pour les bulles: ne le dites qu'à très peu de personnes, et commandez de ma part un grand secret. Madame de Jouarre ne sait où elle en est : il lui prend quelquefois des envies de retour. Je ne l'ai pas vue encore. Madame de Lusancy vous dira ce que je lui mande, et madame la prieure aussi.

A Paris, ce 15 janvier 1693.

LETTRE CIV.

**

de Noël. Il n'y a point d'obligation d'entendre Sur la confession, l'oraison, le sacrifice, la liberté avec

trois messes le jour de Noël.

Vous pouvez les jours de dimanche et fètes, après vos prières et lectures, employer le reste du temps, quelque long qu'il soit, à transcrire mes écrits, à votre relation et autres choses.

Songez bien à cet Enfant admirable, et songez particulièrement en quoi il l'est pour vous: j'en suis pénétré.

A Meaux, ce 22 décembre 1692.

LETTRE CIII.

laquelle elle doit dire son avis; et sur un endroit du Cantique des Cantiques.

J'ai envoyé votre lettre à la Trappe. Sur votre lettre du 17, vous n'avez, ma Fille, qu'à vous tenir à la règle que je vous ai donnée. Tous les raisonnements que vous faites sont bons: mais je dois agir par d'autres principes, qui sont encore meilleurs par rapport à vous; et je persiste à vous dire que vous n'avez point à vous confesser des choses dont vous me parlez.

Rien ne vous oblige à rester dans l'église ni au lieu de l'oraison, encore que vos attraits continuent lorsque le temps est passé. Suivez sans crainte l'attrait durant la messe : ce sacrifice comprend tout, et convient à tout.

Sur la prudence et les ménagements dont elle devoit user; et sur le bonheur de faire le bien sans paroître. J'approuve fort, ma Fille, l'avis que vous avez Vous avez raison de dire qu'il ne faut pas alinspiré pour le réglement. Il faut mener les choses avec douceur et prudence, et plutôt faireler vite; mais il faut aller, et faire ce qui sera jugé nécessaire. Ne craignez point de proposer qu'ordonner. Il faut même ne faire que ce qui sera nécessaire, et le moins qu'on pourra de vos sentiments, et après abandonnez tout à Dieu. changement: car il faut entrer dans tous les mé- Il faut bien se garder de faire beaucoup de bruit nagements que M. de Soubise est obligé d'avoir. pour un petit bien. Pour le fond, lui et madame de Soubise sont dans toutes les dispositions que nous pouvions souhaiter. Je dois voir après diner la nouvelle abbesse, et j'ajouterai un article à cette lettre, quand je l'aurai vue.

Le sieur de La Vallée ne paroit pas, et je ne

*On a quelques lettres de ce religieux à Bossuet: il se nommoit le père Antoine, et il est célèbre dans son ordre par la réforme qu'il a établie dans plusieurs des maisons de la Provence

et du Comtat.

་་

Celle qui venoit de se démettre.

le crois pas de retour. Assurez-vous que ni lui ni | à Jouarre, nous aviserons aux livres qu'on lui son frère n'approcheront de Jouarre tant que pourra proposer. Dieu me conservera la vie.

J'ai été ravi d'entendre parler le père Toquet sur la pauvreté : rien ne me touche plus que cette vertu, et le silence. Il le faut rompre sans crainte, pour dire votre avis sans hésiter : vous n'en aurez jamais d'occasions plus pressantes. Dieu, qui a tiré la lumière du sein des ténèbres, tire les bons avis d'où il lui plaît. Il faut même redire plusieurs fois les mêmes choses, jusqu'à ce qu'on entre. Quand on trouve tout bouché, et qu'on a assez frappé sans qu'on ouvre, alors il se faut retirer aussi content que si on avoit réussi; parcequ'on a réussi à contenter Dieu, qui est ce qu'il faut chercher.

Pourquoi ne voulez-vous pas que le Trahe me, et le reste, soit dans la Vulgate? Il y est, tout au commencement du Cantique'. J'aime beaucoup cette parole, à cause du rapport qu'elle a avec celle du Fils de Dieu : Nisi Pater meus traxerit eum : «Personne ne peut venir à moi si » mon Père ne l'attire; » et à celle-ci, Omnia traham3, « Je tirerai tout à moi. » Il tire en bien des manières; quelquefois il se cache, et alors il tire par le fond.

2

Je

pense sérieusement aux confesseurs.

Je donne de tout mon cœur ma bénédiction à madame la prieure. Notre Seigneur soit avec

vous.

A Versailles, ce 9 février 1693.

LETTRE CVI.

ce que doit faire une religieuse, lorsque le médecin et la supérieure lui ordonnent le gras; manière dont Dieu distribue ses graces, et dont on doit les recevoir.

Je veillerai à tout, s'il plaît à Dieu. Il y a une permission aux deux La Vallée d'aller où ils voudront, à l'exclusion du diocèse de Meaux. Je presse fort qu'on me tienne parole sur leurs bénéfices; mais on n'a pas pu mettre cela en condition.

Je suis très en peine de madame votre sœur : je m'en vais dire la messe à son intention et à celle de madame la prieure.

Quand les médecins jugent le gras nécessaire, et que la supérieure l'ordonne, la plus prompte obéissance est la meilleure, et il ne faut point se laisser forcer. J'approuve fort la pratique de se priver de boire hors des repas, quand il n'y a au

Que j'aime ce bon père Toquet! j'entre dans toutes ses pensées. Prenez bien garde comme je parle; je veux dire dans toutes celles de sa let-cune sorte de nécessité. tre, et j'espère que le temps approche d'accomplir le reste bientôt vous le verrez. Dieu est

avec vous.

A Versailles, ce 25 janvier 1693.

LETTRE CV.

Sur la confession pour gagner les indulgences; et la méprise dans la récitation de l'office, etc.

Au lieu de vous unir à ce que je fais pendant le carême, unissez-vous, ma Fille, à mes intentions, et surtout à celles que j'ai pour vous, et que j'offre à Dieu tous les jours en votre nom.

Le volume des notes sur Salomon tire à sa fin, et vous en aurez des premières.

Pour gagner les indulgences, le plus sûr est de se confesser, encore qu'on ne sente pas en avoir besoin.

Dans le changement d'un office pour un autre par mégarde, il n'est pas d'obligation de recommencer, quand même l'office omis seroit plus long.

Je n'entends point encore parler de la bénédiction de la nouvelle abbesse. Quand elle sera

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Dans les graces qu'on reçoit de Dieu, ce seroit une fausse humilité et une vraie ingratitude de ne les pas reconnoître mais dès qu'on les reconnoît comme graces, l'humilité est contente. Il ne faut point décider si Dieu ne les donne qu'aux ames pures; car il les donne à qui il lui plait, et il est au-dessus de toutes les règles : outre encore qu'un grand attrait se peut rencontrer avec une grande infidélité. Dieu n'en est pas moins bon, et la grace n'en est pas moins grace, encore qu'on n'y réponde pas autant qu'on devroit; et c'est de quoi pousser l'ame jusqu'à son néant. Il ne faut pas pour cela recevoir le don de Dieu avec inquiétude; mais dilater son cœur par la confiance, sur cette parole de saint Paul': Où le péché a abondé, la grace a surabondé.

N'hésitez point à communier trois fois la semaine, sans même attendre cette impression, qui assurément est de Dieu; de quoi néanmoins je ne vous fais pas une règle : mais quand cette faim spirituelle se fait sentir, il faut l'assouvir, et se livrer à l'amour de Jésus-Christ.

Vous aurez part au sacrifice, et la même que les deux malades.

A Versailles, ce 12 février 1693.

Rom. v. 20.

LETTRE CVII.

Sur la bénédiction de la nouvelle abbesse; la résistance à la grace, et la communion.

Pour réponse à votre lettre du 16, je n'ai point encore parlé de la bénédiction de la nouvelle abbesse je m'expliquerai sur tout cela avant mon départ. Le cérémonial me touche peu, et je ne m'attacherai qu'à l'obéissance.

J'ai été fort surpris d'apprendre que madame de Thou n'étoit pas partie. Il y a près d'un mois qu'elle a ordre de moi de s'en retourner, et qu'on m'avoit assuré qu'elle partoit le lendemain. J'ai écrit pour avancer son départ, et j'ai fait dire à M. l'abbé de Thou que je ne recevois pas l'excuse des mauvais chemins. J'attends l'effet de ma lettre, et ne donnerai aucun relâche.

Il n'est pas possible, à mon avis, que La Burie soit de retour, et c'est tout ce qu'il pourra faire d'en avoir reçu la permission. Mon déplaisir seroit extrême, s'il avoit trouvé madame de Thou encore à Paris. J'ai dit ce qu'il falloit dire sur ces deux frères.

craindre l'illusion si vous agissiez sans conduite, et hors de l'ordre de l'obéissance ne craignez rien en obéissant. Vous êtes précisément dans le cas où il faut suivre Jésus-Christ, qui dit : Qui vous écoute, m'écoute 1. Vous ne m'avez pas assez expliqué votre peine sur la passion de Jésus-Christ et sur celle des saints, pour que je puisse vous y donner une décision précise. Quelle qu'elle soit, elle ne doit point vous empêcher de vous appliquer à ces objets quand vous y serez attirée mais aussi suivez votre attrait, et ne forcez pas votre esprit à s'y attacher. Dites à votre loisir le psaume Super flumina, et Te decet hymnus, Deus, in Sion.

Quant à madame de Rohan, il est vrai qu'elle ne croit pas pouvoir se passer de quelque religieuse, et il seroit dur de l'y obliger. Celle qu'elle mènera est la personne du monde dont il y a le moins à craindre, et qui paroît me devoir être la plus soumise elle n'aura point du tout un air de gouvernante ni de conseillère: ce ne sera que pour un temps, et nous en serons le maître. L'autre Sœur est une converse, qui prend soin de mademoiselle de Rohan. On n'a pas encore de nouvelle de la signature des bulles

Il est certain qu'on peut être infidèle à un grand attrait de la grace, et c'est ce qui concilie la reconnoissance avec l'humilité. Il faut prier l'au-ne les aura que pour Pâques ou environ. Laissez

teur de la grace de nous donner cet attrait, auquel on ne sait pas résister.

Vous feriez mal de vous retirer souvent de la communion. Je ne vous le permets que très rarement, et lorsque vous sentirez que la faim de cette viande céleste pourra être excitée par cette espèce de jeûne spirituel.

J'instruirai M. votre frère des choses que yous me mandez sur la religieuse étrangère, qui pourroit accompagner madame de Rohan. Je ferai ce qu'il faudra sur tout cela. Je salue de tout mon cœur madame de Luynes, et me réjouis de sa convalescence. Tout à vous, ma Fille. A Versailles, ce 24 février 1693.

LETTRE CVIII.

Sur la communion, l'oraison, l'obéissance, et la nouvelle

*abbesse.

Vous devez savoir à présent, ma Fille, que j'ai reçu toutes vos lettres précédentes. Celles du samedi 28 février et du 2 mars me furent ren

dues hier en même temps. N'hésitez point à communier malgré cette peine : gagnez sur vous de ne la confesser pas. Suivez votre attrait dans l'oraison. Si Dieu vous le continue, malgré toutes les infidélités où vous pouvez tomber, c'est un effet de sa bonté, à laquelle vous ne pouvez ni ne devez donner des bornes. Vous auriez à

on

dire au père Toquet ce que Dieu lui inspirera; mais ne paroissez en rien. Je serai, s'il plaît à Dieu, lundi à Meaux. Je vous verrai bientôt après, s'il plaît à Dieu, et nous dirons ce qui ne se peut écrire.

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