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Le Code pénal de 1810 portait la peine des travaux forcés à perpétuité; la loi du 28 avril 1832 l'a réduite aux travaux forcés à temps: >>> L'abaissement de la peine, a dit le rapporteur de cette loi, pour le crime prévu par l'article 132, a dû amener un deuxième abaissement pour le crime prévu par cet article. » Il semble résulter de ces paroles que le législateur a plutôt été mû par la pensée de concilier les textes de ces deux articles que par le désir d'établir une juste proportion entre le crime que prévoit l'art. 133 et la peine qu'il inflige.

Dans la discussion du Code pénal de 1810, plusieurs orateurs avaient demandé que la contrefaçon des monnaies de cuivre et de billon fût punie de la même peine que celle des monnaies d'or et d'argent. Mais il fut répondu avec raison que les peines doivent être graduées d'après l'influence plus ou moins grave que le délit peut avoir sur la tranquillité ou sur la fortune des citoyens; et que des pièces de billon ou de cuivre, que l'on ne reçoit ordinairement qu'en très-petite quantité et pour de faibles sommes, ne peuvent pas, comme de fausses pièces d'or, par exemple, causer la ruine de ceux qui les reçoivent [1]. Ces motifs firent adopter cette distinction, qui fut alors une immense amélioration dans la législation pénale.

La seule question importante que l'art. 133 ait fait naître est de savoir à quels signes on doit distinguer la monnaie de billon et la monnaie d'argent.

Cette question ne pouvait s'élever à l'égard des pièces de notre système monétaire actuel, puisqu'elles sont clairement classées en monnaies d'argent et de cuivre par la loi du 23 thermidor an III, et que toutes les monnaies d'argent sont frappées au même titre. Mais elle a été agitée au sujet des pièces de quinze et de trente sous, qui appartiennent à l'ancien système monétaire. La Cour de cassation les a déclarées monnaies d'argent, en se fondant sur ce que <«< la législation, d'accord en cela avec les principes et les dénominations en usage en matière

[1] Procès verb. du Cons. d'état, séance du 5 août 1809.

de monnaie, n'a entendu par billon que la monnaie de cuivre alliée à un peu d'argent, et que, dans l'espèce, il s'agissait de pièces qui, d'après les lois de leur création, étaient fabriquées à plus de deux tiers d'argent fin, et par conséquent étaient classées parmi les monnaies d'argent ayant cours légal en France [2].

M. Carnot a critiqué cet arrêt [3]. Ses objections consistent à dire que les pièces de quinze et de trente sous, n'étant pas fabriquées au même titre que les écus, ne sont pas des monnaies d'argent proprement dites; et que si, comme l'a proposé M. Merlin, dans le réquisitoire sur lequel cet arrêt fut rendu, le caractère de la monnaie se détermine par la qualité du métal qui prédomine, toute pièce mélangée d'argent et de cuivre serait monnaie d'argent, puisque ce métal, quelque légère que soit la quantité alliée au cuivre, l'emportera toujours par sa valeur.

Il semble qu'il faut chercher la solution de cette question dans les lois qui ont créé cette monnaie et qui lui ont donné son caractère spécial. Or, les lois des 11-19 janvier 1791 et 11-28 juillet suivant classent formellement les pièces de quinze et trente sous dans la monnaie d'argent [4]. A la vérité, d'après l'article 2 de cette dernière loi, la proportion de cuivre qui entre dans l'alliage est plus forte que dans les écus; mais l'article 132 n'a point distingué entre telle ou telle espèce de monnaie d'argent ; sa disposition est générale; et nous ne pensons pas que la distinction proposée par M. Carnot soit admissible.

En général, lorsque l'accusation porte sur le crime de contrefaçon de monnaie, la question d'émission ou d'exposition de la monnaie contrefaite peut être posée lorsqu'elle résulte des débats, puisque ces faits accessoires ne sont que le complément et la consommation du crime principal [5]. Mais si le titre de l'accusation est une contrefaçon de monnaie d'argent de la valeur de quinze ou de trente sous, la Cour d'assises peut-elle modifier ce titre et poser subsidiaire

et de 15 sous. » Et la loi des 11-28 juillet 1791 ajoute : « Les pièces de 30 sous contiendront, en

[2] Arr. cass. 28 nov. 1812 (Dalloz, t. 15, p. 375; grains de fin, la moitié de l'écu, et celles de 15 S. 1813, 1, 198.

[3] Carnot, art. 133, no 3; Bourguignon, sur l'art. 133, no 5.

[4] La loi des 11-19 janvier 1791 porte : « Il sera incessamment fabriqué une..... monnaie d'argent... Cette fabrication sera faite au titre actuel des cus... Cette monnaie sera divisée en pièces de 30

CHAUVEAU. T. II.

sous, le quart de l'écu. Néanmoins, chacune desdites pièces sera alliée dans la proportion de 8 deniers d'argent fin avec 4 deniers de cuivre. » Voy. encore les lois des 9-15 avr. 1791, et 5-14 sept. 1792, tit. 4.

[5] Arr. cass. 19 avr. 1832,

5

ment la question de contrefaçon de monnaie de billon? La Cour de cassation s'est prononcée pour la négative [1] ; et cette opinion nous paraît fondée. En effet, le point de savoir si ces pièces sont des monnaies d'argent ou de billon n'est point une question de fait, une circonstance nouvelle surgissant du sein des débats, et exerçant une subite influence sur le fait principal. Cette question est extrinsèque au fait; elle est indépendante de l'action imputée ; elle appartient à la législation; c'est une question de droit; la Cour d'assises, en se prononçant dans un sens contraire à l'arrêt de la chambre d'accusation, usurpe un droit qui ne lui appartient pas, et dénature l'accusation qu'elle a mission de purger sans pouvoir la changer.

La contrefaçon des monnaies étrangères est prévue et punie par l'article 134 : « Tout individu, porte cet article, qui aura en France contrefait ou altéré des monnaies étrangères, ou participé à l'exposition ou introduction en France de monnaies étrangères contrefaites ou altérées, sera puni des travaux forcés à temps.» Cette disposition n'existait pas dans le projet du Code pénal. M. Merlin signala cette lacune, et proposa d'étendre l'article 132 à la contrefaçon des monnaies étrangères; il rappela que la loi du 2 frimaire an II punissait les fabricateurs de fausse monnaie étrangère de 15 ans de fers, comme les contrefacteurs de la monnaie nationale. «Les monnaies étrangères, ajoutat-il, sont reçues en France on les achète; la nation a donc intérêt à ce qu'on empêche de les contrefaire. » M. Berlier répondit qu'il semblait juste de prévoir ce cas, mais qu'il fallait lui appliquer une peine moindre que celle infligée aux contrefacteurs des monnaies du pays, parce que les conséquences en sont moins graves. Il proposa la peine des travaux forcés à temps, qui fut adoptée en définitive; toutefois le Conseil d'état arrêta que ce crime serait puni de 15 ans de fers, conformément à la disposition du Code du 25 septembre-6 octobre 1791 [2]. La loi du 28 avril 1832, après avoir réduit les peines édictées dans les articles 132 et 133, n'a point touché à celle-ci : nous ne blâmerons pas cette réserve. La contrefaçon des monnaies étrangères peut avoir un double objet : l'agent les fabrique en France, soit pour les répandre en pays étranger, soit pour les émettre en France même. Dans le premier cas, la peine n'a

(1) Arr. cass. 9 sept. 1830; S. 1831, 1, 186.
[2] Procès-verb. du Cons. d'état, séance du 28

oct. 1808.

qu'un but politique : celui de provoquer, de la des juste réciprocité des nations étrangères, mesures de la même nature vis-à-vis de la France. Dans la deuxième hypothèse, cette peine a pour but de préserver les citoyens des périls d'une circulation qui, pour n'être pas forcée, n'en est pas moins tolérée par l'usage. La distance qui sépare ce crime du crime de fausse monnaie nationale est donc uniquement dans la différence du préjudice qu'il peut causer: la criminalité est la même dans l'un et l'autre cas, c'est un faux préparé pour commettre un vol; ce sont les mêmes préparatifs, la même préméditation, le même crime.

Les monnaies étrangères sont définies par cette dénomination même. Cependant la question s'est élevée de savoir si l'on doit comprendre dans cette expression les billets papiermonnaie ayant cours forcé dans un pays étranger. La Cour de cassation a résolu cette question affirmativement: « Attendu que la disposition de l'article 134 est générale et absolue ; que par sa généralité elle se réfère généralement à toutes les monnaies étrangères de quelque espèce qu'elles soient; qu'elle n'excepte point de la peine qu'elle prononce la fabrication des monnaies qui seraient d'une matière autre que l'or, l'argent, du cuivre ou du billon; que dès lors elle s'applique aux unes comme aux autres [3]. » Nous ne pouvons adopter cette interprétation. Le Code pénal n'a appliqué l'expression de monnaie qu'à la monnaie métallique; dans le paragraphe où se trouve placé l'art. 134, il n'est question que de cette espèce de monnaie; la contrefaçon du papier-monnaie n'a été prévue que par le deuxième paragraphe de la même section, et dans ce paragraphe il n'est pas question de billets étrangers. Si l'article 134 parle en termes généraux des monnaies étrangères, sans expliquer ce terme, il est évident qu'il se réfère aux articles 132 et 133; et cela résulte de son texte même, qui se trouve calqué sur le texte de ces articles, et dans lequel les mots monnaies altérées ne peuvent s'appliquer qu'à des monnaies métalliques. La Cour de cassation, en isolant cet article de ceux qui l'environnent et en omettant d'analyser ses termes, a méconnu son vrai sens et étendu arbitrairement sa pénalité. Les billets papiermonnaie d'un gouvernement étranger ne peuvent avoir en France que le caractère d'écrits

[3] Arr. cass. 17 janv., 25 avr.1828 et 20 juin 1829. (Journ. du droit crim. 1829, p. 233.)

privés, et leur falsification étant un acte préjudiciable peut constituer un faux en écriture privée; mais c'est là le seul caractère que ce crime puisse revêtir, et ce n'est que par une étrange fiction qu'on a pu attribuer à un faux en écritures le caractère et les effets de la contrefaçon de la monnaie.

L'article 134 ne punit la contrefaçon des monnaies étrangères qu'autant que le crime a été commis en France. Cette disposition établit une nouvelle différence entre la falsification des monnaies nationales et étrangères, puisque, aux termes de l'article 5 du Code d'instruction criminelle, tout Français qui s'est rendu coupable, hors du territoire de France, de contrefaçon des monnaies nationales ayant cours, peut être poursuivi et puni en France.

De là il suit que la contrefaçon en pays étranger de monnaies étrangères, ne constitue ni crime ni délit; et l'introducteur de ces monnaies ne pourrait être puni comme complice, puisque le fait principal ne serait pas punissable, mais seulement comme coupable du fait distinct de l'introduction.

Cependant un arrêt de la Cour de cassation paraît avoir implicitement décidé qu'un militaire français qui contrefait des monnaies étrangères, dans un pays étranger qu'occupe une armée française, commet le crime prévu par l'art. 134 [1]. Mais cet arrêt a son principe dans cette fiction que le pays occupé par une armée française est censé faire partie du territoire français, et que le militaire qui est sous le drapeau doit être considéré comme s'il était en France. Ainsi cet arrêt reconnaît la règle légale, tout en y dérogeant. Du reste, nous ne pensons pas qu'à l'aide d'une fiction qui n'a été introduite qu'en faveur des militaires, et pour conserver leurs intérêts, on puisse étendre l'application d'une peine au-delà des limites fixées par la loi.

La complicité en matière de fausse monnaie s'établit d'après les règles générales de l'article 60. Ainsi, non-seulement le fabricateur, mais encore ceux qui l'ont aidé et assisté dans la fabrication, sont enveloppés dans la même peine. On a demandé si les fabricateurs d'instruments propres à contrefaire ou altérer les monnaies doivent être punis comme faux monnayeurs, lorsque l'altération ou la contrefaçon n'a pas été consommée. La Convention nationale,

[1] Arr. 18 oct. 1811; (Sir. 1812, 1, 123; Dalloz, t. 15, p. 375.

[2] Décret du 24 avr. 1808, art. 1.

saisie de la même question, en matière de fabrication d'assignats, l'a décidée affirmativement par un décret du 17 brum. an 11, en se fondant sur ce que « la contrefaçon d'un assignat est une opération complexe qui ne peut résulter que de plusieurs faux successifs; que le crime de celui qui met la dernière main à cette contrefaçon est absolument distinct du crime de celui qui fabrique la fausse forme, comme le crime qui consiste à fabriquer la fausse forme est absolument distinct de celui qui consiste à fabriquer le faux papier ou la fausse planche; que chacun des auteurs de ces divers faux consomme, en ce qui le concerne, le crime de contrefaçon d'assignats; qu'ainsi il est inutile d'examiner, à l'égard de chacun d'eux, si celui de ses complices qui devait opérer après lui, a ou n'a pas exécuté le délit dont il s'était chargé. » Il est facile d'apercevoir le vice du raisonnement qui sert de base à cette loi. Le fabricateur d'instruments se rend coupable, non d'un crime distinct, mais d'un acte purement préparatoire du crime de fausse monnaie : si ce crime se consomme, il peut en être réputé le complice, pourvu d'ailleurs qu'il ait connu la destination des instruments qu'il préparait; s'il n'en a été fait aucun usage, il n'y a point de crime, et les actes préparatoires qui n'ont été suivis d'aucun commencement d'exécution ne sont passibles d'aucune peine. La loi citée a fait des crimes distincts des actes préparatoires et des actes d'exécution; elle ne saurait donc être invoquée sous l'empire du Code pénal qui repousse une telle confusion. Au reste, les balanciers adoptés pour la fabrication des monnaies ne peuvent être confectionnés que dans l'hôtel des monnaies de Paris [2], et les ouvriers qui font usage de presses, moutons, laminoirs, balanciers et coupoirs, sont tenus d'obtenir la permission de les établir [3].

Le Code pénal de 1810 avait presque complétement assimilé le crime de fausse monnaie au crime de haute trahison; c'étaient les mêmes peines, les même poursuites contre les nonrévélateurs, la même exemption de peines en faveur des dénonciateurs. La peine de mort, la confiscation, et les peines qui frappaient la non-révélation, ont été successivement supprimées; mais l'exemption de peines, cette prime donnée à la dénonciation, subsiste encore.

[3] Arrêté du 3 germ, an ix, qui rappelle les dispositions des lettres patentes du 28 juillet 1783.

L'article 138 porte : « Les personnes coupables des crimes mentionnés aux articles 132 et 133 seront exemptes de peines, si, avant la consommation de ces crimes et avant toutes poursuites, elles en ont donné connaissance et révélé les auteurs aux autorités constituées, ou si, même après les poursuites commencées, elles ont procuré l'arrestation des autres coupables. Elles pourront néanmoins être mises pour la vie ou à temps sous la surveillance spéciale de la haute police. »>

Cet article n'est qu'une application nouvelle du principe posé dans l'article 108. Nous ne devons donc point reproduire les réflexions que ce principe nous a suggérées [1], et nous nous bornerons à signaler quelques légères diffé rences qu'on remarque entre ces deux dispositions.

D'après l'article 108, le révélateur ne peut invoquer le bénéfice de la loi qu'autant que sa révélation a précédé toute exécution ou tentative du crime. Dans l'espèce de l'art. 138, au contraire, ce bénéfice lui est acquis, pourvu que la dénonciation ait précédé la consommation. Ainsi, jusqu'à l'acte qui consomme le crime, le coupable peut racheter la peine en révélant les projets du crime. Mais quel est l'acte qui, en matière de fausse monnaie, consomme le crime? Si l'on s'arrête au point de vue théorique, cet acte c'est l'émission des pièces fausses tous les faits antérieurs n'ont pour but que de préparer ce dernier fait; seul il donne la mesure de l'intention criminelle de son auteur. Mais, dans le système du Code, la contrefaçon étant punie, abstraction faite de l'émission, le crime est consommé par la scule fabrication des pièces. Le droit du révélateur se trouve donc épuisé dès que la contrefaçon est parfaite.

La Cour de cassation a même jugé qu'il faut, pour motiver l'application de cet article, « que les coupables aient donné connaissance et révélé les auteurs aux autorités constituées, avant que le projet soit devenu criminel, soit par la consommation, soit par une tentative caractérisée crime d'après l'art. 2 du Code pénal, et aient ainsi mis l'autorité à même de suivre les circonstances préparatoires ou constitutives du crime [2]. » Peut-être cette jurisprudence a-t-elle placé le révélateur dans une position

[1] Voy. suprà.

[2] Arr. cass. 17 août 1820; Dalloz, t. 15, p. 377. [3] Procès-verb. du Cons. d'état, séance du 22 oct. 1808.

moins favorable que la loi ne l'avait voulu ; car l'art. 138 n'a point, comme l'article 108, li mité la remise de la peine au cas où la révélation est faite avant la tentative, mais bien seulement avant la consommation. Or, si la tentative est assimilée à la consommation par l'article 2, ce n'est que relativement à la peine et nullement aux effets de ces deux modes d'exécution. L'esprit du Code a été, d'ailleurs, d'étendre les effets de l'exemption plutôt que de les limiter: « cette exemption, disait M. Berlier, repose sur l'intérêt politique de l'Etat, mieux servi par de promptes révélations que par des punitions tardives. Cettte vue fondamentale semble repousser toute proposition qui tendrait à en restreindre les effets [3]. >>

Une autre différence révèle encore le même esprit. L'article 108 ne fait jouir de l'exemption que celui des coupables qui, le premier, a révélé le crime: l'article 138 accorde le même privilége à toutes les personnes qui ont fait la révélation. M. d'Hauterive demandait au Conseil d'état que ce bénéfice ne profitât qu'à un seul des coupables, et non à plusieurs qui s'uniraient pour sacrifier un de leurs complices, et acheter à ce prix l'impunité. Cette proposition fut repoussée par la raison que le suprême intérêt qu'a la société d'écarter le fléau de la fausse monnaie, rend cette application simultanée légitime et nécessaire.

Au surplus, dans l'hypothèse de l'art. 138 comme dans celle de l'article 108, c'est au jury à déclarer le fait de la consommation, et si les coupables qui réclament le bénéfice de l'une des deux dispositions de cet article ont rempli les conditions que la loi a mises à son application [4].

En terminant ce chapitre, il importe de remarquer que l'article 164, qui prononce contre les coupables de faux une amende dont le minimum est de cent francs, et dont le maximum est du quart du bénéfice illégitime que le faux aurait procuré à son auteur, s'applique aux faux monnayeurs aussi bien qu'aux autres faussaires; cela résulte, non du texte de cet article, mais de la place qu'il occupe parmi les dispositions communes aux différentes espèces de faux. La Cour de cassation, conformément à cette interprétation, a annulé plusieurs condamnations qui avaient omis de prononcer cette amende [5].

[4] Arr. cass. 17 août 1820; Dalloz, t. 15, p. 377.

[5] Arr. cass. 20 juin 1832 (Dall. 1832).

Il en est de même à l'égard de l'article 165 qui porte que tout faussaire condamné, soit aux travaux forcés, soit à la réclusion, subira l'exposition publique. Le crime de fausse monnaie, que la loi pénale a placé au premier rang des divers genres de faux, est évidemment compris dans la disposition commune de cet article [1]. Tels sont les principes qui régissent la répression de ce crime; telles sont les dispositions de la législation qui s'y rattachent. En traçant les règles théoriques qui nous paraissent dominer cette matière, et les diverses distinctions qui, à nos yeux, la divisent profondément, notre but a été de faire ressortir la nature du crime et les caractères dont il peut s'emprein

dre. Si le système du Code tranche fortement avec cette théorie, elle en éclaire néanmoins les dispositions, en permettant de poser avec plus de netteté leur principe et leur but. Nous avons parcouru le cercle de ce système, simple mais étroit, clair mais rigoureux, et nous en avons déduit les règles pratiques d'application qui, dans l'esprit sainement compris de la loi, doivent guider la jurisprudence. En cette partie du Code, les dispositions sont nettement écrites et les difficultés peu ardues : c'est au système de l'incrimination elle-même que la réforme devrait remonter, et nous serions heureux si nous osions penser que notre travail pût avoir quelque jour cet effet.

DU FAUX.

CHAPITRE XXI.

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DU FAUX COMMIS PAR FAITS.

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DE LA CONTREFAÇON DES SCEAUX DE L'ÉTAT, DES BILLETS DE BANQUE, DES EFFETS PUBLICS, ET DES POINÇONS, TIMBRES ET MARQUES. DU FAUX EN GÉNÉRAL. DIFFÉRENTES ESPÈCES DE FAUX. Ser. CONTREFAÇON DES BILLETS DE BANQUE ET DES EFFETS PUBLICS. CARACTERE DE CE CRIME. RÉDUCTION DE LA PÉNALITÉ. DÉFINITION DES EFFETS ET BILLETS COMPRIS DANS L'ARTICLE 139. EXEMPTION DE PEINE A L'ÉGARD DES DÉNONCIATEURS. - S II. CONTREFAÇON DU SCEAU ET DES TIMBRES, DES MARTEAUX ET POINÇONS DE L'ÉTAT. CARACTÈRES PARTICULIERS DE CHACUN DE CES CRIMES. L'APPLICATION FRAUDULleuse d'une VÉRITABLE EMPREINTE DU MARTEAU DE L'ÉTAT PEUT-ELLE ÊTRE ASSIMILÉE A L'USAGE DE CE MARTEAU? L'APPLICATION D'UN FAUX POINÇON DOIT-ELLE DANS TOUS LES CAS ÊTRE CONSIDÉRÉE COMME UN FAUX? USAGE ILLÉGAL DES TIMBRES ET MARTEAUX. - § III. MARQUES POSÉES PAR LE GOUVERNEMENT SUR LES DENRÉES ET MARCHANDISES. CONTREFAÇON DES SCEAUX, TIMBRES ET MARQUES DES AUTORITÉS OU DES ÉTABLISSEMENTS DE COMMERCE. RÈGLES GÉNÉRALES CONCERNANT LES MARQUES DES MANUFACTURES. USAGE ILLEGAL DES VRAIS SCEAUX, TIMBRES ET MARQUES. APPLICATION A CES DIVERS CRIMES DES ART. 163, 164 ET 165. (COMMENTAIRE DES ART. 139, 140, 141, 142, 143 ET 144 DU CODE PÉNAL.)

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Le faux, dans son acception la plus générale, comprend toute altération de la vérité, qu'elle soit ou non accompagnée de fraude. Pris dans les termes de cette définition, le faux peut constituer une faute grave, il ne constitue point un crime. Le dol même ne suffit pas pour lui imprimer ce caractère : il faut qu'il ait pour but de porter préjudice à autrui. Falsitas est fraudulosa veritatis mutatio et in alterius præ

[1] Arr. cass. 11 oct. 1834; S., 1835, 1, ( 61.

judicium facta. C'est revêtu de ce triple caractère, qui sera développé plus loin, que se présente le faux prévu par la loi pénale.

Ce crime peut se commettre de trois manières, par paroles, par écrits et par des faits [2]. On trouve des exemples de la première espèce dans les articles 361 et 366 du Code pénal qui punissent le faux témoignage et le faux serment : l'ordre adopté par le Code nous impose

[2] Scripturâ, dicto, facto et usu. Farin. quæst. 150, n° 8.

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