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cation à l'égard des unes qu'à l'égard des autres de ces conventions.

Ainsi, bien qu'il soit vrai des conventions internationales, comme des conventions entre particuliers, que ces conventions ne sont valables qu'autant qu'il y a eu véritable consentement ce qui concerne la violence, les manœuvres frauduleuses ou les erreurs substantielles qui seraient de nature à vicier le consentement, prend à l'égard des nations un caractère à part et mérite dans la pratique une détermination particulière, appropriée à la nature des nations, à leur manière de vouloir et d'agir.

Il en est de même de ce qui concerne la capacité et les pouvoirs des personnes qui forment la convention; la manière de s'y faire représenter; les choses ou les actes qui peuvent ou qui ne peuvent pas en faire l'objet; les causes licites ou illicites susceptibles de s'y présenter; enfin les formes exigées pour que les accords soient censés définitivement arrêtés et sanctionnés.

Il y a inévitablement sur tous ces points, en ce qui concerne les conventions entre nations, des différences notables qui ne doivent pas échapper dans l'application; que les traités spéciaux de droit international peuvent s'attacher à développer, mais qu'il nous suffira, à nous, dans ces notions préliminaires, d'avoir fait entrevoir d'une manière sommaire.

On ne qualifie de traités publics que les pactes, accords ou conventions conclus d'État à État (1).

Ces traités se nomment ainsi, dit Klüber, parce que les

(1) VATTEL, Droit des gens, liv. 2, chap. 12, § 154 Précis du droit des gens moderne, § 47. KLUBER, moderne, § 144 .

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parties qui les forment sont des peuples indépendants ou des États régis par le droit public.

On a vu au chapitre deuxième que la faculté de faire des traités publics est un des droits les plus essentiels de la souveraineté extérieure; que cependant, sans que cette souveraineté soit détruite, il peut se faire qu'un État souverain, par des alliances, par des confédérations ou autres relations avec des nations étrangères, se trouve assujetti à certaines restrictions dans l'exercice de ce droit; on a vu aussi que les États dépendants ou mi-souverains n'ont qu'une capacité limitée de conclure des traités.

Le corps de l'État ne pouvant agir par lui-même et étant représenté par son gouvernement, c'est ce dernier qui contracte au nom de l'État qu'il représente. La première et la plus essentielle condition de la validité d'un traité public est donc qu'il ait été conclu par le pouvoir gouvernant, dans la limite de ses attributions.

La constitution particulière de chaque État détermine quels sont ceux des pouvoirs constituant le gouvernement auxquels appartient le droit de faire des traités au nom de l'État. Dans les monarchies absolues ce droit réside en entier en la personne du prince régnant. Il en est de même ordinairement dans les monarchies constitutionnelles représentatives, avec cette différence toutefois que dans ces monarchies le prince ne peut contracter en personne; aucun de ses actes ne peut être fait que sous le contre-seing d'un ministre responsable. En outre, dans certains cas, selon la nature des objets dont il est disposé par le traité, le consentement ultérieur du pouvoir législatif de la nation y est nécessaire. - Dans les républiques, ce droit est ordinairement exercé collectivement par magistrat investi du pouvoir exécutif et par certains conseils ou assemblées auxquels l'exercice de ce pouvoir

le

est soumis. C'est ainsi que, aux États-Unis d'Amérique, le consentement du sénat est essentiel pour rendre valable un traité conclu par le président et pour engager la foi

nationale.

Les têtes couronnées qui, dans les États monarchiques, et les magistrats suprêmes qui, dans les États républicains, sont investis du droit de faire des traités au nom de la nation, font rarement ces traités en personne, soit qu'ils le pussent de leur propre chef, comme dans les gouvernements absolus, soit qu'ils le pussent sous le contre-seing et la responsabilité d'un ministère responsable, comme dans les gouvernements représentatifs. Ils désignent, pour les négociations et pour la rédaction des clauses d'un traité, des mandataires auxquels ils délivrent des pleins pouvoirs spéciaux, et qui, pour cette raison, sont appelés plénipotentiaires.

Avant d'entrer en négociation, les plénipotentiaires font entre eux la vérification et l'échange de leurs pleins pouvoirs ou diplômes; mais aucun d'eux n'est tenu de faire connaître les instructions particulières de son gouvernement sur ce qu'il lui est permis d'accorder ou sur la manière dont il doit conclure (1).

Ils arrêtent ensuite les clauses et la teneur du traité, le rédigent par écrit suivant les formes diplomatiques, et le signent en commun.

Un traité ne devient pas obligatoire pour un État par le fait seul de la signature de son plénipotentiaire; il faut encore, pour sa conclusion définitive et pour sa validité, que le pouvoir gouvernant l'ait confirmé en donnant sa ratification.

La nécessité de cette ratification est le plus souvent

(1) SCHMALZ, Droit des gens européen, chap. 3, p. 52,

aujourd'hui expressément réservée dans les pleins pouvoirs, ou bien stipulée dans le traité même.

Plusieurs publicistes veulent que dans le cas où cette réserve expresse n'a pas été faite, le traité souscrit par un plénipotentiaire soit valable, si celui-ci n'a pas agi hors de ses pouvoirs ostensibles. Telle est l'opinion de Klüber, qui soutient, du reste, que lorsque la nécessité de la ratification a été stipulée, cette ratification donnée par l'une des parties contractantes n'oblige point l'autre partie à donner également la sienne (1).

M. de Martens dit, au contraire, que, si l'une des deux parties offre dûment sa ratification, l'autre ne peut refuser la sienne qu'en tant que son mandataire s'est écarté des bornes de ses instructions et, par conséquent, est punissable; et qu'au moins, dans la règle, il ne dépend pas du libre arbitre d'une nation de refuser sa ratification par de simples motifs de convenance (2).

Suivant Vattel, pour refuser avec honneur de ratifier ce qui a été conclu en vertu d'un plein pouvoir, il faut que le souverain ait de fortes et solides raisons, et qu'il fasse voir, en particulier, que son ministre s'est écarté de ses instructions (3).

(1) KLÜBER, Droit des gens, § 142.

(2) DE MARTENS, Précis du droit des gens moderne, § 48.

(3) « Aujourd'hui, pour éviter tout danger et toute difficulté, les princes » se réservent de ratifier ce qui a été conclu en leur nom par leurs » ministres. Le plein pouvoir n'est autre chose qu'une procuration cum » libera. Si cette procuration devait avoir son plein effet, on ne saurait » être trop circonspect à la donner. Mais, les princes ne pouvant être » contraints autrement que par les armes à remplir leurs engagements, >> on s'est accoutumé à ne faire fond sur leurs traités qu'autant qu'ils les » ont agréés et ratifiés. Tout ce qu'a conclu le ministre demeurant donc » sans force jusqu'à la ratification du prince, il y a moins de dangers à » lui donner un plein pouvoir. Mais pour refuser avec honneur de rati▾ fier... » (VATTEL, Droit des gens, liv. 2, ch. 12, § 156.)

La nécessité de la ratification pour rendre un traité obligatoire, et le droit de refuser cette ratification, qu'elle ait été ou non expressément réservée, sont soutenus par Bynkershoek, Schmalz et Pinheiro-Ferreira (1).

« Tous les traités conclus par des plénipotentiaires, >> dit Schmalz, doivent, dans la règle, être ratifiés par » le souverain. Il n'y a d'exception qu'à l'égard de ceux >> qui, par une convention faite d'avance, ont été exemptés >> de cette formalité, ou de ceux qui doivent être exé» cutés de suite, et la plupart du temps ce n'est qu'en » guerre que peut avoir lieu une nécessité aussi urgente. » La ratification du souverain suit ordinairement la signa»ture, car il est rare qu'un plénipotentiaire se hasarde » à trop s'écarter de ses instructions. On ne doit pour>> tant pas en tirer la conséquence absolue que le souve» rain soit obligé de ratifier, puisque si une telle obliga» tion existait, la ratification elle-même serait superflue.

>> Plusieurs exemples ont fait voir dans tous les temps » que les souverains prétendent avoir le droit de ne pas >> accorder la ratification; et quel droit en effet paraît >> plus naturel? Il n'y a donc qu'une renonciation expresse » à ce droit, précédemment faite, qui puisse lier un sou» verain aux engagements contractés en son nom par son >> plénipotentiaire. >>

Cette doctrine a été naguère professée en France par les hommes d'État alors à la tête des affaires, qui en ont fait l'application à propos d'un traité concernant le droit de visite en mer, traité signé à Londres par M. de SainteAulaire le 20 décembre 1841.

« Un débat, disait à cette occasion à la chambre des

(1) BYNKERSHOEK, Quæst. jur. publ., lib. 2, cap. 7.-Schmalz, Droit des gens européen, ch. 3, pag. 53. PINHEIRO-FERREIRA, no 25 de ses

Notes sur MARTENS.

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