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QUATRIÈME ENTRÉE.

FRANÇOIS.

DEUX POITEVINS CHANTANTS ET DANSANTS, POITEVINS ET POITEVINES DANSANTS.

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SECOND POITEVIN.

Le rossignol, sous ces tendres feuillages,
Chante aux échos son doux retour;

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(Trois Poitevins et trois Poitevines dansent ensemble.)

CINQUIÈME ET DERNIÈRE ENTRÉE.

(Les Espagnols, les Italiens et les François se mêlent ensemble, et forment

QUELS

la dernière entrée.)

CHOEUR DE SPECTATEURS.

JELS spectacles charmants! quels plaisirs goûtons-nous! Les dieux mêmes, les dieux, n'en ont point de plus doux.

FIN DU BALLET DES NATIONS.

RÉFLEXIONS

SUR

LE BOURGEOIS GENTILHOMME.

Si l'on excepte LE MISANTHROPE et LE TARTUFFE, aucune pièce de Molière n'offre de plus grandes vues que celle-ci. L'avarice, le pédantisme, la jalousie, ne sont que des travers particuliers, au lieu que celui de M. Jourdain est commun à presque tous les hommes, soit sous le rapport du rang, soit sous celui des richesses, soit sous celui des talents: il n'y en a pas qui ne cherche à s'élever, et qui ne veuille paroître plus grand qu'il n'est:

Tout prince a des ambassadeurs.

Tout marquis veut avoir des pages.

:

« Cette foiblesse, dit M. de Voltaire, est précisément la « même que celle d'un bourgeois qui veut être homme de qua«lité. Mais la folie du bourgeois est la seule qui soit comique, « et qui puisse faire rire au théâtre ce sont les extrêmes dis« proportions des manières et du langage d'un homme avec <«<les airs et les discours qu'il veut affecter qui font un ridi«cule plaisant. Cette espèce de ridicule ne se trouve point <«< dans des princes ou dans des hommes élevés à la cour, qui « couvrent toutes leurs sottises du même air et du même lan«gage; mais ce ridicule se montre tout entier dans un bour

« geois élevé grossièrement, et dont le naturel fait à tout mo«ment un contraste avec l'art dont il veut se parer. C'est ce « naturel grossier qui fait le plaisant de la comédie; et voilà « pourquoi ce n'est jamais que dans la vie commune qu'on ◄ prend les personnages comiques. »>

Ce jugement de M. de Voltaire est plein de raison et de goût : ce grand poëte avoit en vue les comédies qu'on représentoit de son temps; il blàmoit la manie de ne plus mettre de bourgeois sur le théâtre, et de ne faire que ce qu'on appeloit des pièces de bon ton, genre absolument opposé au but que doit se proposer la véritable comédie.

Il est bien à regretter que Molière, ayant trouvé un si beau sujet, possédant au plus haut degré les moyens d'en tirer tout le parti possible, n'ait fait en quelque sorte que l'esquisser. Boileau lui en faisoit souvent les reproches les plus vifs; mais Molière répondoit qu'il ne pouvoit soutenir son théâtre que par un grand nombre de nouveautés, et que, pour les multiplier, il falloit nécessairement travailler vite. Cependant il se proposoit de faire par la suite une revue de toutes ses pièces, de corriger celles qui lui paroîtroient défectueuses, et de développer celles dont les idées comiques n'étoient qu'indiquées. Quel trésor ne posséderions-nous pas, si Molière, aidé de Boileau, eût pu se livrer à ce travail! Mais on sait qu'une mort prématurée l'enleva au milieu de sa carrière. Il est probable qu'il auroit rectifié le plan du BOURGEOIS GENTILHOMME, dont les actes sont disproportionnés; et qu'en conservant dans leur entier les excellentes conceptions des trois premiers et de la moitié du quatrième, il auroit substitué à la farce du Mufti, qui est d'un autre ton que le reste, de nouveaux développements des ridicules de M. Jourdain, et un dénoûment plus heureusement combiné.

Cette pièce excita, dans le dix-huitième siècle, la censure du philosophe qui s'étoit déjà élevé contre LE MISANTHROPE et L'AVARE. « Quel est le plus blâmable, dit J. J. Rousseau, d'un « bourgeois sans esprit et vain, qui fait sottement le gentil<< homme, ou du gentilhomme fripon qui le dupe? Dans cette « pièce, ce dernier n'est-il pas l'honnête homme ? N'a-t-il pas « pour lui l'intérêt? et le public n'applaudit-il pas à tous les tours qu'il fait à l'autre ? ».

On va voir combien il y a d'erreurs dans ce peu de mots. Un homme du caractère de M. Jourdain ne peut être entouré que de fripons: cela est indubitable. Quels sont les honnêtes gens qui voudroient avoir des liaisons avec un fou si ridicule, et près duquel on ne peut réussir qu'à l'aide de la plus basse flatterie? Aussi Molière a-t-il fait de même que dans L'ÁVARE: il n'a point mis auprès de M. Jourdain un de ces amis raisonnables qu'il place si heureusement dans ses autres pièces. L'avare et le prodigue n'ont pas plus d'amis l'un que l'autre : ces deux excès excluent nécessairement toute liaison de ce genre. Molière, en faisant tromper le Bourgeois gentilhomme, n'a laissé aucun doute sur celui qui est le plus blàmable, ou de la dupe, ou du fripon. Dorante n'est pas l'honnête homme de la pièce, il n'attire pas tout l'intérêt, le public n'applaudit pas à ses ruses; rien n'est plus facile à démontrer. Ce gentilhomme n'a aucun des agréments que donne ordinairement la vie de la cour: son adresse se borne à flatter bassement un sot pour lui escroquer de l'argent. On ne peut donc le considérer ni comme homme d'esprit, ni comme honnête homme; et l'on ne peut applaudir à des ruses si grossières. C'est plutôt au sens droit de madame Jourdain et de Nicole que le public se plaît à applaudir: ni l'une ni l'autre ne sont dupes des fourberies de ceux qui entourent M. Jourdain; elles les devinent

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