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me par celle de Guben: ils font sous confir-,
més par l'électeur. Il eft des caufes qui, fans
être portées à la juftice provinciale, paffent di
rectement à la régence, qui reçoit auf les
appels de cette même juftice. Elle a été fubfti-
tuée, en 1666 au tribunal de la préfecture
& elle tient fon fiège à Lubben. Elle connoît, foit
directement, foit par voie d'appel, de toutes
les affaires de juftice, féodales & de police
qui furviennent dans les cercles. Elle eft com-
pofée d'un préfident, d'un vice-préfident, de
quatre confeillers actuels, dont deux font tirés
du corps des barons ou de l'ordre équeftre, deux
de la roture, & de plufieurs autres officiers.
On peut appeller de ce tribunal, fuivant l'exigen-
ce des cas, au confeil d'état du prince. La ré-
gence eft auffi la cour féodale ordinaire de la
baffe - Luface.

Contributions. Chaque cercle a fa caiffe parti-
culière qui reçoit les contributions, & les verfe
dans la caiffe générale, régie par le receveur en
chef, & dont les comptes font examinés tous
les ans,
& quittancés par une commiffion des
états. Voyez l'article SAXE.

LUXEMBOURG, (duché de) petit pays qui appartient, partie à la France, & partie à l'Autriche. Le duché de Luxembourg ett borné au levant par l'électorat de Trèves, au midi par le duché de Lorraine, au couchant par la Champagne, & vers le nord par les duchés de Limbourg, de Juliers & l'évêché de Liège. Il a dans fa plus grande étendue vingt milles d'Allemagne du feptentrion au midi, & à-peu-près autant du levant au couchant.

château, Remich, la Roche & Virton. L'abbé de Saint-Maximin, qui poffède de grands biens dans le duché de Luxembourg, eft primat des états, quoique fon abbaye foit fituée dans l'évêché de Trèves. La nobleffe a à fa tête un maréchal, dignité qui appartient depuis 1674 aux barons de Metternich, qui jouiffent à ce titre de la feigneurie de Deusborn ou Deufbourg.

Religion. Tous les habitans fuivent la religion. catholique romaine. La plus grande partie du duché eft fous la jurifdiction de l'archevêque de Trèves; l'autre reconnoît celle des évêques de Rheims, Liège, Toul, Verdun, Metz & Namur.

Précis de l'hiftoire politique de ce duché. Il feroit inutile ici de remonter au delà du comte Sigefroi, qui poffédoit des biens héréditaires confidérables dans l'ancien comté d'Ardenne (lequel comprenoit tout le Luxembourg moderne) & acquit, à titre d'échange, le château de Luzelinburhat (Luxembourg). Le dernier de fa race, Conrad II, comte de Luxembourg, mourut en 1136; & le comté paffa à Henri I, comte de Namur, comme au plus proche héritier: la fille de Henri, Harmefinde, le tranfmit à fon premier man, Théobald, comte de Bar; &, après la mort de celui-ci, à fon fecond mari, Waleran, duc de Limbourg, dont le fils ainé, Henri, fonda la feconde branche des comtes de Luxembourg, laquelle a donné des empereurs, des rois & des ducs. Son petit-fils Henri IV, fut élu empereur d'Allemagne, & eft connu fous le nom de Henri VII. Jean, fils de ce dernier, fut élu roi de Bohême; & WenProductions. Il eft fitué vers le centre de la ceflas I, fils de Jean, fut le premier duc de forêt des Ardennes, fi fameufe dès les tems les Luxembourg, en vertu d'un diplôme de 1354 de plus reculés la partie de cette forêt, qui ap- fon frère l'empereur Charles IV. Wenceslas étant partient au duché de Luxembourg, eft partagée mort fans enfans, il tranfmit fon duché, par en quatre cantons, favoir: celui d'Eiffel aux testament, à fon neveu Wenceslas, roi de Boenvirons de Luxembourg; celui de Famenne, vers hême & élu roi des romains, lequel abandonna le nord près de la Marche; celui de la Meufe le duché de Luxembourg à la princeffe Elifabeth, & celui de la Mofelle. Le terrein, particuliére- fille de Jean de Luxembourg, duc de Goerlitz ment dans la partie méridionale, eft montueux, fon frère, (mariée d'abord à Antoine, duc de rempli de fable & peu fertile; mais il produit Bourgogne, & enfuite à Jean de Bavière), à un peu de bled: le pays eft d'ailleurs dédom-titre d'hypothèque, pour la dot de 120,000 for. magé par le produit de l'entretien du bétail. On cultive auffi des vignes, fur-tout vers la Mofelle; les mines de fer font la plus grande richeffe du pays.

Population. Dans tout le duché il y a, outre la capitale, vingt trois petites villes, quelques bourgs, onze cents foixante & dix villages.

Etats. Les états provinciaux font compofés du clergé, de la nobleffe & des députés des villes de Luxembourg, Arlon, Bastogne, Riedbourg, Chiny, Diekrich, Durbuy, Epternach, Grevenmachern, Houffalize, Marche, Neu

qu'il avoit promis de lui payer. Cette princeffe céda, en 1444, tous fes droits fur le duché de Luxembourg au duc de Bourgogne, Philippe le Bon, avec réserve néanmoins du droit de retrait appartenant au roi de Hongrie, Uladislas, fubit le même fort que les autres provinces unies. & à fes defcendans. Dans la fuite, le Luxembourg La France en obtint une portion par le traité des Pyrénées de 1659.

Tribunaux. Ce duché eft adminiftré par un gouverneur. Il y a à Luxembourg un tribunal appellé le fiège des nobles, compofé de perfonnes d'ancienne extraction noble. Le préfident eft

appellé jufticier. Le confeil provincial fut érigé | par Charles V en 1531. Les membres de ce tribunal font un préfident, trois confeillers nobles & trois jurifconfultes, un procureur-général, un fecrètaire, &c.

L

Quelques écrivains divifent le duché de Luxem

bourg en trois parties, fuivant les trois langues qu'on y parle; favoir, l'allemande, la vallonne & la françoife.

LYONNOIS, province de France. Voyer dans le dictionnaire géographique l'époque de fa 1 réunion à la couronne.

MACASSAR

177

MACASSAR, ifle, Voyez l'article CELEBES.

M

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• MADAGASCAR, ifle de l'Océan indien où la compagnie françoife des Indes orientales forma autrefois un établissement qui a été bouleverfé par les naturels, mais qui fubfifte encore en partie.

L'ifle de Madagascar, léparée du continent de l'Afrique par le canal de Mozambique, eft fituée à l'entrée de l'Océan indien, entre le douzième & le vingt cinquième degrés de latitude, & le foixante-deuxième & le foixante-dixième de longitude. Elle a trois cents trente-fix lieues de long, cent vingt dans fa plus grande largeur,

& environ huit cents de circonférence.

bois propres à la conftruction & à tous les arts.

Il n'y a proprement de culture à Madagascar que celle du riz. On arrache le jonc qui croit dans les marais. La femence y elt jettée à la volee. Des troupeaux les traverfent enfuite, & par leur piétinement enfoncent le grain dans la terre. Le reste eft abandonné au hafard. Une autre espèce de riz eft cultivée dans la faifon des pluies, fur les montagnes avec la même négligence. Ces contrées ne font pas fécondées par les fueurs de l'homme. La fertilité du fol & des eaux bienfaifantes y doivent tenir lieu de tous les travaux. chèvres paiffent jour & nuit dans les prairies fans Des boeufs, des moutons, des porcs, des ceffe renaiffantes que la nature a formées à Madagafear. On n'y voit ni chevaux, ni buffles, ni chameaux, ni aucune espèce de bêtes de charge ou de monture, quoique tout annonce qu'elles y profpéreroient.

On a cru trop légérement que l'or & l'argent étoient des productions de l'ifle. Mais il eft prouvé que, non loin de la baie d'Antongil, il fe trouve des mines de cuivre affez abondantes, & des mines d'un fer très-pur dans l'intérieur des

terres.

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Climat & fol. Les côtes de cette grande ifle font généralement mal-faines. Ce malheur tient à des caufes phyfiques qu'on pourroit changer. La terre que nous habitons n'eft devenue falubre que par les travaux de l'homme. Dans fon origine, elle étoit couverte de forêts & de marécages qui corrompoient l'air. C'eft l'état actuel de Madagascar. Les pluies, comme dans les autres pays fitués entre les Tropiques, y ont des temps marqués. Elles forment des rivières qui, cherchant à fe décharger dans l'Océan, trouvent leur embouchure fermée par des fables que le mouvement de la mer y a pouffés durant la faifon fèche, c'eft-à-dire, lorfque les eaux n'avolent pas affez de volume & de viteffe pour fe faire jour. Arrêtées par cette barrière, elles refluent dans la plaine, y font quelque tems ftagnantes, & rempliffent l'horifon d'exhalaifons meurtrières, jufqu'à ce que, furmontant l'obstacle qui les retenoient, elles fe ménagent enfin Cette variété tient fans doute à la formation une iffue. Ce fyftème paroîtra d'une vérité fen- générale des ifles. Toutes ont été liées à quelque fible, fi l'on fait attention que les côtes ne font continent, dans des tems antérieurs à l'origi e mal-faines que dans la mouffon pluvieufe; que de la navigation, & en ont été féparées par ces la colonne d'air corrompu ne s'étend jamais bien bouleverfemens qui ne fe renouvellent que trop loin; que le ciel est toujours pur dans l'intérieur fouvent. Si la rupture a été fubite, l'ifle ne vous des terres, & que le rivage eft conftamment fa- offrira qu'une feule race d'hommes. Si les conlubre dans tous les lieux où, par des circonftan-trées adjacentes ont été menacées long tems ava: t ces locales, le cours des rivières eft libre fans interruption.

Productions. Par quelque vent que le navigateur arrive à Madagascar, il n'apperçoit qu'un fable aride. Cette ftérilité finit à une ou deux lieues. Dans le refte de l'ifle, la nature toujours en végétation produit feule, au milieu des forêts ou fur les terres découvertes, le coton, l'indigo, le chan

le miel, le poivre blanc, le fagou, les bananes, le chou caraibe, le ravenfera, épicerie trop peu connue, mille plantes nutritives étrangères à nos climats. Tout eft rempli de palmiers, de cocotiers, d'orangers, d'arbres gommiers, de Econ. polit. & diplomatique. Tome III.

Habitans. L'origine des madecaffes fe perd comme celle de la plupart des peuples, dans des fables extravagantes. Sont-ils indigènes ont-ils été tranfplantés? C'eft vraisemblablement ce qui ne fera jamais éclairci. Cependant on ne peut s'empêcher de penfer qu'ils ne font pas tous fortis d'une fouche commune, quand on réfléchit aux différentes formes qui les diftinguent.

le déchirement, alors le péril mit les différens peuples en mouvement. Chacun courat en tus multe vers le lieu où il fe promettoit quelque fécurité. Cependant le terrible phénomène s'exécuta, & l'efpace entouré d'eaux renferma des races qui n'avoient ni la même couleur, ni la même ftature, ni la même langue.

Tout porte à croire qu'il en a été ainfi à Madagafcar. A l'ouest de l'ifle, on trouve un peuple, appellé Quimoffe, qui n'a communément que quatre pieds, & qui ne s'élève jamais à plus de quatre pieds quatre pouces. On le croit réduit à quinze mille ames. Il devoit être plus nombreux Ꮓ

avant la guerre meurtrière & malheureufe qui lui fit quitter fes premiers foyers. Forcé de s'expasrier, il fe refugia dans une vallée très-fertile & entourée de hauteurs efcarpées, où il vit fans communication avec fes voifins. Lorfque fes anciens vainqueurs fe réuniffent pour l'attaquer dans cette pofition heureufe, il lâche un grand nombre de boeufs fur la croupe de fes montagnes. Les affaillans qui n'ont que ce butin en vue, s'emparent des troupeaux & quittent les armes, pour les reprendre lorfqu'ils peuvent encore réuf fir à former une confédération affez puiffante pour déterminer les quimoffes à acheter de nou veau la paix.

Du gouvernement des naturels. Madagascar eft divifé en plufieurs peuplades, plus ou moins nombreufes, mais indépendantes les unes des autres. Chacune de ces foibles affociations habite un canton qui lui eft propre, & fe gouverne elle-même par fes ufages. Un chef, tantôt électif, tantôt héréditaire, & quelquefois ufurpateur, y jouit d'une affez grande autorité. Cependant il ne peut entreprendre la guerre que de l'aveu des principaux membres de l'état, ni la foutenir qu'avec les contributions & les efforts volontaires de fes peuples.

Le dépouillement des champs enfemencés, le vol des troupeaux, l'enlevement des femmes & des enfans, telles font les fources ordinaires de leurs divifions. Ces peuples agreftes font tourmentés de la rage de jouir par l'injuftice & la violence, auffi vivement que les nations les plus policées. Leurs hoftilités ne font pas meurtrières, mais les prifonniers deviennent toujours efclaves.

On n'a pas à Madagascar une idée fort étendue de ce droit de propriété, d'où dérivent le goût du travail, le motif de la défenfe & la foumifLion au gouvernement. Auffi les peuples y montrent-ils peu d'attachement pour les lieux qui les ont vu naître. Des raifons de inécontentement, de convenance ou de néceffité, leur font aifément quitter leur demeure pour une autre contrée plus abondante ou plus éloignée de leurs ennemis. Souvent même, par pure inconftance, un madecaffe fe choifit une autre patrie, pour en › par pure inconftance, un changer encore lorfqu'il aura un nouveau caprice, ou qu'il craindra quelque châtiment pour un acte de fureur ou pour un larcin. Il eft affuré de trouver par-tout des terres à cultiver. Jamais elles ne font partagées. C'eft ordinairement la commune qui les enfemence & qui en partage enfuite les productions. Ainfi le droit civil eft peu de chofe dans ces régions; mais le droit politique y eft encore moins étendu.

Industrie & arts. On apperçoit un commencement de lumière & d'induftrie chez ces peuples. Avec de la foie, du coton, du fil d'écorce d'arbre, its fabriqnent quelques étoffes. L'art de fondre & de forger le fer ne leur eft pas entié

rement inconnu. Leurs poteries font agréables: Dans plufieurs cantons, ils pratiquent la manière de peindre la parole par le moyen de l'écriture. Ils ont même des livres d'hiftoire, de médeciqu'on a pris mal-à-propos pour des prêtres, & ne, d'aftrologie, fous la garde de leurs ombis, qui ne font réellement que des impofteurs, qui fe difent & peut-être fe croient forciers. Ces connoiffances, plus répandues à l'ouest que dans le refte de l'ifle, y ont éte portées par les arabes, qui de temps immémorial y viennent trafiquer.

Vingt-quatre familles arabes, qui très-anciend'Anoffi, en ont long-temps joui fans trouble, nement avoient ufurpé l'empire dans la province & l'ont perdu en 1771, fans être ni chaffées, ni maffacrées, ni opprimées.

Détails fur l'établissement qu'y avoit formé notre compagnie des Indes. Tel étoit Madagascar, lorfqu'en 1665 il y arriva quatre vaiffeaux françois. La compagnie des Indes qui les avoit expédiés, étoit réfolue à former un établiffement folide dans cette ifle. Ce projet étoit fage, & l'exécution n'en devoit pas être fort coûteufe.

Toutes les colonies que les européens ont étations, ou au cap de Bonne-Efpérance, dans les blies en Amérique pour en obtenir des producifles de France, de Bourbon, de Sainte-Hélene, pour l'exploitation de leur commerce aux Indes temps & des travaux confidérables. Plufieurs de ont exigé des dépenfes énormes un très long. ces régions étoient entiérement défertes, & l'on n'étoit pas poffible de rendre utiles. Madagascar ne voyoit dans les autres que des habitans qu'il offroit au contraire un fol naturellement fertile,

& un peuple nombreux, docile, intelligent, qui n'avoit befoin que d'inftruction pour feconder efficacement les vues qu'on fe propofort.

Ces infulaires étoient fatigués de l'état de guerre & d'anarchie, où ils vivoient continuelles faire jouir de la paix, de la liberté. Des dif lement. Ils foupiroient après une police qui pût pofitions fi favorables ne permettoient pas de douter qu'ils fe prêtaffent facilement aux efforts qu'on voudroit faire pour leur civilisation.

avantageufe. Avec des foins fuivis, Madagascar
Rien n'étoit plus aifé que de la rendre très-
pour les Indes, pour la Perfe, pour l'Arabie &
devoit produire beaucoup de denrées convenables
pour le continent de l'Afrique. En y attirant quel-
ques indiens & quelques chinois, on y auroit
l'Afie. Il étoit facile d'y conftruire des navires,
naturalifé tous les arts, toutes les cultures de
parce que les matériaux s'y trouvoient de bonne
qualité & en abondance, de les armer même
parce que les hommes s'y montroient propres
la navigation. Toutes ces innovations auroient eu
une folidité que les conquêtes des européens n'au-
pays ne prendront jamais nos loix, nos moeurs,
ront peut-être pas aux Indes, où les naturels du

notre culte, ni par conféquent cette difpofition¦ favorable qui attache les peuples à une domination nouvelle.

à la baie de Saint-Augustin, qui auroit ouvert une communication facile au continent d'Afrique; le fecond à Louquez, où une chaleur vive & Une fi heureuse révolution ne devoit pas être continue devoit faire profpérer toutes les plantes l'ouvrage de la violence. Un peuple brute, nom- de l'Inde; le troifième au fort Dauphin, qu'une breux & brave n'auroit pas préfenté fes mains | température douce & faine rendoit propre au bled aux fers, dont une poignée d'étrangers auroient & à la plupart des productions de l'Europe; le voulu le charger. C'étoit par la voie douce de la quatrième enfin à Tametave, le canton le plus perfuafion, c'étoit par l'appas fi féduifant du fertile, le plus peuplé, le plus cultivé du pays. bonheur, c'étoit par l'attrait d'une vie tranquille, Cette dernière pofition méritoit même d'être choic'étoit par les avantages de notre police, par fie pour être le chef-lieu de la colonie, & voici les jouiffances de notre induftrie, par la fupé- pourquoi. riorité de notre génie, qu'il falloit amener l'ifle entière à un but également utile aux deux nations.

La légiflation qu'il convenoit de donner à ces peuples, devoit être affortie à leurs mœurs, à leur caractère, à leur climat. Elle devoit s'éloigner en tout de celle de l'Europe, corrompue & compliquée par la barbarie des coutumes féodadales. Quelque fimple qu'elle fût, les points divers n'en pouvoient être propofés que fucceffivement, & à mesure que l'efprit de la nation se feroit éclairé, qu'il fe feroit étendu. Peut-être même n'auroit-il pas fallu fonger à y amener les hommes dont l'âge auroit fortifié les habitudes; peut-être auroit-il fallu s'attacher uniquement aux jeunes gens qui, formés par nos inftitutions, feroient devenus avec le temps, des miffionnaires politiques, qui auroient multiplié les profélytes du gouvernement.

Le mariage des filles madecaffes avec les colons françois, auroit encore plus avancé le grand fyftême de la civilisation. Ce lien fi cher & fi fen: fible auroit éteint ces diftinctions odieufes qui nourriffent des haines éternelles, & qui féparent à jamais des peuples habitant la même région, vivant fous les mêmes loix.

Il eût été contre toute juftice, contre toute politique, de prendre arbitrairement des terres pour y placer les nouvelles familles. On auroit demandé à la nation affemblée celles qui n'auroient pas été occupées ; & pour affurer plus de confiftance à l'acquifition, le gouvernement en auroit donné un prix qui pût plaire à ces infulaires. Ces champs légitimement acquis auroient eu, pour la première fois, des maîtres. Le droit de propriété fe feroit établi de proche en proche. Avec le temps, tous les peuples de Madagascar auroient librement adopté une innovation, dont aucun préjugé ne peut obfcurcir les avantages.

Plus les colonies qu'il s'agiffoit de fonder à Malagafcar, pouvoient réunir de genres d'utilité, mieux il falloit choisir les fituations propres à les faire éclore, à les multiplier, à les vivifier, à les conferver. Indépendamment d'un établiffement qu'il étoit peut être convenable de placer dans l'intérieur de l'ifle, pour obtenir de bonne heure la confiance des madecaffes, il étoit indispensable d'en former quatre fur les côtes. L'un

Il n'y a point de port connu à Madagascar. C'est une erreur de croire qu'il feroit poffible d'en former un au fort Dauphin, en élevant un môle fur des recifs qui s'avancent dans la mer. Les travaux d'une fi grande entreprise ne feroient pas feulement immenfes, la dépense en feroit encore inutile. Jamais un môle ne mettroit à l'abri des ouragans les vaiffeaux que les montagnes elles-mêmes n'en garantiffent pas. D'ailleurs ce port factice, ouvert en partie à la fureur des vagues, auroit néceffairement peu d'étendue. Les navires n'y auroient point de chaffe. Un feul démarré les feroit tous échouer, & ils périroient fans reffource fur une côte où la mer eft toujours agitée, où les fables font mouvans par tout.

Il n'en eft pas ainfi à Tametave. La baie, débarraffée de cette incommode barre qui s'étend fur toute la côte de l'eft de Madagascar, eft trèsfpacieufe. Le mouillage y eft bon. Les vaiffeaux y font à l'abri des plus fortes brifes. Le débarl'efpace d'une lieue & demie la grande rivière quement y eft facile. Il fuffiroit de faire creufer qui s'y jette, pour faire arriver les plus gros bâtimens à l'étang de Noffe-Bé, où la nature a formé un excellent port. Au milieu eft une ifle dont l'air eft très-pur, & dont la défense seroit aifée. Cette pofition a cela d'heureux, qu'avec quelques précautions on en pourroit fermer l'en

trée aux efcadres ennemies,

Tels étoient les avantages que la compagnie de France pouvoit retirer de Madagascar. La conduite de fes agens ruina malheureufement ces brillantes efpérances. Ils détournèrent fans pudeur une partie des fonds dont ils avoient l'adminiftration; ils confumèrent en dépenses folles ou inutiles des fommes plus confidérables; ils fe rendirent également odieux, & aux européens dont ils devoient encourager les travaux, & aux naturels du pays qu'il falloit gagner par la douceur & par les bienfaits. Les crimes & les malheurs fe multiplièrent à un tel excès, qu'en 1670 les affociés crurent devoir remettre au gouvernement une poffeffion qu'ils tenoient de lui. Le changement de domination n'amena pas un meilleur efprit. La plupart des françois qui étoient reftés dans l'ifle, furent maffacrés deux ans après. Ceux qui avoient échappé à cette mémorable

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