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GERONIMO.

Cette jeune Dorimène, si galante et si bien parée?

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Et sœur d'un certain Alcidas, qui se mêle de porter

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N'ai-je pas raison d'avoir fait ce choix?

GERONIMO.

Sans doute. Ah, que vous serez bien marié ! Dépêchez-vous de l'être.

SGANARELLE.

Vous me comblez de joie de me dire cela. Je vous remercie de votre conseil, et je vous invite ce soir à

mes noces.

GERONIMO.

Je n'y manquerai pas; et je veux y aller en masque, afin de les mieux honorer.

Serviteur.

SGANARELLE.

GERONIMO, à part.

La jeune Dorimène, fille du seigneur Alcantor, avec le seigneur Sganarelle, qui n'a que cinquantetrois ans ! O le beau mariage! ô le beau mariage! (Ce qu'il répète plusieurs fois en s'en allant.)

SCÈNE III.

SGANARELLE, seul.

CE mariage doit être heureux; car il donne de la joie à tout le monde, et je fais rire tous ceux à qui j'en parle. Me voilà maintenant le plus content des hommes.

SCÈNE IV.

DORIMÈNE, SGANARELLE.

DORIMÈNE, dans le fond du théâtre, à un petit laquais qui la suit. ALLONS, petit garçon, qu'on tienne bien ma queue, et qu'on ne s'amuse à badiner.

pas

y

SGANARELLE, à part, apercevant Dorimène. Voici ma maîtresse qui vient. Ah, qu'elle est agréable! Quel air et quelle taille! Peut-il avoir un homme qui n'ait, en la voyant, des démangeaisons de se marier? (à Dorimène.) Où allez-vous, belle mignonne, chère épouse future de votre époux futur?

DORIMÈNE.

Je vais faire quelques emplettes.

SGANARELLE.

Eh bien! ma belle, c'est maintenant que nous

allons être heureux l'un et l'autre. Vous ne serez plus en droit de me rien refuser; et je pourrai faire avec vous tout ce qu'il me plaira, sans que personne s'en scandalise. Vous allez être à moi depuis la tête jusqu'aux pieds, et je serai maître de tout 4; de vos petits yeux éveillés, de votre petit nez fripon, dé vos lèvres appétissantes, de vos oreilles amoureuses, de votre petit menton joli, de vos petits tétons rondelets, de votre.... Enfin, toute votre personne sera à ma discrétion, et je serai à même, pour vous caresser comme je voudrai. N'êtes-vous pas bien aise de ce mariage, mon aimable pouponne?

DORIMÈNE.

Tout-à-fait aise, je vous jure. Car enfin, la sévérité de mon père m'a tenue jusques ici dans une sujetion la plus fâcheuse du monde. Il y a je ne sais combien que j'enrage du peu de liberté qu'il me donne, et j'ai cent fois souhaité qu'il me mariât, pour sortir promptement de la contrainte où j'étois avec lui, et me voir en état de faire ce que je voudrai. Dieu inerci, vous êtes venu heureusement pour cela, et je me prépare désormais à me donner du divertissement, et à réparer comme il faut le temps que j'ai perdu. Comme vous êtes un fort galant homme, et que vous savez comme il faut vivre, je crois que nous ferons le meilleur ménage du monde ensemble, et que vous ne serez point de ces maris incommodes, qui veulent que leurs femmes vivent comme des loups-garous. Je vous avoue que je ne m'accommoderois pas de cela, et que la solitude me désespère,

J'aime le jeu, les visites, les assemblées, les cadeaux et les promenades; en un mot, toutes les choses de plaisir et vous devez être ravi d'avoir une femme de mon humeur. Nous n'aurons jamais aucun demêlé ensemble, et je ne vous contraindrai point dans vos actions, comme j'espère que, de votre côté, vous ne me contraindrez point dans les miennes; car, pour moi, je tiens qu'il faut avoir une complaisance mutuelle, et qu'on ne se doit point marier pour se faire enrager l'un l'autre. Enfin, nous vivrons, étant mariés, comme deux personnes qui savent leur monde. Aucun soupçon jaloux ne nous troublera la cervelle; et c'est assez que vous serez assuré de ma fidélité, comme je serai persuadée de la vôtre. Mais qu'avez-vous? je vous vois tout changé de visage?

SGANARELLE.

5

Ce sont quelques vapeurs qui me viennent de monter à la tête.

DORIMÈNE.

C'est un mal aujourd'hui qui attaque beaucoup de gens; mais notre mariage vous dissipera tout cela. Adieu. Il me tarde déjà que je n'aie des habits raisonnables pour quitter vite ces guenilles. Je m'en vais de ce pas achever d'acheter toutes les choses qu'il me faut, et je vous envoyerai les marchands.

SCÈNE V.

GERONIMO, SGANARELLE.

GERONIMO.

AH! seigneur Sganarelle, je suis ravi de vous trouver encore ici, et j'ai rencontré un orfévre, qui, sur le bruit que vous cherchiez quelque beau dia, mant en bague pour faire un présent à votre épouse, m'a fort prié de vous venir parler pour lui, et de vous dire qu'il en a un à vendre, le plus parfait du monde.

SGANARELLE.

Mon Dieu! cela n'est pas pressé.

GERONIM O.

Comment! que veut dire cela? Où est l'ardeur que vous montriez tout à l'heure?

SGANARELLE.

6

Il m'est venu, depuis un moment, un moment, de petits scrupules sur le mariage. Avant que de passer plus avant, je voudrois bien agiter à fond cette matière, et que l'on m'expliquât un songe que j'ai fait cette nuit, et qui vient tout à l'heure de me revenir dans l'esprit. Vous savez que les songes sont comme des miroirs, où l'on découvre quelquefois tout ce qui nous doit arriver. Il me sembloit que j'étois dans un vaisseau, sur une mer bien agitée, et que......

GERONIMO.

Seigneur Sganarelle, j'ai maintenant quelque petite affaire qui m'empêche de vous ouïr. Je n'entends

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