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févérant de faire une chofe à laquelle on leur faifoit accroire que tout le monde, leurs Sœurs même, fe rendoient, ne les fît devenir coupa→ bles d'une faute réelle, & ne les chargeât devant Dieu des fuites très-fâcheufes qui étoient à appréhender pour leur maifon. D'autres étoient dans des états de trouble & d'obscurciffement fi étranges, qu'elles ne favoient plus à quoi fe prendre, & ne craignoient rien moins que de tomber dans le défefpoir.

30. 11 eft à propos d'obferver deux ou trois chofes qui au dehors ont pu occafionner des doutes, & conduire à l'affoibliffement. La Sour Angélique de S. Jean s'en explique avec M. Arnauld dans fa fixiéme Lettre. » Savez-vous, » dit-elle, qu'une des choses qui a aidé à trom» per nos Sœurs, & qui donne encore des doutes à quelques-unes, eft que dans les écrits on dit fouvent que nous ne faurions fans pé» ché figner dans la difpofition où nous fommes. D'où elles inférent que lorsqu'on chan»ge de difpofition, & que l'on ne voit plus le mal qu'on voyoit dans cette fignature, mais » qu'on fe fent perfuadé intérieurement qu'il » y a du mal à la refufer, on ne fait plus de » mal, parce qu'on agit en confcience; & ce » faux principe qui les a fait tomber la plupart,

leur fert encore d'excufe préfentement pour » diminuer leur faute. Je vous avoue que cela >> me fait peine, » &c. Autre vue de la Sorur Angélique qui montre encore fa pénétration & la folidité de fon efprit. » J'ai peur, ditelle Lettre XI. que vous ne fachiez pas tous > affez, combien il faut peu de chofe au Déအ mon pour tenter d'affoibliffement & pour obfcurcir l'efprit, quand on eft dans cet effroyable abandonnement où nous avons été.

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» Je l'ai entrevu plufieurs fois d'une maniére » effrayante, & nos Sœurs qui font tombées en parlent d'une maniére qui fait peur. Les > moindres choses qui n'avoient fait nulle impreffion, quand on les avoit ouï dire, re» viennent & en font une terrible en ce tems. >> là ; & il fe trouve que M. Singlin depuis fa » mort a été caufe de la fignature de la plupart » de nos Sœurs, par le feul fouvenir qu'il n'avoit pas approuvé le fentiment de tous les autres

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qui étoit le refus abfolu de figner ] & on » ne penfoit pas à difcerner quel étoit le hien particulier, & qu'il ne prétendoit pas con» feiller de figner par obéiffance, quoiqu'il >> voulût qu'on fe contentât d'exprimer fans au» tre restriction, qu'on ne fignoit que par obéif» fance. Je craindrois de même que ce que vous » dites qu'il faut toujours demander à Dieu » qu'il nous éclaire, pour ne nous pas tromper, » n'allât peut-être revenir dans l'efprit de quel », ques-unes, pour faire croire que l'affaire eft » douteufe. Or depuis le doute jufqu'à la sé»duction f dans cette affaire-ci ]'il n'y a qu'un "pas, ce me femble. » Tout ceci montre combien dans des conjonctures délicates il faut péfer toutes les vues & tous les confeils qu'on donne, avec difcrétion & réflexion. Une chofe affez fingulière, c'eft que parmi ces vues louches qui furent occafion de chute pour celles dont parle la Sœur Angélique, nous ne voyons pas lieu d'y placer la peine extrême d'être fans Sacremens, ni confeffion, ni communion. Ce n'eft pas que ces faintes filles ne la reffentiffent bien véritablement, comme il ne paroît que trop par la fuite de l'Hiftoire: mais leur foi vive & éclairée les élevoit au deffus de cette tentation. On en voit feulement une ou deux

qui font prefque renverfées par la vue de l'impuiffance d'avoir un Confeffeur: mais ce n'étoit pas tant la confefsion proprement dite qui leur tenoit au cœur, que le confeil qu'elles cherchoient & dont elles croyoient dans l'état de trouble ne pouvoir pas fe paffer.

40% De tout ceci il réfulte , qu'à en juger fuivant le dégré de lumière que ces réflexions fourniffent, la faute de ce petit nombre de filles de P. R. eft excufable, & peut être même fort légére par beaucoup d'endroits; que c'eft plus la main, pour ainfi dire, qui a péché, que le cœur; furtout quand on les voit d'un côté fe rétracter avec tant de générosité & de fincérité ; & que de l'autre on fe fouvient de quelques-unes qui ont fait la rétractation prefque dans le même inftant qu'elles avoient lâché pied, & entre les mains du même Supérieur qui venoit de recevoir leur fignature. Après cela, quelle grande & haute idée n'aura-t'on pas d'une Communauté, où dans une perfécution auffi affreufe & pour la durée & pour fes circonftances, le nombre des foibles ne fait pas un dixième, & où ce qu'il y a de foible ne l'eft que d'une maniére tout-à-fait 'excufable › & pour un très-court espace de

tems.

VIII.

Acte capi

Les trois mois de terme portés par l'Ordonnance de l'Archevêque pour la fignature du tulaire pour Formulaire du Pape étoient près d'expirer. C'eft les raifons du pourquoi les Religieufes crurent devoir faire refus de la fiun acte capitulaire, pour déclarer une derniére gnature du fois leurs fentimens fur la fignature, & nouveau For pour mulaire d'Arendre compte au public & à elles-mêmes, des lexandre VII. raifons qui portoient à croire que le refus de la fignature étoit légitime. L'acte eft long, & fort beau. Je n'en ferai cependant point d'ex

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trait, parce que ce n'eft qu'une répétition des motifs & des vues que renferment d'autres actes précédens, tels que ceux de la Sœur Angélique de S. Jean, de la Sœur Euftoquie & autres que nous avons vu plus haut. Les réflexions qu'elles font à la fin fur l'excommunication dont elles font menacées, font très-judicieuses & très-chrétiennes. » Nous ne devons » pas, difent-elles, trouver étrange d'être trai»tées comme le Fils unique de Dieu, quand » fes Miniftres en viendroient à cette extrémité, de nous charger d'anathêmes, comme lui-même a bien voulu l'être pour nous.... L'épée fpirituelle de l'Eglife qu'elle leur a mi» se entre les mains, n'a pas le pouvoir de nous féparer de l'amour de J. C. Le péché seul en » eft capable. Elle ne coupe dans la vigne que » les branches qui ne portent pas de fruit ; & fi » elle en taille quelquefois de celles qui por» tent du fruit, ce n'est que pour leur en faire >> rapporter davantage par la patience. » Elles remarquent que depuis un an qu'on les tient féparées de la Table fainte, Dieu les a nourries pendant cette famine de la manne cachée qui tombe dans le défert ; & que c'est ce qui les remplit de confiance pour l'avenir, que Dieu ne les abandonnera pas, quelque chofe qui leur arrive. Elles déclarent qu'elles ne fe départiront jamais du refpect qu'elles doivent à l'autorité du Chef visible du Corps facré dont elles ont l'honneur d'être les membres, quoique les plus infirmes de tous; puis elles continuent ainsi : » Tels qu'ils font (ces membres) Dieu n'en a » point fait dans le corps qui foient inutiles ; » les plus foibles font les plus néceffaires, fe»lon l'Apôtre, & la tête ne peut pas dire à ses pieds, je n'ai que faire de vous, encore que

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» fes pieds ne puiffent pas voir & difcerner » comme fes yeux, ni exécuter fes ordres & les » foufcrire comme fa main. On doit fe conten»ter qu'ils portent le poids du corps & celui » de l'autorité, fans fortir de l'humilité & fans' » s'abbatre. » L'Acte eft datté du 16. Août 1665. figné de 64. Religieufes & de 6. autres venues depuis.

IX.

Entretien

avec les Reli

gieufes.

Quelques jours après, une ancienne tomba malade. Les Meres demandérent à M. de S. fingulier d'un Laurent, l'Exempt des gardes, s'il ne leur per- Confeffeur mettroit pas de demander un Médecin àM.de Pa- envoyé pour ris. Il répondit qu'il lui falloit un ordre du Roi, une malade qu'il alloit écrire en Cour, qu'elles n'avoient qu'à écrire de leur côté à M. l'Archevêque. Les lettres partirent; & le lendemain M. Renaud Médecin arriva, avec un ordre exprès de l'Archevêque qu'il n'entreroit pas fans être accompagné de la nouvelle Touriére. Le Médecin ayant jugé la malade en danger de mort, on écrivit à M. l'Archevêque pour demander un Confeffeur. On défigna dans le billet le Vicaire de S. Médard. Celui-ci n'arriva que trois jours après. On a fçu d'un de fes amis quelques particularités de fa miffion de la part de l'Archevêque. Le Prélat l'envoya querir, & quand il fut venu, il lui donna commiffion de partir fur l'heure pour P. R. des Champs, afin d'y confeffer une Sœur malade, en cas qu'elle voulût figner. Puis il s'amufa à difcourir fur la défobéiffance de ces filles, fur le caractére haut & inflexible de la Mere du Fargis Prieure de P. R. des Champs, &c. Enfuite il étala une érudition toute neuve fur des Religieufes de Milan qui refuférent d'obéir à leur Archevêque fucceffeur de S. Charles, & qui portérent l'entêtement jusqu'à mourir toutes excommuniées

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