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de l'ordre de Dieu pour y fubftituer le fien ; que d'ailleurs le facrifice feroit plus grand devant Dieu, fi après s'être généreufement féparée des créatures, elle confentoit à être séparée extérieurement de Jesus-Christ même pour demeurer inviolablement attachée à la Juftice & à la Vérité, elle prit la réfolution fixe de demeurer comme elle étoit. Elle n'allégua pourtant pas ces motifs à la Mere la Fayette; elle fe contenta de lui dire qu'ayant fait vœu de stabilité, elle croiroit manquer à fon vœu, fi elle faifoit quelque avance par elle-même pour fortir du lieu où fon Supérieur l'avoit mife, & aller en un autre.

on

La Mere la Fayette mourut en ce tems-ci au grand regret de fa maifon & de la Sœur fainte Eugénie. Elle fut remplacée par une Religieufe fort prévenue contre le procédé des filles de P. R. mais d'ailleurs remplie d'équité de bonté & de politeffe. Pendant la maladie de la Mere la Fayette dont elle mourut apporta au Couvent la penfion de la Sœur de P. R. On parla à la malade de ce qui se pasfoit. Elle en témoigna fon mécontentement, donnant par là une preuve très-édifiante de son grand amour pour la pauvreté. Cependant craignant de déférer trop à fon inclination naturelle qui étoit la générofité, elle confentit qu'on prît la moitié de la fomme qu'on apportoit peu de tems après elle entra en agonie, & mourut. Ceux qui avoient apporté l'argent ne voulurent en rien reprendre, & l'on penfa à en envoyer la moitié à P. R. La nouvelle Supérieure approuva la penfée : mais elle voulut demander à M. l'Archevêque la permiffion de le faire. Le Prélat ordonna que cette fomme fût envoyée à la Vifitation du faux

bourg S. Jacques. Des traits de cette nature font honneur aux Religieufes de la maison de Chaillot, qui dans tout le refte ont autli fort édifié la Sœur fainte Eugenie.

XLI. Tentatives

près de la

au

la S. Michel

L'Archevêque avoit demandé à la Sœur de Mortemar, quand il vint pour l'élection de la nouvelle Supérieure, ce que penfoit à pré- inutiles fent la Sœur de P. R. Elle lui avoit répondu sœur S. Ange. que la Soeur Eugénie ne parloit jamais des af- La Commufaires du tems. Le Prélat lui avoit donné une nion lui eft recopie de fa lettre à M. d'Angers, & lui avoit fufée depuis dit d'en faire la lecture à la Soeur, l'affurant jufqu'à laPenque rien n'étoit plus capable d'éclaircir fes tecôte. doutes. La Religieufe donc préfenta ce papier à la Soeur Eugénie & lui en fit lecture. Celleci après l'avoir entendue, dit à la Sœur de Mortemar que pour bien juger, il conviendroit de voir auffi la lettre de M. d'Angers qui avoit précédé cette réponse,auffi-bien que celle qui viendroit apparemment en réplique. La nouvelle Supérieure de fon côté ne s'épargna pas pour tâcher de ramener la Sour; elle s'y crut obligée en confcience à l'entrée de fa Supériorité : mais elle quitta bientôt la partie & fe réduifit à faire beaucoup prier fa Communauté pour la converfion de la Sœur.

La Communion fut refusée à Pâques comme aux autres fêtes par M. l'Archevêque. La Sœur voyant qu'il n'y avoit plus rien à espérer, & fe fentant chargée d'incommodités qui pouvoient abréger les jours, fit un teftament fpirituel qu'elle comptoit donner aux Religieufes lorfqu'elle feroit au lit de la mort. Elle s'y explique avec fimplicité fur les motifs, qui la conduifent dans le refus qu'elle fait de la fignature, & elle remercie Dieu de ce qu'il l'a fait entrer dans la maifon de P. R. où elle a

1

XLII.

trouvé tant de fecours pour fon falut, auffi bien que dans la maifon de fainte Marie dont les exemples édifians & les bontés maternelles la pénétrent de reconnoiffance.

M. Chamillard vint entre Pâques & Pentecôte à Chaillot pour montrer à la Sœur la Bulle de Rome & le Mandement de Paris. Les deux piéces furent lues, & la Sœur déclara qu'elle ne pouvoit pas changer de fentiment, ni fe réfoudre à faire un jugement téméraire. Il s'emporta affez vivement, & comme il répéta plufieurs fois que c'étoit - là comme parloient tous les hérétiques, la Sœur lui dit avec un peu de fermeté » Mais, Monfieur » vous avez une grande inclination à nous → comparer aux hérétiques. » M. Chamillard fe reprit, & dit que cela feroit injufte pour le préfent, mais que fi elle fe laiffoit excommunier, il n'y auroit plus de différence. » Mon» fieur, répondit-elle, fi vous n'en faites pas, » Dieu fçaura bien en faire.

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On preffa fortia Sœur à la Pentecôte de La Sœur S. demander la Communion, en vertu des trois Ange foufcrit mois de délai que donnoit la Bulle. La Deau bas de la moifelle Teftu, une des bienfaitrices de la Mere Agnès maifon, fe chargea de faire la propofition à qui promet- l'Archevêque. Le Prélat écrivit à cette Demoitoit l'indife- felle qu'il confentoit à ce qu'on lui demandoi',

lettre de la

rence.

pourvu que la Soeur voulût lui marquer par écrit fes difpofitions en conformité à une lettre que la Mere Agnès lui avoit écrite, & en conféquence de laquelle il avoit rendu les Sacremens à ladite Mere Agnès. Il envoya ladite lettre pour la faire lire à la Sœur Eugénie. Comme la Mere Agnès promettoit dans fa lettre cette indifférence favorite que demandoit l'Archevêque, la Soeur d'abord fe fentit ré

voltée intérieurement; elle fe mit à genoux pleurant beaucoup. Cependant le refpect qu'elle avoit pour la vénérable Mere la détermina à mettre fon nom au bas de fa lettre ; croyant d'ailleurs que cette indifférence n'engageoit à rien. Sur cette fignature l'Archevêque lui envoya le Pere de fainte Marthe de l'Oratoire qui la confefla & la fit communier le Dimanche de la Trinité.

La concurrence de sa Communion avec l'Evangile du jour qui dit : Ne jugez point, & vous ne ferez point jugés ne condamnez point, & vous ne ferez point condamnés, jettà quelque trouble dans fon efprit au fujet de fa fignature. Elle repaffa enfuite dans fon efprit quelques termes de la lettre de M. l'Archevêque à Mademoiselle Teftu, où il infiftoit fortement fur la fincérité qu'il exigeoit de la Sœur en fignant. Ses peines augmentérent : elle les expola au Pere de fainte Marthe qui ne put les lui faire furmonter. Ainfi elle fe condamna elle-même à ne plus communier. Le même Pere le premier Juillet lui apporta une lettre de la Mere Agnès qui écrivoit à la Sœur qu'elle étoit fâchée d'apprendre qu'elle ne vouloit plus communier ; & dans la même entrevue le Pere lui annonça qu'on alloit réunir à P. R. des Champs toutes les Religieufes de P. R. & qu'ainfi elle fortiroit dans peu.

XLIII.

Sortie de la

Le lendemain de la fête de la Vifitation la Sœur qui étoit incertaine du jour de fa for- Soeur S. Ange tie, crut devoir prendre fes précautions, pour pour être enne pas quitter la maison fans avoir témoigné voyée à P. R. fa reconnoiffance & fon refpect à toute la des Champs. Communauté; elle fe leva de table au milieu du repas, & alla baiser avec beaucoup d'humilité les pieds de toutes les Religieufes,

XLIV.

& demanda pardon à la Communauté de la mauvaise édification qu'elle avoit pu leur donner. Les Religieufes qui ne favoient pas encore qu'elle dût fortir, furent fort étonnées de la cérémonie qu'elles lui virent faire. Mais le myftére fut découvert à fix heures du foir. La Demoiselle Teftu apporta l'obédience, & fit partir la Sœur fur le champ. Elle l'accompagna dans le caroffe jufqu'aux filles fainte Marie du Fauxbourg S. Jacques où elle la dépofa. Le lendemain la Sœur fut conduite avec les autres à P. R. des Champs.

Captivité de la Mere Agnès de S. Paul Arnauld & de la Saur Marie-Angélique de fainte Thérèfe d'Andilli, aux Filles fainte Marie du Fauxbourg S. Jacques.

La Mere Agnès ayant été nommée parmi les La Mere douze premieres pour être transférée à la VifiAgnès eft trèsreflerrée dans tation du fauxbourg S. Jacques, la Soeur Mafa captivité. rie-Angélique de Ste Thérèse d'Andilli fa nié

ce, & fœur de la four Angélique de S. Jean, lui fut donnée pour compagne, en confidération de fon âge & de fes infirmités. La Mere Agnès rapporte qu'elle fe trouva alors dans une efpèce d'étonnement & de fufpenfion d'efprit qui en lui laiffant un fond de foumission aux ordres de la Providence, ne lui laiffoit aucun fentiment de force. Elle avoue qu'elle fut fort édifiée d'une des douze nommées pour fortir, qui s'approcha d'elle & lui dit : » Ma Mere, toute grace & toute force. » On attendit quelque tems dans une Chapelle de l'Eglife en dehors où le Lieutenant Civil prenoit les noms & les qualités des Religieufes qui fortoient. La Mere Abbeffe pria ce Magiftrat de trouver bon

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