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judicieufe Sœur. Ils ont fait plufieurs retranchemens confidérables de chofes qui en effet ne pouvoient être d'aucune utilité pour le public. La quatriéme raifon eft, qu'elle reconnoit avoir écrit avec affez peu de circonfpehion, & qu'il peut y avoir des endroits, où elle ne parle pas avec affez de modéra tion de certaines perfonnes ; qu'elle auroit vou❤ lu adoucir ces endroits, fi elle avoit prévu que ce récit pût être expofé à d'autres yeux que ceux pour qui elle l'avoit fait.

Elle redit les mêmes chofes dans fa qua triéme lettre, & elle ajoute qu'elle a fi fort compté ne point écrire pour le public, qu'il n'y a même dans la Communauté que quatre Religieufes à qui elle l'ait communiqué 3 penfant bien que cette lecture pouvoit ne pas faire un bon effet dans la plupart 3 » que les >> foibles s'allarmeroient en lifant le récit des » peines étranges aufquelles on eft livré dans » cet état, & que les fortes prendroient "pour une petite vanité & regarderoient peut-être avec quelque jaloufie, le narré des >> affiftances & des confolations qu'on dit avoir » recues du Seigneur.

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LIVRE IX.

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Ce qui s'eft paffé à Port-Royal depuis la tranflation des Religieufes de la Maifon de Paris en celle des Champs en 1665. juf qu'en 1667.

L

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Départ de

E 3. Juillet 1665. fe fit la translation qui a été annoncée dans les deux Livres 30. Religieu précédens. Prefque toutes les Sœurs de Paris fes de P. R. furent conduites à P. R. des Champs, l'Arche de Paris pour vêque ne laiffant à Paris que celles qui avoient P. R. des figné, au nombre de dix ou douze, avec les Champs, fix filles de Sainte-Marie. Le projet étoit d'a bord de n'enlever qu'une partie des Religieufes de Paris, les plus fortes apparemment, dans l'efpérance de réduire avec plus de facilité celles qui fembloient l'être moins. Lorfque l'Archevêque en fit la propofition le 28. Juin à la Communauté, il fe fit une réclamation de toutes les Religieufes qui protestérent contre cette nouvelle vexation › par la quelle on les chaffoit d'une maison qui leur appartenoit, pour en abandonner la poffeffion à un petit nombre de Sœurs qu'on y laifferoit. Il en fut dreffé un acte. Mais il fallut le refaire & le tourner autrement, lorfque le premier Juillet on fçut que l'Archevêque avoit changé de deffein, & qu'il prétendoit enlever fans exception toutes les Religieufes qui n'étoient pas foumifes à la fignature. On déclare dans cet acte que, quoique ce fût un grand foulagement pour les Soeurs dans leur affliction de n'être point féparées & de fe trouver réu

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> nies elles ne confentoient néanmoins à leur tranfport dans la maison des Champs, » que pour céder à la force & par obéissance aux ordres de M. de Paris; qu'elles s'oppo>> foient autant & de la manière qu'elles le pouvoient à toutes les fuites de cet enléve >> ment, & réclamoient pour tous les droits » qui leur étoient acquis à la maison de » Paris.

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Les Religieufes s'attendant que l'expédition Leroit pour le trois de Juillet, le lendemain de la Vifitation de la Ste Vierge, pafférent la nuit pour la plûpart à préparer toutes chofes pour le voyage ; & toute la Communauté fe rendit à l'Eglife dès cinq heures du matin pour faire différentes fortes de dévotions qu'elles avoient projettées. Elles commencérent par une proceffion autour du Cloître en l'honneur de la fainte Epine, comme pour la faluer pour la derniére fois, & auffi pour dire le dernier adieu aux faintes Meres enterrées dans le Cloître dont elles alloient s'éloigner. Au retour de la proceffion, l'Archevêque arris va avec fix caroffes à quatre chevaux. Le bruit de fon arrivée fe fit entendre dans la maison, & arrêta tout court les exercices de piété. La Communauté fe tranfporta au Chapitre ou l'Archevêque entra accompagné de fon GrandVicaire, M. de la Brunetiere, de M. Chamillard, de fes Aumôniers & de fon Portecroix. Il dit deux mots aux Sœurs, pour leur faire entendre que fon intention étoit que leur réunion dans la maifon des Champs fervît à trouver ensemble des moyens de pacifier tout, & de fe foumettre à ce qu'il exigeoit d'elles, les affurant de nouveau qu'elles pouyoient le faire fans commettre aucun péché. II

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prit enfuite un papier, & nomma de fuite trente Religieufes à qui il ordonna de fe rendre à la porte. Il déclara qu'il feroit partir le reste une autre fois, parce qu'on ne pouvoit pas tout faire en un jour. La plus ancienne de celles qui étoient demeurées dans la maifon après la difperfion, lui dit : » Nous » fortirons, Monfeigneur, parce que vous nous l'ordonnez : mais nous proteftons que c'est » fans préjudice du droit que nous avons de » revenir dans notre maison. Eh! qui en dou>>te, ma bonne Sœur, dit l'Archevêque? Je » vous y ramenerai toutes moi-même, quand » vous aurez obéi. » Il leur donna une demiheure pour fe difpofer au voyage.

A fept heures elles fe trouvérent toutes à la porte, & l'Archevêque les fit monter dans les caroffes, fix dans chaque. Le GrandVicaire & les Eccléfiaftiques qui faifoient la conduite étoient enfemble dans un des fix caroffes. Après quelque tems de marche, on en apperçut un feptiéme dans lequel étoit la Mere' Agnès avec les trois niéces & la Sœur Chriftine. Nous avons vu dans les Rélations des captivités que l'Archevêque avoit donné fes ordres pour les faire partir dans le même tems du Couvent de fainte-Marie où la Mere Agnès avoit été enfermée avec fes deux niéces, & où on avoit amené la veille la Sœur Angélique de faint Jean & la Sœur Chriftine. Ce fut une rencontre très-confolante pour toutes ces Filles de fe revoir ainfi avec leur chere Mere, dont elles avoient été fi long-tems féparées. Les caroffes ayant joint celui de la Mere Agnès, les tranfports furent tels qu'ils ne purent refter renfermés; il fallut pour donner cours aux premiéres effufions de tendreffe, faire arrêter Tome II.

M

II.

les voitures. Cela dura à peu près un quart
d'heure, fous les yeux des Eccléfiaftiques qui
regardoient tout en filence.

Lorfqu'on fut arrivé à P. R. des Champs.
toutes les Religieufes defcendirent de carolfe,
& ayant pris leur manteau de Chœur, elles
entrérent dans l'Eglife & fe profternérent de-
vant l'Autel pour adorer J. C. & s'offrir à lui
de nouveau pour tout ce qui pouvoit leur
arriver dans la fuite. La Mere Prieure des
Champs fe trouva avec fa Communauté à la
porte des Sacremens, & la nouvelle compa-
gnie entra & fut reçue avec la joie qu'on peut
imaginer de part & d'autre. Mais en même-
tems la Mere Prieure déclara à M. le Grand-
Vicaire préfent, qu'elle ne laiffoit pas de pro-
tefter contre ce transport, qui avoit été fait
fans la participation de la Mere Abbesse, &
d'interjetter appel pour la confervation des
droits de la Communauté.

M. de la Brunetiere avant que de partir Changement pour retourner à Paris, fit deux expéditions: deConfeffeur, de Chapelain, il congédia un bon Eccléfiaftique, nommé M. de Sacriftain. Canut, qui fervoit de Chapelain depuis 10. Garnifen éta- ou 12. ans, & inftalla à fa place un M. du blie autour de Saugey, le donnant aussi pour Confeffeur de

la maison.

la maison. C'étoit un jeune Prêtre, Savoyard,
qui n'avoit pas encore dit fa premiere Messe.
La Mere Prieure lui repréfenta qu'il étoit
inouï qu'on gênât à ce point les confciences,
& qu'on obligeât des Religieufes de recevoir
pour Confeffeur un homme fans expérience &
qu'elles ne connoiffoient même pas. Elle ajouta
qu'elle proteftoit contre, & qu'elle joignoit
cet appel à tous les autres, Le Grand-Vicaire
promit d'envoyer le lendemain un fecond Ec-
cléfiaftique, parce qu'un feul ne fuffroit pas
pour toute la Communauté.

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