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ÉDIT DU ROI

Portant Réglement général sur les Duels.

Donné à Saint-Germain-en-Laye, au mois d'août 1679; enregistré en Parlement le 1er jour de septembre de la même année.

Louis, par la grace de Dieu, roi de France et de Navarre, à tous présens et à venir, salut.

Comme nous reconnaissons que l'une des plus grandes grâces que nous ayons reçues de Dieu dans le gouvernement et conduite de notre état, consiste en la fermeté qu'il lui a plu de nous donner pour maintenir les défenses des duels et combats particuliers, et punir sévèrement ceux qui ont contrevenu à

une loi si juste et si nécessaire pour la conservation de notre noblesse, nous sommes bien résolu de cultiver avec soin une grâce si particulière, qui nous donne lieu d'espérer de pouvoir parvenir pendant notre règne à l'abolition de ce crime, après avoir été inutilement tentée par les rois nos prédécesseurs. Pour cet effet, nous nous sommes appliqué de nouveau à bien examiner tous les edits et réglemens faits contre les duels, et tout ce qui s'est fait en conséquence, auxquels nous avons estimé nécessaire d'ajouter divers articles.

A ces causes et autres bonnes et grandes considérations à ce nous mouvant, de l'avis de notre conseil et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, après avoir examiné en notredit conseil ce que nos très-chers et bien amés cousins les maréchaux de France, qui se sont assemblés plusieurs fois sur ce sujet, nous ont proposé; nous avons, en renouvelant les défenses portées par nos édits et ordonnances et celles des rois nos prédécesseurs, et en y ajoutant ce que nous avons jugé nécessaire, dit, déclaré, statué et ordonné, disons, déclarons, statuons et ordonnons par notre présent édit perpépétuel et irrévocable, voulons et nous plaît:

ART. 1er.

Nous exhortons tous nos sujets et leur enjoignons de vivre à l'avenir ensemble dans la paix, l'union et la concorde nécessaires pour leur conservation, celle de leurs familles et celle de l'état, à peine d'encourir notre indignation, et de châtiment

exemplaire. Nous leur ordonnons aussi de garder le respect convenable à chacun, selon sa qualité, sa dignité et son rang, et d'adopter mutuellement les uns avec les autres tout ce qui dépendra d'eux pour prévenir tous différends, débats et querelles, notamment celles qui peuvent être suivies de voies de fait; de se donner les uns aux autres, sincèrement et de bonne foi, tous les éclaircissemens nécessaires sur les peines et mauvaises satisfactions qui pourront survenir entre eux; d'empêcher qu'on ne vienne aux mains en quelque manière que ce soit, déclarant que nous réputons ce procédé pour un effet de l'obéissance qui nous est due, et que nous tenons être plus corforme aux maximes du véritable honneur, aussi bien qu'à celles du christianisme, aucun ne pouvant se dispenser de cette mutuelle charité sans contrevenir aux commandemens de Dieu aussi bien qu'aux nôtres.

ART. 2.

Et d'autant qu'il n'y a rien d'aussi honnête, ni qui gagne davantage les affections du public et des particuliers, que d'arrêter le cours des querelles en leur source, nous ordonnons à nos très-chers et bien amés cousins les maréchaux de France, soit qu'ils soient à notre suite ou en nos provinces, et aux gouverneurs-généraux de nos provinces, et en leur absence à nos -lieutenans-généraux en icelles, de s'employer eux-mêmes trèssoigneusement et incessamment à terminer tous les différends qui pourront arriver entre nos sujets, par les voies et ainsi

qu'il leur en est donné pouvoir par les édits et ordonnances des rois nos prédécesseurs. Et en outre, nous donnons pouvoir à nosdits cousins de commettre en chacun des baillages ou sénéchaussées de notre royaume un ou plusieurs gentilshommes, selon l'étendue d'icelles, qui soient de qualité, d'âge et capacité requise, pour recevoir les avis des différends qui surviendront entre les gentilshommes, gens de guerre et autres, nos sujets, les renvoyer à nosdits cousins les maréchaux de France, ou au plus ancien d'eux, ou aux gouverneurs-généraux de nos provinces et nos lieutenans-généraux en icelles, lorsqu'ils y seront présens; et donnons pouvoir auxdits gentilshommes qui seront ainsi commis de faire venir pardevant eux, en l'absence des gouverneurs et lieutenans-généraux, tous ceux qui auront quelque différend, pour les accorder ou les renvoyer pardevant nosdits cousins les maréchaux de France, au cas que quelqu'une des parties se trouve lésée par l'accord desdits gentilshommes, ou ne veuille pas se soumettre à leurs jugemens. Même, lorsque lesdits gouverneurs-généraux de nos provinces et nos lieutenans-généraux en icelles seront dans nos provinces, en cas que les querelles qui surviendront requièrent un prompt remède pour en empêcher les suites, et que les gouverneurs fussent absens du lieu où le différend sera survenu, nous voulons que lesdits gentilshommes commis y pourvoient surle-champ, et fassent exécuter le contenu aux articles du présent édit, dont ils donneront avis à l'instant auxdits gouverneursgénéraux de nos provinces, ou en leur absence aux lieutenansgénéraux en icelles, pour travailler incessamment à l'accom

modement; et pour cette fin, nous enjoignons très-expressément à tous les prevosts des maréchaux, vice-baillifs, vice-sénéchaux, leurs lieutenans, exempts, greffiers et archers, d'obéir promptement et fidèlement, sur peine de suspension de leurs charges et privation de leurs gages, auxdits gentilshommes commis sur le fait desdits différends, soit qu'il faille assigner ceux qui auront querelle, constituer prisonniers, saisir et annoter leurs biens, ou faire tous autres actes nécessaires pour empêcher les voies de fait et pour l'exécution desdits gentilshommes ainsi commis, le tout aux frais et dépens des parties.

ART. 3.

1

Nous déclarons en outre que tous ceux qui assisteront ou se rencontreront, quoique inopinément, aux lieux où se commettront des offenses à l'honneur, soit par des rapports ou discours injurieux, soit par manquement de promesse ou de parole donnée, soit par démentis, coups de main ou autres outrages, de quelque nature qu'ils soient, seront à l'avenir obligés d'en avertir nos cousins les maréchaux de France, ou lesdits gouverneurs-généraux de nos provinces et nos lieutenans-généraux en icelles, ou les gentilshommes commis par nosdits cousins, sur peine d'être réputés complices desdites offenses, et d'être poursuivis comme y ayant facilement contribué, pour ne s'être pas mis en devoir d'en empêcher les mauvaises suites. Voulons pareillement et nous plaît que ceux qui auront connaissance de quelque commencement de querelles et animosités causées par

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