tant pour elle que pour fa Communauté. Non Captivité de la Saur Euftoquie de Brégy aux XVIII. La Soeur Anne-Marie de Ste Euftoquie de Flécelles de Bregy, filleule de la Reine & paren- Entrée de la te du Cardinal de Rets, fut enlevée le 29.No-Sœur Euftoquie aux Urvembre 1664. & révint le s. Juillet 1665. Ainfi ulines de S. elle fut plus de 7. mois dans l'état de captivité, Denis. Lorfqu'elle fut fortie de la clôture du Monaftére, conduite par l'Archevêque qui faifoit tout à la fois la fonction de Juge & le miniftére d'exécuteur, on la fit monter dans un caroffe avec la fœur Melthide, qui étoit celle qui après avoir figné s'étoit rétractée, & que l'Archevêque envoyoit dans une maifon, étrangère pour la punir de fa rétractation. Un Eccléfiafti XIX. 20 que accompagné d'une Dame monta dans le caroffe pour escorter les deux Religieufes. Cel les-ci en chemin s'occupoient à réciter beaucoup de prières. Elles apprirent de l'Eccléfia ftique que c'étoit à S. Denis qu'on les menoit, la four Euftoquie aux Urfulines, & la fœur Melthide aux filles Ste Marie. On defcendit l'une & l'autre dans les maifons défignées; & la fœur Euftoquie étant entrée dans celle des Urfulines, fe mit à genoux fur le feuil de la grand'porte de clôture devant la Supérieure, & lui dit » Ma Mere, je vous fupplie trèshumblement de me permettre de vous faire, » avant que d'entrer, en préfence de Mrs les Eccléfiaftiques & des Meres que voici, la mê→ » me proteftation que j'ai faite à M. l'Archevêque en fortant de P.R. & de vous dire, ma Mere, que c'eft avec joie que j'embrasse la folitude ou Dieu permet qu'on me mette: » que je vous obéirai en tout avec un profond refpect comme à ma Supérieure; tant que je » ferai dans votre maifon, à l'exception des chofes qui regardent les affaires préfentes de » la fignature, fur lefquelles il n'y a pas, s'il vous plaît, une fyllabe à me dire, parce » que l'état dans lequel j'entre eft une ceffation de toute action,, & abfolument paflif pour moi, On la conduifit à l'Eglife. Elle fe mit à genoux devant une image de la Ste Vierge, & y pria quelque tems; de quoi les Religieus fes furent un peu émerveillées. » Ah ! difoientelles, elle prie la Ste Vierge; on nous avoit dit que les Religieufes de P. R. n'y croyoient » point. Elle pafla la journée dans la Communauté, Comment dina & foupa avec les Religieufes de la maidans la mai- fon, & affifta aux deux récréations qui lui fu elle est traitée fon. rent d'autant plus péniblés qu'elles étoient fort gaies. Après la récréation du foir, la Mere Su périeure la pria d'agréer pour compagne une foeur qui étoit là, à qui elle enjoignit, pour obéir aux ordres de M. l'Archevêque, d'être jour & nuit auprès d'elle, enforte que fi elle étoit abfolument obligée de fortir, une Converse viendroit prendre la place pour garder la Prifonniére. La propofition fut acceptée de fort bonne grace. La Prifonniére enfuite s'expliqua fur le régime qu'elle fe propofoit de luivre: elle dit qu'elle comptoit faire comme à P. R. pour l'Office, le jeûne, le coucher, &c. parce que c'étoient des chofes qui n'inté reffoient en rien la difcipline de la maifon ; mais que pour le maigre, comme cela incom moderoit ou embarafferoit la maifon, clle feroit gras trois fois la femaine comme les Religieufes. La compagne qui lui fut donnée, se nom→ moit la Mere Elifabeth de Ste Scholastique, qui ne la quitta point pendant les fept mois, & fe trouva ainfi auffi prifonnière que celle qu'elle gardoit. Elles furent trois femaines fans prefque fe parler, fe méfiant Fune de l'au tre. A la fin la Mere Ste Scholaftique embraf fant la fœur Euftoquie, lui dit: » Vous êtes » pourtant une bonne fille; je ne fçai ce que vous m'avez fait, mais vous m'avez gagné » le cœur. Elle étoit édifiée de l'efprit d'oraifon qu'elle remarquoit dans la four. Car la plus grande partie de la journée, furtout les Fêtes, fe palloit à entendre des Meffes, à réciter des priéres & des offices, & à faire diverfes fortes de dévotions dans une grande Chapelle qui donnoit dans l'Eglife; car on n'alloit point dans l'Eglife. Cette Mere étoit une bou F's XX. du feu vere le ne fille qui avoit beaucoup de fimplicité & de droiture, & qui, à les préjugés près, n'entra pas mal dans beaucoup de bonnes chofes que lui dit la four en converfation, entre autres fur la maniére ancienne de jeûner pendant le Carême, de forte que toutes les deux pri rent la résolution de paffer le Carême de cette maniére & l'exécutérent, ne faisant qu'un repas par jour. Voici un trait tout-2 t-à-fait fingulier que cette Prophétie bonne Mere rapporta à la fœur Euftoquie. ElJeune fur l'é- le lui dit qu'autrefois elle avoit eu pour Direvénement cteur le feu P. le Jeune de l'Oratoire & célépréfent, bre Prédicateur, & qu'il lui avoit prédit qu'un jour elle auroit auprès d'elle une Religieufe étrangère, & qu'elle apprendroit par l'exemple de celle dont elle auroit foin jufqu'à quel point il faut préférer Dieu à tout; & que ce qui arrivoit maintenant, lui caufoit à elle & à d'autres Religieufes qui favoient la pro phétie, un très-grand étonnement. Elle tâchoit néanmoins de cacher en partie à la Communauté l'affection qu'elle avoit pour la prifonniere. Celle-ci n'en étoit pas moins captive parce que la géoliere avoit fes ordres qu'elle n'ofoit outre-paffer en quoique ce fût. La four Euftoquie n'avoit ni Livre ni écritoire. On lui avoit refufé ces petits fecours qu'on accordoit aux autres captives, afin, difoit-on, de lui faire faire pénitence de fes lectures & de fes griffonnages. Ainfi elle paffoit les Fêtes à prier & à lire dans fa Bible qu'elle avoit apportée avec elle, & les jours ouvriers elle travailloit à ce que les Meres fouhaitoient qu'elle fit pour elles ou pour leur Eglife. Hors fa Gardienne elle n'avoit de converfation avec personne. Deux jeunes Religieuses l'étant venues trouver fous le bon plaifir de cette bonne Mere Scholaftique, pour apprendre d'elle un certain chant d'Eglife, en furent févérement réprimandées par la Mere Supérieure. XXI. Epreuves de Jufque-là l'épreuve n'étoit pas infupportable à la prifonniére. Mais Dieu lui en procura différente efd'autres qui n'étoient nullement douces & lé péce que la géres. D'un côté la Mere Supérieure ve- sœur Euftonoit de tems en tems lui reprocher fes difpofi- quie a à fup tions: elle la fatiguoit par des raifonnemens porter. pitoyables, par des amitiés affectées, par des menaces dures & effrayantes, par des difcours calomnieux contre P. R. contre les Meres les plus refpectables, contre M, Arnauld & les autres. Joignez à cela les avanies que lui faifoient quelquefois les Religieufes de la maison à qui elle entendoit dire en paffant: Fy, fy » l'excommuniée, qu'on la retire d'ici; ou bien: Elle prie toujours Dieu, & ne le con5 vertit pas, il faut que ce foit le Diable qui la faffe prier; ou bien, lui adreffant la paro »le: Quand donc renoncerez-vous au Diable qui vous poffede?» De plus la Mere avoit grand foin de lui venir annoncer les nouvelles qu'elle favoit lui être très-affligeantes, favoir les chutes de fes fœurs, ou les nouveaux enlévemens de celles qui ne fignoient pas. La plupart de ces nouvelles étoient fauffes: mais la prifonniere n'avoit pas le moyen de démê ler celles qui étoient vraies d'avec celles qui ne l'étoient pas. Ainfi & les vraies & les fauffes l'accabloient de douleur. Tantôt c'étoit la fignature de la four Candide & de la four Gertrude: tantôt c'étoit celle de M. d'Alet, de M, de Beauvais, de M. Hermant, D'autres fois on 1ui afluroit que la Mere Prieure de Paris exilée avoit figué un premier Formulaire, & qu'el |