ARBATE. Et tu l'as de pied ferme attendu? MORON. Quelque sot.... J'ai jeté tout par terre, et couru comme quatre. ARBATE. Fuir devant un sanglier ayant de quoi l'abattre! MORON. J'y consens, Il n'est pas généreux; mais il est de bon sens. ARBATE. Mais, par quelques exploits, si l'on ne s'éternise.... MORON. Je suis votre valet. J'aime mieux que l'on dise: Fort bien. EURIALE. MORON. Oui, jaime mieux, n'en déplaise à la gloire, Vivre au monde deux jours, que mille ans dans l'histoire. EURIALE. En effet, ton trépas fâcheroit tes amis; Mais, si de ta frayeur ton esprit est remis, Puis-je te demander si du feu qui me brûle.... MORON. Il ne faut pas, seigneur, que je vous dissimule; Mais souvent on rabat nos libres tentatives. Car on doit regarder comme l'on parle aux grands, Et je sais qu'Elpénor, qu'on appeloit mon père, Comptoit pour grand honneur aux pasteurs d'aujourd'hui, Et que, durant ce temps, il avoit l'avantage De se voir salué de tous ceux du village. Baste. Quoi qu'il en soit, je veux par mes travaux.... Mais voici la princesse et deux de nos rivaux. SCÈNE III. LA PRINCESSE, AGLANTE, CINTHIE, ARISTOMÈNE,THÉOCLE, EURIALE, PHILIS, ARBATE, MORON. ARISTOMÈNE. REPROCHEZ-Vous, madame, à nos justes alarmes. Qui me fait avoir part à ce qui vous offense. THEOCLE. Pour moi, je tiens, madame, à sensible bonheur, LA PRINCESSE. Et pensez-vous, seigneur, puisqu'il me faut parler, Qu'il eût eu, ce péril, de quoi tant m'ébranler? THÉOCLE. lui. Eh bien ! soit. Je vois que votre envie Est de persuader que je vous dois la vie; J'y consens. Oui, sans vous, c'étoit fait de mes jours. Je rends de tout mon cœur grâce à ce grand secours; Et je vais de ce pas au prince, pour lui dire Les bontés que pour moi votre amour vous inspire. SCÈNE IV. EURIALE, ARBATE, MORON. MORON. En! a-t-on jamais vu de plus farouche esprit? ARBATE, à Euriale. Je vous vois tout pensif, seigneur, de ses dédains; Mais ils n'ont rien qui doive empêcher vos desseins. Son heure doit venir, et c'est à vous, possible, Qu'est réservé l'honneur de la rendre sensible. MORON. Il faut qu'avant la course elle apprenne vos feux; Et je.... EURIALE. Non, ce n'est plus, Moron, ce que je veux; Garde-toi de rien dire, et me laisse un peu faire; J'ai résolu de prendre un chemin tout contraire. Je vois trop que son cœur s'obstine à dédaigner Tous ces profonds respects qui pensent le gagner; Et le dieu qui m'engage à soupirer pour elle M'inspire pour la vaincre une adresse nouvelle. Oui, c'est lui d'où me vient ce soudain mouvement, Et j'en attends de lui l'heureux événement. |