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belle. Sa con.

gouverne

Maifon.

vue dans les bonnes graces de M. l'Archevêque, elle espéra devenir quelque chofe après la for tie des Meres. Ce qui arriva

comme nous

l'allons voir. Je n'en dirai pas davantage ici, parce que ce qui va fuivre fuffira pour la peindre telle qu'elle étoit.

XVIII. J'ai dit qu'il y eut une délibération entre Election de l'Archevêque, les Jéfuites & M. Chamillard la Sœur Doro- fur le Sujet qu'il convenoit d'élire. On fe réuthée pour Ab. nit pour la Sœur Dorothée. Le 6. Novembre duite dans le 1666. l'Archevêque vint à la maison pour procéder à l'élection. La Sœur Dorothée eut fept ment de fa voix & fut confirmée sur le champ par l'Arche vêque, & tout de fuite le Te Deum fut chanté. Le jour même de l'élection fur le foir il entra 4. ou 5. filles pour être poftulantes du chœur, qui furent fuivies de plufieurs autres dans la fuite. Car la nouvelle Abbeffe & la Sceur Flavie fe donnérent de grands mouvemens pour faire entrer des Sujets. Elles prenoient tout ce qui fe préfentoit. Comme la plupart de ces nouvelles venues ne fçavoient pas bien lire en latin, on fit venir un Bénéficier de N. D. pour leur apprendre à bien prononcer, & pour leur montrer le chant. Il leur fit quelques motets qu'elles chantérent à certaines Fêtes, quelquefois avec l'accompagnement de la viole de MJ le Bénéficier. La Sour Flavie auroit bien fouhaité que les filles de Ste Marie reftaffent dans la maison, parce qu'elle fimpatifoit bien avec elles. Mais c'eft ce que la nouvelle Abbeffe ne goûtoit point. Il auroit femblé qu'elle n'étoit pas capable de gouverner. L'Archevêque les renvoya quelque tems après dans la maifon de leur Ordre. Il vint à P. R. avant leur départ, pour faire quelques Ordonnances. Il sordonna, 10. qu'on le défit de toutes les Reliques qu'on

avoit des Saints modernes ; 20. que l'on ôtât les tableaux de quelques Saints, parce que d'étoient les portraits de certaines perfonnes mortes,qu'on avoit pris pour repréfenter ces Saints; 30. qu'on ôtât la tombe du cœur de M. de S. Ciran, & qu'on effaçât entiérement son épitaphe; 40. qu'on rendît tous les Livres nouveaux que l'on avoit, & qu'on eût de Livres de dévotion que ceux que M. Chamillard jugeroit convenables.

La Sœur Dorothée fe trouvant feule maîtreffe par la retraite des Meres de Ste Marie › prit en main le gouvernement. Elle usa de maniéres fort impérieufes, & gouverna avec beaucoup de defpotifine. Quoiqu'Abbeffe, elle continua de faire l'office de Célériére qu'elle avoit auparavant, parce qu'elle vouloit favoir tout ce qui fe faifoit, & afin que tout passât par fes mains. Elle fe fit accommoder au deffus du Tour un appartement fort élégant, où elle étoit plus ordinairement. Elle s'en fit meubler encore quelques autres ailleurs ; le lit & les meubles étoient fort jolis. Elle mangeoit pen au réfetoire, & le faifoit fervir dans fon appartement avec une délicateffe affectée. Elle faifoit fréquemment des réprimandes aux Sœurs, d'un ton & avec des menaces indécentes & groffiéres. La Sœur Flavie n'étoit pas plus menagée que les autres 2 fi ce n'eft que lorfque l'Abbeffe l'avoit pouffée à bout, alors elle alloit la careffer, de crainte qu'elle ne fît de l'éclat au dehors. Il y avoit chez elle bien de l'humeur beaucoup de haut & de bas. Quelquefois elle prenoit du chagrin, fentant l'embaras de fa charge, pour le temporel furtout. Alors elle s'enfermoit pour plufieurs jours, & on ne pouvoit l'aborder. Elle exigeoit des dotes, & fai

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foit faire des contrats pour les filles qu'on ad mettoit à la profeffion: chofe qui ne s'étoit jamais vue à P. R. Les Jéfuites venoient prêcher dans l'Eglife & il leur arrivoit fouvent de faire des forties fur les affaires du tems; ce qui augmentoit la divifion dans la petite Communauté, les unes approuvant les vivacités du Prédicateur, les autres voulant qu'on fe conformât aux intentions de M. l'Archevêque, qui avoit défendu qu'on parlât de rien.

Dans la troifiéme année de l'élection de la Sœur Dorothée, c'est-à-dire en 1668. on par la de faire nommer par le Roi une Abbeffe perpétuelle étrangere. L'Archevêque s'y portoit affez, parce qu'il étoit bien las des tracafferies que lui caufoit cette Communauté mal-montée > & qu'il comptoit qu'avec une Abbeffe étrangère les chofes marcheroient fur un autre pied. Les Religieufes qui redoutoient extrêmement la domination d'une étrangére, écrivirent au Prélat une lettre fignée de toutes, pour le fupplier de faire nommer la Sœur Dorothée. Il acquiefça à leur demande, & obtint la nomination du Roi pour la Sœur. Celle-ci lorfqu'elle fçut qu'elle étoit nommée, écrivit à M. l'Archevêque pour lui remettre l'Abbaye entre les mains, foit que ce fut une fein te, foit qu'elle agît dans la fincérité. Mais la Sœur Flavie qui étoit l'ame de tout dans cette maifon, fit encore écrire toute la Communauté au Prélat pour le prier de ne point accepter la démiffion. Les Bulles de Rome tardérent un peu, & pendant ce tems-là, la Communauté des Champs fit une oppofition à la prife de poffeffion, qui fut enregistrée au grand Confeil. Les trois Sœurs de Paris qui étoient demeurées attachées aux Meres, fe déclarérent

hautement contre l'Abbeffe nommée, & dirent que jamais elles ne la reconnoitróient. Ce qui les porta à prendre ce parti, après qu'elles avoient d'abord paru demander la Sœur Dorothée, c'eft qu'on commençoit à parler beaucoup de la paix de l'Eglife, & que ces trois Sœurs efpéroient que les Meres feroient rappellées à Paris. Dans le mois de Novembre, les Bulles étant arrivées, l'Official vint mettre l'Abbeffe en poffeffion. Il fut fort étonné de ne voir à la cérémonie que fix Religieufes & quatre nouvelles Profeffes; car les trois dont j'ai parlé n'y voulurent point affifter. La nouvelle Abbeffe fit tout ce qu'elle pût dans la fuite pour les gagner, mais ce fut fans fuccès. Pour les mortifier, elle leur fit refufer les Confeffeurs qu'elles deman doient pour le Jubilé. Enfin ces trois Srous obtinrent quelque tems après la paix faite d'être renvoyées à P. R. des Champs, & laifferent la maison libre à la Sœur Dorothée. Celleci gouverna pendant 14. ans fans beaucoup de contentement, preffée quelquefois des remords de fa confcience, gênée d'ailleurs par le defpotifme de l'impérieux M. Chamillard, & de plus extrêmement embaraffée pour le temporel de la maifon. Nous verrons fa mort à l'année 1684.

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Conteftation

la

Retournons à présent à la maison des Champs. XIX. Sur la fin de l'année 1665. il arriva deux petits entre faits dont je vais rendre compte. Les gardes Communauté mécontens d'un M. Duval qui étoit demeuré desChamps & dans la maison, le firent fortir brufquement. la maifon de Ils ne voulurent point lui donner le tems d'al- Paris fur les ler à fa chambre pour mettre ordre à des pa- autres effets piers qui n'étoient point à lui & qui apparte- retenus par noient à M. Hamon. Ils le chafférent par les celle-ci.

meubles &

épaules, & montérent auffitôt à fa chambre pour en faire la vifite. Ils fe faifirent des papiers de M. Hamon, fe propofant de les remettre à M. l'Archevêque. Ils trouvérent par-, mi ces papiers un petit écrit qui les mit en grande colere contre le fieur Duval, après lequel ils firent courir un homme à cheval. Mais heu reufement il ne fut point attrapé ; car ces Meffieurs lui auroient fait un mauvais parti, s'ils l'avoient tenu. C'étoit un Journal que ledit Duval faifoit pour fe divertir de tout ce que faifoient & difoient les Eccléfiaftiques & les Gardes de P. R. En voici quelques traits. Un tel jour M. du Saugey a amené de Paris des Religieufes. Un autre jour M. du Saugey & M. Biord ont pris querelle enfemble, & l'un a dit à l'autre qu'il ne fçavoit ce qu'il difoit. Une autrefois M. du Saugey & les Gardes ont mis le petard devant l'Eglife. Un autre jour M. du Saugey a mis un chat fur un âne, &c. Quant aux papiers de M. Hamon, M. l'Archevêque, après avoir eu chez lui le paquet durant quelque tems, le fit remettre à ce Médecin tout fimpleraent.

Les Religieufes des Champs écrivirent vers ce même tems-là à la Mere Eugénie qui con-. duifoit la maifon de Paris, fur beaucoup de befoins qu'avoit la maifon des Champs, & fur la négligence des Sœurs de Paris à leur envoyer de quoi y fubvenir. La Sœur Marguerite-Angélique qui tenoit la plume, fe plaignoit fortement de l'injuftice que commettoient leurs Sœurs de Paris, en retenant une infinité de chofes qui leur appartenoient & dont elles ne pouvoient fe paffer. Pour l'en convaincre, elle lui envoie un bordereau qui contient en deux colomnes ce qu'elles ont emporté ou reçu de

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