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Si la France et l'Angleterre nous abandonnent aujourd'hui et ne réalisent en rien les espérances qu'elles nous ont données, ce ne sera point ici l'acharnement de la Russie, ni l'inimitié de la Prusse, ni l'indifférence de l'Autriche, ce sera soi-disant la sympathie que la France et l'Angleterre nous ont montrée, qui aura causé notre ruine. Si ces deux puissances avaient repoussé avec vigueur, dès le commencement, nos demandes; si elles nous avaient déclaré clairement, sans jamais changer de langage, même dans ces derniers temps, si elles nous avaient dit nettement :

«Nous ne vous secourerons pas, quand même vous auriez, pendant sept mois, résisté à tout l'empire russe; quand même vous auriez détruit le prestige qui le rend si fort; nous ne vous secourerons pas quand même vous auriez éveillé les sympathies de toutes les nations; quand même vous auriez gagné les louanges exaltées de l'Europe, par votre courage: quand même vous mériteriez l'estime des Cabinets par votre modération; nous ne vous secourerons pas quand même tous les Polonais soumis à la domination russe auraient révélé leurs sentiments patriotiques et leur dévouement héroïque; nous ne vous secourerons enfin, ni par des motifs d'humanité et de justice, ui par ceux d'une politique sage et généreuse! 19,9 Jordi sb 8.97 1991 de

En entendant ces paroles, nous aurions reconnu tout le positif de la détermination des Cabinets de Paris et de Londres; nous ne nous serions pas laissé bercer par des illusions funestes, et nous aurions eu recours à d'autres moyens de salut qui, peut-être, auraient assuré nos succès! Mais nous nous sommes reposés sur la noblesse et la sagesse des Cabinets, et, en nous y fiant, nous n'avons pas tiré parti de toutes les ressources qui s'offraient à nous intérieurement et extérieurement, pour gagner l'approbation des Cabinets, pour mériter leur confiance; pour nous assurer de leur appui, nous avons subordonné notre marche au désir de les satisfaire et nous ne nous sommes jamais écartés de la ligne de la plus stricte modération, qui, peut-être, a paralysé bien des efforts qui nous aurait secondés. Et même, dans ces derniers temps, sans les promesses des Cabinets, nous aurions déjà peut-être frappé un coup décisif.

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Mais on nous, demanda deux mois d'existence, nous crûmes qu'il fallait temporiser, ne rien laisser au hasard. Et nous nous persuadons aujourd'hui qu'il n'y a que le hasard qui peut nous sauver ! Mais non, notre salut dépend encore des puissances européennes. Notre position est critique; elle n'est point désespérée. Nous sommes, il est vrai, pressés par un ennemi formidable. D'un côté, sur la rive gauche de la Vistule, le maréchal Paskévitsch avec les forces principales de l'ennemi, se trouve en présence de nos troupes; de l'autre, le général Rudiger, avec son corps, manœuvre pour opérer sa jonction avec la grande armée russe. Sur la rive droite, des corps russes arrivés du fond de la Lithuanie s'avancent vers Pultusk; le général Rosen pousse ses avant-postes jusqu'à Praga. or anpil leg of 15

Mais nous avons encore une armée forte de soixante mille hommes, avec une bonne artillerie, et animée de l'enthousiasme le plus vif; mais notre levée en masse menace les derrières et les communications de l'ennemi; mais l'insurrec tion est loin d'être étouffée dans les anciennes provinces polonaises. De nouveaux corps d'insurgés s'y organisent; les matières combustibles s'y accumu lent, et un incendie général y éclatera de nouveau, au premier moment favorable! Enfin, si nous sommes obligés de nous retirer sous les murs de Varsovie, d'un côté, nous avons les ouvrages de Praga, qui nous défendront contre les attaques de l'ennemi; de l'autre, un triple rang de retranchements,

où nous opposerons une résistance opiniâtre, en appelant aux armes la population de Varsovie. Quand même l'ennemi attaquerait la ville, nous pourrions encore tenir jusqu'à la fin de septembre. Ce n'est pas l'ennemi que nous craignons, il n'osera pas même nous attaquer : c'est la famine.

Si les puissances européennes ne viennent point à notre secours, nous épuiserons nos dernières ressources; nous manquerons bientôt de moyens de subsistance et nous périrons après avoir tenté tous les moyens de salut suggérés par le désespoir. Si les grandes puissances veulent nous sauver, elles le peuvent encore. Leur faire l'énumération de tous les avantages que cette conduite noble et généreuse leur ferait recueillir ne serait que répéter ce qui a été dit tant de fois; mais il faut leur faire observer que l'abandon barbare dans lequel on nous laissera, sans égard pour tous les préceptes de la justice et de la prudence, he restera pas impuni, et nous pourrons prophétiser d'une voix mourante que des guerres et des maux terribles s'élèveront de notre tombeau sur l'Europe, désastres dont elle aurait été sauvée par notre existence.

Comment veut-on penser à un d désarmement général, dont le discours du roi des Français fait mention, sans avoir réglé les affaires de la Pologne et assuré son indépendance? Au reste, délaissés par tout le monde, nous nous défendrons jusqu'à la dernière extrémite. Et qui peut prévoir l'avenir? Le désespoir est fécond en résultats; Dieu est tout-pui-sant, et les miracles du courage et du dévouement ne sont pas épuisés pour un peuple qui va à la mort.

Si quelque événement imprévu vient à notre secours; si, après nous être convaincus du peu de compte que les puissances font de notre confiance: qui sait si la Pologne, après avoir éveillé les nouvelles affections des peuples, et en cherchant de nouveaux alliés, ne se mettra pas, peut-être, forcément en opposition avec les intentions des Cabinets, tryol proggy

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D'un autre côté, si la Pologne succombe, l'avenir le plus sombre lui est préparé ! La mort, la destruction et toutes les vengeances d'un ennemi impla cable la menacent. L'Europe pourrait-elle donc contempler sans émotion un spectacle si déchirant? Non certes, les gémissements de tout un peuple mourant retentiront longtemps dans tous les cœurs généreux, et ce peuple trouvera ses vengeurs comme il a trouvé ses bourreaux. 121976

Nous vous avons fait connaître notre situation actuelle, nous vous avons fait pressentir notre avenir. Adressez-vous sur-le-champ au Cabinet français pour lui communiquer les renseignements que nous venons de vous donner; faiteslui sentir la nécessité où nous nous trouvons d'avoir une connaissance exacte de ce que nous avons à espérer de son appui; demandez des réponses catégoriques et claires, et, si on nous refuse tout appui, qu'on ne nous laisse plus au moins dans le doute la vérité, toute triste qu'elle sera, ne pourra pas nous ètre aussi nuisible que les illusions. Si les Cabinets n'ont pas eu le courage de nous secourir, qu'ils aient au moins celui d'avouer leur barbare indifference pour notre cause, et s'ils ont méconnu le devoir que leur imposaient la prudence, la morale et l'humanité, les Polonais sauront suivre celui que leur prescrivent la sainteté de leurs droits et l'amour de leur patrie.

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A. Czartoryski, président du gouvernement;
André Horodyski, ministre des affaires étrangères;
Le général Charles Kniaziewicz, et Louis Plater,
envoyés de Pologne en France.

Proclamation du général Jean Krukowiecki, en prenant l'autoritě suprême, et par laquelle il jure sur ses cheveux blancs el sur son expérience qu'il ne capitulera jamais avec les Russes, qu'il ne trahira point la patrie et qu'il mourra pour elle.

Citoyens,

Varsovie, le 17 août 18311, 10 heures du soir.

91,

Il a plu à la Diète de me confier l'autorité suprême du pays. Pour accepter cette charge importante dans des moments aussi difficiles, il a fallu avoir la force que donne l'amour de la patrie, et cette foi inébranlable qui nous ordonne même de nous ensevelir sous les ruines de la Pologne. Oui, plutôt la mort que de nous soumettre à un ennemi implacable et perfide, que de ternir la gloire du nom polonais. Je n'ai pas examiné mes forces, car mon cœur, dévoué à la plus sainte des causes, m'ordonnait d'obéir à la voix de la nation. Je prends donc courageusement et avec confiance les rênes du gouvernement; j'entre dans une glorieuse carrière en faisant abnégation entière de ma vie qui appartient à la Pologne.

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On doit se fier à un vieux soldat, à son caractère indomptable, être sûr qu'il gouvernera loyalement, et qu'il suivra avec honneur le noble chemin que la révolution du 29 novembre nous a tracé. L'attente de la nation ne sera point trompée...

Je ne flétrirai point mes cheveux blancs par une soumission honteuse; j'exposerai hardiment mon front à tous les coups de nos ennemis, quels qu'ils soient: ceux qui ont envahi notre territoire, comme ceux de l'intérieur, qui oseraient nous trahir."

Vous m'avez donné la plus grande preuve de confiance qu'un citoyen-soldat ait jamais pu mériter. Soyez témoins de toutes mes démarches; avertissez-moi au besoin, mais aussi repoussez et poursuivez quiconque oserait traîtreusement affaiblir la confiance dont vous m'honorez. Grand et important est le moment actuel. Je ne vous cache pas que nous pourrons rencontrer peut-être les adversités inséparables du sort des armes; mais ne vous découragez point, et ne permettez pas qu'au milieu de l'impatience, animée même par les plus nobles motifs, on affai

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blisse l'esprit publié par des prévisions imaginaires ou par des jugements téméraires.es . 900 each 81297 li,19th

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Citoyens! je me présente devant vous avec une conscience sans reproche. Le salut de la patrie est mon seul but; pour elle je donnerai mon sang, et vous, le vôtre. Lo Lorsque nou sque nous accomplirons notre œuvre nationale, j'attendrai votre jugement et celui de la postérité, et je ne le rédouterai point, quand même il devrait être injuste qu'sévère.up a aneb sup Jean Krukowiecki.

991198 Jul 93 89991 61 699109.979 19 167

ou

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nal de Pologne, preside par Jean Krukowiecki, adressée à ses 9 agents à l'étranger, en annonçant les résultats amenés par les Blévénements de la nuit du 15 aoûtsaitaloq sí ensh sststupai tesm si ab aletiqno el ob glɔstedo auɔus 2062 tisdɔ07 Varsovie, le 23 août 1831 Des événements graves viennent de contrister la ville de Varsovie. Les feuilles publiques vous ont déja, sans doute instruits de feur nature; mais il importe que vous sovez' au 'fa qui s'y rattachent, et c'est e curiosité à cet égard.

Vous n'ignorez pas dans quelle situation se trouvait la Pologne, lorsque le 18 janvier, le dictateur Chlopiçki s'est démis inopinément du pouvoir: il a fallu, presque en face de

nement. Vote de conte Improviser une nouvelle forme de gouver

BO 1a Diète, il fut déposé entre les mains de cing membres, dont les opinions pouvaient difficilement être l les mêmes, quoique un égal dévouement pour la patrie, les animât tous. En

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qui

ralissime leur fut adjoint avec un pouvoir a part, Il était nommé parla Diete, et ne pouvait être révoqué que par elle. La loi du 24 janvier le rendait en outre entièrement maître de sa e sa conduite : elle ne T'obligeait pas à rendre à qui que ce fût, compte de ses opérations', ni même à en instruire le gouvernement. 164 97-99 19

Tant que l'armée 'së tenait sur la défensive, e, l'inconvénient d'une autorité aussi étendue ne se faisait point sentir, l'action du généralissime Skrzyneçki se trouvant très-bornée par la force même des choses. Mais bientôt les glorieuses journées de Grochow, le découragement de l'ennemi qui en fut la suite, et les progrès de l'organisation de nos nouvelles levées, mirent l'armée polonaise en état de se mesurer, presque à force égale avec les Russes. Nous pouvions à notre tour commencer l'offensive. Une légère divergence d'opinion s'établit dès lors entre le généralissime et le gouvernement. Celui-ci, plus confiant dans nos propres ressources, rendues presque inépuisables par le patriotisme national, 'aurait voulu que le généralissime agit vigoureusement et d'une manière décisive.

Tel ne fut p pas l'avis du généralissime. Peut-être une idée fausse sur les forces gigantesques de la Russie, ou l'espoir d'une intervention amicale de la part des puissances étrangères, dont plusieurs ne cessaient de nous flatter, inspiraient sans doute au généralissime l'envie d'épargner le sang de nos braves. C'est ainsi,

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1. Archives de Pologne.

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qu'après avoir livré les glorieux combats de Wawr, de Dembe et d'Iganié, du lieu d'en profiter, il resta dans une inaction complète jusqu'à la bataille d

trolenka.

.d'Os

- Cette journée désastreuse, & plus d'un titre, sera mémorable dans les fastes de notre révolution. La guerre, sourde jusqu'idi, entre des deux pouvoirs, éclata alors ostensiblement, par r la fameuse proposition de la réforme, sortie du quartier-général et présentée à Diète, le 8 juin. fut agitée par cette assemblée, mais elle produisit un triste résultat, dar èfte aigrit les partis qui në commencèrent qu'alors à se dessiner dans la Diète. Toutefois, il faut le dire, cette aigreur ne se

questions vitales, le partir que dans les questions, secondaires, car, pour les

patriotisme national ne cessa jamais de l'emporter sur toute autre considération. Cependant les assurances les plus positives d'une intervention généreuse en notre faveur ne discontinuaient pas de la part des puissances étrangères, et particulièrement de la de la France. Trompé par ces pro

messes, le généralissime ne cherchait qu'à gagner an gagner temps, et l'armée russe,

après une marche de flanc, devant le front de l'armée, traversait, sans être nullement inquiétée dans le palatinat de Plock elle effectuait le passage de la Vistule sans coup ferir, et s'approchait sans aucun obstacle de la capitale de la Pologne. Y sbuy, 61 791 intros ab tagasiv every engmonové z Le peuple polonais, irrité par cette temporisation du généralissime, oria à la trahison! Malheureusement un événement fâcheux vint encore exaspérer les esprits. Le corps du général Rudiger, échappa des mains du général Jankowski qui fut mis en jugement, et en même temps, quelques autres individus, soupçonnés par le généralissime lui-même, d'avoir rentretenu des relations suspectes avec l'ennemi, furent arrêtées. Plusieurs semaines s'étaient déjà écoulées depuis ces arrestations, et justice ne se faisait pas. C'était dans l'esprit du peuple un grief contre le généralissime, dont dépendait la formation des Cours martiales. emier si toa taum:gozeb jes Avec la confiance du peuple, le généralissime perdait celle de l'armée qui brûlait de combattre l'ennemi. Il fallut en finir. La Diète envoya au quartiergénéral une députation autorisée à autorisée à nommer un autre chef, et à déterminer ses attributions. Elle venait à peine de satisfaire aux voeux des représentants de la nation, quand, poussée par l'exaspération, et peut-être par une main invisible, une poignée de coupables força, dans la nuit du 15 au 16 août courant, l les prisons de Varsovie, accomplit le meurtre de personnes, accusées de trahison, de vingt-cinq espions à la solde de l'ancien gouvernement russe. Le malheur voulut qu'un prisonnier de guerre russe, tomba aussi victime de la férocité des meurtriers. La nouvelle de l'exécution de plusieurs de nos prisonniers, dans le camp russe, par ordre du prince Adam de Wirtemberg, paraît avoir amené ce forfait.

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Je ne m'efforcerai pas de vous dépeindre l'horreur que cet attentat a inspirée parmi nous. L'Europe connaît la douceur de notre peuple et la pureté des principes de notre révolution : c'est le premier, c'est le seul crime dont elle ait été souillée. Il est juste de remarquer ici que la tranquillité publique n'a pas été interrompue un seul instant, ni avant ni après le fatal événement, Toutefois, le gouvernement national, présidé par le prince A. G. Czartoryski, voyant son autorité outragée par un tumulte populaire, crut avoir perdu la confiance publique, et, fidèle à ses principes, il s'empressa de déposer ses pouvoirs à l'instant même. Le même jour, une nouvelle forme de gouvernement, plus conforme aux circonstances, fut adoptée par la Diète. Cet acte voté à l'unanimité,

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