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dų titre 25 de l'ordonnance de 1670, les juges devaient faire au condamné trois différentes injonctions, après lesquelles ils pouvaient le condamner à plus grande peine. Les articles 226 et 227 ne font courir la peine d'emprisonnement qu'à dater de la réparation, ou, si le condamné n'est pas détenu, ils l'y contraignent par corps. Ce mode d'exécution est plus rigoureux, car il ne laisse pas le choix au condamné. Qu'adviendrait-il donc si celui-ci persistait à refuser la réparation? Serait-ce la justice qui fléchirait? ou, pour un délit léger, le condamné demeurerait-il éternellement en prison?

En résumé, cette peine est un débris d'un système pénal tombé que nos lois modernes n'auraient pas dû recueillir. Quelque modérés que soient les termes de la réparation, elle humilie le coupable au lieu de le corriger; elle allume les ressentiments qu'elle devrait apaiser. Est-elle nécessaire pour réparer l'outrage? Mais qu'est-ce donc que l'emprisonnement ou l'amende sinon une réparation de ce délit? La société est satisfaite: l'aveu du coupable n'ajoute rien à l'expiation du délit. C'est une espèce de torture morale que notre législation aurait dû repousser.

En terminant cet examen des outrages adressés aux fonctionnaires publics, nous devons faire deux observations: la première est que nous avons dû limiter nos études aux dispositions mêmes du Code, et ne nous occuper des lois qui sont intervenues postérieurement sur la même matière, qu'autant que ces lois avaient touché ou modifié quelques-unes des dispositions de ce Code. Nous nous sommes donc abstenus d'examiner, par exemple, la nature et les éléments des outrages commis envers certaines personnes qui, sans être fonctionnaires publics, agissent toutefois avec un caractère public tels sont les membres des Chambres législatives, les jurés et les témoins; la loi du 25 mars 1822, en introduisant ces incriminations nouvelles, n'a modifié nulle disposition du Code, et il ne pouvait entrer dans notre plan de présenter le commentaire de cette loi spéciale.

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le dessein de faire une injure sérieuse, le délit ne peut lui être imputé: Quarè si quis perjocum percutiat aut dùm certat, injuriarum non tenetur. A la vérité, quand les paroles ou les gestes sont injurieux, l'intention coupable est présumée, et c'est au prévenu à justifier de sa bonne foi; mais cette preuve doit être admise et elle efface le délit. Les anciens jurisconsultes ont longtemps disserté sur le point de savoir si l'ivresse ou la colère sont deux excuses de l'injure nous avons apprécié précédemment la nature et les effets de ces deux causes inpulsives des actions humaines; il suffira de rappeler que la colère et l'ivresse ne sont point, en général, des motifs de justification, mais peuvent devenir des circonstances atténuantes qui motiveraient seulement une diminution de la peine.

§ II.

Des violences commises envers les fonc tionnaires publics.

La loi romaine avait prévu, ainsi qu'on l'a vu plus haut, deux espèces d'outrages, verbis aut re: l'outrage réel consistait dans les violences qui sont exercées sur la personne, re quotiens manus inferuntur. Cette sorte d'injure était réputée atroce, re atrocem injuriam haberi Labeo ait; mais cette gravité du délit se graduait toutefois d'après la gravité des violences et des blessures, vulneris magnitudo atrocitatem facit et nonnunquam locus vulneris veluti oculo percusso [1]. L'injure restait classée parmi les injures atroces, quoique les violences fussent légères, etiam sine pulsatione posse dici atrocem injuriam, personá atrocitatem faciente [2]; mais les peines se mesuraient sur la nature et les résultats des violences [3].

Ces distinctions ont été à peu près appliquées par notre Code en matière d'outrage contre les fonctionnaires. Après avoir disposé sur l'ontrage verbal, il passe aux outrages commis à l'aide de violences et en fait l'objet de nouvelles dispositions. Ces violences sont classées, suivant leur criminalité ou plutôt suivant leurs résultats, en cinq catégories différentes, à savoir : celles qui n'ont point causé de blessures, d'effusion de sang ou de maladie; celles qui, sans laisser plus de traces, ont cependant été commises avec préméditation ou guet-apens; celles

[3] L. 8 et 45, Dig, ibid.

qui ont été la cause d'effusion de sang, de blessures ou de maladie; celles qui, ayant produit les mêmes résultats, ont été suivies de la mort de la victime dans les quarante jours; enfin, celles qui ont été commises avec l'intention de donner la mort. Nous allons successivement examiner chacune de ces incriminations.

Les art. 228, 229 et 230 sont relatifs aux violences non préméditées qui n'ont été suivies d'aucune blessure: la loi, en ce qui concerne ce premier degré des violences, et dans cette première hypothèse seulement, a gradué la peine d'après la qualité de la personne offensée. L'article 228 est ainsi conçu : « Tout individu qui, même sans armes, et sans qu'il en soit résulté de blessures, aura frappé un magistrat dans l'exercice de ses fonctions ou à l'occasion de cet exercice, sera puni d'un emprisonnement de deux à cinq ans. »

Cette disposition a fait naître un doute grave sur la nature des violences qu'elle punit. Elle ne comprend, en effet, dans ses termes, que ceux qui ont frappé les magistrats. Or, quel est le sens de cette expression? A-t-elle eu pour but de définir l'espèce des violences punissables, en les restreignant aux coups portés? Est-elle, au contraire, démonstrative seulement de la nature des violences, et permet-elle dès lors de comprendre dans la même incrimination toutes les voies de faits du même genre? Cette question importante, puisque sa solution réagit sur toute celle section, exige quelques développe

ments.

Qu'il nous soit permis de rappeler d'abord que la loi romaine avait distingué et énuméré plusieurs espèces de violences. En règle géné rale, l'injure réelle existait toutes les fois que les mains s'étaient portées sur la personne, quotiens manus inferuntur: mais ce n'était pas assez d'avoir posé cette règle; la loi avait cru nécessaire de prévoir les diverses sortes de violences. Est-ce une injure réelle que l'acte de violence qui ne touchait point immédiatement

le corps, comme, par exemple, de saisir une personne par ses vêtements et de les déchirer? La loi le décidait formellement : An et si non corpori utputà vestimentis scissis, comite abducto? Et ait Pomponius etiam sine pulsatione posse dici atrocem injuriam personá atrocitatem faciente [1]. Fallait-il ranger dans la même catégorie les voies de fait légères qui ne causent nulle douleur et ne laissent aucune trace? La loi avait pris soin de le déclarer encore: injuria in corpus fit cum quis pulsatur [2]; et la valeur de ce dernier mot était clairement déterminée : pulsare est sine dolore cædere. Les coups étaient à la fois définis: verberare est cum dolore cœdere; et la loi, en punissant ces diverses violences, les distinguait encore: Lex Cornelia competit ei qui injuriarum agere volet ob eam rem quòd se pulsatum verberatumve [3].

Il semble qu'en présence de textes aussi explicites, de distinctions aussi claires, le législateur était suffisamment averti d'énumérer et de définir les violences qu'il voulait atteindre; or, il n'en a prévu et incriminé qu'une seule es-pèce, les coups et les blessures. Que faut-il en conclure, si ce n'est que les violences non accompagnées de coups ou de blessures restent dans la classe, soit des outrages par gestes, soit des simples voies de fait? L'art. 228 n'a puni que l'action de frapper; les autres violences sortent donc de ses termes [4]. Mais la Cour de cassation n'a point adopté cette conséquence; elle a craint que les violences, plus légères que les coups, ne fussent pas atteintes d'une peine proportionnée à leur gravité; elle a voulu les comprendre dans les termes de l'article 228; elle a déclaré : « que cette interprétation se déduit nécessairement de la combinaison des articles 228, 230, 231 et 232 du Code pénal; que le sens que l'on doit attacher au mot frappé est suffisamment déterminé par les expressions de violences dont il est parlé aux art. 230 et

[1 et 2] L. 1, § 2; 5. § 1; 7, § 8 et 9, Dig. de in- ticle 228, n'est que démonstratif et que des vio juriis et famosis libellis.

lences constituent le délit prévu par cet article,

[3] L. 1. § 2; 5, § 1; 7, § 8 et 9, Dig. de injuriis quoiqu'elles n'aient pas été accompagnées de et famosis libellis,

[4] La Cour de Bruxelles a décidé que les articles 228 et 230 ne peuvent être appliqués que lorsque le prévenu a réellement frappé, dans toute l'acception du mot, les personnes y dénommées. Arr. du 23 févr. 1833 ; J. de B. 1833, p. 190. II a cependant été jugé par la Cour de cassation de Paris que le mot frappé, employé dans l'ar

coups. V. Sirey, 1829, 1, p. 92. Cette interprétation paraît d'autant plus naturelle, que dans un système contraire, l'art. 228 offrirait, en présence de l'art. 311, une véritable superfétation et une anomalie inexplicable même, puisqu'il est dans le système du législateur d'environner de plus ́ de garanties, les personnes publiques.

231; et qu'il résulte notamment de l'art. 232 qu'il y a assimilation parfaite entre les violences et les coups portés, et que ces violences et ces coups rentrent dans les dispositions dudit art. 228, et dans l'acception du mot frappé, qui n'est que démonstratif [1].

Ce système d'interprétation ne nous semble pas pouvoir être adopté. Nous avons souvent eu l'occasion de rappeler cette maxime, presque banale par sa vérité, que toute incrimination doit être sévèrement renfermée dans son texte. Or, quel est le fait prévu par l'art. 228? C'est le seul fait de frapper, de porter des coups; il ne s'agit, dans les termes de la loi, que d'une seule espèce de violences, que de celles qui se manifestent d'une seule manière. Pour étendre à toutes les violences cette disposition si restrictive, que peut-on alléguer? l'identité de raison? Mais, en la supposant, ce serait donc par voie d'analogie que la peine serait étendue d'un cas à un autre, ce serait done parce qu'un deuxième fait aurait une ressemblance plus ou moins exacte avec le premier, qu'on lui appliquerait une peine que nulle loi n'a prononcée à son égard : cette interprétation monstrueuse, proscrite en matière pénale, peut-elle encore être sérieusement invoquée ? Mais, au reste, l'analogie n'existe même pas, car au-dessous des coups et des blessures, qui seuls ont fait l'objet de la sollicitude de la loi, on ne trouverait que des violences légères et des voies de fait qui n'ont point la même gravité, et qui par conséquent ne mériteraient point les mêmes peines. On prétend que l'art. 228 se trouve expliqué par les art. 230 et 232; examinons ces articles. De l'article 230 nous ne citerons que cette seule phrase, la seule qui soit utile ici : les violences de l'espèce exprimée en l'art. 228. Mais ces termes renferment en effet une explication complète, et les conséquences se pressent: l'art. 228 n'a donc prévu qu'une seule espèce de violence, puisque l'art. 230 le déclare hautement; et dès lors les espèces qu'il n'a pas désignées réstent étrangères à sa déposition. Ensuite, les violences incriminées par l'art. 230 ne sont donc autres que les coups prévus par l'art. 228, puisqu'elles sont de la même espèce; d'où il suit que ce dernier article a eu pour but de définir, en les restreignant à une seule espèce, la nature des violences que le législateur voulait punir; d'où il suit encore que ce terme générique de violence n'indique dans ces articles que les seuls coups portés.

[1] Arr. cass. 29 juill. 1826.

L'art. 232 oppose, dans le même contexte, le mot coup au mot violence, et de là la Cour de cassation a conclu que ces deux termes exprimaient deux faits parfaitement analogues, quoique distincts. On pourrait se borner à répondre que ces deux mots sont employés dans cet article comme synonymes, et uniquement pour éviter une aride répétition; mais nous concevons autrement le sens de cette disposition. Les art. 228 et 230 ont limité leur incrimination aux coups dont il ne résulte point de blessures. L'art. 231 prévoit les violences d'une nature plus grave, celles qui peuvent être la cause d'effusion de sang, de blessure ou de maladie. La loi ne s'occupe plus de la manière dont les violences sont exercées; c'est leur résultat qu'elle atteint et qu'elle frappe: ces violences ne résident plus seulement dans les coups; leur gravité se mesure uniquement aux conséquences qu'elles produisent ou qu'elles peuvent produire. Or, l'art. 232 se réfère entièrement, son texte le déclare, à cette dernière classe de violences prévues par l'art. 231, et qui peuvent être la cause d'effusion de sang, de maladie ou de blessures. Lorsque ce résultat n'a pas lieu, la loi dégage de ces violences plus graves une seule espèce de violence, les coups portés, et elle les incrimine séparément. On ne peut donc induire de l'art. 232 aucun argument pour élargir les limites de l'art. 228 et 230. Ce sont deux espèces distinctes, où les mêmes motsexpriment des faits d'une gravité différente.

Nous devons ajouter maintenant que l'interprétation que nous proposons n'est que l'application d'une règle générale qui régit les crimes commis contre les particuliers. Ainsi les articles 309, 310 et 311 limitent également leurs incriminations aux coups et aux blessures; et la question s'est également élevée de savoir si les violences qui n'avaient pas laissé de traces, et qui n'étaient pas des coups, devaient être comprises dans leurs termes. La Cour de cassation, plus fidèle aux principes quand ils n'étaient dirigés que contre les particuliers, a constamment jugé que les violences, quand elles ne sont accompagnées ni de coups ni de blessures, ne rentraient point dans l'application de ces articles, et ne pouvaient donner lieu qu'aux peines portées par l'art. 605 du Code du 3 brumaire an IV, contre les auteurs des voies de fait et de violences légères, pourvu qu'ils n'aient ni blessé ni frappé personne [2]. Or, comment cette doctrine ne serait

[2] Arr. cass. 14 avr. 1821; 15 oct. 1813 (Bull.

elle pas la même dans les deux hypothèses? N'y a-t-il pas parfaite identité de motifs? A la vérité, les coups et les blessures constituent un acte plus grave quand ils sont dirigés contre des fonctionnaires dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, pourvu que, pour nous servir de l'expression d'un arrêt, ces coups et blessures soient alors tout à la fois un attentat à la sûreté particulière et un attentat à la sûreté publique [1]; mais, si cette circonstance aggrave le crime, elle n'en change pas la nature; si la criminalité s'accroit, c'est à raison de la qualité de la personne seulement le fait reste le même dans les deux cas; la solution ne saurait donc être différente sans une évidente contradiction.

En résumé, il faut conclure, soit du texte précis et formel de l'art. 228, soit des rapports qui unissent cet article aux articles qui le suivent, soit enfin du système général du Code, que les coups portés sont les seules violences qu'il ait voulu prévenir. Les violences plus légères et les voies de fait sont rejetées, soit parmi les outrages par gestes, soit parmi les excès et les rixes qui font la matièrede l'art.605 du Code du 3 brumaire an IV.

Reprenons maintenant le texte de l'art. 228. Il importe peu que le coupable ait été armé ou sans armes la loi n'a point fait de cette circonstance une circonstance aggravante; mais il importe que des coups portés il ne soit point résulté de blessures, car ces blessures, ajoutant à la gravité des coups, les rendraient passibles des dispositions pénales de l'art. 231. Il semble inutile de rappeler ensuite que l'article se réfère nécessairement à l'art 222 pour la définition du mot magistrat ; nous n'ajouterons donc rien aux explications que nous avons données sur ce point. Nous ne répéterons point également que l'article n'est applicable qu'autant que les violences ont été commises dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice des fonctions du magistrat cette règle est commune à toutes les dispositions de ce chapitre.

L'art. 232 punit les coups de la peine de la reclusion, lorsqu'ils ont été portés avec préméditation ou de guet-apens. De là M. Carnot a conclu que dans l'espèce de l'art 228 il ne s'a gissait que des coups portés dans un premier mouvement de colère. Cette opinion, qui restreindrait singulièrement l'application de l'article 228, ne nous paraît pas fondée. Les coups

que prévoient les art. 228 et 232 ne sont pas de la même nature; ce dernier article se réfère à l'art. 231, qui ne s'occupe que des violences susceptibles de causer des blessures, des maladies, ou une effusion de sang; ce sont ces violences, plus graves que celles prévues par l'art. 228, pour lesquelles l'art. 232 réserve la peine de la reclusion, dans le cas même où elles n'ont pas produit de résultat matériel, lorsque du moins la circonstance de la préméditation ou du guet-apens les accompagne encore. L'art. 228 ne se trouve donc nullement modifié par cet article; les deux hypothèses sont différentes, et les coups qu'il prévoit et punit rentrent également dans sa disposition, soit qu'ils aient été portés dans un premier mouvement ou avec préméditation.

Le deuxième paragraphe de l'art. 228 porte : «Si cette voie de fait a eu lieu à l'audience d'une cour ou d'un tribunal, le coupable sera en outre puni de la dégradation civique. » Il est évident que ce paragraphe se réfère nécessairement à la première partie de l'article, quant à la nature de la voie de fait; et en ce qui concerne les délits commis à l'audience, nous n'ajouterons rien à nos explications relatives au deuxième paragraphe de l'art. 222. La peine portée par le Code de 1810 était le carcan; la loi du 28 avril 1832, en substituant la dégradation civique au carcan, a de plus ajouté les mots en outre dans le paragraphe qui fait l'objet de notre examen. Cette addition a fait cesser un scandale qui s'était plusieurs fois reproduit. Il résultait, en effet, de la gradation vicieuse des peines portées par les art. 223 et 228, que l'outrage par paroles, par gestes ou par menaces, commis envers un magistrat en l'audience d'un tribunal, faisait encourir à son auteur un emprisonnement qui pouvait s'élever soit à deux, soit à cinq ans, et que si le coupable s'était emporté jusqu'à frapper le magistrat, la peine du carcan lui était seule applicable. On citait, dès lors, des exemples d'individus qui, prévenus d'avoir outragé un magistrat à l'audience, se récriaient qu'ils l'avaient aussi frappé ; ils préféraient le carcan à l'emprisonnement. Au reste, on doit remarquer que cette rectification n'a fait qu'appliquer une proposition faite par la commission du Corps législatif, lors de la rédaction du Code pénal: « Il convient, portait le rapport de cette commission, d'ajouter à l'énonciation de la peine du carcan ces mots : outre l'emprisonnement: on pensera sans

no 220); 10 oct 1822; Dalloz, t. 23, p. 166, t. 28, doute que l'emprisonnement doit être uni ici

p. 272.

[1] Arr. cass. 13 mars 1817.

au carcan; cette dernière peine ne serait rien pour un vagabond ou un inconnu qui aurait

été soldé pour commettre le délit, ou pour un homme sans pudeur ni moralité, qui se promènerait paisiblement après avoir subi son heure d'exposition [1]. » Cet amendement fut alors rejeté par le double motif que nulle part les peines correctionnelles et les peines criminelles n'ont été réunies, et que le carcan, emportant l'infamie, a des suites bien plus graves que la surveillance. Ces motifs ne répondaient nullement à l'objection.

Aux peines de l'emprisonnement et de la dégradation civique, portées par les 2 § de l'article 228, l'art. 229 ajoute une nouvelle peine; cet article est ainsi conçu : « Dans l'un et l'autre des cas exprimés en l'article précédent, le coupable pourra de plus être condamné à s'éloigner, pendant 5 à 10 ans, du lieu où siége le magistrat, et d'un rayon de deux myriamètres. Cette disposition aura son exécution à dater du jour où le condamné aura subi sa peine; si le condamné enfreint cet ordre avant l'expiration du temps fixé, il sera puni du bannisse

ment. >>

Cette interdiction locale et temporaire doit être considérée comme une peine, ce n'est point une satisfaction attribuée au magistrat offensé, mais une garantie donnée à la société elle-même; c'est en vue du délit et non de la victime que le coupable est éloigné du lieu où il l'a commis. On ne pourrait done décider, comme le fait M. Carnot, que le décès du magistrat avant l'expiration du délai de cette interdiction la fait tomber de plein droit; la peine est indépendante de son existence et même de son changement de résidence. Cette mesure ne s'applique qu'aux seuls agents qui ont frappé un magistrat sans que les coups aient produit des blessures: la raison de cette restriction est qu'à l'égard ́ des officiers publics et des autres agents de l'au torité, le délit étant moins grave n'exigeait pas les mêmes mesures répressives; et, relative ment aux violences plus graves que les simples coups, que ces violences étant punies d'une peine afflictive et infamante, la mesure de l'interdiction locale eût fait un double emploi avec la peine accessoire de la surveillance. Enfin, cette peine est purement facultative; les juges doivent la réserver pour les circonstances les plus graves, et attendre que la sûreté publique en sollicite l'application.

du Code d'instruction criminelle, relatif aux contumaces qui ont prescrit leur peine; mais cette peine accessoire se trouve aujourd'hui formulée en quelque sorte en règle générale par l'art. 44 du Code revisé, qui permet d'interdire aux condamnés à la surveillance l'accès de certains lieux. Toutefois il existe ces différences entre la disposition générale et la règle spéciale, que les mêmes mesures n'en dérivent pas à l'égard du condamné, et que l'infraction du ban dans le cas de l'art. 229 est punie non pas d'un simple emprisonnement, mais de la peine du bannissement.

Les violences, de même que les outrages par paroles, sont punies d'une peine différente, suivant qu'elles sont exercées contre des magistrats ou d'autres officiers publics. Cette dernière hypothèse est prévue par l'art. 230 qui est ainsi conçu: «Les violences de l'espèce exprimée en l'art. 228, dirigées contre un officier ministériel, un agent de la force publique, ou un citoyen chargé d'un ministère de service public, si elles ont eu lieu pendant qu'ils exerçaient leur ministère ou à cette occasion, seront punies d'un emprisonnement d'un mois à six mois. »

Le délit prévu par cet article est le même que celui que l'art. 228 a puni : la qualité des personnes qui en sont l'objet a seule changé. Ainsi cet article ne doit s'appliquer qu'aux individus qui ont frappé les officiers qu'il désigne, sans que les coups aient causé des blessures; car il s'agit dans l'un et l'autre cas de violences de la même espèce. Ainsi cette application est subordonnée à la condition que l'officier ait été frappé dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. Il ne nous reste done qu'un seul point à examiner : quelles sont les personnes publiques auxquelles s'étend l'art. 230? Nous ne répéterons point la définition que nous avons donnée précédemment des officiers ministériels et des agents de la force publique; mais une question nouvelle se présente ici : que faut-il entendre par ces mots, un citoyen chargé d'un ministère de service public? Il est difficile d'attacher un sens précis à une expression aussi vague, et que le législateur a jetée ici en quelque sorte au hasard, puisqu'il ne la reproduit nulle part ailleurs; toutefois elle doit être entendue avec de certaines restrictions. Les violences qui font l'objet de ce cha pitre ne prennent un caractère de gravité plus élevé que si elles étaient commises sur de simples particuliers, que parce que, exercées sur des personnes publiques, elles constituent en quel[1] Procès-verbaux du Conseil d'état, séance du que sorte un attentat à la sûreté générale : il

L'interdiction d'un lieu déterminé ne trouvait d'exemple dans la législation que dans l'art. 635

9 janv. 1810.

suit de là qu'il faut nécessairement limiter l'ap

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