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aussitôt en dehors des tranchées, et est presque immédiatement frappé d'un biscaïen au bas de la jambe.

il sortit de l'École d'application de Metz comme sous-lieutenant d'artillerie en 1833. La même année, il s'embarquait pour l'Afrique, où il ne devait pas tarder à se faire remarquer et à appeler sur lui l'attention de ses chefs.

Au passage de l'Oued-Salleg, au combat sur la Chiffa et à la première expédition de Constantine, il avait déjà montré ce que l'on devait attendre de lui dans l'avenir. Lieutenant d'artillerie en 1838, il fut, deux ans après, promu au grade de capitaine en 2o. Le gouverneur général de l'Algérie le cita, en 1842, pour sa brillante conduite dans l'expédition de l'Ouarensenis; l'année suivante, le général Bugeaud le prit pour officier d'ordonnance. A chaque combat où le jeune officier assistait, il se signalait par son intrépidité, et les ordres du jour répétaient à l'armée le nom du capitaine Rivet.

Passé à l'état-major particulier de l'artillerie, on le trouve partout où les tribus rebelles nous forcent à livrer des combats. Il est à Iaourra contre les Kabyles; il fait partie de la colonne sur la frontière du Maroc.

Lorsque la cavalerie indigène fut organisée, le capitaine Rivet quitta l'artillerie et prit rang dans ce nouveau corps avec le grade de chef d'escadron. A la bataille d'Isly, il se couvrit de gloire.

Dans la période de 1834 à 1845, sa brillante conduite l'avait fait citer quatorze fois à l'ordre du jour. En 1846, il est lieutenant-colonel au 2o chasseurs d'Afrique; deux ans plus tard, il est nommé colonel d'un régiment de hussards, mais sans cesser les fonctions de directeur central des affaires arabes. En 1852, il est général et rappelé en France; mais il fallait à cet officier actif et distingué la vie d'Afrique, qu'il n'avait pas quittée depuis tant d'années, et il sollicita son retour en Algérie. Bientôt il est appelé au poste important de chef d'étatmajor général de l'armée d'Afrique, et prend part aux nouvelles expéditions dans la Kabylie.

Quand la France envoya une armée en Orient, il demanda l'honneur d'aller combattre avec le corps expéditionnaire. C'est là qu'il devait encore se distinguer brillamment, et trouver une mort glorieuse, qu'il avait tant de fois affrontée. Certes, le général Rivet était appelé aux plus hautes dignités de l'armée. Lorsque la terre allait recevoir pour jamais les restes du vaillant soldat, le général en chef Pélissier et le général de Salles, commandant le 1er corps d'armée, ont voulu l'accompagner jusqu'à sa dernière demeure, et lui dire une dernière fois adieu

Le général Rivet laisse de grands souvenirs et de profonds regrets.

Une hémorragie subite amena la mort. Au même moment, le général Breton, qui vient de prendre les ordres du général de Salles, est aussi atteint à la tempe d'une balle qui lui traverse la tête (1). Deux pertes cruelles pour l'armée.

Depuis peu de temps la lutte était commencée, et déjà bien du sang était répandu. Un instant repoussés par les colonnes profondes qui les prennent en flanc, nos braves régiments se précipitent de nouveau avec un élan désespéré; mais, malgré les efforts du génie, qui jette des ponts et cherche, en comblant les fossés, à

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Le général Breton était né en 1805, il avait commencé sa carrière militaire à l'école de Saint-Cyr, et sortait comme sous-lieutenant au 42 d'infanterie de ligne en 1824. Il fit les campagnes de 1828 et 1829 en Morée, et sut montrer déjà, quoique dans les rangs inférieurs de l'armée, ce que l'on pouvait attendre de lui. En 1838 il était capitaine, et en 1841, son instruction, ses connaissances variées, son zèle dans le service l'avait fait appeler aux fonctions de capitaine instructeur à l'école de Saint-Cyr. Chef de bataillon en 1845, il était lieutenant-colonel en 1851 et colonel deux ans plus tard. Embarqué en 1854 pour l'armée d'Orient dans la division qui se dirigeait vers la Grèce, il reçut le commandement des 3000 hommes que le général Forey laissa au Pirée, quand il continua sa route pour Gallipoli. Il ne tarda pas à rejoindre son général en Crimée, et fit partie dès lors du corps de siége.

Le lendemain de l'ouverture des tranchées, il était légèrement blessé par un éclat d'obus. Dans la grande journée du 5 novembre, il appela encore sur lui l'attention de ses chefs, sa récompense fut la croix d'officier de la Légion d'honneur, et quelques mois plus tard le grade de général de brigade. Pendant toute la durée du siége, le général Breton fit dans les tranchées un service actif et périlleux. Le 18 juin, il était à l'attaque du mamelon Vert avec le général d'Autemarre, et devait en guidant sa brigade au combat trouver la mort dans l'attaque du bastion Central, près du brave général Rivet.

ouvrir des passages, les réserves et les troupes de soutien ne peuvent avancer en masses suffisantes. Tout à coup plusieurs fourneaux bouleversent encore les terres, déchirent le sol de tous côtés et entraînent dans leurs excavations nos soldats renversés par l'explosion; un moment de confusion succède à cet événement inattendu, les Russes en profitent pour nous assaillir avec un redoublement d'énergie. Vouloir nous maintenir plus longtemps dans les ouvrages que nous avions enlevés, ce serait en payer la possession d'un prix trop cher et trop sanglant. L'ordre est donné à nos colonnes d'assaut de se replier dans l'intérieur des places d'armes avancées.

A ce moment, il était trois heures.

Alors nos batteries, que dirigeait le genéral Lebœuf avec son énergie et son activité habituelles, recommencèrent sur toute la ligne un feu terrible, pour maintenir l'ennemi derrière ses parapets. La division d'Autemarre, placée en réserve, se préparait à une seconde attaque; la brigade de nos vaillants alliés les Sardes, commandée par le général Cialdini, jalouse de verser aussi son sang dans cette glorieuse journée, frémissait d'impatience, attendant le signal de se lancer sur le bastion du Mât; mais le général en chef de l'armée française, jugeant que la possession du bastion. Malakoff entraînait celle de tous les autres, sans répandre à profusion un sang précieux, donna ordre de suspendre toute nouvelle entreprise sur les attaques de gauche.

Si nous n'avions pu nous maintenir, comme nous l'espérions, dans le bastion Central, notre mouvement offensif, en contraignant les Russes à laisser sur cette ligne de ses défenses des forces considérables, avait eu pour heureux résultat de l'empêcher de réunir tous ses efforts dans une attaque désespérée pour reprendre le bastion Malakoff, sur lequel s'était abattu le vol glorieux des aigles impériales.

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CIX. Malakoff!... c'est la clef d'or qui doit donner la victoire!

Les zouaves de la garde, la réserve du général de Wimpffen, un bataillon de voltigeurs de la garde conduit par le colonel Douay, et enfin plusieurs compagnies des grenadiers de la garde sous les ordres du lieutenant-colonel de Bretteville, sont venus renforcer la division Mac-Mahon, Combats incessants, attaques subites, luttes générales ou partielles de tous les instants, pluie de fer, de feu et de mitraille, nos vaillantes légions résistent à tous les chocs et restent inébranlables.

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L'intrépide général de Mac-Mahon avait dit vrai, lorsqu'il répondait la veille au général Niel, qui lui disait que le gain de la journée était attaché à la prise de Malakoff, «J'y entrerai, et soyez certain que je n'en sortirai pas vivant. »

Les Russes comprennent toute l'importance de cette position qui leur a été si subitement arrachée, et redoublent d'efforts pour la reconquérir.

A la tête des premières réserves est d'abord accouru le lieutenant général Krouleff lui-même; gravement blessé, il remet son cominandement au général major Lissenko, qui, à son tour, est grièvement atteint. Le général major Youférof s'élance à la tête de nouvelles troupes, et attaque la première enceinte du bastion où nous nous sommes enfermés; il tombe mortellement frappé. Le général Martineau lui succède, et son sang coule aussi sur ce terrible champ de combat.

Les morts s'entassent; les chocs impuissants viennent se briser; le réduit Malakoff est à nous!

Les attaques furieuses ont cessé, mais les feux de l'artillerie et de la mousqueterie continuent avec une violence extrême sur tous les points.

CX. Il est près de cinq heures; tout à coup une explosion se fait entendre; un immense nuage de feu et de fumée enveloppe Malakoff et toute la partie gauche de la courtine, vers le point où elle se relie au bastion l'air est obscurci par de noirs débris.

En entendant cette sinistre détonation, un sentiment de profonde angoisse serra tous les cœurs. Sans nul doute, Malakoff venait de sauter et la division Mac-Mahon ainsi que les troupes de renfort, enfermées dans ce réduit, devaient être ensevelies sous les décombres.

C'était un épouvantable désastre. Combien les secondes qui séparèrent ce doute affreux de la réalité

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