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avec un soin scrupuleux, en mettant à profit de nombreux documents manuscrits conservés aux Archives de l'Empire.

Etudes historiques sur l'administration des voies publiques en France aux XVII et XVIII' siècles, par E. J. M. Vignon, ingénieur en chef des ponts et chaussées, directeur du dépôt des cartes et plans et des archives au ministère de l'agriculture, du commerce et des travaux publics. Paris, imprimerie de Thunot, librairie de Dunod, 1862, 3 volumes in-8° de x111-415, 358 et 281 pages. Cet ouvrage considérable, dont le sujet est neuf et l'intérêt réel, a été puisé aux meilleures sources, et est accompagné de nombreuses pièces justificatives. C'est un travail trèsrecommandable, qui sera consulté avec fruit pour la solution de bien des questions historiques ou administratives.

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Compte rendu des travaux de la Société du Berry, à Paris; neuvième année. Paris, imprimerie et librairie de Chaix, 1862, in-8° de vin1-355 pages. Nous avons eu plusieurs fois l'occasion de signaler l'intérêt varié des publications de la Société du Berry. Le volume que nous annonçons n'est inférieur, sous aucun rapport, aux précédents. On remarquera dans les chapitres consacrés à l'agriculture, à la législation, à l'hygiène, à l'économie domestique, de sérieux et importants mémoires dus à MM. le duc de Maillé, Chatégnier, de la Tremblais, Boyer et Stanislas Martin. L'érudition historique, l'archéologie et l'histoire littéraire y sont aussi dignement représentées. Nous signalerons notamment une étude sur l'Église et la féodalité dans le bas Berry au moyen âge, par M. Desplanque; un mémoire sur les légendes de quelques saints du Berry par M. Just Veillat; un rapport de M. Pérémé sur les antiquités de Neuvy-sur-Baranjon; une étude sur Guy de Fontenay, poëte berruyer du xv siècle par le même, et une notice biographique de M. Advielle sur Nicolas de Nicolay, écrivain du xvr siècle, à qui l'on doit une description topographique du Berry.

Tableau de la Cochinchine, rédigé sous les auspices de la Société d'Ethnographie, par MM. E. Cortambert et Léon de Rosny, précédé d'une introduction par M. le baron Paul de Bourgoing, sénateur, avec carte, plan et gravures. Paris, imprimerie de Cosson, librairie de Le Chevalier, 1862, in-8° de xv-349 et xiv pages. Ce travail collectif, rédigé sur des documents puisés aux meilleures sources, offre des renseignements variés et dignes d'intérêt. M. Cortambert y a réuni les indications géographiques et statistiques les plus récemment recueillies sur la Cochinchine, avec des notions sur les mœurs et les coutumes de cette contrée, et il a joint à son travail une carte contenant l'empire d'Annam, le Kambodje et la basse Cochinchine, devenue possession française. M. de Rosny s'est associé à cette publication en la complétant par un vocabulaire de la langue cochinchinoise et un résumé de l'histoire du pays. On remarquera en outre dans l'appendice une notice bibliographique de quelques ouvrages chinois traitant de la Cochinchine.

Paléographie des charles et des manuscrits du x1' au XVII' siècle, par Alph. Chassant; cinquième édition, augmentée d'une instruction sur les sceaux et leurs légendes et de règles de critique propres à déterminer l'âge des chartes et des manuscrits non datés. Imprimerie de Hérissey, à Évreux, librairie d'Aubry, à Paris, 1862, in-12 de iv-159 pages, avec dix planches. Cette cinquième édition du livre de M. Chassant contient des additions et des améliorations qui ajoutent encore à l'utilité de cette paléographie élémentaire.

Six lectures on political economy, delivered at Cambridge in michaelmas term 1861,
by W. Whewell, d. d. master of Trinity college, Cambridge, 1862, in 8°, XII-102 pages.
Six leçons sur l'Economie politique, etc. Ce qui donne à ces leçons un intérêt
particulier, c'est qu'elles ont été faites pour le prince de Galles, pendant qu'il sui-
vait les cours de l'université de Cambridge. A la demande du prince Albert, l'il-
lustre D' Whewell voulut bien se charger de ce soin, et il enseigna au futur héritier
de la couronne les principes les plus généraux et les plus essentiels de la science. C'est
nécessairement un résumé très-concis; et le D' Whewell s'est attaché surtout à
faire un exposé le plus clair possible d'après les auteurs les plus autorisés. Mais,
prétendre à être nouveau, ce petit manuel sera fort utile, car il contient tout ce
que l'économie politique présente de plus solide et de moins contestable. L'auteur
s'est spécialement arrêté, dans les deux dernières leçons, à l'étude des fermages et
à l'état actuel du système agricole en Angleterre.

Travels in Peru and India, while superintending the collection of chinchona plants
and seeds in South America and their introduction into India; by Clements R. Mar-
kham, with maps and illustrations. Londres, Murray, 1862, in-8° de 572 pages.
Le principal but de cet ouvrage est de faire connaître les essais tentés récem-
ment pour introduire dans l'Inde la culture du quinquina, qui tend à disparaître
de l'Amérique méridionale. Le livre de M. Markham donne en outre beaucoup de
détails nouveaux ou peu connus sur la civilisation, les mœurs, et les ressources in-
dustrielles et commerciales des contrées qu'il a parcourues.

Bogdan Chmielnicki, par M. Nicolas Kostomarof. (2o article de M. P. Mérimée.)
Dessins et peintures bouddhiques. (1er article de M. Barthélemy Saint-Hilaire)..
Le Guide des égarés, par Moïse ben Maîmoun, dit Maimonide, publié et traduit
par S. Munk. (3° article de M. Franck.)..

-

Fragmenta historicorum græcorum, etc. Scriptorum de rebus Alexandri Magni
fragmenta, par Car. Müllerus. Diogenis Laertii, etc. libri X, par G. Cobet.
Olympiodori, Ammonii, Jamblichi, Porphyrii et aliorum, vitæ Platonis,
Aristotelis, Pythagoræ, par Ant. Westermann; Marini vita Procli, par J. F.
Boissonade. Histoire du Roman,
Le Merveilleux dans l'antiquité

grecque et latine, par

A. Chassang. (3o et dernier article de M. E. Egger.). . .

Livres nouveaux..

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DES SAVANTS.

MARS 1863.

THÉÂTRE COMPLET DE TÉRENCE, traduit en vers par le marquis Paris, Michel-Lévy frères. 1 vol. grand in-18,

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de Belloy.
XII-438 pages.

Voltaire écrivait à madame du Deffand, qui s'était avisée un jour de vouloir comparer Virgile et Pope: «Savez-vous le latin, Madame? Non. «Voilà pourquoi vous me demandez si j'aime mieux Pope que Virgile. Ah! Madame, toutes nos langues modernes sont sèches et pauvres et <«sans harmonie en comparaison de celles qu'ont parlées nos premiers << maîtres, les Grecs et les Romains. Nous ne sommes que des violons de « village 1. » Si madame du Deffand avait eu la fantaisie de juger Térence, et qu'une traduction pareille à celle que j'ai sous les yeux fût tombée dans ses mains, elle aurait pu répondre à Voltaire que la langue du traducteur français n'avait rien qui ressemblât à un violon de village, et qu'il savait, au contraire, habilement manier un instrument souple, harmonieux, expressif et sonore, presque autant que le latin. Et, de plus, elle aurait affirmé qu'il joignait l'exactitude à l'élégance, si, piquée au jeu, elle eût voulu, ne fût-ce que pour contredire Voltaire, avec qui elle aimait quelquefois à disputer, se mettre en état de lire l'œuvre même du poète romain; mais elle était trop paresseuse pour cela. Nous y suppléerons.

Hy a. en effet, deux épreuves à faire subir à une traduction : d'un côté, la confrontation avec le texte qu'elle doit interpréter; de l'autre,

Correspondance de Voltaire, edit de Beuchot, n° 2062.

la lecture séparée et suivie, comme d'un écrit original. Commençons par celle-ci.

La versification de la comédie, de la vraie comédie, celle que les maîtres ont appelée le miroir de la vie humaine, non pas la caricature extravagante ou satirique, ni la déclamation dialoguée visant aux mots imprévus et scintillants plus qu'à l'observation juste et profonde, cette versification me semble, de tous les genres de poésie, celui où il est le plus difficile d'atteindre et de garder la mesure, celui qui exige le tact le plus délicat et l'esprit le plus judicieux avec l'entrain et la verve, le plus de facilité familière avec une sorte de noblesse et de distinction, et, dans l'imitation constante de la réalité, un rayon d'idéal qui lui donne le relief et la couleur. Trop uni et trop vulgaire, le style de la comédie devient froid et insipide; trop fleuri et trop orné, il sort du bon naturel et de la vérité, et que sera-ce encore, si, pour passer entre ces écueils, l'écrivain s'enferme volontairement dans les liens d'une phrase donnée, où il faut se mouvoir avec aisance, le paraître du moins, et, s'inspirant de la pensée d'autrui, en reproduire une copie fidèle, une transformation vivante, sans y ajouter du sien, sans rien dérober de ce qu'il doit rendre?

A quoi sert-il de se donner tant de peine? dira l'école des dramatistes modernes. Ne vaut-il pas mieux faire parler ses personnages comme parle tout le monde? La comédie, ce sont les intérêts et les passions, les vices et les ridicules, les usages, les manières, le langage de la société transportés sur la scène. Oui, assurément; mais ce n'est pas seulement cela, pas plus que le moulage en cire d'une figure n'est une œuvre du sculpteur ou du peintre. La comédie est une image des choses de la vie, mais une image que l'art grandit, élève, anime, et à laquelle il communique ce charme secret que n'aura jamais, quelque habile qu'il soit, le mécanisme de l'imitation matérielle.

Le rhythme en soi a quelque chose qui plaît et qui sympathise à notre nature. Cette musique de la parole ajoute beaucoup à l'agrément et même à la force de l'expression, et semble donner du ressort à la pensée. Lorsque vous lisez le Festin de Pierre et l'Avare, même la prose si riche et si puissante de Molière laisse encore à désirer un dernier complément, cette lumière de la versification, qui prête tant d'éclat aux Femmes savantes et au Misanthrope. Il faut garder cette condition du grand art théâtral, ne fût-ce que comme une barrière contre les invasions de la littérature facile, qui ne veut procéder que d'elle-même.

Revenons à la double épreuve à laquelle nous devons soumettre le traducteur de Térence. Ouvrons le livre au hasard. Je rencontre la pre

mière scène des Adelphes, cette exposition en forme de prosopopée de
la thèse éternellement controversée, «lequel vaut mieux de l'indul-
«gence ou de la sévérité dans l'éducation?» d'où Molière a tiré son su-
jet de l'École des maris, en surpassant, comme toujours, son modèle.
L'exposition, chez lui, est plus dramatique et plus vraisemblable; c'est
la conversation ou plutôt la dispute des deux frères très-opposés d'hu-
meur et de caractère, et usant, avec leurs pupilles, de procédés tout
différents; l'un, doux et complaisant, l'autre jaloux et tyrannique. Les
anciens, dans leurs vastes théâtres remplis d'une foule immense et
bruyante, sacrifiaient volontiers la vraisemblance de l'action aux néces-
sités de l'explication préparatoire, à la clarté toute nue du programme
de la pièce. C'est Micion, le bon et généreux père, qui vient, tout seul
et sans détour, instruire le spectateur; il sort de sa maison :

Storax! Personne encore, et voici le matin;
Eschine aura donné la nuit à ce festin.
J'appelle en vain mes gens partis à sa rencontre.
Le proverbe dit vrai, tout ceci le démontre :
Préférez éprouver ce que dit et pressent
Une femme en courroux sur son époux absent,
A ce qu'en pareil cas, sur leur progéniture,
Suggère à des parents la voix de la nature.
Une épouse, du moins, jusqu'à votre retour,
Vous suppose attardé par le vin et l'amour,
Et croit que, soulagé du poids de votre chaîne,
Vous prenez le plaisir et lui laissez la peine!
Mais moi, pour une nuit qu'il donne à ce repas,
Quels malheurs pour mon fils ne redouté-je pas!
L'air glacé de la nuit, un abîme, une chute,
Un membre tout au moins rompu dans une lutte.

Ah! qu'un homme est donc fou, qui, sans savoir pourquoi,
Se ménage quelqu'un à mieux aimer que soi!

Notez que ce garçon n'est qu'un fils de mon frère,
Et d'un frère de qui grandement je diffère.
A peine adolescents, tout contrastait en nous :
La ville et ses loisirs répondaient à mes goûts;
J'y vécus doucement, sans tracas, sans ménage,
Ce qui, selon plus d'un, a bien son avantage.
Mon frère de ma vie a pris tout le rebours :
A sa maison des champs il confine ses jours,
Marié, réprouvant le luxe et la dépense,
Et père de deux fils, dont l'aîné, dès l'enfance,
Élevé sous mes yeux par droit d'adoption,
Est bientôt devenu ma seule affection.

Afin qu'il me chérisse en retour, il n'est peine
Que pour le contenter chaque jour je ne prenne;

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