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il davantage pour prouver l'univerfalité de fes talens! Etant très vieux, & ne pouvant plus deffiner avec fermeté, il fe fer- MICHELvit de la main de Tiberro Calcagni fculpteur Florentin, qui termina plusieurs morceaux de fculpture que Michel-Ange BUONAROTA

avoit commencés.

Quoique ce fublime artiste ait excellé dans les trois arts de la peinture, de la sculpture & de l'architecture, il semble que la fculpture doive l'emporter fur les deux autres; on y trouve la légèreté de la main, la belle touche, la correction, l'élégance & le fublime de la pensée. On voit de lui un Cupidon grand comme nature, différent de celui dont on a déja parlé; & un Bacchus tenant une taffe, & de l'autre main la peau d'un tigre avec une grappe de raifin que mange un jeune Satyre. Ces figures font fi parfaites, qu'un (a) auteur Italien dit de lui, qu'en fait de sculpture il ne peut être furpaffé par un autre que par

lui-même.

Sa peinture eft fiére & terrible, comme il a cherché le difficile & le furprenant, elle étonne plus qu'elle ne plaît, fes couleurs font trop tranchantes & tirent fur la brique. Grand anatomiste, il affectoit de charger trop les muscles de fes figures, & d'en outrer les attitudes. S'il n'a pas été le premier peintre de l'univers, il a été du moins le premier artiste qui ait fait paroître ce qu'il y avoit de plus grand dans cet art c'est lui qui en a ouvert le chemin. Raphaël en a fçû profiter, fans jamais abandonner le facile, le naturel & le gra

cieux,

Michel-Ange accablé d'années & d'une fiévre lente, mourut à Rome en 1564. âgé de quatre-vingt-dix ans. Cofme de Médicis le fit enterrer magnifiquement, & enfuite l'ayant fait exhumer secretement, on le tranfporta à Florence, où il eft enterré dans l'Eglife de fainte Croix. On y voit fon buste de marbre accompagné des trois statues de la peinture, de la fculpture, & de l'architecture. Il ne manqua rien à fa pompe, une oraifon funébre & un catafalque avec des tableaux relatifs à fes actions, peints par tous les académiciens de Florence. L'Académie changea les trois guirlandes qu'il avoit pris pour devife, en trois couronnes avec ces mots Ter geminis tollit honoribus.

Infatigable dans fes travaux, il alloit lui-même choisir les marbres à Carrare. Les études qu'il a faites de l'anatomie font

L

ANGE

(a) Ne puo effer Vintonella fcoltura dà altrui che dà fe steffo.

Dolce p. 52.

immenfes. Trop religieux pour avoir tué fon modéle, comMICHEL- me on l'a dit fauffement, afin d'exprimer mieux un Christ ANGE mourant fur la croix, il difoit que la peinture étoit fa femme, BUONAROTA & fes ouvrages fes propres enfans: honoré de tous les Prinil a fervi sept Papes & deux Empereurs; Cofme de Médicis lui parloit toujours le chapeau bas, & plufieurs Papes le faifoient affeoir devant eux.

(a) Un pareil crucifix fe trouve

ces,

Il étoit extrêmement fpirituel dans fes reparties, & faifoit bien des vers. Pour faire connoître à Raphaël qu'il étoit venu voir l'histoire de Pfiché que ce peintre peignoit au petit Farneze, il deffina au charbon une belle tête de Faune dans un des coins du plafond, laquelle existe encore. Raphaël en la voyant s'écria, que ce ne pouvoit être que Michel-Ange qui eût fait cette tête.

Il eut pour éléves Sébastien de Venise, appellé Fra sebastien del Piombo, Antoine Minio, Pierre Urbano Pistolefe, Afcanio della ripa Tranfone.

La plume des deffeins de Michel-Ange eft groffe, mais sçavante, ce font des traits hardis, des hachures croisées de tous côtés, comme une lime, avec un petit lavis de biftre, des plis reffentis, des têtes fiéres & féroces, d'un grand caractére, des attitudes extraordinaires, & des contours très musclés. Baccio Bandinelli fon imitateur à deffiné dans fon goût d'une maniére ferme, mais toujours égale & avec moins de hardiesse & de fineffe que lui. On prétend qu'avant que de mourir, Michel-Ange brûla tous fes deffeins, afin qu'on ne connût pas la peine qu'il s'étoit donnée pour opérer.

On voit à Naples dans le couvent de faint Martin des Chartreux un Chrift flagellé, petit tableau précieux.

Dans la ville de Malte à faint Jean dans la chapelle de la communion la décolation du Saint.

La galerie du Duc de Parme poffède le fameux tableau du jugement univerfel, qui eft l'efquiffe du grand sujet peint dans la chapelle du Pape.

Dans la galerie de Florence le grand rond eft une Vierge à Rome chez le dont la couleur est tranchante à fon ordinaire; on voit à ce Prince Borghese,

les Chartreux de

& un pareil chez qu'on prétend l'original de fon fameux ( a ) crucifix. L'Electeur Palatin à Duffeldorf poffède une Vierge avec le Jefus & faint Jofeph derriére elle.

Naples qu'on af fure tous deux originaux.

Le Roy n'a qu'un feul tableau de ce maître, il représente

David qui terraffe Goliath, peint des deux côtés fur l'ardoise.

ANGE

Au palais Royal il y a une defcente de croix peinte fur bois; MICHELla prière de Jesus-Christ au jardin des Olives, Ganiméde porté dans les airs par une aigle, une fainte famille où la Vierge BUONAROTA tient le Jefus endormi; tous ces tableaux font petits.

Augustin Venitien, Jules Bonafone, les Mantuans, Greuter, Cherubin Albert, Corneille Cort, Beatricius, Matham, Eneas Vicus, Martin Rota, Jean-Baptifte de Cavalleriis Leon d'Aven, Lucas Bertelli, Boel, Van Steen & autres graveurs ont travaillé d'après ce maître, fon œuvre eft de trois cens vingt pièces,

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BARTHELE-
MI di SAN-
MARCO.

RERE Barthelemi di San Marco, prit le jour en 1469. dans la terre de Savignano, à dix milles de Florence. Comme il avoit marqué dans fa jeuneffe beaucoup de difpofition pour la peinture, on le mit à Élorence chez Cofimo Rofelli où il étudia pendant plufieurs années. Le voifinage de la porte de faint Pierre Gatolini le fit appeller Baccio della porta. Les ouvrages de Leonard de Vinci achevérent de le former, & il s'acquit une telle réputation qu'on lui donna à peindre plufieurs Vierges, & une chapelle dans le cimetière de l'Hôpital de fanta Maria nuova. Il y représenta à fresque le jugement univerfel avec une gloire célefte, & beaucoup de figures des plus expreffives.

Ce peintre paffoit pour un homme très rangé & de bonnes

mœurs. Son plus grand plaifir étoit d'entendre un beau fer- BARTHELEmon. Il alla plufieurs fois à ceux de Savonarolla fameux Do- MI di SANminiquain, il fit fon portrait & lia une étroite amitié avec lui

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& avec les autres moines de faint Marc.

· Touché des déclamations de ce prédicateur contre les tableaux indécens, & les livres qui traitent de l'amour profane, il apporta le carnaval fuivant, les peintures & les fculptures nuës de grands maîtres qu'il poffedoit, avec fes livres & tous fes deffeins, & les jetta dans des feux qu'on a coûtume de faire en cette faison.

Bartholomée se trouva dans le couvent de faint Marc lorfqu'on vint fe faifir de favonarolla accufé d'héréfie, ce qui caufa une bataille entre les archers & les moines qui le défendirent avec tant de chaleur, que plufieurs y furent tués. La peur qu'eut Bartholomée en cette occafion périlleuse lui fit faire un vœu que s'il pouvoit fortir de ce danger, il fe feroit Dominiquain; il en prit effectivement l'habit en 1500. Alors les exercices fpirituels du couvent l'occupérent entiérement, & il ne fit pendant quatre années que quelques portraits de religieux.

Dans le temps que Raphaël vint étudier à Florence, il fit connoiffance avec Barthelemi & lui montra les régles de la perspective, ce peintre lui enfeigna celles du bon coloris. Lorsque Bartholomée fut arrivé à Rome quelques années après, les ouvrages de Michel-Ange & de Raphaël l'étonnérent, & lui firent prendre le parti de ne peindre que deux tableaux; l'un repréfentoit faint Paul, & l'autre faint Pierre, il laiffa ce dernier imparfait, & Raphaël l'acheva dans la fuite. De retour à Florence, ce peintre fit connoître les progrés qu'il avoit fait à Rome en peignant un faint Sébastien dont corps étoit fi beau, que les moines l'ôtérent de leur Eglife, à caufe de l'impreffion qu'il avoit faite fur l'efprit de plufieurs femmes.

le

Bartholomée affidu au travail ne peignoit rien que d'après nature. Avant que de commencer un tableau, il faifoit des deffeins de clair-obfcur en forme de cartons, & il avoit inventé un manequin à reffort pour draper commodément ses figures. Afin de rendre fes couleurs plus tendres, il les fçavoit enfumer, & il diminuoit les ombres pour donner plus de reL iij

MARCO.

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