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te: la Mere demanda les Sacremens: le Prêtre dit qu'il ne pouvoit pas les accorder. Les Religieufes préfentes lui firent des reproches fur le peu d'égard qu'il avoit pour une fille dont le mérite & la vertu étoient eftimés & reconnus de toute la France; elles lui déclarérent qu'elles fe portoient appellantes d'un tel procédé, & lui fignifiérent que dans la fuite on ne le feroit plus entrer pour les malades, puifqu'il étoit réfolu à ne rien accorder.

XXXV.

Cinq ou fix jours après, la Sœur Lutgarde procédé inentra en agonie, à une heure après mi- décent du nuit. M. Poupiche qui le fçut demanda avec Chapelain auempreffement à entrer. Il vint en furplis, on près des deux lui préfenta une étolé qu'il ne voulut point moribondes. prendre. Comme il approcha du lit de la malade, on lui préfenta l'eau-bénite pour en jetter fur la malade; il n'en voulut point non plus. On le fupplia de vouloir bien adminiftrer à la mourante l'Extrême-Onction: pareil refus. Enfin on lui ouvrit le Rituel, & on lui montra les priéres de l'agonie pour les réciter : : on n'obtint rien. Cependant il déclara qu'il refteroit jufqu'à la fin, parce qu'il ne fal loit, difoit-il, qu'un bon moment. Les Meres donc prirent fa place pour la fonction qu'il refufoit de faire, & récitérent les priéres accoutumées avec toute la Communauté. On dit enfuite les fept Pfeaumes de la pénitence que les Meres interrompoient quelquefois pour dire à la mourante quelque mot d'édificatión, en cas qu'elle pût entendre. On lut auffi la Paffion de N. S. fort haut fuivant la coutume du Monaftére; puis la profeffion de foi du Concile de Trentre; enfin l'acte capitulaire en forme de Teftament fpirituel du 28. Août de la précédente année 1665. pour fa

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tisfaire à la prière que la malade avoit faite avant que de perdre connoiffance, qu'on lui lût cet acte à l'article de la mort. La féance dura cinq heures ; & pendant tout ce tems-là le Sieur Poupiche eut la patience de refter muet & prefque immobile, jufqu'à ce qu'enfin la Soeur ayant rendu le dernier foupir il fe leva, repouffa le livre qu'on lui préfenta pour les oraifons au moment de la mort, & fe retira en menaçant toutes les Sœurs d'un fort pareil. La Mere Abbeffe lui fit observer que la conduite qu'il venoit de tenir, les mettoit en droit de ne plus l'appeller en pareille, occafion, puifque fa préfence bien loin d'être de quelque utilité à une pauvre ame réduite à l'extrémité, étoit capable même de la mener au défefpoir, par les menaces, & les efpeces d'imprécations terribles qu'il faifoit. Car il lui étoit échapé de dire, voyant la Sœur fouffrir beaucoup dans l'agonie: Ce n'est que le commencement de fes peines. La Mere Abbeffe chargea M. Hilaire d'aller apprendre à M. l'Archevêque la mort de la Sœur. Mais fans attendre la réponse, la Communauté. fit le convoi & l'inhumation avec les cérémonies ordinaires. On demanda aux Eccléfiaftiques une meffe baffe à la fin de Laudes pour les défunts en général, fans exiger d'oraifon particuliére pour la Soeur défunte; ce qu'ils. refuférent.

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Les maladies continuant à Port-Royal, les fcenes continuérent de la part des Eccléfiafti ques, mais elles changérent, pour ainfi dire de décoration. En voici une d'une nouvelle efpece. Une Soeur Converfe, nommée Michelle, ayant été trouvée en danger par le Médecin, on fit avertir M. Poupiche de venir la confeller. Comme les Sccurs Converfes n'é

toient pas comprifes dans l'interdit, il ne fit aucune difficulté d'entrer. Il refta quelque tems avec la malade qui fe confeffa à lui après lu avoir déclaré franchement qu'elle ne le faifoit que pour céder à la néceffité, & qu'en toute autre occafion elle n'auroit pas eu la confiance de le faire, parce qu'il s'étoit déclaré partie contre la maifon & qu'il la deffervoit en tout. Le Sieur Poupiche fortit & déclara, au grand étonnement des Sœurs qui avoient tenu toutes chofes prêtes pour les Sacremens qu'il n'adminiftreroit pas la Sœur, parce qu'elle n'avoit pas de confiance en lui, & qu'elle ne lui avoit point donné matiére d'abfolution dans la confeffion qu'elle lui avoit faite. Les Meres effayérent inutilement de réfuter fes mauvaises raifons, il tint ferme pour le refus; tout ce qu'il accorda par grace, fut de prendre confeil de M. du Saugey. On fe douta bien qu'il ne trouveroit perfonne qui l'autorisât dans une conduite auffi hétéroclite & qui montroit une auffi groffiére ignorance. Eneffet il fe ravifa & vint adminiftrer la malade. Ce fut en ce tems-ci, de Septembre,

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XXXVI.

Les

Relf

nonobstant Pinterdit J

que la Mere fit la propofition à la Commu- gieufes renauté capitulairement affemblée, de ne plus prennent le garder l'interdit pour le chant au Choeur..chant & l'ofVoici les raifons qu'elle expofa. Elle dit fice public » "qu'il y avoit un an révolu que la fentence » qui interdifoit le chant de l'office avoit été. ≫ rendu qu'on avoit cru devoir s'y foumettre,. quoiqu'on en eût appellé, tant pour ne point →caufer de scandale, que pour ne point irriter davantage M. l'Archevêque : qu'il semblòit >> maintenant que le Prélat ne fe mettoit guéres »-en peine de ce qui fe faifoit dans la maifon ::

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qu'il n'avoit rien dit für le chant qu'on

XXXVII.

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» avoit repris aux fêtes annuelles ; que le Sieur » du Saugey fon efpion avoit pareillement gardé le filence fur l'office chanté dans le » chœur à des fêtes non privilégiées, telles » que celle de S. Laurent, & les octaves de l'Affomption & de laNativité toutes entiéres: » que cela étant ainsi, & n'y ayant d'ailleurs aucune apparence d'adoucir les Supérieurs ni aucun rifque d'être plus maltraité qu'on » étoit, puifqu'on étoit traité déja à peu près » comme des perfonnes excommuniées, il n'é> toit pas raifonnable de fe priver de la confolation que procure un office journalier chanté avec piété d'autant plus que les Religieufes de P. R. font liées à la célébration de l'office par une obligation plus particuliére, étant confacrées à l'adoration perpé>>tuelle. » La Communauté goûta fort ce que venoit de dire la Mere Abbelle, & il fut conclu fur le champ tout d'une voix qu'on reprendroit le jour & la nuit le chant du Chour pour tous les Offices.

de Sacremens

à la mort.

Revenons à nos malades. La Sœur Catherine. Autres refus de Ste Sufanne Champagne qui l'étoit depuis plufieurs jours, empira i fort le 20. Septembre qu'il fallut envoyer à M. l'Archevêque demander pour la malade le Vicaire de faint Médard, lequel confefferoit auffi des Sœurs Converses qui ne s'étoient pas confeffées depuis longtems, parce qu'elles ne vouloient point s'adreffer au Sieur Poupiche. Le Vicaire arriva le 21. à huit heures du foir, après avoir effuyé une pluie affreufe, & avoir rifqué mê-me de s'égarer la nuit, ne trouvant pas. fon chemin. Ön fut très-étonné le lendemain ma- : tin, lorfqu'on apprit que l'Exempt avoit ordre de ne pas laiffer entrer ce Vicaire, fans

qu'il fût accompagné d'un des deux Eccléfiaftiques, & de ne pas le laiffer de même confeffer à la grille les Soeurs Converses, fans qu'un de ces Ecclefiaftiques fût préfent. Les Meres & le Vicaire furent également révoltés d'un tel ordre qui étoit fi contraire à la difcipline eccléfiaftique, & fi humiliant pour un Confeffeur honnête homme. L'Exempt écouta tout ce qu'on voulut lui dire, & perfifta néanmoins à s'en tenir aux ordres qu'il avoit reçus. Le Vicaire prit fon parti, remonta à cheval & s'en alla très-mécontent, fans avoir rien fait. Cinq jours après, l'Aumônier de M. l'Archevêque ramena dans le caroffe du Prélat le même Vicaire. Cela ne produifit aut cun bien, ni pour la malade à qui il refufa l'abfolution & le S. Viatique, à cause du re fus perfévérant de la fignature, ni pour les Sœurs Converfes qu'il dit n'avoir pas le téms de confeffer. Il revint encore une fois dans le mois d'Octobre pour la Sœur Julie de fainté Sinclétique Remirecourt, dangereufement malade, à qui il fit le même refus qu'à la précédente mais il voulut bien cette fois confeffer les Sœurs Converfes.

Dans le mois de Novembre une autre Sœur, nommée Antoinette de S. Auguftin le Gros fe trouva en danger de mort. Elle étoit une des Novices de Maubuiffon fous la Mere Angélique. Son caractere étoit une aimable fimplicité qui faifoit qu'elle ne prenoit aucune part aux chofes qui ne la regardoient pas, & qu'elle ne trouvoit jamais à redire à rien. Ele avoit com mencé, comme le veut S. Bernard, c'est-à-dire, parfaitement, enforte que fa premiére ferveur n'eut pas befoin de croître. Dieu l'affligea qua tre ans avant la mort d'une maladie bien dou

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