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manuscrits. Mais le manuscrit dont s'est servi Des Molets ne lui a pas fourni toujours un texte satisfaisant. J'ai reconnu cette fois la nécessité de le contrôler, et je l'ai fait en recourant au manuscrit 2980 de la Bibliothèque Mazarine. M. Gazier a bien voulu me communiquer aussi les variantes d'un manuscrit qui lui appartient (1).

J'ai pu introduire ainsi dans l'Entretien avec M. de Sacı un grand nombre de corrections, dont je marquerai ici quelques-unes.

P. cxxvii, l. 2: aucune des moindres choses de la nature au lieu de, aucunes choses.

P. CXXIX, l. 7: quelques songes, pour, un songe.

P. cxxx, l. 16: dans l'ivresse de la science; ces trois mots. manquaient.

P. cxxxII, l. 1 : il suit donc les mœurs de son pays parce que la coutume l'emporte; cette phrase manquait.

P. cxxxv, l. 5: la même mort, et non, la mort même. 1. 19 ex stercore Tertulliani; ce mot manquait.

(1) Je demande à placer ici des notes que je dois encore à M. Gazier, sur quelques passages des Lettres à Mlle de Roannez (au tome II). On sait combien M. Gazier est savant sur tout ce qui touche à l'histoire de Port-Royal et du jansénisme.

P. 327, n. 6. Il s'agit de la mise à l'Index des œuvres d'Arnauld publiées depuis la censure: «< On vit paraitre tout d'un coup, le 25 jour d'août de cette année, l'affiche d'un décret de l'Index du 21 du même mois, par lequel tous les écrits de ce docteur publiés depuis la censure de Sorbonne étaient condamné. » Hermant, Mémoires manuscrits, 1. XV, ch. 9.

M. Gazier ajoute « Cela n'est rien du tout s'explique ainsi tout naturellement, car les décisions de la congrégation de l'Index n'étaient pas reçues en France. » Il conclut que cette lettre est postérieure à la date du 25 août, contrairement à ce que j'avais dit p. 327, note 6 et 329, note 2.

P. 328, note 1. M. Gazier déclare d'après Hermant, que M. Du Gas est M. Singlin.

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P. 336, nole 1. « Il s'agit probablement, dit M. Gazier, de quelques prêtres de Saint-Merry, paroisse des Roannez (Hermant, Mémoires, 1. XIV, ch. 8 et 1. XVI, ch. 2). » L'année suivante, au mois de juillet, ils étaient encore errants et sous le coup d'une lettre de cachet.

Aux corrections qui ont été faites, je demande qu'on ajoute encore les suivantes :

P. cxxxIII, 1. 7: les autres sciences, au lieu de, les hautes. Ligne 14: après, fort juste, mais il n'y avait rien de

nouveau.

P. cxxx, 1. 7 après ces mots, car on peut dire après lui de Montaigne, Des Molets ajoutait, à l'égard de sa jeunesse, ce qui n'offrait pas de sens. Il faut lire à l'égard de la jeunesse, c'est-à-dire, quant à l'usage que la jeunesse doit faire de la lecture de Montaigne.

Je crois, au contraire, qu'à la p. cxxxiv, l. 13, il faut rétablir la leçon de Des Molets que j'avais donnée d'abord : en chassant ce qu'il y a de faux.

On voudra bien excuser toutes ces explications en considérant combien est gênante la correction sur clichés.

Mes deux premières éditions contenaient la dédicace suivante: « A mon frère aîné, Adolphe Havet, hommage d'une tendre et reconnaissante affection. » Elle n'exprimait que bien discrètement mes sentiments pour mon frère, mon aîné de près de vingt ans; mais je la supprime, la mort l'ayant rendue sans objet.

Octobre 1880.

E. II.

AVERTISSEMENT

DE LA PREMIÈRE ÉDITION

La nouveauté de cette édition n'est pas dans le texte qu'elle contient. Ce texte est celui que M. Faugère, mettant à profit les découvertes de M. Cousin, et répondant à son appel, a fait paraître en 1844, d'après le manuscrit autographe entièrement dépouillé pour la première fois; grand et précieux travail, récompensé par l'honneur même qui s'attache au titre de premier éditeur des vraies Pensées de Pascal. Quoique je me sois reporté moi-même au manuscrit autographe, dont j'ai tiré plusieurs corrections, cependant mon édition ne diffère pas, en général, de celle de M. Faugère, quant au texte de chaque fragment pris à part. Elle présente cependant un autre aspect, et ce n'est plus le même livre, en ce que la disposition n'est plus la même. J'ai expliqué 1 les motifs qui m'ont déterminé à classer ces fragments suivant un ordre qui n'est pas véritablement nouveau, mais qui est le même, à très-peu de chose près, que celui de toutes les éditions faites d'après Bossut, c'est-à-dire des éditions les plus répandues et les plus nombreuses.

Mon édition comprend : 1° toutes les Pensées proprement dites, c'està-dire tous les fragments contenus dans le manuscrit autographe, à l'exception seulement des notes qui se rapportent aux Provinciales, lesquelles doivent entrer dans les éditions des Provinciales, et non dans les éditions des Pensées. J'ai conservé cependant, parmi ces notes, celles que les anciennes éditions avaient accueillies, par exemple, xxiv, 66; 2° les Opuscules qu'on est habitué à lire, sous une forme ou sous ine autre, dans les éditions des Pensées faites d'après Bossut, plus le Discours sur les passions de l'amour.

J'ai eu le plaisir inattendu de m'apercevoir qu'après tant de restaurations, on m'avait laissé encore une restauration à faire : cette édition des Pensées est la première où l'on trouvera le véritable texte de l'En

1. Dans mes Remarques sur la Préface de l'édition de Port-Royal.

tretien de Pascal avec M. de Saci. Ce texte était pourtant ouvert à tous les yeux, il ne reposait pas même dans un manuscrit, comme celui des Pensées, il avait été imprimé en 1728 par le P. Des Molets, d'après le manuscrit des Mémoires de Fontaine, mais on l'a laissé dans les Mémoires de Des Molets sans songer à s'en servir. M. Faugère lui-même n'a donné ce morceau que d'après les Mémoires de Fontaine imprimés (1736), où il n'avait été reproduit qu'avec beaucoup d'altérations. On avait fait comme pour les Pensées, on avait effacé les hardiesses et les traits de scepticisme.

Je répète cependant que la tâche d'éditeur n'a pas été mon principal objet; mon travail consiste surtout dans mes notes. M. Cousin le premier a reconnu et fait reconnaître la véritable lettre et le véritable esprit des Pensées; M. Faugère en a publié le premier le texte complet et authentique; j'entreprends le premier d'y joindre un commentaire où se trouvent toutes les explications et tous les renseignements qu'on souhaite en les lisant.

Ces secours, qui ne sont pas inutiles pour lire les classiques, même quand il s'agit d'ouvrages régulièrement composés et préparés à loisir pour le public, m'ont semblé particulièrement nécessaires pour l'étude d'un recueil de matériaux, de notes sans suite et sans liaison, ramassées seulement après la mort de l'auteur, et qui en outre ont eu cette singulière destinée, que, quoique publiées il y a plus de cent soixantedix ans, elles étaient inédites, en un certain sens, hier encore, tant leur texte véritable diffère de celui qui est en possession de toutes les bibliothèques et de toutes les mémoires depuis si longtemps. Mon premier soin a été d'introduire entre ces deux textes des rapprochements frẻquents, qui font ressortir à la fois l'intention des corrections faites par Port-Royal et la force de la leçon originale. Chacun de ces rapprochements est un véritable commentaire ou de l'idée de Pascal ou de son style.

Toutes les fois que Pascal cite un passage de l'Écriture, ou qu'il y renvoie, ou qu'il y fait allusion, j'ai indiqué ce passage d'une manière précise. Quoique les anciens éditeurs eussent fait une grande partie de ce travail, ils avaient négligé encore bien des passages.

Pascal cite par leur nom Épictète, saint Augustin, Tertullien, etc., sans indiquer les passages. J'ai donné des renvois précis.

Voltaire avait averti déjà que, parmi les Pensées, un grand nombre étaient tirées de Montaigne, observation que Ch. Nodier a poussée depuis jusqu'à l'outrer dans une sortie fort bizarre contre Pascal (Questions de littérature légale, anonyme, 1812, page 21). Ces imitations ont été signalées dans l'édition de M. Faugère beaucoup plus compléte

ment qu'elles ne l'avaient encore été. On trouvera cependant ici plusieurs rapprochements frappants qui avaient été oubliés.

Mais indépendamment de l'Écriture et des Pères, ou de Montaigne et d'Épictète, il y a en divers endroits des Pensées le témoignage de l'impression qu'avait faite sur Pascal tel ou tel esprit ou tel ou tel livre contemporain. Comme il ne nomme jamais ou presque jamais, on n'avait guère remarqué ces traces de ses conversations ou de ses lectures. Je puis me permettre de dire, en général, que je suis le premier qui les aie suivies. On verra dans mes notes que telle pensée vient de Descartes, ou de Balzac, ou de Grotius, ou de Méré, ou d'une Anthologie de Port-Royal, ou du Cyrus, ou du Pugio fidei, etc. D'autres notes, en faisant voir de quelles idées on était préoccupé alors, quelles questions on soulevait et quels débats on agitait, éclaireront par cela même certains fragments.

Les Lettres à mademoiselle de Roannez n'avaient été l'objet d'aucun éclaircissement; j'ai cherché à me rendre compte des moindres particularités qu'elles présentent. J'ose croire que cette étude des détails donne à ces Lettres un aspect nouveau et un intérêt imprévu. Ce qui pouvait ne sembler qu'une suite de lieux-communs de dévotion janséniste, paraît, ainsi éclairé, le développement d'une espèce de drame intérieur plein d'émotion, et le journal des assauts que l'âme violente de Pascal livre à une autre âme qu'elle subjugue enfin.

Je ne veux pas détailler ici tous les genres d'éclaircissement qui ont pu entrer dans mes remarques, mais j'affirme que je n'ai pas laissé passer une phrase du texte de Pascal sans essayer de répondre à toute question qui se présentait à mon esprit à l'occasion de cette phrase. Je n'ai rien négligé enfin pour donner aux éditeurs qui m'avaient demandé ce livre un travail sérieux, tel qu'avait droit de l'attendre une maison qui se recommande aux amis de la littérature savante, et par tant de bonnes éditions des classiques, et par le nom même et les travaux de M. Dezobry.

Si d'ailleurs j'explique avec cette insistance les soins que j'ai pris afin de donner un bon commentaire des Pensées, c'est pour rassurer ma conscience sur les faiblesses que j'aperçois mieux que personne dans mon travail. Celui qui publie un livre pour la première fois, surtout un livre de ce genre, où les détails sont infinis, et où l'on a, pour ainsi dire, autant de sujets différents à traiter que de notes à faire, doit trahir son inexpérience par plus d'une faute, surtout quand il arrive, comme cela m'est arrivé par des circonstances dont il est inutile d'entretenir le public, que le livre s'imprime à mesure qu'il se fait, ce qui a toutes sortes d'inconvénients qu'on voit sans peine. Enfin tra

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