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SUR LE CARACTÈRE ET LES TENDANCES

DE

L'EMPEREUR NAPOLÉON III

D'APRÈS SES ÉCRITS ET SES ACTES.

Charles-Louis Napoléon, empereur des Français, est né au palais des Tuileries le 20 avril 1808, de Louis Bonaparte, roi de Hollande, et de HortenseFanny de Beauharnais, fille de l'impératrice Joséphine, en sorte qu'il est à la fois neveu et petitbeau-fils de l'empereur Napoléon Ier. Sa naissance fut annoncée par des salves d'artillerie et célébrée par des réjouissances publiques dans cet immense Empire qui s'étendait de fait de la Baltique aux Pyrénées, du Danube à la Méditerranée.

Il fut inscrit le premier sur le registre de l'état civil destiné aux enfants de la dynastie napoléonienne, le 10 novembre 1810; baptisé par le cardinal Fesch, en 1811, il eut pour parrain l'empereur Napoléon, et pour marraine l'impératrice MarieLouise.

Ses premières années s'écoulèrent au milieu des

splendeurs du règne de Napoléon le Grand, mais il ne devait pas tarder à passer par les plus rudes épreuves de l'adversité. Le sixième anniversaire de sa naissance, c'est-à-dire le 20 avril de l'an 1814, correspondait avec une touchante mais bien triste. solennité, les adieux de Napoléon à ses soldats dans les cours du château de Fontainebleau. Quel frappant contraste! Bien peu de temps après, le 29 mai, le jeune prince perdait son aïeule maternelle, l'impératrice Joséphine, qui lui avait toujours témoigné une affection toute particulière.

Il avait à peine sept ans lorsqu'il fut obligé, à la suite des désastres de 1815, de partir pour la terre étrangère, n'ayant d'autre soutien que l'héroïque dévouement de la meilleure des mères.

Après avoir échappé comme par miracle à de grands dangers et avoir été, après un séjour plus ou moins court, expulsés de Genève, où ils avaient vainement espéré trouver quelque répit à leurs angoisses; d'Aix en Savoie, où la reine avait fondé un hôpital, alors que cette ville faisait partie de l'Empire français; de Constance, où, grâce au dévouement de la grande-duchesse de Bade, leur belle-sœur et tante, ils purent du moins se reposer quelque temps de si terribles secousses, les illustres proscrits parvinrent enfin à obtenir l'autorisation d'habiter le canton de Thurgovie, et encore fallut-il que, pour éviter de nouvelles persécutions de la part de la Sainte-Alliance, la reine se décidât à acheter la propriété d'Arenenberg, située sur les bords du lac de Constance. Cette acquisition fut réalisée le 10 fé

vrier 1817, avec l'agrément des autorités du

canton.

Dans cet asile paisible, la reine Hortense put enfin se vouer sans préoccupation à l'éducation du jeune prince, qui se faisait déjà remarquer par les dons les plus précieux de la nature, une intelligence supérieure et un noble cœur.

On rapportait de lui des traits charmants qui révèlent une précocité prodigieuse. Il nous suffira d'en citer un seul pour donner une idée de ses généreux instincts; c'était à l'époque du séjour de la reine à Constance.

Un jour que le jeune prince jouait comme d'habitude, pendant ses récréations, avec les enfants du voisinage, dans le jardin, son précepteur, le bon abbé Bertrand, s'étant aperçu que son élève avait franchi l'enceinte, s'empressait de le rappeler; quel ne fut pas son étonnement lorsqu'il le vit revenir sans redingote, marchant les pieds nus dans la neige! Aux questions qui lui furent faites sur les causes de ce singulier accoutrement, l'enfant répondit d'une voix émue et avec un certain embarras, qu'en jouant à l'entrée du jardin il avait vu passer une pauvre famille dans un état de dénûment qui faisait peine à voir, et que, n'ayant pas d'argent à leur donner, il avait chaussé l'un des enfants avec ses souliers et couvert l'autre de sa redingote.

Une seule chose inquiétait la reine, c'était une exubérance de vivacité, qui, en définitive, est presque toujours d'un bon augure chez les enfants dont l'éducation est bien dirigée.

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Arrivé près d'un village, sur le plateau élevé qui domine le lac, il entend tout à coup les cris d'une foule effrayée; deux chevaux attelés à une légère calèche avaient pris le mors aux dents dans la direction d'un affreux précipice. Le cocher avait déjà été renversé, et une dame seule avec deux enfants dans la voiture poussait des cris déchirants. Mais le prince a vu le danger, et aussitôt, lançant son cheval avec la rapidité de l'éclair à travers les champs et les ravins pour devancer la voiture, il l'atteint sur le bord de l'abîme, saisit un des chevaux par la bride et le détourne d'une main si vigoureuse, que l'animal s'abat et que la voiture s'arrête aux applaudissements de la foule, qui fut heureuse de reconnaître le fils de la reine Hortense dans ce hardi et habile cavalier.

Louis-Napoléon utilisa avec le plus vif empressement le voisinage de Constance pour se former aux manœuvres militaires avec le régiment badois, qui tenait garnison dans cette ville.

Bientôt le jeune prince montra un goût prononcé pour l'artillerie; pendant plusieurs années il consacra tout son temps à l'étude des sciences qui s'y rattachent. Aussi s'estima-t-il très-heureux d'obtenir son admission au camp de Thünn, où les Suisses se réunissaient chaque année pour les manœuvres du génie et de l'artillerie, alors dirigées par un ancien colonel du génie de l'Empereur, M. Dufour, officier d'un grand mérite, et promu depuis au grade de général. Rompu d'avance aux exercices gymnastiques, quoique né avec une constitution assez faible, il supportait avec la plus grande facilité les fatigues de

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