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seule existence du délit a autorisées, à l'instant présumer que, dans aucun cas, ils ne peuvent même où il a été commis [1]. »

Dans une autre espèce, la même Cour a également déclaré que l'apposition de la fausse signature d'un mineur au pied d'une lettre de change constitue un faux criminel. Les juges du fait avaient acquitté le prévenu, parce que cette altération, nulle par sa nature, ne pouvait causer aucun préjudice; mais cette décision ful annulée, << attendu que la moralité d'un faux ne dépend pas de l'effet éventuel du faux [2]. » Cette doctrine se trouve encore confirmée par d'autres arrêts desquels il résulte, 1o que la surcharge qui a pour objet de changer la somme portée dans une quittance constitue un faux punissable, lors même que cette quittance ne serait pas signée [3], 2° que le rédacteur d'un faux acte sous signature privée commet un crime, lors même que cet acte n'a pas été fait double, et qu'à raison de cette circonstance il ne peut servir de preuve légale [4].

Il nous semble que ces deux systèmes s'écartent l'un et l'autre de la vérite des principes. En décidant que tout acte nul échappe aux peines du faux, à moins qu'il n'en ait été fait usage, les anciens jurisconsultes nous paraissent déroger à la règle qui ne demande, pour la constitution du crime, que la possibilité d'un préjudice; car, de ce qu'un acte est atteint d'un vice de forme, il ne s'ensuit pas qu'il ne puisse servir, au moins jusqu'à ce que le vice soit connu, et quelquefois même après la connaissance de ce vice. Le crime peut donc réunir ses conditions d'existence, même avant qu'il en ait été fait usage. D'un autre côté, la Cour de cassation tombe dans une erreur plus grave, en n'accordant aucun effet aux différentes nullités qui peuvent vicier les actes falsifiés; car, si ces actes sont nuls dans leur principe, si, à raison de cette nullité, il est impossible qu'ils puissent nuire, le crime manque de l'un de ses éléments principaux, il n'a pas d'existence légale.

Il faut distinguer entre les actes qui sont nuls dans leur principe, qui sont atteints d'un vice radical, et ceux qui, valides au moment de leur rédaction, puisent une cause de nullité dans l'omission des formes dont la loi a voulu qu'ils fussent revêtus. Les premiers ne peuvent devenir la base d'un faux punissable, puisqu'il est à

[1] Arr. cass. 20 nov. 1807; arr. ident. Metz, 18 janv. 1820; Dalloz, t. 15, p. 406 et 432; S. 1808, 1,293, 1820, 2, 335.

[2] Arr. cass. 21 août 1812; Dalloz, t. 15, p. 440.

produire de préjudice. Telle est la fausse acceptation attribuée à un mineur sur une lettre de change: une telle acceptation, fùt-elle exempte de faux, n'aurait aucun effet civil; le vice est inhérent à son principe; l'agent a fait un acte inutile et sans force, cet acte ne peut constituer le crime de faux.

Si la nullité prend sa source dans des formes postérieures à la rédaction de l'acte, il faut distinguer encore si cette nullité provient du fait de l'agent, ou si elle est indépendante de sa volonté. Dans le premier cas, et si, pour prendre les exemples cités par M. Merlin, le garde rapporteur d'un faux procès-verbal a négligé de l'affirmer; si le notaire, après avoir rédigé une fausse convention, ne l'a pas fait signer par les témoins instrumentaires, on doit présumer que l'auteur du faux a renoncé à son entreprise; il en a lui-même arrêté les effets en annihilant l'acte altéré; son action ne consiste plus que dans une pensée coupable non suivie d'exécution, une tentative dont l'auteur s'est volontairement désisté. Ce principe a été appliqué par la Cour de cassation elle-même, dans un arrêt qui décide que le fait d'avoir fabriqué les clauses d'une donation supposée, mais sans consommer l'acte par l'apposition d'une fausse signature, ne constitue ni crime ni délit [5].

Si, au contraire, l'acte doit sa nullité à une circonstance étrangère à l'auteur du faux, comme si l'un des témoins instrumentaires n'a pas signé ou n'avait pas les qualités requises, l'acte même frappé de nullité peut être l'objet d'une action criminelle, mais c'est en le considérant comme une tentative du crime de faux qui n'a manqué son effet que par une circonstance indépendante de la volonté de son auteur.

Une autre question non moins délicate est de savoir si la supposition d'un titre matériellement faux, pour se faire payer d'une dette légitime à l'insu et sans le consentement du débiteur, constitue le crime de faux. Nous supposons qu'un créancier, ne pouvant obtenir le paiement d'une dette réelle, se présente chez un tiers dépositaire de fonds appartenants à son débiteur, et, à l'aide d'un billet faux ou d'une fausse procuration, se procure l'acquittement da sa créance : cette action réunit-elle les caractères de faux punissables?

[3] Arr. cass. 2 frim, an xu; Dalloz, t. 15, p. 443. [4] Arr. cass. 4 sept. 1807; Dalloz, t. 15, p. 463. [5] Arr. cass. 14 août 1817; Dalloz, t. 15, p. 429; S. 1818, 1, 111.

La Cour de cassation a varié sur ce point. Un premier arrêt du 13 thermidor an xiii a décidé que ce faux n'entraînait aucun préjudice, rentrait dans la classe des altérations matérielles, et n'était pas punissable; mais un arrêt postérieur déclare, au contraire, « que l'emploi d'une pièce fausse, même dans la seule intention de se procurer le paiement d'une dette réelle, contre le gré de celui à qui appartient la somme retirée à l'aide de cette pièce fausse, contient essentiellement le crime de faux; que l'emploi frauduleux d'une pièce fausse est d'autant plus coupable, lorsque la loi offre à celui qui en fait usage un moyen régulier d'exercer ses droits [1]. >>

M. Carnot [2] et après lui M. Bourguignon [3] n'approuvent point cet arrêt, et, pour le concilier avec leur opinion, ils proposent une distinction le faux n'aurait aucun caractère criminel si l'agent n'en avait fait usage que vis-àvis de son débiteur; mais il en serait autrement s'il s'en était servi envers des tiers, comme dans l'espèce de l'arrêt. Cette distinction ne paraît pas fondée dans l'une et l'autre hypothèse, l'intention du créancier est la même, et soit qu'il emploie le faux vis-à-vis du débiteur et des tiers détenteurs des fonds de celui-ci, le caractère du fait n'est point altéré, puisque le but de cet usage ne change pas c'est le débiteur seul qu'il veut atteindre.

Mais nous pensons, avec ces deux auteurs, qu'il est difficile de reconnaître dans cette espèce les circonstances caractéristiques du faux criminel. Dans une espèce analogue, celle où le créancier, saisissant son débiteur dans un lieu écarté, se fait restituer avec violence ce qui lui est dù, la loi romaine décidait qu'il n'y avait pas délit de vol : Qui aliquo errore ductus, rem suam esse existimans, et imprudens juris, eo animo rapuerit quasi domino liceat etiam per vim rem suam auferre à possessoribus, absolvi debet [4] L'agent était puni à raison de ses actes de violence, mais non à raison du vol et la peine était la perte de l'objet enlevé Prospectum est ut nemini liceat vi rapere, vel rem mobilem vel se moventem, licèt suam eamdem rem existimet; sed si quis contra statuta principum fecerit, rei quidem suæ domi nio cadere. Cette distinction a été consacrée

[1] Arr. cass, 3 août 1809; Dalloz, 15, 450; S. 1809, 1, 454.

[2] Comm, du C. P. art. 145, no 6.
[3] Jurisp. des C. cr. art. 147, no 4.

[4] Instit. de vi bonor. rapt. 1. 4, tit. 2, § 1.

par deux arrêts de la Cour de cassation, rendus dans la même hypothèse, et qui se fondent sur ce que les violences exercées avec port d'armes avaient pour objet la restitution de sommes que l'agent croyait lui être dues, et que dans ce fait, il n'y avait pas les caractères du vol qui consistent à vouloir dépouiller quelqu'un dans le dessein du crime [5].

Or l'analogie de cette question avec celle qui nous occupe est frappante. Le faux est un crime complexe : la loi pénale ne le considère et ne le punit que comme moyen de commettre un vol, comme moyen de nuire; s'il est séparé de cet effet, s'il est employé dans un but qui n'est pas criminel, s'il ne porte préjudice à personne, le crime manque de l'un de ses éléments, il n'existe plus aux yeux de la loi : à la vérité, dans l'espèce, le faux n'est pas une simple altération matérielle, elle est accompagnée de fraude; le créancier se procure le paiement de sa créance par un moyen immoral et contre le gré du débiteur. Mais toute espèce de fraude n'est pas constitutive du crime; il faut que cette frande ait pour objet de nuire, et pour effet de rendre un préjudice possible. Or, dans l'hypothèse où nous nous renfermons, nous voyons une altération matérielle, une intention immorale, mais nous cherchons vainement le dessein et la possibilité de causer un préjudice, puisque le faux n'a pour but que le remboursement d'une dette légitime.

Toutefois cette solution doit être resserrée dans d'étroites bornes; car nous pensons, avec la Cour de cassation, « qu'une créance ne suffit pas pour légitimer un vol [6]. » Le faux reprendrait les caractères d'un crime, si le faussaire ne s'était pas borné au paiement du montant de sa créance, si cette créance n'était pas liquide ou exigible, si le débiteur n'en avait retardé le paiement qu'en opposant quelque exception, enfin si, à quelque titre que ce soit, elle était litigieuse; car, dans ce cas, la fraude n'a plus seulement pour but de surprendre le débiteur et de lui arracher un légitime paiement, mais de nuire à ses intérêts et de leser ses droits.

Au reste, dans les questions de cette nature, c'est au jury qu'il appartient en quelque sorte de déterminer le caractère du fait, en déclarant si la pièce fausse a lésé des tiers, circonstance qu'il est exclusivement appelé à con

[5] Arr. cass. 1er therm, an XII et 17 oct. 1806; Dalloz, t. 28, p. 378; S. 1805, 1, 51, et 1807, 2;

1187.

[6] Arr. cass. 22 déc. 1808; Dalloz, t. 28, p. 378, S. 1807, 1, 1188.

stater [1]. La qualification dépend de cette solution; et nous avons dit, dans le paragraphe précédent, qu'il était indifférent pour la constitution du crime que le préjudice fût moral ou matériel, qu'il s'attaquât à des intérêts privés ou publics.

En résumant ce qui précède, on voit que l'existence ou la possibilité d'un préjudice est une condition élémentaire du faux ; que si cette circonstance n'est pas constante, l'altération de la vérité, dépourvue de tout effet nuisible, n'est plus qu'une énonciation mensongère, immorale sans doute, mais qui n'a plus le caractère d'un crime parce qu'elle ne menace la société d'aucun péril. Nous avons toutefois dégagé de l'application de cette loi le cas où l'acte, fabriqué dans un but nuisible, ne se trouve privé de sa force que par une circonstance, un vice de forme, que l'agent n'avait pu prévoir. Ce n'est point une exception à notre principe: l'acte est nul, il n'y a point de faux accompli; mais cet acte recèle en lui-même tous les caractères d'une tentative caractérisée dont l'effet n'a été suspendu que par un fait indépendant de la volonté de l'agent.

[ ]Arr. cass. 8 sept. 1826.

Reprenons maintenant les trois règles qui viennent d'être successivement développées. II ne peut exister de crime de faux sans une altération matérielle de la vérité, sans une intention de nuire, sans l'existence ou la possibilité d'un préjudice. Chacun de ces trois éléments est également essentiel à la constitution du crime; mais chacun d'eux a son caractère spécial et défini. Ce n'est pas assez, pour l'existence du faux, qu'une altération matérielle subsiste et soit constatée, il faut qu'elle rentre dans l'un des cas spécifiés par la loi ; ce n'est pas assez que l'agent ait préparé le faux avec la conscience de l'immoralité de son action, il faut qu'il ait eu le dessein de nuire à autrui par le moyen de ce faux ; enfin ce n'est pas assez que l'altération soit frauduleuse, il faut qu'elle opère ou qu'elle ait la puissance d'opérer un préjudice, une lésion quelconque.

Tels sont les éléments constitutifs du crime de faux : ces principes généraux s'appliquent à toutes les espèces d'altérations. C'est à l'aide de ces notions préliminaires que l'on pourra discerner si les faits si nombreux qui présentent les apparences de ce crime, offrent en réalité les caractères qui le constituent. Nous allons main tenant parcourir les différentes classes du faux, et rechercher les règles particulières qui sont applicables à chacune d'elles.

CHAPITRE XXIII.

DU FAUX EN ÉCRITURES PUBLIQUES.

QUES, DE COMMERCE, ET PRIVÉES.

DIVISION DU FAUX, EN FAUX EN ÉCRITUres publiORIGINE ET MOTIFS DE CETTE DIVISION. DIFFÉRENCE

DES PÉNALITÉS DES LÉGISLATIONS ÉTRANGÈRES.

DÉFINITION.

FAUSSES SIGNATURES.

DISCUSSION DES ARRÊTS.

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QUELLES ÉCRITURES SONT publiques? DEUX SORTES DE FAUX EN ÉCRITURES PUBLIQUES. — § Ier. DU FAUX COMMIS PAR LES FONCTIONNAIRES PUBLICS. -DU FAUX PAR – QUELLES SIGNATURES SONT CONSTITUTIVES DU FAUX? -DU FAUX PAR ALTÉRATION D'ÉCRITURES. ESPÈCES DIVERSES. DU FAUX PAR SUPPOSITION DE PERSONNES CARACTÈRES ÉLÉMENTAIRES DU CRIME. EXAMEN DE LA JURISPRUDENCE. DU FAUX PAR INTERCALATION D'ÉCRITURES SUR LES ACTES OU REGIstres. -DANS QUELS CAS CETTE INTERCALATION PEUT CONSTITUER UN FAUX PUNISSABLE? DU FAUX INTELLECTUEL COMMIS PAR LES FONCTIONNAIRES PUBLICS. ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS DE CE FAUX.

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EXAMEN DE LA JURISPRUDENCE ET APPLICATION DES PRINCIPES - § II. DU FAUX EN ÉCRITURES PUBLIQUES COMMIS PAR DES Officiers publicS HORS DE LEURS FONCTIONS OU PAR DES PARTICULIERS. —DE LA CONTREFAÇON DES ÉCRITURES OU SIGNATURES. L'ALTÉRATION DES MÊMES ÉCRITURES. DE LA FABRICATION DE CONVENTIONS. FAUX PAR SUPPOSITION DE PERSONNES EST COMPRIS DANS CETTE FABRICATION. L'ADDITION OU ALTÉRATION DE CLAUSES OU DE FAITS QUE LES ACTES AVAIENT POUR OBJET DE CONSTATER. (COMMENTAIRE DES ART. 145, 146, 147, 148 ET 149 DU C. P.)

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Le Code pénal distingue trois espèces de faux en écritures, suivant qu'il est commis en écritures publiques, en écritures de commerce et en écritures privées. Cette division, qui sert de base à des peines différentes, n'existait point dans la législation romaine. La célèbre loi Cornelia de falsis s'occupait presque exclusivement des faux commis dans les testaments, et l'une de ses dispositions étendait ses pénalités et ses règles à tous les autres faux, quelque fût le caractère de l'acte falsifié : Paulus respondit legis corneliæ pœnâ teneri omnes qui etiam extra testamentum cætera falsa signassent [1], Cette peine était la déportation et la confiscation des biens pour les personnes libres, et pour les esclaves le dernier supplice [2]. L'édit de mars 1680 distingua le premier entre

[1] L. 16, § 2, Dig. ad leg. corn. de falsis. On lit encore dans la même loi : Sed et cæteros qui in rationibus, tabulis, litteris publicis, aliáve quá re sive consignatione falsum facerent, vel ut verum non appareat, quid celaverunt, subri

les faux en écritures publiques et en écritures privées. Les notaires, tabellions et autres personnes publiques qui commettaient des faux dans l'exercice de leurs fonctions étaient punis de mort [3], et l'édit ajoutait : « A l'égard de ceux qui ne sont officiers, et qui n'ont aucune fonction, ministère public, commission ou emploi, les juges pourront les condamner à telles peines qu'ils jugeront, même de mort, selon l'exigence des cas et la qualité des crimes. »> Les faux en matière de change et de commerce rentraient dans la classe des faux en écritures privées [4].

Le Code pénal de 1791 établit ce triple degré le faux commis en écriture privée était puni de quatre années de fers; en lettres de change et autres effets de banque, de six années de fers;

puerunt, subjecerunt, resignaverunt eádem pœná affici dubium non esse.

[2] L. 1, § 13, Dig. eod. tit.

[3] Ord. de mars 1531; éd. de mars 1680; ord. de 1735, art. 48.

[4] Ord. de police du 14 août 1680.

enfin en écritures authentiques et publiques, de huit années de fers [1]. Les rédacteurs du Code de 1810 n'ont fait que maintenir cette gradation mais en aggravant toutefois la quotité de ces peines.

La différence placée entre les faux commis par les fonctionnaires publics dans leurs fonctions, et les simples citoyens, nous semble juste et rationnelle. L'officier public qui commet ce crime est doublement coupable; il trahit la foi due à son caractère. « Un fonctionnaire public connaît plus particulièrement ses devoirs qu'un simplecitoyen, il jouit d'une confiance obligée, et les faux dont il se rend coupable présentent, outre cette offense portée à la loi, celle de l'autorité chargée de donner la certitude et l'authenticité aux actes [2]. »

Mais à l'égard du simple citoyen on peut émettre quelques doutes sur la nécessité de graduer la peine à un taux différent, d'après le caractère des écritures qu'il altère ou contrefait. En effet, la criminalité du faux est évidemment la même, soit que l'acte soit public ou privé; elle ne dépend pas de la nature des écritures, mais de l'intention qui a dicté l'altération ; et quant aux résultats matériels du crime, il est clair que tel faux commis en simple écriture privée peut avoir des conséquences autrement graves qu'un autre faux commis dans un acte supposé émaner d'un officier public. Ainsi, par exemple, la fabrication ou l'altération d'un contrat de vente, d'une obligation civile, est un crime plus grave, au moins par ses conséquences, que la fabrication d'une fausse mention d'enregistrement sur un acte public, ou la falsification d'une expédition des impôts indirects. Les motifs qui ont fondé cette gradation sont à l'égard des actes authentiques, la foi plus grande qui les accompagne dans les transactions sociales, et qui peut rendre dans certaines circonstances leur falsification plus dangereuse; et quant aux actes de commerce, qui ne sont au fond que des actes privés, le désir de protéger la sûreté et la rapidité de leur circulation contre des altérations qu'elles rendent plus faciles. Mais on peut objecter que la loi accorde aux actes privés qui ont date certaine la même foi qu'aux actes publics eux-mêmes, et que la facilité que l'altération des billets de commerce

[1] Art. 42, 43 et 44 du tit. 2 de la 2o p. du C. du 25 sept. 6 oct. 1791.

[2] Rapport de M. Noailles.

[3] Code général d'Autriche, 1re p. art. 178, 180, 181.

peut offrir est un motif d'assurer le succès de la répression, mais non d'aggraver les peines, puisque le caractère intrinsèque de ce crime reste le même.

Nos observations sont confirmées par les législations étrangères. Le Code d'Autriche confond dans la même peine la contrefaçon des actes publics et des actes privés; cette contrefaçon n'est considérée que comme une sorte d'escroquerie qui n'est passible que d'un emprisonnement de six mois à cinq ans [3]. Le Code prussien distingue ces deux espèces de faux ; mais la peinc est à peu près la même : six mois à deux ans ou à trois ans de détention; seulement cette peine est doublée si l'auteur est un fonctionnaire public [4].

La loi brésilienne ne mentionne aucune distinction entre les actes que le faussaire a falsifiés : toute fabrication, toute altération d'actes, tout usage de pièces contrefaites ou altérées sont uniformément punis de la prison avec travail pendant deux mois à quatre ans et d'une amende proportionnée au dommage [5].

Le Code de la Louisiane punit également le faux d'une peine uniforme, quelle que soit l'écriture dans laquelle il se manifeste: la peine est l'emprisonnement aux travaux de force non moins de sept, ni plus de quinze ans. La loi pénale de l'état de Géorgie énumère dans une même disposition toutes les espèces de faux, et leur applique la même peine, l'emprisonnement laborieux dans un pénitencier pendant un temps qui ne peut être au-dessous de quatre ans, ni excéder dix ans [6]. Les statuts de New-York posent, au contraire, une distinction; mais ils la puisent, non dans la nature de l'écriture, mais dans son objet: la fabrication des faux contrats qui portent atteinte aux propriétés, des fausses obligations, des actes de l'autorité publique, forme une première classe parmi les faux; celle des actes judiciaires, des faux certificats, une deuxième classe; l'altération des comptes publics et des livres de commerce est comprise dans la troisième classe; en-fin des altérations plus minimes, parmi lesquel-les on remarque le fait d'attribuer à un homonyme une obligation signée de son propre nom, figurent dans une quatrième classe. La peine du premier degré est l'emprisonnement pendant

[4] Code prussien, art. 1384, 1385. [5] Code du Brésil, art, 187.

[6] Penal Code of Georgia, seventhe division,

sec. 1.

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