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» on s'en appercevroit beaucoup plus aifément.

177. Cependant j'avouerai avec ingénuité que l'opé >> ration me paroît toujours extrêmement difficile. L'affem>> blage de corde & de morceaux de liége forme non-feu>>lement un grand volume, il forme une grande masse, » qui n'eft pas exempte d'inertie, & qui ne prend du mou»vement qu'en réliftant beaucoup. Quand même cette » maffe feroit parfaitement en équilibre avec l'eau de Mer, » elle ne viendra pas fans peine, lorfqu'on tirera en haut, »ou lorfque le Navire agité par une groffe Mer, s'élevera >> brufquement. Lorfqu'on fonde dans un lac, ou dans une >> eau dormante, on a en haut un point parfaitement fixe; >> & rien ne trouble, ou ne peut rendre irréguliére l'ac» tion que fait fur la main la pefanteur du plomb. Mais ce » n'eft pas la même chofe, lorfque le poids eft d'environ » cent livres, & lorsqu'on eft dans un Vaiffeau qui s'enfon»ce, & qui s'élève tout-à coup. La ligne de fonde a pref» que continuellement de trop violentes fecouffes à foute>> nir, & il n'eft pas aifé de démêler dans cet effort, qui » n'eft que trop capable de bleffer les Matelots, la partie >> qui eft caufée par la péfanteur du poids.

178. » Tout ce qu'on peut faire de plus, c'est de choi>> fir l'endroit du Navire où il y a le moins de mouvement. » Cet endroit fe trouve aux environs du grand mât. Il est » certain que le milieu du pont conferve toujours à peu » près la même hauteur au-deffus de la furface de la Mer; » lorfque le Navire s'incline d'un côté, l'autre flanc s'éle>>ve. Ainfi on peut mettre deux poulies, l'une à droite & >> l'autre à gauche, pour foutenir la ligne de fonde, lorf » que fa partie qui eft dans l'eau fera déja fort longue; » & on appliquera à la feconde extrémité de la corde un » contrepoids, qui descendra dans la Mer de l'autre côté » du Navire. Cette efpéce d'équilibre entre les deux par» ties de la ligne, doit contribuer à rendre plus fenfible la » différence de péfanteur, felon que le plomb s'appuyera » ou ne s'appuyera pas fur le fond. Cependant l'expérience

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feule

feule doit nous apprendre fi ces différens expédiens peu- «<

vent réuffir. »

CHAPITRE V II.

Du Flux & Reflux de la Mer.

I.

179. Port, on ne peut pas toujours y entrer, quoiL ORSQU'ON eft parvenu à l'ouverture d'un que le vent foit favorable: il faut souvent attendre le flux, ou que la mer foit pleine, fi on eft fur les côtes de l'Océan ; & l'affujétiffement eft à peu près le même lorfqu'on veut fortir du port. Tout le monde fçait que nos côtes font fujettes à une espéce d'inondation de la part de la Mer deux fois le jour. Les eaux montent pendant environ fix heures: ce mouvement, qui eft quelquefois affez rapide, & par lequel la Mer vient couvrir nos plages, fe nomme le flux ou le flot. Les eaux, lorfqu'elles font parvenues à leur plus grande hauteur, reftent à peine un demi quart d'heure dans cet état : la Mer eft alors pleine, ou elle eft étale. Elle commence enfuite à defcendre, & elle le fait pendant fix heures, qui forment le tems du reflux, de l'ébe ou du jusant. La Mer en fe retirant parvient à fon plus bas terme, qu'on nomme basse Mer, & elle remonte prefque auffi-tôt. Il fe fait un autre flux, qui dure également fix heures, & ainsi toujours de fuite,

180. Chaque mouvement de la Mer n'eft pas précifément de fix heures; elle met ordinairement un peu plus à venir, & un peu plus à s'en retourner. Ces deux mouvemens contraires font même considérablement inégaux dans certains ports, principalement dans l'entrée des riviéres; mais les deux enfemble font toujours plus de 12 heures; ce qui eft cause que la pleine Mer, ou chaque

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marée, ne fe fait pas à la même heure le foir que le matin.
Elle arrive environ 24 minutes plus tard; & d'un jour à
l'autre il fe trouve environ 48 minutes de retardement.
C'est-à-dire, que s'il eft pleine Mer aujourd'hui dans un
Port à neuf heures du matin, il n'y fera pleine Mer ce soir
qu'à 9 heures 24 min. & demain à 9 heures 48 min. du ma-
tin, & le foir à 1c heures 12 min. C'eft auffi la même cho-
fe à l'égard des baffes Mers; elles retardent également d'un
jour à l'autre de 48 minutes, & du matin au foir de 24
minutes.

181. Ce retardement étant connu, on peut, fi l'on a
été attentif à l'inftant de la marée un certain jour, prévoir
à quelle heure il fera pleine mer dans le même Port un
autre jour, & faire fes difpofitions à propos, fi on eft dans
un Navire,
, pour fortir du port ou pour y entrer ce jour-là.
Chaque jour les marées retardent de 48 minutes, ou de 3
quarts d'heure & de 3 minutes; ainfi en cinq jours elles
doivent retarder de 15 quarts d'heure & de 15 minutes,
c'est-à-dire, de 4 heures; ce qui donne la facilité de trou-
ver leur retardement, à proportion pour tout autre nom-
bre de jours. Elles doivent retarder de 8 heures en 10 jours,
& de 12 heures en 15 jours. Or il fuit de-là que les marées
reviennent exactement aux mêmes heures tous les quinze
jours; mais que celles qui fe faifoient le matin fe font le
foir, & celles qui arrivoient le foir, fe font le matin. A
la fin de quinze autres jours elles reprennent leur premier
ordre.

182. Il fuffit toujours, felon ce que nous venons de
dire, de faire la proportion ou régle de Trois fuivante,
pour trouver le retardement des marées, pour quel nom-

de jours on veut. Si l'on demande combien la pleine Mer doit fe faire plus tard au bout de 11 jours: Je dis, fi 5 jours produifent 4 heures de retardement dans les marées, combien 11 jours en doivent-ils produire ? Je multiplier par 4, & divifant le produit 44 par 5, il me vient 8 au quotient, qui marque que le retardement eft de 8 heures;

mais il refte 4 à la divifion, & chaque unité qui refte vaut un cinquième d'heure, ou 12 minutes. Ainfi les marées doivent arriver plus tard de 8 heures 48 minutes, au bout de 11 jours. S'il eft pleine mer aujourd'hui dans un certain Port à 9 heures du matin, il fera pleine Mer dans ce même Port en 11 jours à 9 heures augmentées de 8 heures 48 min. qui eft la quantité du retardement; c'est-à-dire, qu'il y fera pleine Mer à 5 heures 48 min. du soir.

I I.

De l'Accord qu'il y a entre le Flux & le Reflux, & les Mouvemens du Soleil & de la Lune.

183. Les marées ne se faisant pas à la même heure chaque jour, c'est une marque qu'elles ne dépendent pas uniquement du mouvement du Soleil. Elles dépendent beaucoup davantage du mouvement de la Lune, qui retarde également de 48 min. chaque jour à revenir aux mêmes points du Ciel, comme nous l'expliquerons dans la fuite. On dit que la Lune eft nouvelle, lorfqu'elle paffe vis-à vis du Soleil, parce qu'on ceffe alors de la voir, & qu'elle doit reparoître peu de tems après, ou comme fe renouveller. Au bout de 15 jours la Lune fe trouve à l'oppofite du Soleil; elle paroît alors toute ronde, & on dit qu'elle eft pleine. Mais lorsqu'elle n'eft éloignée du Soleil que de 90 dégrez, foit après l'avoir quitté, ou foit lorsqu'elle vient le rejoindre,fa partie lumineufe n'eft que comme la moitié d'un cercle, & on nomme ces deux apparences ou Phafes, les Quadratures qui arrivent fept jours & demi après les nouvelles ou pleines Lunes. Ce que nous venons de dire fuffit pour faire entrevoir aux Lecteurs le parfait accord qu'il y a entre le flux & reflux, & les mouvemens du Soleil & de la Lune. Les marées retardent tous les jours de 48 minutes, & elles reviennent à la même heure au bout

de 15 jours, & au bout d'un mois ou de 29 jours & demi, non pas lorsque la Lune eft revenue exactement au même point du Ciel, mais lorfqu'elle a repris fa même situation par rapport au Soleil. Forte preuve que les deux Aftrés ont part à l'effet; & toutes les autres circonftances le confirment.

184. Les marées font plus fortes de 15 jours en 15 jours: c'eft ce qui arrive à toutes les nouvelles & pleines Lunes, ou lorfque les deux Aftres agiffent ensemble sur le même point de la Mer. On donne le nom de grandes eaux à ces plus fortes marées, on les nomme auffi Malines ou reverdies. Dans certains tems de l'année les deux Aftres exercent encore mieux leurs forces, ils répondent au-deffus de l'Océan vers le milieu de la Terre, ou vers l'Equateur. La Mer monte alors beaucoup davantage, & elle defcend auffi plus bas : c'eft ce qui arrive vers les commencemens d'Avril & d'Octobre. Enfin le Soleil & la Lune ne confervent pas toujours la même distance à la Terre. La Lune principalement eft fujette à fe reculer dans le Ciel, par rapport à notre Globe, & d'autres fois elle s'en approche. Une médiocre attention fait appercevoir ce changement de diftance; la Planéte nous paroît plus petite ou plus grande. Mais toutes les fois qu'elle eft plus voifine & qu'elle devient comme plus grande par rapport à nous, fon action fur la Mer eft auffi plus forte: c'est ce que nous apprennent toutes les obfervations.

185 11 y a tout lieu de penfer que le flux & reflux de » la mer eft une fuite de la pefanteur univerfelle que nous > remarquons dans toute la Nature, & qui paroît en con» ftituer une des premiéres Loix. Toutes les parties de » matiere pesent un peu les unes vers les autres; elles » ont une force fecrete pour s'approcher ou pour s'unir. » Cette force arrondit les goutes de liqueur; elle fait que >> deux goutes d'eau fe confondent auffi-tôt qu'elles fe tou>> chent; elle conferve la figure à peu près fphérique qu'a » la Terre, & qu'ont tous les corps céleftes: elle produit

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