et de leurs résultats. On applique aussi quelquefois ce mot-là d'une manière à peu-près ridicule à des convenances très-accidentelles pour l'art diplomatique. L'espèce d'auréole dont la diplomatie aimait à s'entourer autrefois, a engagé plus d'un publiciste à traiter avec une certaine coquetterie, avec une certaine dévotion, principalement ses formes extérieures. Nous prétendons retracer seulement dans les pages suivantes les règles générales et essentielles du commerce diplomatique. A cet effet nous traiterons simplement, dans notre manière habituelle, d'abord des divers agents diplomatiques; ensuite de l'art diplomatique, et enfin des formes des négociations. La diplomatie de nos jours ne marche plus d'un pas aussi affecté et aussi guindé que celle d'autrefois. Elle a pris des allures plus simples, et si ses ressorts ne se meuvent pas, comme dans le monde ancien, au grand jour de la publicité, ils sont devenus pourtant plus reconnaissables et plus accessibles. SECTION I. DES AGENTS DU COMMERCE DIPLOMATIQUE.1 Origine et principe naturel. § 199. Les peuples du monde ancien déjà entretenaient entre eux des relations diplomatiques, sinon permanentes, du 1 Parmi les ouvrages innombrables relatifs à cette matière nous citons: Alberici Gentilis, De legationibus libri III. Londin. 1583. 1585. Hannov. 1594 (ou 1596). 1607. 1612. Abr. de Wicquefort, L'ambassadeur et ses fonctions. A la Haye 1680. 1681 (Compilation de peu de valeur). J. G. Uhlich, Les droits des Ambassadeurs et des autres Ministres publics les plus éminents. Leipzig 1731. J. Baron de Pacassi, Einleitung in die sämmtlichen Gesandtschaftsrechte. Wien 1777. Fr. Xav. de Moshamm, Europäisches Gesandtschaftsrecht. Landshut 1805. Merlin, Répertoire univ. de la jurisprud. m. Ministre public. Vattel liv. IV. chap. 5. J. J. Moser, Versuche t. III et Beiträge zu dem neuesten Europäischen Völkerrecht t. III. Klüber, Droit des gens § 166. Schmelzing, Völkerrecht II, p. 90 suiv. Charles Bar. de Martens, Manuel diplomatique. Leipz. et Paris 1822. Le même, Guide diplomatique. Paris et Leipz. 1832. de Hofmann, Guide diplomatique. Bruxelles 1838; 4e édit. publiée par l'Auteur et de Wegmann 1851; le même, Traité complet de diplomatie par un ancien Ministre. Paris moins transitoires. Ils traitaient ensemble par leurs hommes d'États et leurs orateurs (géopas, legati, oratores) sur leurs intérêts réciproques, à mesure que ces intérêts surgissaient occasionnellement. La diplomatie d'alors était un art accessible à tout le monde.1 Plus tard les papes commençaient à entretenir à Constantinople et auprès des princes des races franques, des mandataires permanents sous le nom de apocrisiarii ou responsales. Ensuite le système moderne d'ambassades permanentes s'est développé dans les diverses cours de l'Europe depuis le XVe siècle, simultanément avec cette politique secrète que nous avons essayé d'esquisser dans notre introduction (page 11 cidessus) et avec le système des armées permanentes. pour but autant une surveillance réciproque que le maintien d'une bonne entente constante et la plus prompte expédition des intérêts réciproques des nations. 3 C'est ainsi que les ,,Corps diplomatiques" accrédités auprès des Cours ont pris naissance. Ce terme lui-même, à ce qu'il paraît, a été inventé en 1754 par une dame de la cour de Vienne.1 Il avait Aujourd'hui la puissance qui prétendrait rompre ou repousser ses relations diplomatiques avec les autres États, se retirerait par là même du système politique de l'Europe. Droit d'envoyer ou de recevoir des agents diplomatiques. . $ 200. Tout souverain a le droit incontesté d'envoyer, pour les affaires d'État, des ministres publics aux autres 1833. 3 vol. (V. la critique dans la Revue anglaise Foreign Quarterly Review, février 1834). A. Mirus, Das Europäische Gesandtschaftsrecht. 2 cahiers. Leipzig 1847. E. C. Grenville Murray, Droits et devoirs des envoyés diplomatiques. Londres 1853. Alt, Handbuch des Gesandtschaftsrechts. Berl. 1870. Sur l'ancienne littérature v. Struv, Bibliotheca juris nat. et gent. C. H. de Römer, Handbuch für Gesandte. I. Leipzig 1791. d'Ompteda II, p. 534 suiv. de Kamptz, Neue Liter. § 200. 1 L'histoire de l'ancienne diplomatie est racontée par Weiske, dans ses Considérations sur les Ambassadeurs des Romains comparés avec les modernes. Zwickau 1834. 2 V. à ce sujet la Nouvelle de Justinien. 123, chap. 25. 3 Ward, Enquiry II, p. 483. 4 V. la lettre du Ministre prussien de Fürst à Frédéric II dans Vehse, Geschichte des österreichischen Hofes VIII, p. 113. puissances. Lui seul peut leur conférer le caractère officiel. Aucun sujet, quelque considérables que soient d'ailleurs son importance et ses prérogatives, ne jouit d'un droit analogue. On ne saurait au contraire refuser ce droit: 1° aux souverains soumis à un vasselage ou à une protection étrangère; 2o aux États mi-souverains, dans les limites du moins que leur constitution politique les y autorise.1 A cette catégorie appartiennent encore, par exemple, les divers cantons suisses, en ce qui concerne les rapports qui ne sont pas de la compétence exclusive du pouvoir central de la Confédération.2 Enfin: 3° à l'usurpateur avec lequel on veut entretenir ou continuer des relations diplomatiques; mais d'un autre côté aussi il appartient au souverain détrôné dont la restauration est regardée comme possible, pourvu que les relations établies par la tierce partie avec l'usurpateur ne s'y opposent pas. Des autorités non-souveraines n'ont pas le droit d'envoyer des ministres publics, à moins qu'il ne leur soit concédé expressément, ainsi que cela a eu lieu quelquefois au profit de vicerois et de gouverneurs de provinces. Les mêmes règles s'appliquent aussi en général au droit de recevoir des ministres publics, avec tous les effets qu'y rattachent les lois internationales. Car considéré en lui-même, on ne saurait naturellement le refuser à des particuliers. Rien ne les empêche de recevoir d'un souverain étranger des agents diplomatiques. Par quels motifs serait-il défendu à une tête couronnée d'envoyer un représentant auprès d'une maison prin 1 V. surtout Merlin sect. II. § 1. Schmelzing § 274. 2 V. Constitution de la Confédération helvétique du 12 septembre 1848 art. 8 et 9. Autrefois il existait aussi des villes et des corps politiques soumis à une puissance suzeraine, qui néanmoins, dans des affaires de guerre, de commerce et autres, avaient le droit d'envoyer des ambassadeurs. Vattel cite à ce sujet les villes de Neufchâtel et de Bienne comme jouissant du droit de bannière (jus armorum) et par suite de celui d'envoyer des ministres publics. cière non-souveraine, par exemple, dans une affaire matrimoniale ou dans d'autres affaires purement personnelles? Néanmoins tout État souverain a le pouvoir de déterminer les conditions auxquelles il consent à recevoir des ministres publics, et les droits et les prérogatives qui se rattachent à l'exercice de leurs fonctions.1 De même il En soi-même il n'existe aucune obligation pour un État souverain de recevoir des ministres des autres puissances. C'est une pure question de convenances. Cependant le souverain qui refuse sans motifs de recevoir un ministre étranger, s'expose à la rétorsion. Au surplus l'esprit d'humanité s'oppose à ce qu'une puissance repousse en pleine paix les communications officielles d'une autre, sans les entendre. Il arrive quelquefois qu'un gouvernement refuse de recevoir en qualité de ministre tel ou tel individu ou un de ses propres sujets. peut refuser de recevoir des ministres dont les pouvoirs sont incompatibles avec les lois et la constitution de l'État. Ainsi aucun gouvernement n'est tenu de recevoir des légats ou des nonces du pape, porteurs des pouvoirs qui leur sont conférés expressément ou tacitement par les lois ecclésiastiques, et dont l'exercice donnerait lieu à des collisions avec l'autorité souveraine de l'État en matière religieuse. En pareil cas, ainsi que cela se pratique en France, un gouvernement peut exiger que les pouvoirs du ministre ecclésiastique soient nettement définis et réduits à des limites raisonnables.4 1 Un intéressant document sur le droit d'envoyer ou de recevoir des ministres publics, ce sont les prétendues lois de Charles V. relatives aux ambassadeurs, qui se trouvent dans de Réal t. V. p. 140 suiv. et dans Rousset, Cérémonial diplom. t. II, p. 481. V. aussi de Martens, Erzählungen t. I, p. 371. Malgré leur contenu assez exact, elles ne nous paraissent pas appartenir à l'époque de Charles V, et jusqu'à nouvelle preuve nous les regardons comme apocryphes. Nous indiquerons plus loin un document analogue relatif aux immunités des ambassadeurs. 2 Vattel IV, chap. 65. 66. Merlin, à l'endroit cité, sect. II, § 3. 3 J. J. Moser, Versuche t. III, p. 89. Beiträge t. III, p. 90. Bielfeld, Institut. II, p. 178. Merlin sect. III, no. 3. Klüber, Droit des gens. § 176. 187. 4 Mirus § 94 suiv. sect. V. § 7. Merlin, Répert. univ. mot: Ministre public, Heffter, droit international. 3e éd. 25 Classification des agents du commerce diplomatique. § 201. En dehors de la part active que les souverains eux-mêmes prennent à la direction générale des relations extérieures de leurs États, il existe un certain nombre d'agents qui en sont chargés d'une manière spéciale. Ce sont: I. Le ministre des affaires étrangères. Nous insistons notamment sur l'organisation du Ministère des affaires étrangères en France, par ordonnance du 13 août 1844, avec son bureau de protocole qui expédie les traités, les conces sions, brevets, provisions, exequatur; qui instruit pour le ministre les questions relatives au cérémonial et au protocole, aux priviléges, immunités et franchises des ambassadeurs et ministres étrangers.1 II. Les agents et les mandataires envoyés en pays étranger, afin d'y pourvoir en toute occasion aux intérêts politiques ou personnels, ou bien pour y traiter certaines affaires particulières de leurs souverains. Ils sont chargés tantôt de missions ou de fonctions diplomatiques permanentes auprès des puissances étrangères, tantôt seulement de certaines missions passagères. A cet effet on distingue les catégories suivantes: 1° les ministres publics (legati publice missi), revêtus d'un caractère public et officiel et accrédités auprès du gouvernement étranger; 2° les agents, chargés de missions analogues, mais sans caractère public et officiel; 3° les commissaires délégués pour régler certaines affaires particulières, telles qu'une délimitation de frontières, l'arrangement d'un différend litigieux, l'exécution de quelque article d'un traité ou d'une convention. Ils ne communiquent pas directement avec le souverain étranger, mais seulement avec ses ministres ou avec leurs députés; 4° les consuls chargés de veiller aux intérêts du commerce (§ 244 suiv.). Ces divers agents sont nommés définitivement ou provi soirement (ad interim), pour un temps fixe ou indéterminé. Notons en outre qu'il y a souvent un personnel auxiliaire, comme les secrétaires et les autres membres de bureau, les courriers d'ambassade etc. 1 Journal des Débats du 20 septembre 1844. |