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pofoit pas deux amis qui ont bien voulu traduire dans les livres Hollandois & Flamans ce qui lui a été necessaire.

Au refte on ne prétend affujettir personne au jugement que l'on a porté fur les plus fameux peintres, chacun est dans la pleine liberté d'en juger felon fon goût & fes connoiffances; les perfonnes inftruites n'ont pas befoin de lumieres, celles dont les vuës ne font pas fi étenduës, & qui ne faifissent pas d'abord tout ce qu'il y a à faifir dans un ouvrage, ne feront pas fâchées de trouver une route frayée, qui les conduise à exercer leur jugement, & à perfectionner leurs connoiffances. Le public eft l'arbitre fouverain du mérite & des talens.

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TABLEAUX

VANT que d'écrire l'histoire des grands peintres, & de parler de leurs ouvrages, quelques principes, pour arriver à la connoiffance de ces matieres curieuses, femblent devoir préceder; aucun auteur que l'on fçache n’a traité ce sujet : fi nous avons quelques inftructions fur les deffeins, fur les eftampes, & fur les tableaux, elles ne font point accompagnées des détails néceffaires pour parvenir à les connoître parfaitement.

(a) J'ai con

ment cet excel

Mr. de (a) Piles, auteur de ces inftructions, avoit nu particuliére- regardé comme une chofe (b) impoffible de donlent auteur, & ner des régles certaines fur cette matiere; il fouje lui dois les haitoit que le peu qu'il en a dit, pût encourager cipes de la con- quelque personne à l'augmenter dans la suite : noiffance des nous nous fommes propofés de fuivre fon plan.

premiers prin

deffeins.

Peintres, pag. 65. Ed. 1699.

ce

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Les deffeins infiniment fuperieurs aux eftampes, (b) Abrégé de la vie des tiennent un jufte milieu entr'elles & les tableaux font les premieres idées d'un peintre, le premier feu de fon imagination, son style, son esprit, sa maniere de penfer : ils font les premiers originaux qui fervent fouvent aux éléves du maître, à peindre les tableaux qui n'en font que les copies. Les deffeins prouvent encore la fécondité, la vivacité du génie de l'artiste, la noblesse, l'élevation de fes fentimens, & la facilité avec laquelle il les a exprimés.

Un peintre en peignant un tableau, fe corrige & réprime la fougue de fon génie, en faisant un deffein, il jette le premier feu de fa pensée, il s'abandonne à lui-même, il se montre tel qu'il est.

Les differentes manieres de deffiner fe réduisent à trois, fçavoir, à la plume, au crayon, & au lavis.

La plume fe manie légérement, & eft foûtenuë de hachures du côté des ombres; fouvent on ne fait à la plume que le trait des contours, & on lave du côté des ombres.

Le crayon eft plus ufité & se peut hacher du côté des ombres. On le fert de pierre rouge appellée fanguine, de pierre noire, de mine de plomb, & d'une craie blanche pour piquer les plus vives lumiéres ; cette craie fujette à s'effacer oblige fouvent de la délayer avec de la gomme, & on l'employe avec le pinceau; alors on dit du blanc de craie ou du blanc au pinceau,

Le

Le lavis fe fait avec un pinceau, que l'on trempe dans de la couleur de fuie de cheminée, appellée bistre, de la fanguine, du bleu d'Inde ou de l'encre de la Chine délayée, & que l'on applique du côté des ombres, en l'adouciffant fur les parties

éclairées.

Il y a des deffeins qui participent de ces trois manieres, d'autres que l'on dit faits aux trois crayons.

On appelle un dessein eftompé celui qui eft fait avec un crayon mis en poudre, qu'on applique du côté des ombres avec de petits rouleaux de papier ou de cuir, fans qu'on y découvre aucunes lignes.

Tous les deffeins fe divifent en cinq efpéces ; il y a des penfées, des deffeins arrêtés, des études, des Académies, & des cartons.

Les pensées font les premieres idées que le peintre jette fur le papier pour l'exécution de l'ouvra ge qu'il fe propofe; on les nomme auffi Efquiffes, ou Croquis, parce que la main n'a fait que mettre en maffe, & pour ainfi dire, que croquer les figures, les grouppes, les ordonnances & les autres parties qui les compofent. Ces deffeins (a) heurtés & faits avec beaucoup de viteffe, ne font fouvent de peinture extrêmement corrects & peuvent manquer pour la pour fignifier

pas

(a) Terme

un deffein qui

hardis & peu

perspective, & les autres parties de l'art; mais ce n'eft touche ne font point des défauts dans une efquiffe, dont efquiffe, dont que de coups tout le but eft de repréfenter une penfée exécutée prononcés. avec beaucoup d'efprit, ou bien des figures détachées & imparfaites qui doivent entrer dans quelque compofition dont elles font partie.

Les deffeins finis font les mêmes pensées plus digérées & plus arrêtées, que l'on appelle par

C

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excellence des deffeins rendus, finis, arrêtés, termi nés, capitaux: ils donnent une jufte idée de l'ou vrage, & c'eft ordinairement fuivant ces morceaux, qui font les derniers faits, que l'on en détermine l'exécution.

Les Etudes font des parties de figures deffinées d'après nature, telles que des têtes, des mains, des pieds, des bras, quelquefois même des figu res entiéres, lesquelles entrent dans la compofition totale d'un tableau; les draperies, les animaux, les arbres, les plantes, les fleurs, les fruits & les païfages font auffi des études qui y fervent infiniment, On donne le nom d'académies à des figures faites d'après nature, dans les attitudes convenables à la composition d'un tableau, pour en avoir exa&tement le nu & les contours; on drappe enfuite çes figures, de maniere à careffer toujours ce nu & à le faire deviner. Rien ne fait mieux connoître la correction d'un maître que ces fortes de def-, feins; ils prouvent en même temps fa capacité dans, l'anatomie.

Les cartons font de grands deffeins faits fur du papier gris de la même grandeur que l'ouvrage pour lefquels ils font destinés, & on les calque une pointe fur l'enduit frais d'un plafond, pour le peindre enfuite à fresque; l'on fait auffi des cartons pour des tapisseries.

avec

Les deffeins des grands maîtres étant tout esprit, forment une curiofité des plus piquantes; ils font la meilleure instruction pour un amateur, c'est une fource féconde, où il peut puifer toutes les lumiéres qui lui font néceffaires; il converfera, pour ainsi

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