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vaillant à repousser le mal et à faire le bien, ce qui est la vertu ou la perfection humaine, ou en travaillant à faire le mal et à repousser le bien, ce qui est le vice ou la dégradation humaine.

En effet, en établissant les lois de l'activité humaine, soit bienfaisante ou malfaisante, soit vertueuse ou vicieuse, nous montrons comme quoi cette activité ne peut être arrêtée dans sa marche : ainsi, il dépend bien de l'homme de faire un choix, d'aimer un objet plutôt qu'un autre, d'aimer le mal plutôt que le bien, de préférer l'erreur à la vérité, l'iniquité à la justice, mais il ne dépend pas de lui de ne pas aimer; et comme l'esprit d'amour est le principe inspirateur de l'âme, il ne dépendra pas non plus de l'homme de ne rien penser ni vouloir : il pensera au bonheur, et il le voudra forcément. Cette soumission de l'homme à la loi d'un pouvoir supérieur compromet singulièrement sa liberté; mais, sans la connaissance d'un point aussi capital, il ne nous paraît pas possible de rien fonder de stable. Ce qui fait que toutes les institutions religieuses, politiques et sociales ont toutes été

attaquées, démolies ou ébranlées et endommagées; c'est qu'on ne les a plus comprises en exagérant outre mesure la liberté. Pour édifier, il est de toute nécessité de revenir à une connaissance plus vraie et plus approfondie de l'homme.

Nous n'avons pas besoin de dire que nous sommes catholique. Ce bien court exposé indiquerait assez que nous reconnaissons pleinement le grand principe de la chute.

Il y a plus, nous reconnaissons que nos principes rationnels ne sont rien ou ne peuvent rien sans la tradition. C'est qu'au fond ils émanent de la tradition, dont la pure source est la révélation: oui, la raison ou la pensée philosophique, aussi bien que la tradition, ont une origine commune, la révélation. Nous avons fait les plus grands efforts dans un précédent ouvrage pour démontrer cette vérité, qui est le fondement catholique, à savoir : que l'homme ne penserait point si les idées qui forment le fond de son activité intellectuelle,

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Science du bien et du mal, ou Philosophie de la révélation; Paris, 1848.

le fond de toutes les langues, ne lui eussent été révélées.

Nous nous livrons à un travail court, mais substantiel, sur la tradition païenne et la tradition chrétienne, pour y découvrir les bases de l'activité humaine. Cet examen a pour résultat de consacrer nos principes rationnels par l'expérience des traditions, par l'histoire.

A notre point de vue philosophique, nous attachions la plus grande importance à être d'accord avec la parole divine du Christ, qui est venu réhabiliter l'humanité, lui délier la langue et lui rendre l'ouïe; car elle était religieusement sourde et muette: elle ne savait plus ni parler à Dieu, ni entendre sa voix. Dans le beau langage de l'antiquité païenne, certainement trop admiré de nos jours, tout venait de l'homme et retournait à lui. Or, nous avons trouvé un accord parfait entre l'Évangile, l'Église catholique, qui en est le produit et la vie, et nos principes d'éducation, nos lois de l'activité et du développement de l'homme.

Venant à jeter un coup d'œil sur l'état actuel de notre société, nous avons été étrange

ment étonné de la trouver plus païenne que chrétienne. Nous nous sommes demandé d'où venait cette anomalie? Comment, avec l'Évangile et toutes ses traditions catholiques, la société française avait pu devenir ce que nous la voyons? Et nous avons reconnu qu'elle était devenue telle par la renaissance des lettres latines et grecques de l'antiquité, et l'éducation dite classique, mais formellement païenne, qu'on avait greffée sur l'éducation chrétienne.

Après ce mouvement social païen qui a produit ce type de l'honnête homme, qui n'a pour tout bagage que quelques opinions courantes, mais qui ne croit plus sérieusement à rien, excepté à l'argent, à la force matérielle, à la puissance du bras, et qui ne travaille plus que dans un vulgaire intérêt de petits honneurs et de petites jouissances matérielles, nous nous sommes demandé si on avait sondé la profondeur du mal, et si on avait proposé quelque remède? Nous n'avons rien trouvé de suffisant dans les ouvrages français sur l'éducation, rien, dis-je, qui fût à la hauteur de notre temps.

A notre tour, nous avons jeté les bases

d'une réforme dans l'éducation de l'enfance. Conformément à nos principes, nous voulons que cette éducation se fasse dans la famille. Ce principe n'exclut pas la fondation d'écoles primaires pour un grand nombre d'enfants qui ne pourraient malheureusement pas être élevés dans la maison paternelle; mais alors, ces écoles seraient surtout animées de l'esprit de famille, qui nourrit et développe le cœur de l'enfant. Nous proposons le retour à de bonnes traditions chrétiennes qui se sont perdues par le malheur des temps, et la restauration de plusieurs usages de nos pères. Le principe chrétien aussi bien que l'expérience des siècles ont démontré qu'il était nécessaire d'user de sévérité dans l'éducation; notre sentiment est qu'on ne peut réussir qu'à gâter l'enfance, dont tout le reste dépend, avec le système actuel de relâchement de tout respect, d'insigne complaisance pour tous les caprices mauvais, et de négligence ou d'absence de tous soins moraux.

Pour l'adolescence, la principale et essentielle réforme que nous proposons, c'est l'abotion de l'éducation quasi païenne des colléges,

a.

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