Images de page
PDF
ePub

(1677-1753). Sans offrir aucun fait nouveau de quelque importance, ces biographies
sont intéressantes par l'abondance des détails, surtout celles de Vallon de Mimeure
et de Languet de Gergy.

-

Les origines du palais de l'Institut. Recherches historiques sur le collége des Quatre-
Nations, d'après des documents entièrement inédits, par Alfred Franklin. Paris,
imprimerie de Bonaventure et Ducessois, librairie d'Aubry, 1862, in-12 de 1x-205
pages. - M. Alph. Franklin, qui a publié récemment une intéressante Histoire de
la bibliothèque Mazarine, continue ses recherches sur les origines du palais de l'Ins-
titut en retraçant les annales du collège des Quatre-Nations, dont les bâtiments sont
occupés aujourd'hui par le premier de nos corps savants. Il n'avait rien été publié
jusqu'ici sur ce collége. Les détails donnés par M. Franklin sont curieux, et ont le
mérite d'être inédits. L'auteur les a puisés, pour la plupart, dans les registres des
procureurs du collége des Quatre-Nations, déposés aux Archives de l'Empire.

k

BELGIQUE.

-

Histoire des Carolingiens, par L. A. Warnkonig et P. A. F. Gérard. Mémoire
couronné. Bruxelles, librairie de J. Rozez; à Paris, chez A. Durand, 1862, deux
volumes in-8° de xxv-486 et 454 pages. L'Académie royale des sciences, des
lettres et des beaux-arts de Bruxelles avait mis au concours, en 1858, la question sui-
vante: « Exposer l'origine belge des Carolingiens; discuter les faits de leur histoire
aqui se rattachent à la Belgique.» Le savant mémoire que MM. Warnkonig et
Gérard publient aujourd'hui a été jugé digne du prix, «comme approfondissant
<< toutes les parties de la question, et résumant avec érudition les textes des anciens
« historiens et les travaux de la science moderne. » C'est en effet une œuvre consi-
dérable, écrite surtout d'après les sources, et qui nous paraît mériter, à tous égards,
la distinction qu'elle a obtenue.

TABLE.

Pages.

Bogdan Chmielnicki, par M. Nicolas Kostomarof. (1o article de M. P. Mérimée.)
Les mosaïques chrétiennes des basiliques et des églises de Rome (2o article de
M. Vitet.)...

5

26

Les moines d'Occident, depuis saint Benoît jusqu'à saint Bernard, par M. de Mon-
talembert. (4° et dernier article de M. É. Littré.). . . . .

Le duc et connétable de Luynes. (13° et dernier article de M. Cousin.). . . . . . .
Nouvelles littéraires. - Livres nouveaux : Fragments pour servir à l'histoire de la
comédie antique; De l'âme humaine; Histoire des Carolingiens, etc. ....

-

40

52

71

FIN DE LA TABLE.

DES SAVANTS.

FÉVRIER 1863.

Богданъ Хмельницкій

Сочиненіе Николая Костомарова.

BOGDAN CHMIELNICKI, par M. Nicolas Kostomarof.
Saint-Pétersbourg, 1859.

DEUXIÈME ARTICLE1.

Peu de jours après la victoire de Korsun, Bogdan Chmielnicki établissait son quartier général à Biela-Cerkow pour organiser à la fois son armée et un gouvernement. Il n'avait pas voulu prendre le titre d'ataman, que lui offraient ses soldats, car, disait-il, au roi seul appartenait d'en donner l'investiture; et de tous les insignes du commandement il n'avait accepté que le sceau de l'armée zaporogue. En réalité, il était le chef reconnu, non-seulement des Cosaques de l'Ukraine, mais encore de toutes les populations russiennes, enthousiastes de sa gloire et de ses succès. Il présida en cette qualité une assemblée de près de 70,000 hommes, et, malgré l'ardeur belliqueuse des nouvelles recrues, il décida le cercle à envoyer des députés à Varsovie pour traiter de la paix.

Vladislas était mort le 2 mai 1648, plus de quinze jours avant le combat de Korsun; mais Chmielnicki, feignant de l'ignorer, lui écrivit de la manière la plus soumise, pour protester de son dévouement et

1

Voir, pour le premier article, le cahier de janvier 1863, p. 5.

་་

[ocr errors]

lui demander de soulager les misères de ses compatriotes. « Après avoir épuisé tous les moyens de faire valoir leurs droits, les Cosaques, disait<«<il, réduits au désespoir, avaient eu recours aux armes. Ils étaient prêts « à les déposer, dès que S. M. aurait ordonné qu'ils fussent traités comme « le méritaient des sujets fidèles à la République.» En terminant, il suppliait le roi d'envoyer au plus tôt des commissaires en Ukraine, pour connaître la vérité et remédier aux maux produits par la tyrannie des gouverneurs polonais. Chmielnicki recevait en même temps une lettre du vayvode de Braclaw, Kissel, qui, professant la religion grecque, et s'étant souvent montré favorable aux demandes de ses coreligionnaires, était à la diète une sorte de patron reconnu par les Cosaques. Kissel remerciait Chmielnicki de ses intentions pacifiques, le conjurait de renvoyer les Tartares, et lui promettait que cette fois les plaintes de l'Ukraine seraient écoutées. Au milieu de ces négociations, Chmielnicki pressait avec la plus grande activité ses préparatifs militaires. De toutes les provinces voisines du Dniepr, les paysans accouraient en Ukraine pour s'enrôler. Devenir Cosaques, c'est-à-dire hommes libres, tel était le vœu de tous les Russiens.

Chmielnicki et les Anciens parmi les Zaporogues se préoccupaient beaucoup plus, selon toute apparence, des antiques priviléges des Cosaques que de l'affranchissement des paysans; mais les victoires des Eaux-Jaunes et de Korsun avaient éveillé dans toutes les provinces méridionales l'idée d'une indépendance absolue. Plus de maîtres, plus d'étrangers, l'ancienne religion, ce fut le cri général partout où les paysans appartenaient à la communion grecque. Les popes et les évêques furent les premiers à souffler le feu de la révolte et à prêcher la vengeance contre les oppresseurs de la foi orthodoxe, c'est-à-dire contre les catholiques et les Juifs. Les Cosaques, soldats de profession, ne s'étaient pas montrés cruels, après la victoire, envers d'autres soldats dont ils estimaient la bravoure; mais les paysans russiens, esclaves révoltés et sectaires fanatiques, furent sans pitié lorsque le sort des armes les favorisa. Tandis que Chmielnicki s'appliquait à compléter ses régiments avec des hommes habitués à la guerre, des aventuriers hardis et féroces se mettaient à la tête des serfs insurgés. Armés de faux emmanchées à revers, de piques et de bâtons, ils saccageaient les maisons isolées, massacraient sans merci tous les Polonais, tous les catholiques, tous les Juifs qui leur tombaient entre les mains. Les Juifs leur étaient particulièrement odieux. En général, l'intendant ou l'homme d'affaires d'un pane polonais était un Juif. Son industrie ordinaire était d'avancer de l'argent à son maître et d'en obtenir, pour se rembourser, l'autorisa

tion de pressurer les paysans. Les Russiens attribuaient aux Juifs toutes les exactions, toutes les violences dont ils étaient victimes. Leur vengeance fut horrible. En quelques semaines maint château fut détruit, maint village brûlé, plusieurs villes importantes surprises et cruellement saccagées. Les plus féroces bandits, les plus ingénieux à inventer des supplices atroces, étaient nommés par acclamation chefs de ces bandes insurgées, qui s'appelaient Haïdamaks, d'un mot tartare qui signifie, je crois, partisans; sans doute les Cosaques n'eussent pas souffert que cette populace furieuse se mêlat à leurs rangs et prit leur nom. Un certain Morosenko, dont les paysans de la Volhynie conservent encore la mémoire, arrachait une lanière de peau autour du cou des femmes polonaises ou juives qu'il rencontrait, c'est ce qu'il appelait leur faire cadeau d'un ruban rouge. Ganja, un des colonels de Chmielnicki, l'avait quitté pour se mettre à la tête des insurgés de la Podolie. S'étant emparé par trahison de la ville de Nemirof, il y massacra tous les gentilshommes et tous les Juifs, ces derniers au nombre de six mille. Le château de Nesterow, où s'étaient réfugiées la plupart des familles nobles de Podolie, essaya de résister. Ganja avait quelques canons d'un trop faible calibre pour faire brèche aux remparts, mais qui détruisaient les toits des maisons et ne laissaient aucun repos aux assiégés. Ils demandèrent à traiter et offrirent une rançon. Les Haïdamaks répondirent qu'ils accepteraient une rançon pour les Polonais, mais non pour les Juifs. « Ce <«< sont nos ennemis mortels, disaient-ils, et nous ne nous retirerons que « si vous nous les livrez. » Après quelque hésitation, les Polonais expulsèrent les Juifs du château. Préparés au sort qui les attendait, les malheureux Israélites sortirent des remparts avec leurs femmes et leurs enfants, invoquant la vengeance divine contre les lâches qui les envoyaient à la mort. On dit que le massacre dura trois jours, accompagné d'épouvantables cruautés. Las de tuer, les insurgés reçurent la rançon des Polonais et s'éloignèrent; mais, dès le lendemain, survint un autre chef de bande, qui saccagea le château et égorgea ce qui restait de ses habitants.

L'insurrection, avec ses hideuses saturnales, s'étendit rapidement sur les deux rives du Dniepr, en Podolie, en Volhynie et dans la Sévérie, province qui appartenait alors à la Pologne. Elle pénétra même en Lithuanie, malgré l'énergique résistance du prince Janus Radziwill. Partout les masses populaires poursuivaient avec une égale fureur la noblesse, le clergé catholique, mais surtout les Juifs et les Jésuites. Un rabbin, qui a écrit le récit des misères de ses coreligionnaires dans ces temps déplorables, estime à plus de cent mille le nombre des Juifs

massacrés, sans compter ceux qui, obligés de fuir au hasard, moururent de faim et de froid dans les forêts ou sur les routes. Jusques à aujourd'hui les souvenirs de cette grande catastrophe se sont conservés dans les pays qui en ont été le théâtre, revêtus par l'imagination slave de couleurs fantastiques, dont, à notre avis, les chroniqueurs contemporains n'ont pas toujours su se défendre. Aux trop célèbres chefs de Haïdamaks, tels que Ganja, Nebaba, Krivonoss et tant d'autres, les paysans ajoutent des monstres imaginaires, types dignes de ce temps d'épouvantable mémoire. Ainsi les légendes populaires racontent les exploits et les crimes d'un kan tartare d'un autre âge, Choloudivoï Bouniak, espèce de vampire, mort depuis longtemps, mais ranimé par une puissance surnaturelle. Sous sa pelisse, disait-on, il cachait un cadavre en décomposition. Une fois par mois il prenait un bain, et le Cosaque qui le servait voyait avec horreur à quel monstre il avait affaire. Bouniak ne manquait jamais de tuer un témoin qui aurait pu être indiscret. Cela dura quelque temps, jusqu'à ce qu'il eut pour baigneur le fils d'une fameuse sorcière, qui connaissait les vampires à la mine. Elle donna à son fils un gâteau fait avec son lait, et lui dit d'en faire manger au capitaine dès qu'il serait au bain. A peine le vampire en eut-il mangé, qu'il s'écria: «Tu viens d'échapper à la mort; nous sommes frères, à présent que nous avons goûté le lait d'une même mère. Quant à « moi, je suis perdu!» En effet, il mourut dans le premier combat, et cette fois pour ne plus revenir. Cette tradition fantastique atteste l'existence de la fraternité par adoption, pobratimstvo', alors très en honneur parmi les Slaves du midi, Elle était et est encore consacrée par des rites religieux dans l'Église grecque. Il paraît qu'elle pouvait exister entre personnes de religions différentes, car on dit que Chmielnicki et un frère du kan de Crimée s'appelaient pobratimes, ou frères d'adoption.

Les terribles cruautés des Haïdamaks ôtaient à la noblesse polonaise jusqu'à sa valeur si renommée. On fuyait devant le torrent dévastateur, sans essayer de lui résister. Il n'y avait plus de troupes régulières dans les provinces russiennes, et les gentilshommes polonais, isolés et entourés d'ennemis, ne savaient ou ne pouvaient se concerter. Chacun cherchait un refuge dans quelque grande ville. Le prince Jérémie Wiszniowiecki, descendant des Jagellons, et un des plus riches seigneurs de ce temps, donna le premier l'exemple de la résistance, et courut fièrement lui-même au-devant de l'insurrection. Propriétaire d'immenses domaines

1 Побратимство.

« PrécédentContinuer »