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PERIN

peu

Perin revint à Rome chercher fa femme pour la mener à Pife où il avoit deffein de s'établir, il y acheta une maison, del VAGA. & il commença les peintures du Dôme qu'il abandonna de temps après pour quelques amourettes qui l'appellérent à Genes. Le Prince Doria lui donna encore de l'occupation, ce qui l'empêcha de repondre aux instances qu'on lui faifoit de revenir à Pife pour terminer ce qu'il y avoit commencé. Enfin de retour en cette Ville, il trouva le Dôme fini; ce qui le mit fi fort en colère, qu'il partit fur le champ pour Rome. Il termina dans l'Eglife de la Trinité du Mont la chapelle Maffimi qu'avoit commencé Jules Romain; le Pape le chargea de racommoder les ornemens de clair-obfcur qui accompagnent au Vatican les peintures de Raphaël, & il obtint pour ce travail une penfion viagere. La falle Royale fut enfin l'objet de fes travaux; on y voit de fa main des devises & des armes de la maison Farnéfe, décorées de Stucs admi rables.

Sur la fin de fes jours, Jules Romain étant à Mantouë & le Fattore étant mort, Perin devint le premier peintre de Rome; toutes les grandes entreprises lui étoient confiées. A l'exemple de Raphaël, il confumoit fon temps à deffiner & à faire exécuter les idées.

Le plaifir trop fréquent de boire avec fes amis, & les fatigues de fon art l'épuifèrent au point qu'il devint asmatique; enfin il mourut dans une ruë de Rome, en parlant à un de ses amis en l'année 1547. à l'âge de quarante-fept ans ; on le plaça à la Rotonde parmi tous les illuftres de fon art.

On lui a reproché qu'il donnoit à toutes fes figures de femmes le même air de tête, parce qu'il prenoit toujours pour modéle celle de fa femme.

Ses difciples font Marcel Venufti, Louis Vargas de Seville; Girolamo Siciolante dà Sermoneta.

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Les deffeins de Perin font très-légers & d'une touche fort fpirituelle; il les arrêtoit ordinairement d'un trait de plume, il les lavoit à l'encre de la Chine ou au biftre avec un peu blanc au pinceau. Ses deffeins d'ornemens & de frises font excellens : quoiqu'il ait tâché de fuivre Raphaël, il s'eft trop livré à fon génie en abandonnant la nature, & il a contracté une maniére que l'habitude fait aisément diftinguer.

Outre les Loges de Raphaël où il y a beaucoup d'ouvrages

de ce maître ainfi qu'au Vatican, on voit de fa main une defcente de croix à la Minerve, une Vierge le Jefus & faint Jo- PERIN feph à fan Stefano rotundo. A faint Ambroife du Cours, le maî- del VAGA, tre Autel & les peintures à frefque qui font dans l'oratoire près la facristie. A faint Marcel des religieux de fainte Croix on voit dans une chapelle la création d'Adam & d'Eve grands comme nature, & de l'autre côté un grand faint Marc & un faint Jean avec deux enfans qui tiennent un chandelier terminés par Daniel de Volterre. Dans la chapelle Pucci à la Trinité du Mont où font les prophétes Daniel & Ifaïe d'une grandeur confidérable, dans les angles de la corniche il a peint la vie de la Vierge en quatre morceaux, un autre en face fous l'arcade de la voûte & en dehors deux prophétes avec deux enfans qui foutiennent des armes. Dans la chapelle Massimi de la même Eglife, & que Jules Romain avoit commencée, Perin à peint les murs chargés d'ornement & de petits fujets d'hiftoire fainte d'un fini précieux, l'un eft la pif cine, l'autre la résurrection du Lazare. Il deffina les métamorphofes des Dieux pour la pourfuite de leurs amours, fujets très libres que Jacques Caraglius a gravé.

Il a peint à Genes dans le palais Doria quelques actions de cette maifon, Jupiter qui foudroye les géans, les métamorphofes d'Ovide, & il a fait exécuter plufieurs morceaux fur fes

cartons.

Dans la galerie Ambrofianne à Milan, on voit de sa main un lavement des pieds.

Le Roy a un petit tableau appellé le Parnaffe où les Mufes & les Néréïdes difputent en présence des Dieux, Mars & Vénus avec un amour tenant un foudre à la main.

On voit au palais Royal un faint Jerôme couché fur la terre avec un ange placé dans le haut fonnant de la trompette. Jacques Caraglius de Verone, Jules Bonafone, Hollar ont gravé d'après Perin del Vaga, & il y a trois morceaux de lui dans le recueil de Crozat,

DANIEL de VOLTERRE.

DANIEL DE
VOLTERRE.

L ne faut fouvent qu'un ouvrage pour immortalifer un peintre: c'eft ce qu'on remarque dans la perfonne de Daniel Ricciarelli de Volterre, nommé ainfi, parce qu'il étoit né en cette Ville en 1509.

Extrêmement mélancolique & long dans fon travail, Daniel naquit avec peu de difpofition pour la peinture. On le mit chez le Sodoma, chez Balthazar Peruzzi & en dernier lieu chez Michel-Ange, dont il fuivit entiérement la maniére & les confeils.

Daniel ne trouvant point d'occupation à Volterre, fe rendit à Rome, il y apporta un tableau d'un Christ à la colonne dans lequel il avoit employé tout fon fçavoir : le cardinal

Trivulzi à qui il le fit voir, l'acheta, & accorda fa protection

à Daniel : il lui donna ordre de peindre dans fa vigne l'hif- DANIEL DE toire de Phacton & ce morceau fut le commencement de fa VOLTERRE. réputation.

Perin del Vaga chargé dans ce temps de tous les grands ouvrages, fe fit un plaifir de travailler avec lui dans la chapelle Malimi à la Trinité du Mont; la Princeffe des Urfins fur la réputation de Daniel lui donna auffi une chapelle dans la même Eglife pour y représenter les myftéres de la croix. Ce morceau lui coûta fept années de fon temps, & c'eft la plus belle chofe qu'il nous ait laiffée. Quoique l'ennui du peintre s'y manifefte en plufieurs endroits, on ne peut qu'admirer fa patience & fon habileté; des huit tableaux qui repréfentent l'hiftoire de la vraie croix, la defcente de JefusChrift de ce bois facré eft le plus eftimé, l'expreffion en eft admirable. Il y a peint encore fous l'arcade de la corniche deux belles figures de Sibylles & la voûte eft compartie en ornemens de Stuc.

La réüffite de cette chapelle mit Daniel de pair avec les plus grands peintres. Michel-Ange l'aimoit beaucoup, & s'excufant fur fon grand âge lorfqu'il s'agiffoit d'entreprendre quelque ouvrage, il le propofoit en fa place : Sébastien del

Piombo dont il fuivit la maniére fut auffi de fes amis.

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pen

Après la mort de Perin del Vaga, Paul III. nomma Daniel ordonnateur des peintures du Vatican avec la fion qui y eft attachée. Le cardinal Farnéfe lui fit peindre une belle frife dans fon palais dont il s'acquitta en habile homme il ne fut pas auffi heureux à la chapelle qui eft visà-vis celle des Urfins, à l'exécution de laquelle il avoit employé quatorze ans, il eft vrai que prefque tout eft peint sur fes cartons, & qu'il n'y a de fa main que la Vierge qui monte les marches du Temple, fon affomption, & en bas les douze apôtres. Jules III. qui fuccéda à Paul, priva Daniel de fa penfion & de la direction du Vatican. Il lui fit faire feulement la décoration de la fontaine d'une Cléopâtre antique qui est au bout du grand corridor de Belvedere, laquelle il orna de très-beaux Stucs: la lenteur avec laquelle il travailloit lui nuifit beaucoup dans l'efprit du Pape.

Daniel quitta la peinture pour la fculpture, & comme on Jui commanda plufieurs ftatues, il alla choifir les marbres à

Carrare, d'où il paffa à Volterre pour y revoir fes parens. Il DANIEL DE y fit un tableau des Innocens pour l'Eglife de faint Pierre. A VOLTERRE. fon retour à Rome il fut chargé de couvrir ce qui étoit trop nu dans le jugement univerfel de Michel-Ange; ce fut le feul moyen de conferver ce beau morceau dont le Pape avoit réfolu la deftruction. Catherine de Médicis lui fit proposer de fondre un cheval de bronze pour porter la figure de Henri II. Ce cheval fut modélé fur les avis de Michel-Ange, & la fonte manqua; Daniel l'entreprit de nouveau, & réüffit à le fondre d'un feul jet; fes fatigues, une complexion délicate le firent tomber malade, & la mort l'empêcha de faire la figure de Henri II. Ce cheval fe voit dans la place Royale à Paris, & porte la statuë de Louis XIII. Rome perdit Daniel en 1566. à l'âge de cinquante-fept ans ; il fut enterré proche les Chartreux.

des con

Ses éléves font Michel Alberti Florentin, Jean-Paul Rofetti de Volterre, Feliciano da fan Vito, Biagio da Carigliano Piftolefe, Marc de Sienne, & Jacques Rocca Romain. La rareté de fes deffeins les expose peu aux yeux noiffeurs ; ils font deffinés à la pierre noire avec un petit lavís d'encre de la Chine, les attitudes & les caractéres font dans le goût de Michel-Ange, des figures un peu courtes, une touche lourde & peinée; des draperies fondues & prefque eftompées les diftinguent aisément,

Ses principaux ouvrages font à Rome principalement fa belle chapelle des Urfins à la Trinité du Mont ; vis-à-vis il a donné les cartons d'une chapelle & y a peint plufieurs morceaux de fa main, c'est la vie de la Vierge.

On voit à faint Marcel al corfo dans la chapelle du Crucifix la création d'Adam & d'Eve, les deux évangéliftes faint Marc & faint Jean qu'avoit commencé Perin del Vaga avec deux enfans d'une carnation admirable qui foutiennent un chandelier, & les deux évangéliftes faint Luc & faint Matthieu : dans l'Eglife de faint Augustin à la chapelle fainte Croix il a fait une partie des peintures à frefque, qui repréfentent sainte Hélene, & fur les côtés fainte Cécile & fainte Luce : une frife dans le palais Massimi avec plufieurs ornemens de Stuc: une autre frife chez le cardinal Farnéfe & fur le mur le triomphe & les chaffes de Bacchus.

Il a peint au Palais Médicis dans le cabinet d'étude, l'hif toire de Charles V, en huit feuilles,

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