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» légitimistes, que les mandataires qu'il a désignés, >> et qui sont MM. le duc de Lévis, le général de >> Saint-Priest, Berryer, représentants du peuple; » marquis de Pastoret, duc d'Escars.

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» De retour en France, j'aurai, comme par le

passé, l'honneur de vous transmettre leurs instruc» tions, et j'ai la confiance que vous voudrez bien >> me continuer votre précieux concours, et me tenir >> au courant de la situation de votre département. »

Nous arrivons maintenant à une série d'intrigues que, peut-être, le lecteur trouvera peu dignes de son attention, mais qui eurent dans leur temps trop de retentissement, pour que nous puissions nous dispenser d'en dire quelques mots.

Après s'être mis en relation avec les provinces, il était tout naturel et même convenable que LouisNapoléon ne restât pas invisible à l'armée dont il avait le droit de disposer, aux termes de l'article 50 de la constitution; ce droit emportait évidemment celui de passer des revues; nous ne craindrons même pas de dire que c'était un devoir, pour le chef du pouvoir exécutif, de s'assurer par lui-même du degré de perfection des manoeuvres militaires, et d'encourager par sa présence le zèle des défenseurs de la patrie.

Cependant les revues militaires, qui eurent lieu au mois d'octobre dans les plaines de Saint-Maur et de Satory, causèrent un grand émoi au sein de la commission de permanence, parce que les troupes avaient coutume d'accueillir le chef du pouvoir exécutif par les acclamations de Vive Napoléon! Vive le Président! mêlées de quelques cris isolés de Vive l'Em

à

pereur! et aussi parce que Louis-Napoléon avait jugé propos de faire faire quelques distributions de vin et de comestibles, à la suite de ces longues et pénibles revues.

La commission s'émut aussi de ce que Louis-Napoléon avait jugé à propos d'éloigner de Paris le général Neumayer, à la suite d'un ordre du jour, par lequel ce général interdisait aux troupes placées sous son commandement les cris parfaitement constitutionnels de Vive le Président! Vive Napoléon !

Un fait presque incroyable, c'est que le commandant en chef de l'armée de Paris, qui avait assisté à toutes les revues sans s'opposer aux acclamations, osa braver le chef de l'État par l'ordre du jour suivant, qu'il publia à la suite de la mesure prise contre le général Neumayer :

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Aux termes de la loi, l'armée ne délibère point; >> aux termes des règlements militaires, elle doit » s'abstenir de toute manifestation et ne proférer >> aucun cri sous les armes.

» Le général en chef rappelle ces dispositions aux >> troupes placées sous son commandement. »

C'était un acte d'hostilité manifeste contre le pouvoir exécutif, qui atteignait presque les proportions d'un conflit.

Peu de jours après, le 8 novembre, on lisait dans le journal des Débats ce qui suit:

« La commission de l'Assemblée s'est réunie au»jourd'hui. Elle a consacré presque toute sa séance » à délibérer sur un incident fort singulier. L'un de >> ses membres a déclaré, de la manière la plus for

» melle, qu'il était à sa connaissance que, dans la » soirée du 29 octobre, vingt-six individus, parmi » les plus exaltés de la société du 10 décembre, ont >> tenu une séance extraordinaire où ils ont agité >> hautement le projet d'assassiner le président de >> l'Assemblée nationale, M. Dupin, et le commandant » en chef de l'armée de Paris, M. le général Chan>> garnier, comme étant tous les deux le grand ob» stacle à l'accomplissement des desseins de la société.

» Ce projet aurait été adopté à l'unanimité, et on >> aurait procédé au tirage au sort, pour désigner ceux >> qui devaient mettre à exécution ce double at>> tentat. En conséquence, on aurait mis dans un >> chapeau vingt-quatre bulletins blancs, et deux » portant, l'un la lettre C, et l'autre la lettre D.

>> Chacun des vingt-six membres aurait été appelé » à tirer successivement un bulletin. Celui qui aurait >> amené le bulletin avec la lettre C aurait aussitôt » déclaré, en termes énergiques, qu'il était prêt à » exécuter la décision de la réunion. Celui auquel >> serait échu le bulletin avec la lettre D aurait gardé >> le silence.

» Le président de la réunion ayant annoncé que » le jour de l'exécution serait ultérieurement fixé, » les vingt-six membres se seraient alors séparés. » Les délibérations subséquentes donneraient lieu de >> croire, qu'on aurait été disposé à faire quelque ten»tative de ce genre le jour de la réunion de l'Assem» blée.

» Telles sont, d'après ce que nous croyons savoir, » les étranges révélations dont s'est occupée au

» jourd'hui la commission de permanence. Avant de » se séparer, la commission, qui, depuis un mois, >> avait demandé la dissolution de la société du 10 dé>>cembre, qui a toujours présenté à ses yeux le >> caractère d'une société politique défendue par les » lois, a chargé trois de ses membres, MM. Baze, >> Faucher et Monet, de se rendre auprès du ministre » de l'intérieur pour lui exprimer son profond éton>> nement de ce que l'autorité n'ait pas cru devoir » prévenir le président de l'Assemblée nationale et » le général en chef de l'armée de Paris des projets » qu'on tramait contre eux, et de ce qu'aucune » mesure n'ait encore été prise pour fermer cette >> dangereuse société. »

Il est inutile de dire que l'ordre du jour du général Changarnier, et la prétendue nouvelle du Journal des Débats furent l'objet d'une foule de commentaires, et durent causer une vive inquiétude dans le pays.

Fort heureusement le préfet de police se hâta de démentir l'article du Journal des Débats par la note suivante :

<< Les faits indiqués dans votre article sont complétement dénués de fondement. Le prétendu com>> plot n'est qu'une mystification, dont un agent qui » n'est pas sous mes ordres paraît avoir été la » dupe. >>

Le général Piat adressa en même temps, de son côté, au même journal, une lettre ainsi conçue:

<< Permettez-moi, monsieur, de protester de toutes » les forces de mon âme contre une pareille calomnie,

» et de m'étonner qu'elle ait pu trouver accès dans » un journal aussi grave que le vôtre.

» Je suis l'un des fondateurs de la société du » 10 décembre, et depuis son origine je n'ai cessé » de la présider. Je déclare donc sur mon honneur >> militaire,

>> Que jamais la société du 10 décembre ne s'est » occupée de politique; que son seul but a été de >> réunir, par l'association, des hommes honnêtes de» vant se prêter mutuellement assistance, et de les » soustraire par là à des passions désorganisatrices.

>> Il est faux qu'il y ait eu réunion le 29 octobre. >> Les seules séances rapprochées de cette date » ont eu lieu le 25 octobre et le 1er novembre, et » dans ces réunions, que j'ai présidées, je le répète, >> il n'a pas été question de politique.

>> Quant au complot dont vous parlez, je croirais » dégrader ma vie entière, si je descendais à nier » l'existence d'une délibération dont l'assassinat » aurait été l'objet. »

Qu'est-ce qui avait donc pu motiver la délibération de permanence?

C'était tout simplement le prétendu rapport d'un agent de police, nommé Allais, précédemment condamné par le tribunal de Chartres pour dénonciation calomnieuse, et qui finit par avouer que son rapport sur le prétendu complot contre la vie du général Changarnier et de M. Dupin lui avait été inspiré par son chef M. Yon, commissaire de police spécialement attaché à l'Assemblée nationale, qui se rendit luimême justice en donnant sa démission, bien que la

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